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Date : 20141117


Dossier : IMM-1289-14

Référence : 2014 CF 1083

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

 

Ottawa (Ontario), le 17 novembre 2014

En présence de monsieur le juge Shore

ENTRE :

ZENAS OGBONNA SAMUEL EKUOKE

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.                   Introduction

[1]               La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire fondée sur le paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la LIPR] à l’égard du refus de la Section d’appel des réfugiés [la SAR] d’accueillir la demande du demandeur en vue d’obtenir une prorogation de délai pour déposer un appel interjeté à l’encontre de la décision défavorable de la Section de la protection des réfugiés [la SPR].

II.                Contexte

[2]               Le demandeur est citoyen du Nigéria, dont la demande d’asile a été rejetée par la SPR le 24 septembre 2013.

[3]               Le 13 novembre 2013, le demandeur a demandé une prorogation de délai pour déposer un appel devant la SAR au motif que son colocataire, en raison d’une mésentente entre eux, lui aurait caché la lettre contenant la décision de la SPR. Par conséquent, le demandeur indique qu’il n’a eu connaissance de la décision de la SPR que le 1er novembre 2014.

[4]               Le 10 janvier 2014, la SAR a rejeté la demande du demandeur en vue d’obtenir une prorogation de délai pour déposer un appel, dont l’avis a été reçu par le demandeur le 17 janvier 2014. Cette décision fait l’objet du présent contrôle devant notre Cour.

[5]               La Cour fait remarquer que, en raison de ce qui semble être une erreur d’écriture, la date du 18 février 2013, plutôt que la date exacte du 17 janvier 2014, a été inscrite sur la demande comme date à laquelle le demandeur a reçu la décision de la SAR. Cette erreur a amené le greffe à accepter le dépôt de la demande le 3 mars 2014, puisqu’il croyait qu’elle avait été déposée dans le délai imparti.


III.             La décision faisant l’objet du contrôle

[6]               Dans sa décision du 23 décembre 2013, la SAR a conclu que le demandeur n’a pas justifié sa demande de prorogation de délai suivant les exigences de la LIPR et conformément aux Règles et au Règlement applicables ci‑après.

[7]               En particulier, la SAR a conclu que le demandeur n’a as répondu au critère relatif à une demande de prorogation de délai visée au paragraphe 159.91(2) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 [le RIPR], selon lequel la SAR peut, « pour des raisons d’équité et de justice naturelle », proroger le délai « du nombre de jours supplémentaires qui est nécessaire dans les circonstances ».

[8]               De plus, la SAR s’appuie sur des facteurs établis dans la décision Canada (Procureur général) c Pentney, 2008 CF 96, et dans l’arrêt Canada (Procureur général) c Hennelly, [1995] ACF 1183 (CAF) [Hennelly], pour conclure que, conformément aux principes d’équité procédurale et de justice naturelle, le demandeur n’a pas fourni suffisamment d’explications raisonnables pour justifier l’octroi d’une prorogation de délai.

[9]               En particulier, la SAR a conclu que le demandeur :

         n’a pas expliqué comment il a su que son colocataire lui avait caché la lettre contenant la décision de la SPR;

         n’a pas expliqué la nature du conflit entre lui et son colocataire;

         n’a fourni aucune explication ni aucune preuve à l’appui des allégations susmentionnées;

         a admis qu’il avait eu connaissance de la décision de la SAR le 17 janvier 2014, confirmant l’erreur ayant mené le greffe à accepter sa demande;

         a admis que la décision avait été envoyée à son domicile.

(décision de la SAR, au paragraphe 10)

IV.             Questions

[10]           Les questions déterminantes auxquelles la Cour doit répondre sont celles de savoir si la Cour devrait annuler la demande au motif qu’elle a été déposée après l’expiration du délai et ne comprend pas une demande de prorogation de délai officielle, et si la SAR a commis une erreur en refusant d’accorder une prorogation de délai pour instruire l’appel.

V.                Dispositions de la loi applicables

[11]           Premièrement, la LIPR prévoit un délai de 15 jours pour déposer une demande devant la Cour fédérale :

Application

Application

72.(2) Les dispositions suivantes s’appliquent à la demande d’autorisation :

72.(2) The following provisions govern an application under subsection (1):

a) elle ne peut être présentée tant que les voies d’appel ne sont pas épuisées;

(a) the application may not be made until any right of appeal that may be provided by this Act is exhausted;

b) elle doit être signifiée à l’autre partie puis déposée au greffe de la Cour fédérale — la Cour — dans les quinze ou soixante jours, selon que la mesure attaquée a été rendue au Canada ou non, suivant, sous réserve de l’alinéa 169f), la date où le demandeur en est avisé ou en a eu connaissance;

 

(b) subject to paragraph 169(f), notice of the application shall be served on the other party and the application shall be filed in the Registry of the Federal Court (“the Court”) within 15 days, in the case of a matter arising in Canada, or within 60 days, in the case of a matter arising outside Canada, after the day on which the applicant is notified of or otherwise becomes aware of the matter;

c) le délai peut toutefois être prorogé, pour motifs valables, par un juge de la Cour;

 

(c) a judge of the Court may, for special reasons, allow an extended time for filing and serving the application or notice;

[…]

[…]

[12]           Deuxièmement, les extraits pertinents des Règles des cours fédérales en matière d’immigration et de protection des réfugiés, DORS/93-22 [les RCFIPR], à l’égard d’une demande de prorogation de délai devant la Cour se trouvent à l’article 6 :

Prorogation du délai de dépôt et de signification de la demande d’autorisation

Extension of time to file and serve application for leave

6.(1) Toute demande visant la prorogation du délai au titre de l’alinéa 72(2)c) de la Loi, se fait dans la demande d’autorisation même, selon la formule IR-1 figurant à l’annexe.

6.(1) A request for an extension of time referred to in paragraph 72(2)(c) of the Act shall be made in the application for leave in accordance with Form IR-1 set out in the schedule.

   (2) Il est statué sur la demande de prorogation de délai en même temps que la demande d’autorisation et à la lumière des mêmes documents versés au dossier.

   (2) A request for an extension of time shall be determined at the same time, and on the same materials, as the application for leave.

[13]           Troisièmement, les paragraphes 159.91(1) et (2) du RIPR portent sur la possibilité de demander une prorogation de délai en appel devant la SAR :

Délais d’appel

Time limit for appeal

159.91(1) Pour l’application du paragraphe 110(2.1) de la Loi et sous réserve du paragraphe (2), la personne en cause ou le ministre qui porte en appel la décision de la Section de la protection des réfugiés le fait dans les délais suivants :

159.91(1) Subject to subsection (2), for the purpose of subsection 110(2.1) of the Act,

a) pour interjeter appel de la décision devant la Section d’appel des réfugiés, dans les quinze jours suivant la réception, par la personne en cause ou le ministre, des motifs écrits de la décision;

(a) the time limit for a person or the Minister to file an appeal to the Refugee Appeal Division against a decision of the Refugee Protection Division is 15 days after the day on which the person or the Minister receives written reasons for the decision; and

b) pour mettre en état l’appel, dans les trente jours suivant la réception, par la personne en cause ou le ministre, des motifs écrits de la décision.

(b) the time limit for a person or the Minister to perfect such an appeal is 30 days after the day on which the person or the Minister receives written reasons for the decision.

Prolongation

Extension

(2) Si l’appel ne peut être interjeté dans le délai visé à l’alinéa (1)a) ou mis en état dans le délai visé à l’alinéa (1)b), la Section d’appel des réfugiés peut, pour des raisons d’équité et de justice naturelle, prolonger chacun de ces délais du nombre de jours supplémentaires qui est nécessaire dans les circonstances.

(2) If the appeal cannot be filed within the time limit set out in paragraph 1)(a) or perfected within the time limit set out in paragraph (1)(b), the Refugee Appeal Division may, for reasons of fairness and natural justice, extend each of those time limits by the number of days that is necessary in the circumstances.


VI.             Analyse

[14]           Le demandeur a déposé une demande devant notre Cour le 3 mars 2014, après l’expiration du délai de 15 jours prescrit par l’alinéa 72(2)b) de la LIPR. Par conséquent, le demandeur était tenu de soumettre une demande de prorogation de délai officielle, conformément à l’article 6 des RCFIPR. Lorsqu’elle se penche sur une telle demande, la Cour doit examiner si les explications et la situation du demandeur, d’après les critères de la jurisprudence, justifient d’accueillir la demande.

[15]           Le demandeur n’a non seulement pas présenté une demande de prorogation de délai, mais n’a également fourni aucune explication valable pour justifier d’accueillir la demande.

[16]           Qui plus est, en examinant la décision de la SAR, la Cour a conclu que la demande de prorogation de délai du demandeur devant la SAR n’était pas étayée par la preuve et que, par conséquent, la SAR n’a commis aucune erreur.

[17]           Selon le demandeur, sa demande de prorogation de délai devant la SAR est fondée sur le fait qu’il n’a eu connaissance de la décision de la SPR qu’un mois après l’avoir reçue, et il n’était donc pas en mesure d’agir plus tôt.

[18]           Au paragraphe 3 de la décision Hennelly, précitée, la Cour fédérale a déterminé que le critère applicable pour autoriser une prorogation de délai est celui de savoir si un demandeur a démontré : 1) une intention constante de poursuivre sa demande; 2) que la demande est bien fondée; 3) que le défendeur ne subit pas de préjudice en raison du délai; et 4) qu’il existe une explication raisonnable justifiant le délai.

[19]           La Cour conclut que la SAR a rejeté à bon droit la demande du demandeur au motif que ce dernier n’a pas démontré les critères susmentionnés.

VII.          Conclusion

[20]           La Cour conclut que le demandeur n’a pas démontré qu’un motif valable justifie d’accueillir la demande de prorogation de délai. Par conséquent, la demande est rejetée.


JUGEMENT

LA COUR ORDONNE ce qui suit :

1.      La demande de contrôle judiciaire est rejetée;

2.      Aucune question grave de portée générale n’est certifiée.

« Michel M.J. Shore »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Mylène Boudreau, B.A. en trad.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-1289-14

 

INTITULÉ :

ZENAS OGBONNA SAMUEL EKUOKE c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Montréal (QuÉbec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 13 NOVEMBRE 2014

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE SHORE

 

DATE DES MOTIFS :

LE 17 NOVEMBRE 2014

 

COMPARUTIONS :

Claudette Menghile

Susan Ramirez

 

POUR Le demandeur

 

Patricia Nobl

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Me Claudette Menghile, avocate

Montréal (Québec)

 

POUR Le demandeur

 

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

Montréal (Québec)

 

POUR LE DÉFENDEUr

 

 

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