Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20140930


Dossier : T-1269-06

Référence : 2014 CF 930

 

ENTRE :

LA SOCIÉTÉ ÉDUCATIVE DU PROJET CONJOINT DE L'ALBERTA

Partie demanderesse

(Défenderesse reconventionnelle)

et

SA MAJESTÉ LA REINE

Partie défenderesse

(Demanderesse reconventionnelle)

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

LE PROTONOTAIRE LAFRENIÈRE

[1]               Ces motifs s'appliquent aux dossiers de la Cour T-1269-06, T-1270-06, T-1271-06 et     T-1272-06, vu que les faits et les points invoqués respectivement par chacune des parties dans les quatre instances sont pratiquement identiques. Une copie des motifs sera déposée dans chacun de ces dossiers.

[2]               La défenderesse, Sa Majesté la Reine (la Couronne), sollicite une ordonnance rejetant les instances pour le motif que la poursuite des instances par les demandeurs accuse un retard injustifié. Bien que les Règles des Cours fédérales, prévoient, à l’article 167, la possibilité de présenter une requête en rejet de l’instance pour cause de retard injustifié, ce type de requête est rarement présentée dans un cas de gestion de l’instance, compte tenu du rôle actif que joue la Cour en ce qui concerne la surveillance du déroulement de toutes les instances : Multibond Inc c Duracoat Powder Manufacturing Inc, 1999 CanLII 8948 (FC), (1999), 177 FTR 226 (CF), para 15. Cependant, après un examen attentif des antécédents sur le plan de la procédure, j'en suis venu à la conclusion que les retards inhabituels et excessifs dans ces affaires, de la part des demandeurs, constituent une circonstance extraordinaire qui justifie l'intervention de la Cour.

[3]               Au soutien de sa requête, la Couronne s'appuie sur l’affidavit de Jessica Winbaum, établi sous serment le 26 août 2014. Les demandeurs n’ont pas déposé de preuve par affidavit en réponse. Toutefois, l’avocat des demandeurs a présenté des observations sur le fond de la requête. Les faits pertinents et incontestés peuvent être résumés de la façon suivante.

[4]               Les quatre instances ont été engagées par le dépôt d’une déclaration le 21 juillet 2006. La Couronne a produit sa défense dans les quatre dossiers le 5 septembre 2006, ainsi qu’une demande reconventionnelle dans T-1269-06 et T-1271-06. Par la suite, la Couronne a déposé une requête conjointe en gestion des instances, qui fût accueillie le 9 novembre 2006. Les quatre instances font, par la suite, l’objet d’une seule et même gestion de l’instance. Les actes de procédure sont clos depuis le mois d’août 2007.

[5]               Les demandeurs ont signifié leurs affidavits de documents le 10 avril 2007. Selon la Couronne, la description de certains documents était insuffisant et le groupement non-conforme aux Règles. Les demandeurs ont été tenus par la Cour de fournir des affidavits de documents plus amples et plus précis.

[6]               La Couronne a signifié ses affidavits de documents en avril 2007, et des affidavits supplémentaires le 28 août 2007. Deux représentants de la Couronne ont été interrogés au préalable par l’avocat des demandeurs au mois de juillet 2008 et janvier 2010. La Couronne a répondu aux engagements pris lors des derniers interrogatoires, en juillet 2011.

[7]               Les interrogatoires de la représentante des demandeurs n'ont pas eu lieu en 2008 car leur avocat à l'époque n’était pas bilingue, et tous les documents devaient être traduits du français à l’anglais. Le nouvel avocat des demandeurs a ensuite demandé un délai afin de pouvoir se familiariser avec les quatre dossiers.

[8]               En se préparant pour les interrogatoires de la représentante des demandeurs au début de 2010, l’avocat de la Couronne s’est rendu compte que les affidavits de documents amendés ainsi que les documents produits par les demandeurs, étaient inadéquats, qui avait pour effet de faire obstacle au droit à un interrogatoire efficace. Ces lacunes ont été portées à l’attention de l’avocat des demandeurs par lettre datée du 17 février 2010.

[9]               Dans un rapport en date du 8 avril 2010, l’avocat des demandeurs informe la Cour qu’un problème avait été identifié par la Couronne avec la version électronique des documents produits par les demandeurs. Il précise dans sa lettre :

We are in the process of attempting to resolve this issue with Counsel for the Defendant following which we would expect to schedule and complete examinations for discovery of the Plaintiffs’ representative in a reasonably timely manner with the anticipated cooperation of Counsel for the Defendant.

[10]           Par ordonnance en date du 3 décembre 2010, la Cour a ordonné comme suit :

2.         The Plaintiff shall use best efforts and take reasonable steps to rectify any outstanding issues that the Defendant may have identified with regard to the use of the Plaintiff’s electronic records production on or before January 31, 2011.

[11]           Par ordonnance en date du 30 juin 2011, la Cour a de nouveau ordonné aux demandeurs de remédier aussitôt que possible aux problèmes soulevés par la Couronne à l’égard de la production de documents, et de signifier un affidavit de documents amendé. Les demandeurs vont d'atermoiements en atermoiements depuis cette date. En ce qui concerne la communication de documents, différentes ordonnances ont fait en sorte qu'elles ont obtenu plusieurs prorogations de délai pour satisfaire à leurs obligations.

[12]           Le défaut constant des demandeurs de produire et divulguer complètement les documents pertinents, en temps opportun et conformément aux ordonnances de divulgation, a retardé considérablement l’instruction des affaires, a entrainé de nombreuses correspondances de l’avocat de la Couronne demandant que les demandeurs se conforment aux ordonnances de divulgation, et a entraîné l’intervention de la Cour à maintes reprises. Depuis plusieurs années, la Cour a essayé d'encourager les demandeurs, par tous les moyens (y compris en rendant une ordonnance péremptoire le 10 janvier 2014),  à respecter ses engagements, mais sans succès.

[13]           Je note que les quatre instances ont progressé au cours des huit dernières années avec une lenteur remarquable, et surtout depuis 2012. La demanderesse a fait défaut de fournir, en temps utile, des documents électroniques en format lisible, bien qu’ils se soient engagés à plusieurs reprises de le faire.  De guerre lasse, la Couronne demande le rejet des actions.

[14]           Les demandeurs plaident aujourd'hui des difficultés qui les ont empêchés d'agir en temps utile, et elles souhaitent obtenir un délai additionnel sans pour autant fournir de preuve tangible de sa capacité de donner suite à ses engagements. Dans ses prétentions écrites, l’avocat des demandeurs se borne à promettre d’entreprendre toutes les mesures nécessaires pour faire avancer les instances aussitôt qu’il obtient l’accord de la Cour. Il est permis de déduire, du fait que les demandeurs n’ont pas inclus d’échéancier dans ses représentations écrites, que les demandeurs n’ont pas encore remédié à leur défaut et qu’ils seront donc toujours dans l’incapacité de mener à bien ces dossiers.  Le défaut des demandeurs de proposer un échéancier ou des mesures concrètes pour faire avancer le dossier est suffisant en soi, pour rejeter la demande pour cause de délai.

[15]           Je reconnais que la réparation draconienne, consistant à rejeter une action, ne devrait être invoquée qu’en dernier recours. Cependant, la Cour n’a d’autres alternatives, vu que les demandeurs ont omis à maintes reprises de respecter ses engagements ainsi que les ordonnances de la Cour.

[16]           Puisque je souscris à l’essentiel des observations écrites déposées pour le compte de la Couronne, que j’adopte et reprends à mon compte, je conclus que les actions de demandeurs devraient être rejetées avec dépens.

« Roger R. Lafrenière »

Protonotaire

Vancouver (Colombie-Britannique)

Le 30 septembre 2014

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-1269-06

 

INTITULÉ :

LA SOCIÉTÉ ÉDUCATIVE DU PROJET CONJOINT DE L'ALBERTA et SA MAJESTÉ LA REINE

 

REQUÊTE ÉCRITE CONSIDÉRÉE À, Vancouver (Colombie-Britannique)

SUITE À LA RÈGLE 369 DES RÈGLES DES COURS FÉDÉRALES

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 30 septembre 2014

 

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :

LE PROTONOTAIRE LAFRENIÈRE

 

DATE DES MOTIFS :

LE 30 septembre 2014

 

COMPARUTIONS :

Allan W. Damer

 

pour le demandeur

 

Sean Gaudet

pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Allan W. Damer

Mintz Law

Edmonton, Alberta

 

pour le demandeur

 

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Toronto, Ontario

 

pour le défendeur

 

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.