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Date : 20141128

Dossier : IMM-3146-14

Référence : 2014 CF 1147

[traduction française certifiée, non révisée]

 

Ottawa (Ontario), le 28 novembre 2014

En présence de monsieur le juge Barnes

ENTRE :

YOGRAJ SINGH BUNDHEL

demandeur

et

MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE

L’IMMIGRATION CANADA

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

Je requiers que la version révisée de la transcription des motifs du jugement que j’ai prononcé oralement à l’audience à Vancouver, Colombie-Britannique, le 17 novembre 2014, soit déposée pour satisfaire aux exigences de l’article 51 des Règles des Cours fédérales.


JUGEMENT

LA COUR STATUE que la présente demande est rejetée.

« R.L. Barnes »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Jean-Jacques Goulet, LL.L.


MOTIFS

[1]               Le demandeur, Yograj Singh Bundhel, conteste une décision, datée du 3 avril 2014, rejetant sa demande de permis de travail temporaire. M. Bundhel est un acteur qui souhaitait entrer au Canada pour travailler sur le plateau d’une production cinématographique. La décision est fondée sur la présentation erronée faite par M. Bundhel sur ses antécédents en ce qui a trait, plus particulièrement, à deux accusations criminelles graves portées contre lui en Inde.

[2]               La demande de visa présentée par M. Bundhel contenait la question suivante : « Avez‑vous déjà commis, été arrêté, accusé ou reconnu coupable d’une infraction pénale quelconque dans un pays? »

[3]               En cas de réponse affirmative par le demandeur à cette question, il doit fournir des détails. M. Bundhel a répondu par la négative, ce qui était inexact. En Inde, M. Bundhel a été accusé de conduite dangereuse et d’hébergement d’un fugitif accusé de meurtre. Bien que ses accusations aient été ultérieurement écartées en appel, il est indéniable que M. Bundhel a été arrêté et accusé relativement à ces deux affaires.

[4]               L’agente a donné la possibilité à M. Bundhel d’expliquer cette contradiction. Il a fourni comme excuse qu’une « simple erreur d’écriture » s’était glissée dans sa réponse, car il ne croyait pas devoir divulguer ces détails vu qu’il avait été acquitté, en fin de compte, des accusations criminelles portées contre lui.

[5]               L’agente n’a pas jugé satisfaisante l’explication fournie par M. Bundhel et elle a conclu qu’il avait fait une fausse représentation. Voici ce qu’elle a exprimé dans ses motifs :

[traduction] J’ai examiné cette réponse dans l’esprit dont nous avons exprimé notre question dans le formulaire de demande. De toute évidence, nous souhaitons être mis au courant d’arrestations et d’accusations antérieures, même si finalement elles n’ont pas mené à une condamnation, sinon nous n’aurions pas posé cette question. En dissimulant ses accusations et condamnations antérieures, même s’il en a été finalement acquitté, le demandeur aurait pu entraîner une erreur dans l’application de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés. Plus particulièrement, le demandeur a présenté une demande de permis de travail et de visa de résident temporaire pour visiter le Canada. En ne fournissant pas des renseignements véridiques en ce qui a trait à ses antécédents , il prive ainsi l’agent des renseignements qui lui auraient été nécessaires pour déterminer si le demandeur est visé par les dispositions de l’alinéa 36(1)c), soit celles concernant la commission, à l’extérieur du Canada, d’une infraction punissable d’un emprisonnement et une mise en accusation pour une infraction qui correspondrait à celle prévue à l’article 221 du Code criminel canadien. Je n’accepte pas qu’il s’agisse d’une erreur d’écriture, car de la façon dont la question est rédigée, il est parfaitement évident que ce sont les accusations et les arrestations ainsi que par les condamnations qui nous intéressent. Le demandeur n’a pas respecté l’obligation qui lui incombe de répondre véridiquement aux questions qui lui sont posées conformément au paragraphe 16(1). De ce fait, le demandeur est interdit de territoire en vertu du paragraphe 40(1) de la LIPR. Demande refusée pour des motifs liés à la bonne foi et à de fausses déclarations.

[6]               M. Bundhel fait valoir que cette décision est déraisonnable parce qu’« à première vue, son explication était à tout le moins plausible » et qu’elle exigeait de l’agente qu’elle explique pourquoi elle ne l’avait pas retenue. Il soutient également qu’il a corrigé les faits à la première occasion et que ce facteur atténuant aurait dû être d’une certaine façon pris en compte. Enfin, il souligne les graves conséquences que pourraient avoir sur ses futurs déplacements outre-mer des conclusions portant sur l’existence de fausses déclarations.

[7]               Aucun de ces arguments n’est fondé. L’agente a conclu de façon raisonnable que M. Bundhel avait délibérément caché les faits relatifs à ses arrestations et poursuites criminelles. La question qui lui a été posée n’admet aucune ambiguïté. M. Bundhel savait très bien qu’il avait été arrêté et accusé relativement à deux affaires criminelles graves, et l’agente a conclu qu’il avait délibérément dissimulé ces renseignements dans sa demande. Dans sa réponse à l’agente, il n’a pas expliqué comment, de façon plausible, il aurait pu mal comprendre cette partie du formulaire où il était question de criminalité. L’agente ne disposait donc d’aucun élément lui permettant de tirer d’autre conclusion que celle qui semblait évidente, soit que M. Bundhel avait été de mauvaise foi lorsqu’il avait dissimulé les faits réels sachant que la vérité pourrait être problématique au regard d'une interdiction de territoire.

[8]               La plainte formulée par M. Bundhel selon laquelle l’agente aurait dû tenir compte du fait qu’il a reconnu le problème à la première occasion est également injustifiée. M. Bundhel a seulement admis les faits véritables que lorsqu’ils ont été portés à son attention. La situation diffère de celle où un demandeur reconnaît avoir fait une erreur avant qu’elle soit découverte ou de celle où les renseignements exacts soient déjà versés au dossier. En pareilles circonstances, des conclusions plus favorables sont plus susceptibles d’être tirées parce que cette attitude suggère davantage une erreur de bonne foi qu’une omission volontaire. Le même raisonnement a été suivi dans la décision Uppal c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 445, où la juge Anne Mactavish s’est ainsi exprimée :

30        Les fausses déclarations ont été faites en l’espèce alors que les demandes de résidence permanente étaient examinées par l’agent. En pareilles circonstances, le fait que les demandeurs aient révélé avoir fait les fausses déclarations avant qu’une décision ait été rendue à l’égard de leurs demandes ne les aide en rien. La Cour a en effet rejeté expressément pareil argument dans la décision Khan c. Canada (M.C.I.), 2008 CF 512, aux paragraphes 27 à 29.

31        La Cour a ainsi statué dans Khan que retenir une telle interprétation donnerait lieu à une situation dans laquelle un individu pourrait faire sciemment une fausse déclaration, mais ne pas être interdit de territoire du moment qu’il révèle l’avoir faite juste avant qu’une décision soit rendue. Non seulement une telle interprétation inciterait-elle à enfreindre la Loi, mais elle ferait abstraction de l’obligation incombant à l’auteur d’une demande au titre de la Loi de fournir des renseignements véridiques.

32        Les faits de l’espèce font amplement voir combien étaient fondées les préoccupations de la Cour dans la décision Khan, les demandeurs n’ayant fait connaître leur « clarification » qu’une fois conscients que leurs mensonges allaient bientôt être révélés par suite des analyses génétiques.

33        Par conséquent, je suis convaincue qu’il était raisonnable pour l’agent de conclure comme il l’a fait, au vu du dossier dont il était saisi, que les demandeurs avaient fait une présentation erronée sur des faits importants quant à un objet pertinent qui aurait pu entraîner une erreur dans l’application de la Loi.

 

[9]               En fait, notre système de contrôle en matière d’immigration repose en grande partie sur la sincérité des déclarations faites par les personnes qui présentent des demandes pour entrer au pays. Toute personne qui fait une présentation erronée de ses antécédents ou qui fait une réticence sur des renseignements importants afin d’améliorer ses chances d’entrer au pays ne mérite pas qu’on lui accorde une attention particulière. Les conséquences sont graves pour M. Bundhel, mais elles résultent de son omission de communiquer des renseignements importants. L’intégrité du contrôle qu’exerce le Canada sur ses frontières n’exige rien de moins des demandeurs qu’ils fassent preuve d’une honnêteté scrupuleuse, et que cette obligation soit appliquée de façon rigide. La décision de l’agente respecte ce principe et elle est à tous égards raisonnable.

[10]           La présente demande est donc rejetée. Ni l’une ni l’autre des parties n’ont proposé une question aux fins de la certification et le présent dossier ne soulève aucune question de portée générale.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-3146-14

 

INTITULÉ :

YOGRAJ SINGH BUNDHEL c MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Vancouver (COLOMBIE-bRITANNIQUE)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 17 NOVEMBRE 2014

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE BARNES

DATE :

LE 28 NOVEMBRE 2014

COMPARUTIONS :

Katrina Sriranpong

  POUR LE DEMANDEUR

Mary E. Murray

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Overseas Immigration

Surrey (Colombie-Britannique)

 

POUR LE DEMANDEUR

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

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