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Date : 20160125


Dossier : A-127-15

Référence : 2016 CAF 21

[TRADUCTION FRANÇAISE]

CORAM :

LA JUGE TRUDEL

LE JUGE STRATAS

LE JUGE RYER

 

 

ENTRE :

BEMCO CONFECTIONERY AND SALES LTD.

appelante

et

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

Audience tenue à Toronto (Ontario), le 25 janvier 2016.

Jugement prononcé à l’audience à Toronto (Ontario), le 25 janvier 2016.

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :

LE JUGE STRATAS

 


Date : 20160125


Dossier : A-127-15

Référence : 2016 CAF 21

CORAM :

LA JUGE TRUDEL

LE JUGE STRATAS

LE JUGE RYER

 

 

ENTRE :

BEMCO CONFECTIONERY AND SALES LTD.

appelante

et

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR

(prononcés à l’audience à Toronto (Ontario), le 25 janvier 2016).

LE JUGE STRATAS

[1]               Bemco Confectionary and Sales Ltd. interjette appel de l’ordonnance datée du 20 juin 2014 délivrée par la Cour canadienne de l’impôt (le juge Paris) : 2015 CCI 48. La Cour de l’impôt a rejeté la requête présentée par Bemco en vertu de l’article 53 des Règles de la Cour canadienne de l’impôt (procédure générale), DORS/90-688a, en vue d’obtenir une ordonnance radiant certains alinéas de la réponse de l’intimée sans autorisation de la modifier.

[2]               L’ordonnance visée par l’appel est discrétionnaire, c’est-à-dire qu’il s’agit d’une ordonnance délivrée en appliquant des normes juridiques aux faits particuliers de l’espèce dans des circonstances où la Cour pourrait arriver à des conclusions différentes. À défaut de pouvoir prouver l’existence d’une erreur de droit ou d’une erreur commise dans l’application des principes juridiques, l’appelante doit satisfaire à une norme de contrôle exigeante.

[3]               Récemment, dans l’arrêt Turmel c. Canada, 2016 CAF 9, la Cour a souligné qu’au fil des années, plusieurs expressions ont été utilisées pour décrire cette exigeante norme — notamment la norme de « l’erreur manifeste et dominante » examinée dans l’arrêt Imperial Manufacturing Group Inc. c. Decor Grates Incorporated, 2015 CAF 100, et appliquée par la Cour à de nombreuses reprises depuis. Le point commun de toutes ces expressions est le fait :

[…] [qu’]en l’absence d’une erreur de droit ou d’une erreur touchant aux principes juridiques, le tribunal d’appel ne peut modifier une ordonnance discrétionnaire que s’il y a une erreur manifeste et grave qui met à mal son intégrité et sa viabilité. Il s’agit d’un critère exigeant, auquel il est rarement satisfait selon la jurisprudence. (Turmel, au paragraphe 12)

Ainsi, nous souscrivons essentiellement à l’argument de l’intimée selon lequel, en l’absence d’une erreur de droit ou d’une erreur touchant aux principes juridiques, Bemco doit démontrer une erreur évidente qui pourrait changer le dénouement de l’affaire.

[4]               À notre avis, Bemco n’a pas fait cette démonstration. Nous ne relevons aucune erreur de droit ni aucune erreur touchant aux principes juridiques de la part de la Cour de l’impôt, ni aucune autre erreur évidente qui pourrait changer le dénouement de l’instance.

[5]               Bemco soutient qu’un certain nombre de faits allégués dans la réponse sont irrecevables en preuve puisqu’ils constituent des éléments de preuve de conduite déshonorante et laissent croire, à tort, que Bemco a une propension à contrevenir à la Loi de la taxe sur le tabac, L.R.O. 1990, ch. T-10. La Cour de l’impôt a interprété d’une façon différente (aux paragraphes 25 à 27) les passages controversés de la réponse. Elle a conclu que les passages controversés de la réponse décrivent simplement des dates, des lieux et des circonstances se rapportant aux opérations en cause et ne laissent pas entendre que Bemco avait adopté une conduite déshonorante qui serait sans rapport avec les obligations que lui impose la Loi sur la taxe d’accise, L.R.C., 1985, ch. E‑15. Pour reprendre les termes employés par la Cour de l’impôt (aux paragraphes 26 et 27), la réponse « énonce la thèse de l’intimée suivant laquelle les rouages commerciaux mis en place par [Bemco] et les acheteurs indiens constituaient un stratagème », ce qui « écarte donc d’emblée toute idée d’un raisonnement fondé sur une propension », contrairement à l’arrêt R. c. Handy, 2002 CSC 56, [2002] 2 R.C.S. 980.

[6]               Vu la norme de contrôle, nous ne voyons aucune raison de modifier cette conclusion. Il n’y avait aucune erreur de droit ni aucune erreur touchant aux principes juridiques et l’interprétation donnée par la Cour de l’impôt des passages controversés de la réponse est justifiable compte tenu de la norme de contrôle applicable. Si l’intimée utilise ultérieurement ces passages de la réponse à l’appui d’un argument irrégulier fondé sur une propension, la Cour de l’impôt pourra intervenir et empêcher qu’un préjudice soit causé ou rejeter d’emblée l’argument.

[7]               Devant la Cour de l’impôt, dans le cadre de sa requête en radiation, Bemco s’est en outre plainte qu’il n’y avait pas suffisamment de précisions sur l’identité et l’emplacement des véritables acheteurs des produits en question. La Cour de l’impôt, en s’appuyant sur le critère juridique approprié, a conclu (aux paragraphes 47 à 49) qu’il n’était pas nécessaire d’apporter des précisions puisque les actes de procédure donnaient à Bemco suffisamment de renseignements pour savoir quels moyens lui étaient opposés, qu’il incombait au ministre de prouver les faits controversés et qu’au besoin, une demande de précisions pouvait être déposée. Encore là, nous ne relevons aucune erreur de droit ni aucune erreur touchant aux principes juridiques et nous ne sommes pas convaincus qu’il y a d’autres raisons de modifier cette conclusion compte tenu de la norme de contrôle applicable.

[8]               Comme la Cour de l’impôt n’a accordé aucuns dépens en première instance, la Couronne ne réclame pas de dépens devant la Cour. Par conséquent, aucuns dépens ne seront adjugés. Nous rejetons l’appel.

« David Stratas »

j.c.a.

Traduction certifiée conforme

Mario Lagacé, jurilinguiste

 


COUR D’APPEL FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER:

A-127-15

APPEL D’UNE ORDONNANCE DATÉE DU 26 FÉVRIER 2015 RENDUE PAR LE JUGE B. PARIS, DOSSIER Nº 2013-4833(GST)G

DOSSIER :

A-127-15

 

 

INTITULÉ   :

BEMCO CONFECTIONERY AND SALES LTD. c. SA MAJESTÉ LA REINE

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 25 JANVIER 2016

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE LA COUR :

LA JUGE TRUDEL

LE JUGE STRATAS

LE JUGE RYER

 

PRONONCÉS À L’AUDIENCE PAR :

LE JUGE STRATAS

COMPARUTIONS :

Robert G. Kreklewetz

John Bassindale

 

POUR L’APPELANTE

 

André Leblanc

 

POUR L’INTIMÉE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Millar Kreklewetz LLP

Toronto (Ontario)

 

POUR L’APPELANTE

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

 

POUR L’INTIMÉE

 

 

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