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Date : 20140919


Dossier : IMM-3535-13

Référence : 2014 CF 900

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 19 septembre 2014

En présence de monsieur le juge O’Reilly

ENTRE :

MINQIN ZENG

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.                   Aperçu

[1]               Mme Minqin Zeng a demandé l’asile au Canada, prétendant qu’elle était persécutée en Chine parce qu’elle est chrétienne catholique. Elle a prétendu qu’elle était membre d’une église clandestine dans la province de Fujian et que le Bureau de la sécurité publique (BSP) avait fait une descente dans l’église auquel elle appartient pendant qu’elle était au Canada afin d’assister aux funérailles de son frère. Elle prétend que le BSP l’arrêtera si elle retourne en Chine.

[2]               Un tribunal de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié a rejeté la demande de Mme Zeng en raison d'un manque d'éléments de preuve crédibles. Mme Zeng prétend que la décision de la Commission était déraisonnable parce que ses conclusions quant à la crédibilité n’étaient pas étayées. Mme Zeng me demande d'annuler la décision de la Commission et d'ordonner qu'un autre tribunal examine de nouveau sa demande.

[3]               Je ne peux pas conclure que la décision de la Commission était déraisonnable. La Commission avait des raisons valables d’avoir des réserves quant au témoignage de Mme Zeng et sa conclusion appartenait aux issues acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit. En conséquence, je dois rejeter la présente demande de contrôle judiciaire.

[4]               La seule question en litige est de savoir si la décision de la Commission était déraisonnable.

II.                La décision de la Commission

[5]               La Commission a relevé un certain nombre de points où le témoignage de Mme Zeng posait problème :

                     Mme Zeng a affirmé dans son témoignage qu’une amie lui avait dit que l’existence de leur église devait rester secrète parce qu’elle n’était pas enregistrée. Toutefois, dans son récit écrit, elle a déclaré que ce n’était que plus tard qu’elle avait appris que l’église était clandestine.

                     Mme Zeng n’a fait part d’aucune inquiétude quant à la possibilité que l’église fasse l’objet d’une descente ni d’aucune crainte concernant l’incidence que son arrestation pourrait avoir sur son enfant.

                     Mme Zeng a déclaré que l’église avait un prêtre, mais que celui-ci n’avait jamais été présent au cours de l’année où elle avait participé aux offices religieux. La Commission a conclu que cela était invraisemblable étant donné le rôle essentiel joué par le prêtre dans le catholicisme

                     Mme Zeng a omis de mentionner que, lors de l’office religieux, on faisait une prière pour le Pape, ce qui fait normalement partie d’une cérémonie catholique.

                     L’église n’a fait l’objet d’une descente qu’à une seule reprise au cours de ses six années d’existence. Le fait que la descente a eu lieu pendant que Mme Zeng était au Canada semblait être une coïncidence invraisemblable.

                     Le récit de la descente qui a été fait à Mme Zeng par une amie qui en aurait été témoin semblait fabriqué. L’amie se serait tenue près de la maison afin de regarder la descente, courant ainsi le risque d’être arrêté.

                     Mme Zeng a attendu près de dix mois après la descente avant de demander l’asile. Son retard a pour conséquence que sa crainte subjective de persécution est mise en doute.

                     Mme Zeng a déclaré que les agents du BSP n’ont laissé chez elle aucune assignation ni aucun mandat d’arrestation, même s’ils s’y étaient rendus à plusieurs reprises. La Commission a reconnu que, en Chine, les pratiques peuvent varier en ce qui concerne les assignations et les mandats. Néanmoins, il était probable qu’une certaine forme de procédure écrite ait été laissée chez la demanderesse après que le BSP s’y soit rendu à autant de reprises.

                     La preuve documentaire ne contenait aucun rapport récent faisant état que des descentes auraient eu lieu dans des églises clandestines de la province de Fujian ou que des églises clandestines auraient été fermées dans cette même province.

                     La Commission a reconnu que Mme Zeng était membre d’une église catholique au Canada et connaissait les croyances et les pratiques chrétiennes. Toutefois, ce témoignage aurait tout simplement pu être fabriqué dans le but d’étayer sa demande; il ne permettait pas de conclure que la demanderesse était une véritable chrétienne. Mais, même si elle l’était, la preuve ne permettait pas de conclure qu’elle craignait avec raison d’être persécutée en Chine.

[6]               Dans l’ensemble, la Commission a conclu que le témoignage de Mme Zeng n’était pas convaincant et qu’elle n’avait pas établi plus qu’une simple possibilité qu’elle serait persécutée, en Chine du fait de ses croyances religieuses.

III.             La décision de la Commission était-elle déraisonnable?

[7]               Mme Zeng prétend que la Commission a rejeté son témoignage pour des motifs vagues et injustifiables. Elle donne à penser que l’approche globale que la Commission a adoptée quant à sa demande a été influencée par les raisons pour lesquelles elle est à l’origine devenue membre d’une église clandestine. Elle prétend également que certains aspects de sa demande n’étaient pas invraisemblables. Par exemple, le fait que la descente dans son église a eu lieu alors qu’elle était absente n’était pas si peu probable que son témoignage sur ce point devrait être rejeté. Dans la même veine, le fait qu’aucun prêtre n’ait été présent dans son église était non seulement possible, mais était compatible avec la preuve documentaire indiquant que les prêtres risquent de subir des sanctions s’ils sont surpris à célébrer des offices religieux. En ce qui concerne les assignations et les mandats, la preuve documentaire révèle que les pratiques varient d’une région à l’autre de la Chine et aucune inférence valable ne peut être tirée de l’absence d’assignation ou de mandat dans un cas donné. Enfin, la preuve documentaire indique que la persécution religieuse exercée contre les chrétiens et les catholiques est répandue en Chine.

[8]               Bien que Mme Zeng conteste la façon dont la Commission a traité certains éléments de preuve, je ne peux pas conclure que la conclusion de la Commission était déraisonnable. La Commission a interrogé Mme Zeng au sujet des raisons pour lesquelles elle était devenue membre d’une église clandestine, mais, selon moi, son affirmation selon laquelle ses réponses ont amené la Commission à douter de l’ensemble de ses prétentions n’est pas fondée. Comme je l’ai déjà mentionné, la Commission a expliqué pourquoi elle avait conclu que certains éléments de sa preuve étaient invraisemblables, elle a souligné que les agissements de Mme Zeng étaient incompatibles avec une crainte subjective de persécution et a fait une évaluation raisonnable de la preuve documentaire. Fait plus important encore, selon la Commission, rien dans cette preuve n’étayait la prétention de Mme Zeng voulant qu’elle risque d’être victime de persécution religieuse dans la province du Fujian. En ce qui concerne l’absence d’assignation ou de mandat, il était loisible à la Commission de conclure que le BSP aurait vraisemblablement laissé au moins un des deux documents à la famille de Mme Zeng étant donné le nombre de fois qu’il s’est censément rendu chez elle (voir, p.ex., Chen c Canada (MCI), 2012 CF 796, au paragraphe 10).

[9]               Selon moi, compte tenu de la preuve dont elle était saisie, la conclusion de la Commission appartenait aux issues acceptables; elle n’était pas déraisonnable.

IV.             Conclusion et décision

[10]           L’analyse et les conclusions de la Commission n’étaient pas déraisonnables étant donné la preuve dont elle disposait. Par conséquent, je dois rejeter la demande de contrôle judiciaire de Mme Zeng. Aucune des parties n’a proposé de question de portée générale à certifier et aucune n’est certifiée.


JUGEMENT

LA COUR STATUE que :

1.                  La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

2.                  Aucune question de portée générale n’est certifiée.

« James W. O’Reilly »"

Juge

 

Traduction certifiée conforme

Claude Leclerc, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-3535-13

 

INTITULÉ :

MINQIN ZENG c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE:

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 24 JUILLET 2014

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE O'REILLY

 

DATE DU JUGEMENT

ET DES MOTIFS :

LE 19 SEPTEMBRE 2014

 

COMPARUTIONS :

John Savaglio

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Nicole Paduraru

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

John Savaglio

Avocat

Pickering (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

 

 

 

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