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Date : 20141001


Dossier : T-730-14

Référence : 2014 CF 934

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Vancouver (Colombie-Britannique), le 1er octobre 2014

En présence de madame la juge Mactavish

ENTRE :

YUET YI FUNG

demanderesse

et

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

(Motifs prononcés à l’audience à Vancouver le 1er octobre 2014)

[1]               Yuet Yi Fung demande le contrôle judiciaire d’une décision de deuxième niveau de l’Agence du revenu du Canada. Dans cette décision, un délégué du ministre refusait d’accorder un allègement à Mme Fung à l’égard des pénalités et intérêts imposés à la suite de son omission de produire, avant la date limite du 15 juin 2012, le formulaire T-1135, Bilan de vérification du revenu étranger, à l’égard de son année d’imposition 2011.

[2]               Pour situer le contexte, Mme Fung s’est vue imposer, en raison de l’omission de produire la déclaration T-1135 avant la date limite, une pénalité de production tardive de 2 500 $ ainsi que des intérêts sur l’arriéré de 106,82 $. Elle a versé les sommes dues le 23 avril 2013, mais entre-temps, elle a demandé un allègement en vertu des dispositions relatives à « l’équité en matière fiscale » contenues au paragraphe 220(3.1) de la Loi de l’impôt sur le revenu.

[3]               Dans ses observations présentées au premier niveau, Mme Fung affirmait qu’elle était enceinte en 2011 et que sa fille était née avant la date prévue. Dans sa demande d'allègement fiscal, Mme Fung a déclaré qu’elle avait été obligée de prendre soin d’un enfant prématuré et de son enfant de 4 ans et qu’elle avait eu beaucoup de mal à se procurer ce qu’elle a qualifié de « temps d’attention » pour organiser ses reçus d’impôt sur le revenu, de sorte qu’elle n’a été en mesure de produire la déclaration pour l’année d’imposition 2011 qu’en octobre 2012. Madame Fung a également affirmé qu’elle ne savait pas qu’elle était tenue de produire le formulaire T-1135 avant la date limite du 15 juin, même si elle ne devait pas d’impôt pour l’année d’imposition 2011.

[4]               La demande d'allègement de Mme Fung a été rejetée au premier niveau et le décideur a fait remarquer que l’enfant de Mme Fung était né en août 2011. L’agent de l’ARC a estimé que si Mme Fung n’était pas en mesure de s’acquitter de ses obligations fiscales, elle aurait dû retenir les services d’un conseiller fiscal pour veiller à ce que ses déclarations de revenus soient produites dans le délai prescrit. L’agent de l’impôt n’a pas estimé que Mme Fung avait établi l’existence de circonstances indépendantes de sa volonté et il a donc refusé sa demande d'allègement de premier niveau.

[5]               Madame Fung a alors porté sa demande au second niveau. Le délégué du ministre qui a pris la décision de second niveau a fait remarquer que les dispositions d’allègement pour les contribuables de la Loi de l’impôt sur le revenu accordent à l’ARC [traduction] « le pouvoir discrétionnaire d’annuler tout ou partie des pénalités ou des intérêts dus, lorsque ces pénalités et intérêts ont été encourus en raison de circonstances indépendantes de la volonté du contribuable ». En l’espèce, le délégué du ministre a constaté que l’enfant de Mme Fung était né 10 mois avant la date limite de production du formulaire du 15 juin 2012.

[6]               Le délégué du ministre a reconnu qu’[traduction]« il arrive que des difficultés surviennent », mais il a conclu que Mme Fung était en fin de compte responsable de déposer ses déclarations de revenus avant la date limite. Le délégué du ministre n’a pas estimé que Mme Fung avait démontré l’existence de circonstances indépendantes de sa volonté et sa demande d’allègement a été refusée encore une fois. C’est cette décision qui est visée par la demande de contrôle judiciaire de Mme Fung.

[7]               Dans le cadre d’une demande de la présente nature, il ne m’appartient pas d’examiner de nouveau la demande d’allègement de Mme Fung et de décider si j’en arriverais à une décision différente de celle du délégué du ministre. Je ne peux modifier la décision que si Mme Fung me convainc que la décision de second niveau était déraisonnable dans le sens où elle manquait de justification, de transparence ou d’intelligibilité ou que la décision n’appartenait pas aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit : voir Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 R.C.S. 190, au paragraphe 47.

[8]               Madame Fung n’a malheureusement pas réussi à me convaincre que la décision du délégué du ministre était déraisonnable. Le délégué du ministre a examiné tous les arguments que Mme Fung a présentés à l’appui de sa demande d’allègement et il a expliqué pourquoi ces arguments n’avaient pas été retenus. Il n’y avait rien de déraisonnable dans l’analyse à laquelle s’est livré le délégué du ministre.

[9]               Madame Fung affirme qu’elle ne savait pas qu’elle était tenue de produire le formulaire T‑1135 avant la date limite prévue par la loi, si elle ne devait pas d’argent. L’ignorance de la loi n’est toutefois pas une excuse et ne constituait pas une circonstance indépendante de la volonté de Mme Fung. L’ignorance de la loi ne permet pas d’accorder une mesure d'allègement aux termes du paragraphe 220(3.1) de la Loi de l’impôt sur le revenu : Sandler c Canada (Procureur général), 2010 CF 459, au paragraphe 12.

[10]           En ce qui concerne la naissance de l’enfant de Mme Fung, comme cela a été mentionné dans la décision de deuxième niveau, l’événement s’est produit près de 10 mois avant la date à laquelle Mme Fung devait produire sa déclaration T-1135. Il incombait à Mme Fung de convaincre le délégué du ministre de l’existence de circonstances qui justifieraient l’octroi d’un allégement. Madame Fung n’a fourni au délégué du ministre aucune preuve médicale pour étayer l’affirmation qu’elle a faite pour la première fois dans son mémoire des faits et du droit selon laquelle son enfant a eu besoin [traduction] « de soins intensifs pendant une longue durée », et le dossier dont disposait le délégué du ministre ne contenait aucune preuve permettant d'appuyer cette affirmation.

[11]           Il appartenait à Mme Fung de fournir des preuves au délégué du ministre pour étayer sa demande d’allégement. Il ne revenait pas au délégué du ministre de préciser à Mme Fung quels étaient les genres de preuves qu’elle devait fournir à l’appui de sa demande. Madame Fung n’a pas fourni de renseignements au sujet du type de soins dont avait besoin son enfant et elle n’a pas non plus expliqué pourquoi elle n’avait pas été en mesure d’obtenir les services d’un conseiller fiscal dans le délai prescrit, même s’il semble qu’elle ait déjà eu recours aux services d’un tel conseiller auparavant pour préparer ses déclarations de revenus et qu’elle a au bout du compte retenu les services d’un tel conseiller pour préparer sa déclaration T-1135 pour 2011.

[12]           En réalité, Mme Fung n’a fourni aucune preuve établissant qu’elle a déployé un quelconque effort au cours de la période en cause pour respecter ses obligations fiscales pour 2011-2012. Dans les circonstances, il était tout à fait raisonnable que le délégué du ministre conclue que Mme Fung n’avait pas démontré l’existence de circonstances qui justifieraient l’octroi d’un allègement à l’égard des pénalités et intérêts qui lui ont été imposés.

[13]           La demande est, par conséquent, rejetée. Avec le consentement des parties, l’intitulé de la cause sera modifié pour remplacer « Agence du revenu du Canada » par « Procureur général du Canada » en qualité de défendeur.

[14]           J’ai examiné la question des dépens. Il me semble que le défendeur devrait avoir droit à des dépens, mais dans l’exercice de mon pouvoir discrétionnaire, je vais limiter ces dépens à 500 $.

 


JUGEMENT

LA COUR STATUE que :

1.                   La demande est rejetée;

2.                   L’intitulé sera modifié pour que « Procureur général du Canada » figure en qualité de défendeur au lieu de l’« Agence du revenu du Canada »;

3.                   Le défendeur a droit à des dépens de l’ordre de 500 $.

« Anne L. Mactavish »

Juge

Traduction certifiée conforme

Linda Brisebois, LL.B.

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-730-14

 

INTITULÉ :

YUET YI FUNG

c PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Vancouver (Colombie-Britannique)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 1ER OCTOBRE  2014

JUGEMENT ET MOTIFS :

LAJUGE MACTAVISH

 

DATE DES MOTIFS :

LE 1ER OCTOBRE  2014

 

COMPARUTIONS :

Yuet Yi Fung

POUR LA DEMANDERESSE

(POUR SON PROPRE COMPTE)

Matthew Turnell

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Yuet Yi Fung

Richmond (Colombie-Britannique)

 

POUR LA DEMANDERESSE

(POUR SON PROPRE COMPTE)

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

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