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Date : 20140923


Dossier : T-927-13

Référence : 2014 CF 911

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 23 septembre 2014

En présence de madame la juge Kane

ENTRE :

HENRY J. FELIX SR. et GARRY DANIELS, GERTRUDE FELIX, GARRY WICHIHIN, RAMONA FELIX COOK, DAVID BADGER (LE « GROUPE DE TRAVAIL » DE LA STURGEON LAKE FIRST NATION)

demandeurs

et

LA STURGEON LAKE FIRST NATION, (« LA BANDE ») et LE STURGEON LAKE FIRST NATION BAND COUNCIL

actuellement représentés par

LE CHEF CRAIG BIGHEAD, LES CONSEILLERS WESLEY BALLANTYNE, MICHA DANIELS, DONNA KINGFISHER, DANNY MOOSEHUNTER, ANITA PARENTEAU, JONAS SANDERSON (« LE CONSEIL DE BANDE ») et GARRY TURNER, DARWIN NAYTOWHOW

(« LES FONCTIONNAIRES ÉLECTORAUX ») et CRAIG BIGHEAD, SOLOMON SANDERSON, KENNETH BARRY KINGFISHER (« CANDIDATS AU POSTE DE CHEF ») et GABRIEL FELIX, ALLEN JOE FELIX (« LES APPELANTS EN MATIÈRE D’ÉLECTION »)

défendeurs

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]               Les demandeurs sollicitent le contrôle judiciaire de la décision du Sturgeon Lake First Nation Appeal Tribunal (le tribunal d’appel) rendue le 2 mai 2013 ou vers cette date. Le tribunal d’appel a rejeté l’appel des demandeurs qui contestaient la décision de rendre M. Felix inéligible à titre de candidat au poste de chef et l’issue de l’élection du conseil de bande tenue le 27 mars 2013. Pour les motifs exposés ci-dessous, la demande est accueillie.

Contexte

[2]               La présente demande de contrôle judiciaire survient dans le contexte de plusieurs années de tension au sein de la communauté relativement au processus électoral et aux résultats des élections du conseil de bande tenues en 2010 et en 2013. Le contexte nécessaire est exposé dans une chronologie détaillée des événements qui se trouve à l’annexe A.

[3]               La juge Bédard a résumé les événements pertinents qui ont mené à l’élection de 2010 dans la décision Felix Sr c Sturgeon Lake First Nation, 2011 CF 1139, 398 FTR 88 (l’affaire Felix no 1).

[4]               La juge Snider a également résumé l’historique dans l’ordonnance Felix c Sturgeon Lake First Nation, 2013 CF 310 (l’affaire Felix no 2), qui a rejeté la requête d’Henry Felix Sr pour outrage au tribunal et a ordonné l’adjudication de dépens contre lui.

[5]               Résumé à sa plus simple expression, l’historique mouvementé est le suivant. Henry Felix était candidat au poste de chef en 2010. Il s’agissait de la première élection tenue en vertu du Sturgeon Lake First Nations Election Act, 2009 (la Loi électorale). Il a perdu l’élection par deux voix après un nouveau dépouillement. M. Felix a interjeté appel devant le tribunal d’appel, qui a rendu une décision préliminaire rejetant l’appel. Dans l’affaire Felix no 1, la juge Bédard a statué que le tribunal d’appel avait enfreint des principes d’équité procédurale, notamment en se fondant sur des preuves extrinsèques, et a accueilli la demande de contrôle judiciaire. Il a été demandé au tribunal d’appel de relancer l’appel au stade de l’audience (soit la deuxième étape qui fait suite à une décision préliminaire et qui permet aux parties d’être entendues) et de veiller à ce que l’audience respecte la Loi électorale et soit équitable pour toutes les parties. La juge Bédard a également prévenu les intéressés que le tribunal d’appel devait éviter de prendre part à quelque décision qui pourrait être contestée ultérieurement dans le contexte d’un appel.

[6]               Le tribunal d’appel a relancé la procédure, a tenu trois jours d’audience, puis a rejeté l’appel.

[7]               M. Felix n’a pas demandé de contrôle judiciaire du deuxième rejet de son appel. Il a toutefois présenté une requête pour outrage au tribunal contre la Bande (Sturgeon Lake First Nation) alléguant que la nouvelle audience tenue par le tribunal d’appel n’a pas été tenue en conformité avec le jugement de la juge Bédard dans l’affaire Felix no 1. La requête a été rejetée par la juge Snider dans l’affaire Felix no 2 qui mentionnait, entre autres préoccupations, qu’une demande de contrôle judiciaire aurait constitué la réparation appropriée pour le demandeur.

[8]               La juge Snider a conclu que le litige n’était pas nécessaire et [traduction] « reposait sur une incompréhension fondamentale du droit en matière d’outrage au tribunal » et a rejeté la requête, adjugeant des dépens élevés à l’encontre de M. Felix. La juge Snider a rendu l’ordonnance le 26 mars 2013.

[9]               Le 27 mars 2013 était la date à laquelle la deuxième élection du chef et des membres du Conseil a été tenue en vertu de la Loi. M. Felix a de nouveau été candidat au poste de chef. Les mises en candidature avaient pris fin le 20 mars 2013 et des scrutins anticipés avaient eu lieu les 25 et 26 mars.

[10]           À la date de l’élection, le directeur général des élections (DGÉ) a affiché un avis au bureau de scrutin vers la mi-journée indiquant que M. Felix devait de l’argent à la Bande par suite de l’ordonnance sur les dépens rendue dans l’affaire Felix no 2 et qu’il était par conséquent inéligible comme candidat à l’élection.

[11]           Le scrutin s’est poursuivi et, lorsque les votes ont été dépouillés, M. Felix avait reçu 325 voix, ce qui lui conférait la majorité. Toutefois, tous les votes dépouillés qui étaient en faveur de M. Felix ont plus tard été mis dans une enveloppe et déclarés annulés.

[12]           Le tribunal d’appel a observé l’assemblée de mise en candidature, les scrutins anticipés et le scrutin. Le tribunal d’appel était présent au lieu de scrutin le 27 mars 2013 quand l’administrateur de la Bande a délivré l’avis, appelé « Exposé des faits », avec l’ordonnance rendue par la juge Snider. Le DGÉ a ensuite affiché l’avis indiquant que M. Felix devait de l’argent par suite de l’ordonnance de la juge Snider qui imposait des dépens à M. Felix, payables à la Bande et à d’autres parties, et précisant qu’il ne pouvait plus être candidat.

[13]           M. Felix et les codemandeurs, le groupe de travail, ont interjeté appel des résultats de l’élection en alléguant que des erreurs ont été commises dans l’interprétation ou dans l’application de la Loi électorale et que les fonctionnaires électoraux (« FÉ ») se sont livrés à des manœuvres frauduleuses en violation de la Loi. M. Felix a énoncé neuf motifs d’appel. Il a notamment fait valoir qu’il ne devait pas d’argent à la Bande au moment pertinent au titre de la Loi.

[14]           Le tribunal d’appel a rendu une décision préliminaire le 12 avril 2013 rejetant les appels, mais, par « courtoisie », il a tenu une audience pour permettre aux appelants d’exposer leur position. Il règne une certaine incertitude sur la question de savoir si le tribunal d’appel a effectivement étudié l’appel interjeté par M. Felix ou a jugé ce dernier sans qualité pour agir en raison de son inéligibilité, et s’est penché seulement sur l’appel des coappelants, soit les membres du groupe de travail, qui formulaient les mêmes allégations. L’audience a eu lieu les 29 et 30 avril 2013. Le tribunal d’appel a rendu sa décision le 2 mai 2013 et a confirmé la décision des FÉ de rendre M. Felix inéligible.

[15]           Le tribunal d’appel a décidé de tenir une élection partielle pour le poste de chef. M. Felix est demeuré inéligible à titre de candidat à l’élection partielle parce qu’il devait de l’argent à la Bande du fait de l’ordonnance de la juge Snider. L’élection partielle s’est tenue le 29 mai 2013 et des scrutins anticipés ont eu lieu les 27 et 28 mai. Craig Bighead a été élu chef.

[16]           Le 23 mai 2013, M. Felix a déposé la présente demande de contrôle judiciaire de la décision du tribunal d’appel qui rejetait son appel.

[17]           La demande d’injonction de M. Felix de surseoir à l’élection partielle a été rejetée par le juge Roy le 29 mai 2013.

[18]           L’appel interjeté par M. Felix à l’égard de la décision rendue par la juge Snider dans l’affaire Felix no 2, qui rejetait sa requête pour outrage et le condamnait aux dépens, est toujours en attente d’une audience devant la Cour d’appel fédérale.

La décision soumise au contrôle

[19]           La décision du tribunal d’appel est un document d’une page de type schématique qui énonce les faits très brièvement, qui fait état du fondement de l’appel interjeté en vertu de l’article 12.1 de la Loi et qui expose son analyse et sa décision.

[20]           L’analyse expose notamment ce qui suit :

[traduction]

1.         5.1(b)(VII) Argent dû à la Sturgeon Lake First Nation par ordonnance de la Cour fédérale

2.         12.1(a) Nous ne croyons pas qu’il y a eu erreur ou violation sur le plan de l’interprétation ou de l’application de la Loi électorale

3.         12.1(b) Oui, nous croyons qu’Henry Felix, qui s’est porté candidat à l’élection, était inéligible à le faire en vertu du Sturgeon Lake Election Act, 2009.

[21]           La décision porte ce qui suit :

[traduction] Confirmer la décision du directeur général des élections de rendre Henry Felix inéligible, conformément à la décision de Madame la juge Snider, de la Cour fédérale, selon laquelle Henry Felix doit de l’argent à la Sturgeon Lake First Nation, et en vertu de l’alinéa 12.8c) du Sturgeon Lake Election Act : [traduction] « Il ne doit pas y avoir de mises en candidature nouvelles ou additionnelles outre celles qui figurent sur la liste pour l’élection ou l’élection partielle qui fait l’objet de l’appel; cependant, aucun candidat n’est tenu de laisser son nom figurer sur la liste dans le cadre de la nouvelle élection ou élection partielle » pour le poste de chef aux dates suivantes : [...]

[22]           La décision ajoute que les scrutins anticipés auraient lieu les 27 et 28 mai et que l’élection se tiendrait le 29 mai 2013.

[23]           La décision préliminaire du tribunal d’appel rendue le 12 avril 2013 déclarait ce qui suit :

         En ce qui concerne l’appel interjeté par Henry Felix :

[traduction] Annulé pour cause d’inéligibilité en vertu de l’ordonnance de la Cour fédérale et de la Loi électorale.

         En ce qui concerne les appels interjetés par le GT :

[traduction] Réponse : Nous croyons que le DGÉ a exercé ses fonctions conformément au Sturgeon Lake Election Act. Nous estimons qu’il ne s’agit pas d’appels visant une personne ou une manœuvre frauduleuse en particulier, mais qu’il s’agit plutôt de plaintes contre le Sturgeon Lake Act. Une personne ne peut interjeter appel de la loi en présence d’une procédure de modification de la loi. Art. 16. Personne ne peut modifier la loi au cours d’une élection.

[24]           À la fin, la décision porte :

[traduction] Bien que nous ayons rendu une décision préliminaire rejetant ces appels, les coappelants ont été invités par courtoisie à venir exposer leurs récriminations lors de l’audition en appel les 29 et 30 avril 2013.

[25]           L’avis affiché au bureau de scrutin le 27 mars 2013 (appelé l’exposé des faits) énonce ce qui suit : 

[traduction]

AVIS

DANS L’AFFAIRE

HENRY J FELIX SR. c LA STURGEON LAKE FIRST NATION

Aux termes d’une ordonnance de la Cour fédérale rendue le 26 mars 2013 par madame la juge J. Snider :

HENRY J FELIX SR. doit à la Sturgeon Lake First Nation les dépens pour sa requête en outrage déposée contre le tribunal d’appel, les membres du Conseil de bande et les trois avocats qui ont agi comme conseillers juridiques.

PAR CONSÉQUENT, HENRY J FELIX SR. N’EST PLUS UN CANDIDAT ÉLIGIBLE À L’ÉLECTION DE 2013.

Des copies du jugement seront accessibles au bureau de la Bande la semaine prochaine.

La loi

Le Sturgeon Lake First Nation Election Act, 2009

[26]           Le Sturgeon Lake First Nation Election Act, 2009 (la Loi électorale) régit le processus électoral à partir du moment du choix des fonctionnaires électoraux jusqu’à la fin de la période d’appel. Cette loi prévoit notamment les critères applicables aux candidats, le rôle et les responsabilités des fonctionnaires électoraux, la composition du tribunal d’appel et le processus d’appel.

 

L’Executive Act (Loi exécutive)

[27]           La Loi exécutive énonce les rôles, les responsabilités et les pouvoirs du chef et du Conseil. Elle porte également constitution du Conseil consultatif exécutif des aînés (le « Conseil des aînés »), qui peut exercer les fonctions qui lui sont attribuées par le chef et le Conseil, notamment en donnant des conseils lorsque son avis est demandé (alinéa 8.3a)).

[28]           L’article 9 prévoit la création d’un code de déontologie qui régit ce que le chef et le Conseil peuvent faire ou non pendant leur mandat. Ces lignes directrices aident les représentants à être de bons leaders, à préserver leur intégrité et la dignité de leur charge, à prendre part à des discussions et à éviter les conflits d’intérêts. Le code expose également d’autres principes de déontologie. L’article 10 comporte des dispositions sur les conflits d’intérêts. L’article 11 porte sur la discipline. Le Conseil des aînés peut en référer au tribunal d’appel lorsqu’il a des motifs de croire que le chef ou un conseiller a enfreint le code de déontologie ou les lignes directrices sur les conflits d’intérêts, ou s’est par ailleurs conduit de façon illégale ou immorale.

[29]           L’article 12 prévoit des motions de défiance pour les cas de violation grave des obligations énoncées dans la Loi.

[30]           L’article 13 régit les situations dans lesquelles un poste élu est libéré, notamment en cas de condamnation pour un acte criminel ou une infraction liée au trafic d’une substance prohibée ou contrôlée, de démission, de décès, d’incapacité mentale, de manquement au serment de fonction, de défaut de respecter les règlements intérieurs de la Bande, ainsi que lorsqu’une personne [traduction] « est jugée inéligible à une charge en vertu de cette Loi ou des modifications y afférentes » (alinéa 13.1j)).

Position globale des demandeurs

[31]           Les demandeurs font valoir que le tribunal d’appel a violé son devoir d’équité procédurale en participant à la décision de rendre M. Felix inéligible à la date de l’élection, puis en statuant ultérieurement sur l’appel de cette même décision. La Loi électorale a codifié les coutumes, mais ne dit mot du rôle du tribunal d’appel dans la supervision des élections. C’est le rôle du DGÉ et des directeurs adjoints des élections (DAÉ). Même si le tribunal d’appel a comme coutume d’assister à l’élection, la coutume ne peut l’emporter sur l’équité procédurale. Les appelants font valoir que le tribunal d’appel a fait fi de la directive donnée par la juge Bédard dans l’affaire Felix no 1.

[32]           Les demandeurs requièrent que la Cour annule la décision en la remplaçant par sa propre décision qui rétablirait les résultats du scrutin en faveur de M. Felix à l’élection de 2013. Les demandeurs font valoir que le renvoi de la décision pour que le même tribunal d’appel statue à nouveau sur l’affaire ne donnera pas lieu à un processus ou à une décision équitable, compte tenu du fait que le tribunal d’appel a fait fi des directives données par la juge Bédard dans l’affaire Felix no 1 et que les mêmes membres trancheraient de nouveau l’appel de la décision à laquelle ils ont pris part et qu’ils avaient pour ainsi dire déjà tranché. Subsidiairement, les demandeurs sollicitent des directives claires dans le cas où la décision serait renvoyée au tribunal d’appel pour nouvel examen.

Position globale des défendeurs

[33]           Les défendeurs font valoir que le tribunal d’appel s’est conformé à la Loi électorale et à la coutume, selon laquelle le tribunal d’appel supervise l’élection. Les défendeurs soutiennent que le tribunal d’appel n’a pas pris part à la décision de rendre M. Felix inéligible le jour de l’élection et que M. Felix était inéligible du fait de l’application de la Loi électorale en raison de l’échec de son propre litige qui a entraîné une ordonnance aux termes de laquelle il devait payer des dépens à la Bande. Les défendeurs prétendent que M. Felix s’est lui-même placé dans cette situation. Ils font valoir que la présence du tribunal d’appel à l’élection et sa décision ultérieure sur l’appel ne créent pas une crainte raisonnable de partialité. Les défendeurs font ressortir l’importance de l’autonomie gouvernementale et les efforts de la Bande pour refléter leurs coutumes dans la Loi électorale, et demandent que la Cour n’usurpe pas le rôle du tribunal d’appel, qui est le mieux placé pour régler cette question.

Compétence et norme de contrôle judiciaire

[34]           Il est bien établi que la Cour a compétence pour statuer sur la présente demande de contrôle judiciaire. Le Sturgeon Lake First Nation Appeal Tribunal (le tribunal d’appel) est un « office fédéral » pour l’application de la Loi sur les Cours fédérales, LRC 1985, ch F-7, article 2.

[35]           La demande soulève des questions de droit et des questions de compétence du tribunal d’appel de même que des enjeux importants d’équité procédurale, qui sont toutes susceptibles de contrôle selon la norme de la décision correcte.

[36]           Les questions mixtes de fait et de droit peuvent être revues en fonction de la norme de la décision raisonnable (Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 RCS 190 (« Dunsmuir »)).

Les questions en litige

[37]           Les questions en litige reviennent à déterminer si le tribunal d’appel a violé son devoir d’équité procédurale du fait de sa coutume d’observer et de superviser l’élection et sa conduite spécifique du 27 mars 2013; si la décision du tribunal d’appel de maintenir la décision du DGÉ de rendre inéligible M. Felix comme candidat était raisonnable; et, advenant que la décision soit annulée, quelle est la réparation appropriée.

[38]           J’ai donc regroupé les questions spécifiques soulevées par les demandeurs comme suit :

         Le tribunal d’appel a-t-il violé son devoir d’équité procédurale?

o   La présence du tribunal d’appel au bureau de scrutin a-t-elle résulté en de la partialité ou en une crainte raisonnable de partialité dans sa décision concernant l’appel des demandeurs qui ont contesté le processus électoral et l’inéligibilité de M. Felix?

o   Les coutumes peuvent-elles prévaloir sur les dispositions de la Loi électorale ou sur les principes de justice naturelle et d’équité procédurale?

         La décision du tribunal d’appel est-elle raisonnable?

o   Le tribunal d’appel a-t-il commis une erreur en concluant qu’un candidat peut être déclaré inéligible après avoir été accepté par le fonctionnaire électoral et avoir fait inscrire son nom sur le bulletin de vote? (Autrement dit, à quel moment un candidat peut-il être déclaré inéligible? Si la Loi électorale fait référence à la date de mise en candidature, quel processus régit l’inéligibilité après cette date ou après la tenue de l’élection?)

o   Le tribunal d’appel a-t-il commis une erreur en concluant que les fonctionnaires électoraux ont agi dans les limites de leurs pouvoirs et de leur compétence en vertu de la Loi électorale en déclarant M. Felix inéligible et en rejetant les bulletins de vote en sa faveur?

         Quelle est la réparation appropriée?

o   La Cour a-t-elle compétence et convient-il dans les circonstances qu’elle substitue son jugement à celui du tribunal d’appel qui a maintenu la décision du DGÉ, par ricochet, à celui du DGÉ qui a déclaré M. Felix inéligible comme candidat?

Le tribunal d’appel a-t-il violé son devoir d’équité procédurale?

[39]           Les demandeurs font valoir que le droit coutumier par lequel le tribunal d’appel observe l’élection ne constitue pas la question cruciale. La question réside dans la participation du tribunal d’appel à la décision même sur laquelle il s’est penché en appel. C’est cette participation qui crée de la partialité ou la crainte raisonnable de partialité. 

[40]           Les demandeurs notent que dans l’affaire Felix no 1, la juge Bédard a mis en garde le tribunal d’appel au sujet de sa coutume de l’observation des élections et, dans ce cas‑là, la conduite relative à la détermination du lieu des bureaux de scrutin anticipé et à l’aide aux électeurs âgés était moins grave. Les demandeurs font valoir que le tribunal d’appel n’a pas tenu compte de la directive de la juge Bédard. 

[41]           Les demandeurs mentionnent Sparvier c Bande indienne Cowessess, [1993] 3 CF 142, [1994] 1 CNLR 182 42 (Sparvier), affaire dans laquelle le juge Rothstein a souligné que la coutume ne peut être appliquée aux dépens de la justice naturelle.

[42]           La Loi électorale a été ratifiée en 2009 et a codifié la coutume de la Bande en ce qui concerne les élections. La pratique du tribunal d’appel d’assister aux élections et de les superviser n’est pas compatible avec la Loi qui confère la responsabilité de la tenue de l’élection au DGÉ et à la personne qu’il désigne (art. 4 et 5). La Loi, électorale prévoit seulement que le tribunal d’appel peut entendre des appels découlant de l’élection.

[43]           Les demandeurs prétendent que si la coutume est, pour le tribunal d’appel, d’assister aux élections et de les observer ou de les superviser, ce devrait être expressément inclus dans la Loi électorale, qui est censée être une codification de telles coutumes de longue date.

[44]           Les demandeurs font valoir que la présence du tribunal d’appel au bureau de scrutin empêche non seulement le DGÉ de s’acquitter de son mandat, mais également que le tribunal est allé beaucoup plus loin en donnant des directives au DGÉ concernant l’inéligibilité de M. Felix.

[45]           La présence et la participation du tribunal ont donné lieu à une crainte raisonnable de partialité et, dans les faits, ont prédéterminé l’issue de l’appel du fait de sa participation à la décision initiale.

[46]           Les demandeurs remettent en question le fait que les membres du tribunal d’appel puissent témoigner dans le cadre de ce contrôle judiciaire au sujet de leur propre conduite.

[47]           Les demandeurs font valoir que si la décision est renvoyée devant le tribunal d’appel, on ne peut pas compter sur celui‑ci pour rendre une décision impartiale.

[48]           Les demandeurs soutiennent en outre que le processus du tribunal d’appel qui a rejeté l’appel de M. Felix à l’étape 1 lui a complètement refusé un appel; son appel a été [traduction] « annulé pour cause d’inéligibilité en vertu de l’ordonnance de la Cour fédérale et de la Loi électorale », ce qui laisse croire que le tribunal ne s’est pas penché du tout sur l’appel.

[49]           Les défendeurs font observer que la Loi électorale de 2009 a découlé de consultations exhaustives et de coutumes codifiées qui ont évolué sur une période de 42 ans et qui avaient acquis force de loi.

[50]           La Loi électorale prévoit la sélection des FÉ et des membres du tribunal d’appel au même moment. Les membres du tribunal d’appel prêtent serment au sujet de l’exécution de leurs fonctions. La coutume de la Bande est que le tribunal soit présent à toutes les élections pour observer le DGÉ et les FÉ pendant le déroulement du processus électoral. Les défendeurs soutiennent que cette pratique fait l’objet d’une acceptation collective.

[51]           Les défendeurs soulignent l’observation de la juge Snider selon laquelle la juge Bédard n’a pas conclu que la coutume était interdite, pourvu que la Loi électorale soit respectée. Les défendeurs soutiennent maintenant que, dans les cas où la Loi électorale demeure silencieuse, la coutume peut s’appliquer.

[52]           Les défendeurs reconnaissent qu’en 2010, le tribunal a outrepassé son rôle. Les mots de la juge Bédard ont alors été bien pris en compte lors de l’élection de 2013 et le tribunal n’a pris part à aucune décision. Le tribunal n’a pas commenté publiquement l’annonce de l’inéligibilité de M. Felix. Il a revu la décision de la juge Snider et a vu l’avis (l’exposé des faits) qui a été préparé pour informer les électeurs et affiché au lieu de l’élection.

[53]           Les défendeurs ont réitéré ce qui est ressorti du jour de l’élection et ont fait observer que le DGÉ a dépouillé les bulletins de vote à la vue de tous pendant que le tribunal observait. Le DGÉ a annoncé les résultats ainsi que l’inéligibilité de M. Felix. Le rapport sur l’élection a été dressé. Les bulletins de vote en faveur de M. Felix ont été placés dans une enveloppe et accompagnés d’une mention selon laquelle M. Felix devenait inéligible. Les bulletins de vote ont alors été scellés dans la boîte.

[54]           Les défendeurs affirment qu’il n’y a pas de crainte raisonnable de partialité dans la coutume qui consiste à assister à l’élection et à superviser le rôle du DGÉ et des FÉ pourvu que le tribunal ne prenne pas part à des décisions qui pourraient être contestées ultérieurement.

[55]           Les défendeurs constatent d’une part les défis qui se présentent dans les petites communautés où de nombreuses personnes sont liées et se connaissent, et, d’autre part, que la partialité doit être prise en compte en ayant ce fait à l’esprit.

Le tribunal d’appel ne s’est pas acquitté de son devoir d’équité procédurale

[56]           La Loi électorale énonce le rôle du tribunal d’appel et ne fait pas référence à l’observation ou à la supervision de l’élection. Elle prévoit à l’article 11 la constitution d’un tribunal d’appel lorsqu’une élection est convoquée et énonce le rôle du tribunal et le processus des appels. Les dispositions suivantes sont expressément mentionnées :

[traduction]

11.2 Aucun membre du tribunal d’appel ne peut participer à l’élection ou à l’élection partielle, que ce soit comme candidat, personne qui propose un candidat, personne qui seconde, ou électeur.

 

11.3     Le tribunal d’appel supervise et administre tous les appels relatifs à une élection ou élection partielle conformément à la Loi électorale. Il peut siéger de nouveau pour statuer sur toute question disciplinaire se posant au cours du mandat d’un élu conformément aux dispositions du Sturgeon Lake First Nation Executive Act, 2009.

11.4     Il incombe au tribunal d’appel d’attester le résultat de l’élection ou de l’élection partielle du conseil de la Première Nation si un appel est formé après la tenue de l’une ou l’autre.

[Texte mis en évidence dans l’original]

[57]           Je conclus que le tribunal d’appel a outrepassé son rôle au titre de la Loi électorale et de la coutume d’observer et de superviser l’élection. Le tribunal a pris part à la décision de rendre M. Felix inéligible comme candidat à l’élection. La preuve n’étaye pas la position des défendeurs selon laquelle le tribunal d’appel n’a fait qu’être présent et observer. Les affidavits des membres du tribunal d’appel n’indiquent pas en quoi le tribunal a pris part à l’affichage de l’avis d’inéligibilité ou au rejet ultérieur des bulletins de vote inscrits en faveur de M. Felix, mais leurs contre-interrogatoires sont plus francs. 

[58]           M. McLeod, membre du tribunal d’appel, a déclaré que la coutume de la Bande consiste pour le tribunal d’appel à superviser et à observer l’élection. Irene Ermine, membre du tribunal d’appel, a également indiqué à la question 350 que le tribunal d’appel a toujours eu pour pratique [traduction] « de se présenter à l’élection pour – pour – observer ».

[59]           Lorsque M. McLeod s’est fait demander ce que « superviser » signifie, il a répondu à la question 57 que l’objectif était de s’assurer que « ça se déroule bien ». En réponse à la question de savoir ce qu’il ferait si tel n’était pas le cas, il a donné l’exemple de donner instruction au greffier du scrutin d’aider une personne handicapée.

[60]           Aux questions 64 à 93, il a répondu à des questions sur ce qui s’est passé lorsque l’administrateur de la Bande a délivré l’exposé des faits. Il a mentionné qu’il a demandé au DGÉ ce qu’était le document. Le DGÉ et les FÉ ont lu les documents et ont fermé les portes du bureau de scrutin pendant quelque cinq minutes, soit la durée d’une courte réunion. À la question 90, il a indiqué qu’il assistait à cette réunion avec d’autres membres du tribunal d’appel et le DGÉ et d’autres FÉ et qu’il [traduction] « [...] écoutait les témoignages -- ».

[61]           Lorsqu’il a été interrogé au sujet de la décision préliminaire du tribunal d’appel, il a convenu, en réponse à la question 201, que l’appel de M. Felix n’avait pas été examiné du tout, qu’il a été rejeté [traduction] « pour cause d’inéligibilité ». M. McLeod a mentionné que les autres appels avaient été examinés et également rejetés.

[62]           M. Gary Turner, le DGÉ, s’est fait demander ce qu’il a fait au sujet de l’exposé des faits qui a été délivré. Il a répondu à la question 58, que « nous » avons eu une discussion de groupe sur la décision et que ce groupe comprenait le DAÉ et les membres du tribunal.

[63]           Lorsqu’il s’est fait demander ce que les membres du tribunal ont fait, il a répondu à la question 81 [traduction] « Eh bien, j’ai – eh bien, j’ai – j’ai  -- je leur ai lu cet exposé des faits et je leur ai demandé, et ils ont décidé que – d’aller de l’avant avec – avec le  scrutin, mais d’informer les gens qu’Henry était inéligible à titre de -- à titre de candidat. » À la question 83, il a répondu que c’est le membre du tribunal Jeff McLeod qui a pris la décision/fait la déclaration.

[64]           En réponse à la question 122, il a reconnu qu’il a affiché l’exposé des faits au bureau de scrutin, mais qu’il a lu la décision de la juge Snider ultérieurement.

[65]           Lorsqu’on lui a demandé pourquoi M. Felix n’était pas candidat à l’élection partielle, il a indiqué en réponse à la question 255 que M. Felix a été radié comme candidat par le tribunal d’appel.

[66]           En réponse aux questions 338 à 340, il a mentionné que sur la base des renseignements qu’il a obtenus de l’administrateur de la Bande, le tribunal d’appel lui a dit que M. Felix était inéligible.

[67]           Ce témoignage établit que le tribunal d’appel a joué dans la déclaration d’inéligibilité de M. Felix un rôle plus actif que le simple rôle d’observateur ou de superviseur des fonctions du directeur général des élections. Il semble que le tribunal a lu la décision de la juge Snider et l’avis dressé par l’administrateur de la Bande, a tenu une réunion et a discuté de l’avis avec le DGÉ et les fonctionnaires électoraux, et a collaboré à la décision d’afficher l’avis, de laisser l’élection se poursuivre et de déclarer ultérieurement inéligibles les voix enregistrées en faveur de M. Felix.

[68]           Cette participation a clairement outrepassé le rôle coutumier du tribunal, qui est décrit comme un rôle d’observation et de supervision des élections. Le défendeur n’était pas en mesure de dire ce que comportait généralement la supervision. Selon moi, si la coutume convenue du tribunal d’appel consiste à avoir un rôle dans la supervision de l’élection, celui-ci se placerait dans la même situation « délicate » que celle qui est mentionnée par la juge Bédard, car il pourrait être appelé ultérieurement à statuer sur un appel concernant une multitude d’irrégularités électorales survenues pendant qu’il supervisait l’élection.

[69]           Même le silence du tribunal d’appel – si les faits indiquaient que le tribunal est demeuré silencieux – pourrait être interprété comme une participation à une décision au cours de laquelle le tribunal observe et n’empêche pas une violation de la Loi électorale ou de l’équité procédurale.

[70]           En l’espèce, le tribunal d’appel a examiné l’appel de la décision même à laquelle il avait participé, soit la déclaration d’inéligibilité de M. Felix. Il ne fait aucun doute que cette participation a donné lieu à une crainte réelle ou raisonnable de partialité.

[71]           Le critère de partialité fréquemment cité a été énoncé dans Committee for Justice and Liberty c L’Office national de l’énergie, [1978] 1 RCS 369, à la page 394 :

Selon le passage précité, la crainte de partialité doit être raisonnable et le fait d’une personne sensée et raisonnable qui se poserait elle-même la question et prendrait les renseignements nécessaires à ce sujet. Selon les termes de la Cour d’appel, ce critère consiste à se demander « à quelle conclusion en arriverait une personne bien renseignée qui étudierait la question en profondeur, de façon réaliste et pratique. [...]

[72]           Dans la présente affaire, la personne éclairée pourrait seulement conclure qu’il y a eu crainte raisonnable de partialité.

[73]           Comme les défendeurs l’ont mentionné, dans les petites communautés, tout le monde se connaît et beaucoup de membres sont liés les uns aux autres, y compris les décideurs, et il pourrait être difficile d’éviter la crainte de partialité. Toutefois, il n’est pas question de lien de parenté et de familiarité, mais plutôt d’une conduite qui pourrait être évitée grâce à l’observation de règles de base d’équité procédurale.

[74]           La juge Bédard a exposé clairement ses préoccupations sur la pratique du tribunal d’appel dans l’affaire Felix no 1, aux paragraphes 46 à 49 :

[46]      À l’audience, l’avocat du demandeur a fait état de préoccupations tenant au rôle que les membres du tribunal d’appel avaient joué dans le processus électoral. Il a notamment signalé que ceux‑ci étaient présents dans les bureaux de scrutin et ont été témoins de faits sur lesquels ils se sont prononcés par la suite. La Cour juge elle aussi ces faits préoccupants.

[47]      La défenderesse a reconnu que les membres du tribunal d’appel avaient pris part à différentes étapes du processus électoral. Il appert de la preuve, par exemple, qu’ils ont pris part à la décision concernant l’emplacement du bureau de scrutin anticipé à Saskatoon. La preuve indique aussi qu’ils étaient présents lorsque l’Ancienne/interprète Margaret Ermine a aidé des électeurs. Or l’emplacement du bureau de scrutin anticipé à Saskatoon et la question de l’aide fournie par l’Ancienne Margaret Ermine étaient en cause dans l’appel. Les membres du tribunal d’appel se sont placés dans une situation très délicate. L’on ne peut être juge, témoin et partie. Les membres du tribunal d’appel doivent se tenir à une distance prudente du processus électoral afin de rester neutres et de toujours montrer qu’ils font preuve de la neutralité qu’on attend d’eux.

[...]

[49]      Je suis également d’avis qu’il convient d’étudier la question de la participation des membres du tribunal d’appel au processus électoral afin de veiller à ce qu’ils ne prennent pas part à des décisions qui pourraient par la suite être contestées dans le cadre d’un appel.

[75]           Bien que les défendeurs soutiennent que le tribunal d’appel a tenu compte des conseils ou des directives de la juge Bédard, il est clair qu’il ne l’a pas fait et qu’il ne semblait pas comprendre que son rôle de participant et d’observateur le plaçait directement en situation de participer à des décisions qu’il serait appelé à trancher ultérieurement en appel. Ces situations ne peuvent être prévues et il serait judicieux de ne pas observer ou superviser les élections, ou encore de prévoir en quoi consiste le rôle et d’en respecter les limites sans usurper le rôle du DGÉ.

[76]           Je conviens avec les demandeurs que la question cruciale ne réside pas dans le rôle que joue la coutume dans la communauté, mais plutôt dans la nécessité de veiller à ce que la coutume se conforme à la justice naturelle et à l’équité procédurale. Il est bien établi en droit que la coutume ne peut ignorer ou outrepasser les principes de justice naturelle ou d’équité procédurale. Dans Sparvier, le juge Rothstein a fait observer ce qui suit au paragraphe 47 :

47        Bien que j’accepte l’importance d’un processus autonome pour l’élection des gouvernements de bandes, j’estime que des normes minimales de justice naturelle ou d’équité procédurale doivent être respectées. Je reconnais pleinement que les tribunaux doivent éviter de s’immiscer dans le mouvement politique des peuples autochtones en vue d’acquérir plus d’autonomie. Cependant, les membres des bandes sont des individus qui, à mon sens, ont le droit à ce que les tribunaux suivent une procédure équitable dans les instances qui les concernent. Dans la mesure où cette Cour a compétence, les principes de la justice naturelle et de l’équité procédurale doivent être appliqués.

[77]           En ce qui concerne la prétention des demandeurs selon laquelle l’appel de M. Felix a été écarté par une décision préliminaire en raison de l’inéligibilité de M. Felix, le dossier n’établit pas clairement que cela s’est produit. La brève décision n’établit pas clairement s’il s’agissait d’une décision préliminaire en bonne et due forme visant à rejeter l’appel en raison de l’insuffisance de la preuve ou s’il s’agissait plutôt d’une décision préalable sur la question, l’audience subséquente n’ayant été accordée que par courtoisie ou après coup, et non d’un appel en bonne et due forme. Compte tenu du fait que la décision est annulée, il n’est pas nécessaire de trancher cette question; il suffit de formuler la mise en garde selon laquelle la décision préliminaire doit être conforme aux critères énoncés dans la Loi électorale. Une décision préliminaire rejetant l’appel en raison de l’inéligibilité de l’appelant lorsque c’est la validité de cette inéligibilité qui est portée en appel ferait en sorte que l’appelant n’aurait aucune possibilité d’interjeter appel.

La décision du tribunal d’appel est-elle raisonnable?

[78]           Les demandeurs font généralement valoir que la Loi électorale devrait être respectée et que plusieurs irrégularités démontrent que le caractère sacré des urnes a été compromis et que les principes généraux essentiels à un processus démocratique n’ont pas été observés.

[79]           Les demandeurs font valoir que 325 voix ont été enregistrées en faveur de M. Felix et que l’annulation de ces voix par le DGÉ après le dénombrement, et non en conformité avec la procédure d’indication de l’annulation des voix, a privé 325 électeurs de leurs droits et M. Felix de son poste de chef. M. Felix était éligible au moment de l’assemblée de mise en candidature. La Loi ne prévoit pas la réouverture de questions traitées à l’assemblée de mise en candidature.

[80]           Les demandeurs font valoir que l’adjudication de dépens contre M. Felix n’a pas d’incidence sur son éligibilité comme candidat, car cette question a été tranchée le jour de sa mise en candidature. Les demandeurs font observer que M. Felix a été accepté comme candidat à la date de sa mise en candidature. La Loi électorale prévoit que toute dette due à la Bande devrait être vérifiée dans les états financiers du vérificateur. Ces états financiers confirment que M. Felix ne devait pas d’argent à la Bande au moment pertinent. M. Felix fait valoir que même si de l’argent est dû ultérieurement à la Bande, le vote devrait se poursuivre. Il existe d’autres processus sur la conduite des élus pendant leur mandat.

[81]           Les demandeurs font valoir que le DGÉ et les FE ont excédé leur pouvoir et que le tribunal d’appel a commis une erreur en décidant que le DGÉ et les FE ont agi dans les limites de leur pouvoir et de leur compétence en vertu de la Loi électorale lorsqu’ils ont rejeté les voix enregistrées en faveur de M. Felix. Les demandeurs soutiennent que le Tribunal n’a pas tenu compte de la Loi électorale et du caractère sacré de l’urne; les bulletins de vote n’ont pas été rejetés individuellement par le DGÉ, mais plutôt collectivement, après la fermeture des bureaux de scrutin et après que le dénombrement des voix eut clairement favorisé M. Felix.

[82]           Les 325 bulletins de vote enregistrés étaient des bulletins légitimes. Le relevé exigé faisant le détail de chaque bulletin de vote rejeté n’a pas été produit. En date du 29 mars, les bulletins de vote avaient été collectivement inscrits comme ayant été rejetés.

[83]           Les demandeurs soulignent la décision rendue récemment par la Cour suprême du Canada dans Opitz c Wrzesnewskyj, 2012 CSC 55, [2012] 3 RCS 76 (Opitz) et font valoir que les fonctionnaires électoraux devraient favoriser l’inclusion, et non l’exclusion, des électeurs et des candidats.

[84]           Les défendeurs soutiennent que la Loi électorale et la Loi exécutive confèrent le pouvoir de déclarer l’inéligibilité même une fois que la mise en candidature est acceptée. Les défendeurs font valoir que le pouvoir de rendre un candidat inéligible incombe au DGÉ jusqu’à la date de l’assermentation. Par la suite, la Loi exécutive s’applique, et la violation d’un serment professionnel peut mener à une destitution. L’Executive Elders Advisory Council (Conseil des aînés) possède le pouvoir de sanctionner les représentants élus et de se pencher sur leur destitution pour violation de la Loi.

[85]           Les défendeurs font valoir que M. Felix a été à l’origine de cette situation, car c’est le litige qu’il a perdu qui a mis sa candidature en échec. Les défendeurs soutiennent en outre qu’il aurait pu s’acquitter de sa créance avant l’élection partielle, mais qu’il ne l’a pas fait.

[86]           Les défendeurs prétendent que le DGÉ et les FÉ ont pris la décision sur la base des renseignements dont ils disposaient le jour de l’élection, c’est-à-dire que M. Felix devait de l’argent à la Bande.

[87]           Les défendeurs soutiennent en outre que les membres de la communauté ayant pris part au processus de réforme électorale souhaitaient que l’éligibilité des candidats constitue une exigence permanente et mentionnent, par exemple, les dispositions sur les conflits d’intérêts et sur les manœuvres frauduleuses prévues au paragraphe 13(3) de la Loi exécutive. Les défendeurs font valoir qu’un candidat pourrait se rendre lui-même inéligible si un changement substantiel à la situation du candidat devait entraîner son inéligibilité à n’importe quelle étape du processus jusqu’à son assermentation, et que c’est ce qui s’est produit dans le cas de M. Felix.

Le tribunal d’appel doit réexaminer la question de savoir si le DGÉ a commis une erreur en rendant M. Felix inéligible

[88]           Tel qu’il a été indiqué précédemment, le tribunal d’appel a violé l’équité procédurale, et la décision est annulée sur cette base. Dans la plupart des cas, si une décision est annulée pour un tel motif, il ne sera pas nécessaire que la Cour évalue le caractère raisonnable de la décision. Dans la présente affaire, comme le même tribunal d’appel sera chargé de statuer à nouveau sur l’appel, d’autres directives au sujet des questions soulevées qui concernent le caractère raisonnable de la décision sont justifiées.

[89]           La Cour suprême du Canada, au paragraphe 47 de l’arrêt Dunsmuir, se demande « si la décision et sa justification possèdent les attributs de la raisonnabilité. » D’après la Cour, « [l]e caractère raisonnable tient principalement à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit. »

[90]           Il semble que personne ne s’est dit être l’auteur de la décision de rendre M. Felix inéligible et qu’il régnait beaucoup de confusion à savoir qui devrait trancher la question et comment procéder. Le DGÉ est chargé de déterminer l’éligibilité des candidats conformément à la Loi électorale. Tel qu’il a été conclu précédemment, le tribunal d’appel a joué un rôle dans cette décision et a ainsi outrepassé son autorité.

[91]           Certains semblent penser que la déclaration d’inéligibilité a été automatique en raison de la Loi électorale, mais tel n’est pas le cas. Il semble que personne n’a lu attentivement la Loi électorale ou la décision de la juge Snider avant d’afficher l’avis.

[92]           Le témoignage du DGÉ et des membres du tribunal d’appel démontre cette confusion.

[93]           Gary Turner, le DGÉ, a reconnu qu’il a affiché l’exposé des faits au bureau de scrutin, mais qu’il a lu la décision de la juge Snider ultérieurement. Il a également mentionné que c’est Jeff McLeod qui a décidé de rendre M. Felix inéligible. 

[94]           Quand M. Turner a été interrogé sur l’identité de la personne qui a effectivement rendu M. Felix inéligible, il a répondu aux questions 321 à 336 que M. McLeod a affirmé que la Bande a rendu M. Felix inéligible parce que c’est la Bande qui a adopté la Loi électorale et que la Loi électorale s’exprime au nom de la Bande. En réponse à d’autres questions, il a dit : [traduction] « C’est la Bande qui a rendu Henry inéligible, pas moi, pas vous, ni personne d’autre, la Bande. »

[95]           Lorsque M. Turner s’est fait demander à la question 336 qui l’avait informé en sa qualité de DGÉ, il a répondu : [traduction] « Ils ne me l’ont pas dit. Ils me l’ont montré. »

[96]           En réponse aux questions 338 à 340, M. Turner indique que d’après les renseignements qu’il a reçus de l’administrateur de la Bande, le tribunal d’appel lui a dit que M. Felix était inéligible.

[97]           Toutefois, à la question 112 du contre-interrogatoire de M. McLeod, celui-ci convient que l’argent dû par M. Felix ne reflète pas les dispositions de la Loi électorale qui exigent que la dette [traduction] « soit mise en preuve par les états financiers vérifiés les plus récents -- ».

[98]           Irene Ermine, qui est un autre membre du tribunal d’appel, a également été interrogée au sujet de la déclaration d’inéligibilité de M. Felix. En réponse à la question 79, elle a indiqué que M. Felix a été déclaré inéligible par l’« exposé des faits ». Elle semblait croire que l’ordonnance de la juge Snider avait indiqué que M. Felix était inéligible comme candidat parce qu’il devait de l’argent à la Bande. En réponse à d’autres questions, elle ne pouvait rien indiquer dans l’ordonnance de la juge Snider qui indiquait que M. Felix était inéligible.

[99]           En réponse à la question 365, elle a indiqué que le tribunal d’appel [traduction] « ne l’a pas rendu inéligible. C’est l’ordonnance – l’ordonnance de la Cour – l’exposé des faits que nous avons reçu qui l’a rendu inéligible. »

[100]       Malgré le fait que les membres du tribunal et le DGÉ estiment que c’est la Loi électorale qui a rendu M. Felix inéligible, il leur incombe de bien interpréter et appliquer les dispositions de la Loi électorale. Malgré l’avis de M. Turner, la décision lui est attribuée à titre de DGÉ, bien qu’il ait reçu l’avis du tribunal d’appel.

[101]       Je ne souscris pas à la position des défendeurs selon laquelle toutes les exigences rattachées à la candidature sont permanentes parce que c’était l’intention de la Bande. Si telle était l’intention, elle devrait se refléter clairement dans les lois. La Loi électorale fait état des conditions d’éligibilité, et, en ce qui concerne l’argent dû, mentionne expressément la preuve requise, à savoir les états financiers vérifiés. Les dispositions de la Loi exécutive dont les défendeurs font mention sont liées aux conflits et aux obligations éthiques à respecter en cours de mandat.

[102]       Une dette peut constituer une situation temporaire. Il serait impossible et peu pratique de destituer un représentant élu parce qu’il doit de l’argent à la bande un jour donné alors qu’il pourrait rembourser le lendemain ou le mois suivant, selon ce que serait la période de remboursement raisonnable.

[103]       Je ne suis pas non plus d’accord avec les défendeurs qui soutiennent que le Conseil des aînés pourrait régler le conflit. Le rôle du Conseil des aînés semble être fondé sur une demande spécifique du tribunal d’appel. Le Conseil n’a aucun rôle dans les appels ou les différends connexes visés par la Loi électorale.

[104]       Les défendeurs soutiennent que M. Felix n’a pas pris de dispositions pour acquitter les dépens ordonnés par la juge Snider. Toutefois, il n’existe pas de preuve à cet égard. En outre, l’ordonnance imposée par la juge Snider le 26 mars demandait aux deux parties de présenter des observations sur les dépens, d’abord dans les 30 jours, délai auquel se sont ajoutés 25 jours pour les répliques. M. Felix ignorait le montant précis qu’il devait payer jusqu’à ce que l’ordonnance soit définitive.

[105]        L’administrateur de la Bande a affiché très rapidement l’avis concernant la dette de M. Felix et son inéligibilité. Il semble que l’on n’ait pas fait beaucoup d’efforts pour bien comprendre l’ordonnance rendue par la juge Snider. Comme l’a mentionné M. Turner, l’avis a d’abord été affiché, et la décision a été rendue ultérieurement.

[106]       Fait à noter, les scrutins anticipés ont eu lieu avant que la décision de rendre M. Felix inéligible soit rendue, et plusieurs voix avaient vraisemblablement été enregistrées en faveur de M. Felix avant que l’avis soit affiché, et d’autres, vraisemblablement après l’affichage de l’avis.

[107]       Si la juge Snider avait rendu l’ordonnance trois jours plus tard, soit après que les résultats de l’élection aient déterminé que M. Felix était le candidat ayant obtenu le plus de voix, est-ce que la Loi électorale ou la Loi exécutive prévoirait sa destitution? Les dispositions de ces lois ne semblent pas prévoir cette situation. 

[108]       Les dispositions de la Loi exécutive mentionnées par les défendeurs au sujet de la destitution ne font pas référence à de l’argent dû à la Bande, mais plutôt à des questions comme la violation du serment, la corruption et les conflits d’intérêts, qui représentent effectivement des exigences permanentes.

[109]       En ce qui concerne la Loi électorale, elle prévoit expressément à l’article 2 :

[traduction]

« Candidat » Personne qui satisfait à tous les critères suivants :

[...]

e)         personne qui ne doit pas d’argent à la Bande comme en font foi les plus récents états financiers vérifiés (cette interdiction exclut les fonds avancés en cas d’urgence ou pour des études postsecondaires);  

[Je souligne.]

[110]       L’article 5.1 prévoit :

[traduction]

Le directeur général des élections veille à ce qu’il soit satisfait aux conditions suivantes :

[...]

b)         Seuls les membres de la Sturgeon Lake First Nation qui :

[...]

(vii)           ne doivent pas d’argent à la Bande;

[...]

peuvent être mis en candidature en vertu de l’article 2.5 de la présente loi.

[111]       Pour statuer à nouveau sur l’appel interjeté par M. Felix, le tribunal d’appel doit prendre en compte les dispositions applicables de la Loi électorale de 2009 et déterminer si la Loi électorale autorise à déclarer un candidat inéligible pour une dette qui survient après que la candidature de la personne est acceptée et lorsque les états financiers vérifiés ne font état d’aucune dette à la date pertinente. Le tribunal doit également déterminer si une période de paiement raisonnable serait accordée advenant de telles dettes. De même, le tribunal devrait établir ce qui se serait produit si la dette était survenue après l’élection.

[112]       Comme la décision du tribunal d’appel pourrait de nouveau être contestée au stade du contrôle judiciaire, le tribunal devrait avoir pour but d’établir le caractère raisonnable de la décision, c’est-à-dire « l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (Dunsmuir, paragraphe 47) et qu’elle soit justifiée, transparente et intelligible (Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, [2009] 1 RCS 339, au paragraphe 59).

Quelle est la réparation appropriée?

[113]       Les demandeurs ont initialement soutenu que la Cour pouvait interpréter de façon libérale les articles 3 et 4 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106, (les Règles) pour élaborer une réparation appropriée et substituer sa décision à celle du tribunal d’appel et du DGÉ. Ils invoquent également le résultat dégagé par le juge Zinn dans la décision Bellegarde c Poitras, 2009 CF 968, 352 FTR 290 (Bellegarde), qui a rétabli le chef élu, à l’appui de leur argument selon lequel la Cour pourrait substituer M. Felix comme chef.

[114]       Les demandeurs soutiennent que la demande des défendeurs de laisser la Bande examiner les questions à sa manière n’est manifestement pas envisageable. La Cour ne devrait pas renvoyer la décision au tribunal d’appel, car les mêmes membres réexamineraient encore une fois leur propre décision. Il y aurait alors plus qu’une crainte raisonnable de partialité.

[115]       Les demandeurs prétendent que la Cour devrait envisager une réparation comportant certaines directives. La seule réparation véritable ou efficace consiste, pour la Cour, à substituer sa décision à celle du tribunal d’appel et à conclure que les fonctionnaires électoraux n’avaient pas compétence pour rendre M. Felix inéligible et pour donner effet aux résultats de l’élection 2013 conformément à la Loi électorale. Le tribunal d’appel a pris la décision d’annuler la candidature de M. Felix ou y a participé, et cette décision a été acceptée par le DGÉ et le DAÉ, ou, subsidiairement, la décision a été prise par le DGÉ et le DAÉ et acceptée par le tribunal d’appel. Il s’agit là de la décision que M. Felix et le groupe de travail (GT) cherchaient à porter en appel. Le renvoi de cette décision devant le même tribunal d’appel retarderait la justice ou empêcherait que justice soit faite. Le tribunal d’appel possède une expérience limitée de l’interprétation de la Loi et il croit que la coutume l’emporte sur la Loi. En outre, le tribunal d’appel n’est pas enclin à suivre les directives de la Cour. Il ne devrait donc pas statuer à nouveau cet appel.

[116]       Les défendeurs soutiennent que la Cour ne devrait pas substituer sa décision à celle du tribunal d’appel et soulignent que l’autonomie gouvernementale des Autochtones doit être significative et respectée. Le choix d’un chef est un droit inhérent et il appartient aux électeurs qui font partie de la Bande de le déterminer. Les défendeurs prétendent en outre que la Cour ne devrait pas usurper le rôle du tribunal d’appel de décider si les résultats de l’élection devraient être annulés ou si une nouvelle élection est justifiée.

[117]       Les défendeurs soulignent que la Loi électorale ne comprend pas de dispositions permettant à un tribunal d’appel reconstitué de statuer à nouveau sur l’appel. Les trois mêmes membres siégeraient au tribunal d’appel jusqu’à la convocation de la prochaine élection.

[118]       Les défendeurs informent la Cour qu’aucune tentative n’a été faite pour régler ce différend dans la communauté, mais que des modifications à la Loi électorale sont à l’étude. Les défendeurs soutiennent que si les préoccupations des demandeurs sur l’application régulière de la loi et l’équité sont liées à la Loi électorale, ils devraient proposer des modifications à cette loi.

[119]       Les défendeurs reconnaissent que des erreurs ont été commises et que des directives importantes de la Cour permettraient un développement de manière culturellement appropriée. Les défendeurs soulignent par exemple que dans Jackson c Première Nation des Piikani, 2008 CF 130, 323 FTR 188, aux paragraphes 37 et 38, le juge Phelan a ordonné à la Bande d’apporter des modifications spécifiques à sa loi électorale dans un délai fixe.

Le tribunal d’appel doit statuer à nouveau sur l’appel

[120]       La décision est annulée, mais les réparations qui s’offrent à la Cour sont limitées.

[121]       Comme l’a mentionné la juge Bédard dans l’affaire Felix no 1, les articles 3 et 4 des Règles ne permettent pas à la Cour d’ordonner la réparation substantielle que les demandeurs cherchent à obtenir. Au paragraphe 56 :

[56]      La Cour n’a pas compétence pour annuler les résultats d’une élection et ordonner la tenue d’une nouvelle élection. Les règles 3 et 4 des Règles n’habilitent pas la Cour à élaborer une réparation substantielle qui n’est pas prévue par la Loi électorale. La règle 3 est une règle d’interprétation et la règle 4, souvent appelée « règle des lacunes », est de nature procédurale et ne permet pas à la Cour d’inventer un recours non prévu par la loi applicable. C’est au tribunal d’appel qu’il appartient de décider s’il convient d’annuler les résultats de l’élection et d’ordonner la tenue d’une nouvelle élection, et la Cour doit se garder d’usurper ce rôle.

[122]        Les demandeurs soutiennent également que la décision Bellegarde confère suffisamment d’autorité à la Cour pour que celle‑ci déclare que les voix enregistrées en faveur de M. Felix ne sont pas annulées et qu’elle le déclare chef élu. Je ne suis pas d’accord.

[123]       Dans la décision Bellegarde, la demanderesse a été destituée de son poste de chef à la suite d’une décision du Conseil des aînés. Le juge Zinn a conclu que le Conseil avait enfreint son devoir d’équité procédurale et a annulé cette décision. En annulant la destitution du chef, la situation qui existait avant la décision a été rétablie, c’est-à-dire que la demanderesse a été rétablie dans son poste de chef.

[124]       Dans cette décision, le juge Zinn a mentionné : « En raison du paragraphe 2 du présent jugement, la Cour déclare que Beverly Bellegarde est la chef de la Première nation de Peepeekisis et a droit de recevoir immédiatement la rémunération qui ne lui a pas été versée par suite de la décision du 10 juin 2009 visant à interrompre sa rémunération; » [...] Le paragraphe 2 a annulé la décision qui destituait Mme Bellegarde. Le résultat rétablissait la situation qui existait avant que la décision soit prise.

[125]       Dans la présente affaire, le tribunal d’appel a maintenu la décision du DGÉ (si c’est effectivement lui qui a pris la décision, car personne ne la revendique, mais la décision est attribuée au DGÉ). En annulant le rejet de l’appel par le tribunal d’appel, la décision du DGÉ de rendre M. Felix inéligible comme candidat et de rejeter toutes les voix enregistrées en sa faveur demeure.

[126]       Il subsiste la réparation consistant à renvoyer la décision au décideur afin qu’il rende une nouvelle décision. La Loi électorale ne prévoit pas qu’un autre tribunal d’appel reconstitué tranche de nouveau la question. Je souscris aux commentaires du juge Noël dans Bill c Thomas, 2007 CF 1152, 319 FTR 182 (angl.) (Thomas) selon lesquels il ne s’agit pas d’une bonne option. Malheureusement, il s’agit de la seule option.  

[127]       Dans la décision Thomas, aux paragraphes 32 à 34, le juge Noël a commenté le fait que la Loi électorale ne prévoyait pas que le tribunal d’appel soit reconstitué pour statuer à nouveau sur une décision lorsque la Cour permettait le contrôle judiciaire. Il a ensuite demandé à la Bande de modifier sa Loi afin qu’elle prévoie des procédures claires et équitables :

[32]      J’ajouterais également qu’étant donné que la Cour a conclu à une apparence de partialité, il est impossible de renvoyer l’affaire au comité d’appel, tel qu’il était constitué après l’élection de mars 2007. Que peut faire la Cour dans une telle situation?

[33]      À situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles. Pour mettre un terme à ce cercle vicieux et donner effet à la volonté démocratique des membres de la bande, la Cour accueille donc l’appel. La Cour mentionne, à titre de remarque incidente, qu’elle estime, après mûre réflexion, que les demandeurs devraient prendre tous les moyens possibles pour corriger la situation actuelle. Le conseil de la Bande du lac Pélican, sous la direction des demandeurs, le chef Peter Bill et les conseillers Romeo Thomas, Frederick Whitehead, David Thomas, Gilbert Chamakese, Sidney Bill et Jimmy Bill, élus pour un mandat de trois ans le 9 mars 2007, sont invités à redonner à la population le contrôle du processus électoral, conformément à la coutume de la bande, et le pouvoir de décider comment la bande doit être gouvernée, conformément aux modifications qui seront réputées être dans l’intérêt de la bande et de ses membres.

[34]      La Cour veut ainsi encourager le conseil de la bande à penser à l’intérêt de ses membres dans les six (6) mois des présents motifs et, à l’aide de la procédure de modification prévue à l’article 16 de l’Election Act, à mettre en place des mécanismes clairs, équitables et justes qui respectent la volonté démocratique des membres de la bande, lui donnent effet et mettent un point final à cette série interminable de poursuites judiciaires.

[128]       Compte tenu du fait que le même tribunal d’appel doit statuer sur l’appel de la décision à laquelle il a pris part, il sera essentiel que le tribunal d’appel respecte son devoir d’équité procédurale, demande des observations aux avocats des parties sur l’interprétation appropriée de la Loi électorale, en particulier en ce qui concerne l’éligibilité des candidats, le rôle du DGÉ et le rôle du tribunal d’appel, et s’efforce d’aborder l’appel avec un esprit ouvert afin d’éviter la crainte inhérente de partialité.

[129]       En ce qui concerne la suggestion des défendeurs selon laquelle M. Felix devrait prendre part au processus de modification de la Loi électorale, précisons que toute modification apportée à la Loi, aussi nécessaire puisse‑t‑elle être, ne serait que prospective et ne réglerait pas les erreurs de l’élection de 2013.

[130]       Ceci étant dit, j’inciterais la Bande à promulguer des modifications à la Loi dès que possible, et avant la prochaine élection, pour clarifier le rôle du tribunal d’appel comme observateur des élections et pour s’assurer qu’il n’usurpe pas le rôle du DGÉ. Tel qu’il a été indiqué précédemment, le fait de s’en remettre à la coutume, même si elle est codifiée, ne peut prévaloir sur les exigences de base de l’équité procédurale. Plus particulièrement, si cette coutume est codifiée, la Loi devrait également prévoir que le tribunal d’appel évite de prendre part à des activités ou à des décisions qu’il sera appelé à examiner ultérieurement à titre de tribunal d’appel. Comme il a été mentionné précédemment, il est impossible de prévoir de telles situations, ce qui fait que le rôle du tribunal devrait être très limité.

[131]       La Bande devrait envisager d’adopter des modifications avant la prochaine élection de manière à prévoir que les membres du tribunal d’appel puissent être changés advenant que des décisions soient renvoyées au tribunal pour nouvelle décision. Cette démarche est essentielle pour éviter un cycle continu d’allégations de partialité réelle ou apparente. On peut y arriver de plusieurs façons, par exemple en choisissant six membres du tribunal (deux formations de trois membres pour que la même formation ne statue pas à nouveau sur ses propres décisions). 

[132]       La Bande devrait également envisager des modifications afin de clarifier la façon dont les dettes dues à la Bande qui sont postérieures à la mise en candidature du candidat affectent l’éligibilité de celui-ci.

[133]       Compte tenu du manque de clarté concernant la décision préliminaire qui a pu refuser l’appel à M. Felix, le tribunal d’appel devrait s’assurer que ses décisions préliminaires reposent sur l’insuffisance de la preuve, tel qu’il est déclaré dans la Loi, et ne constituent pas des décisions préalables sur des questions qui nécessitent une audience complète.

[134]       Je suis conscient que la Bande a adopté sa loi électorale après de nombreuses années de consultation et le processus de modification se poursuit. Les directives données précédemment n’ont pas pour but d’usurper le rôle des gens de Sturgeon Lake dans la gestion de leurs élections et de leur gouvernement; elles visent plutôt à éviter la nécessité de retourner devant le tribunal.

[135]       La Cour a traité de questions similaires et je me suis penchée sur la jurisprudence, qui souligne que la Cour ne devrait pas élaborer trop rapidement des réparations pour la communauté. Je relève plus particulièrement les mots du juge Barnes dans Première nation de Sweetgrass c Gollan, 2006 CF 778, 294 FTR 119, au paragraphe 53 :

53        La Cour a toutes les raisons de s’interposer le moins possible dans les affaires et les décisions de Sweetgrass en cherchant à mettre fin à l’impasse électorale qui existe aujourd’hui. Comme c’est le cas pour presque toute autre institution démocratique, les électeurs et les représentants élus de Sweetgrass sont tout à fait en mesure de gérer leurs affaires sans intervention extérieure et, sauf dans une mesure restreinte, le présent litige ne fait pas exception.

[Souligné dans l’original.]

[136]       Dans la présente affaire, je conclus que les gens de la Sturgeon Lake First Nation, en se fondant sur cette décision et sur les conseils de la juge Bédard dans l’affaire Felix no 1, sont eux aussi tout à fait en mesure de régler des appels en matière électorale.


JUGEMENT

LA COUR ORDONNE :

1.                           La demande de contrôle judiciaire est accueillie.

2.                           L’affaire est renvoyée au tribunal d’appel pour nouvelle décision, conformément aux instructions données.

3.                           Des dépens raisonnables pour la requête sont adjugés aux demandeurs. Les parties disposent de 15 jours pour présenter des observations concernant leurs dépens et chacune dispose de 15 jours additionnels pour présenter une réplique.

« Catherine M. Kane »

Juge

Traduction certifiée conforme

S. Tasset


Annexe A

Chronologie

         Octobre 2008-mai 2009 – La Sturgeon Lake First Nation prend part à un processus de consultation pour mettre à jour sa loi électorale coutumière initiale. Ce processus se traduit par la promulgation du Sturgeon Lake First Nations Election Act, 2009 en mai 2009.

         26 mars 2010 – M. Felix se présente comme candidat au poste de chef à la première élection tenue en vertu de la Loi électorale de 2009. Il se classe deuxième par trois voix.

         30 mars 2010 – Un dépouillement des voix a lieu et fait diminuer la marge de la défaite de M. Felix à deux voix.

         7 avril 2010 – M. Felix porte le résultat de l’élection en appel devant le Sturgeon Lake First Nation Appeal Tribunal (le tribunal d’appel).

         12 avril 2010 – Le tribunal d’appel se réunit et rend une décision préliminaire qui rejette l’appel de M. Felix.

         29 avril 2010 – M. Felix présente à la Cour fédérale une demande de contrôle judiciaire de la décision rendue par le tribunal d’appel.

         16 octobre 2011 – Dans l’affaire Felix no 1, la juge Bédard annule la décision du tribunal d’appel et ordonne que le processus soit relancé au stade de l’appel et soit mené conformément à la Loi électorale et en toute équité pour toutes les parties.

         1er novembre 2011 – Conformément au jugement de la juge Bédard, le tribunal d’appel est reconstitué et la nouvelle audience a lieu. Le tribunal d’appel procède à la remise d’une deuxième audience au 21 novembre 2011.

         9 novembre 2011 – La bande des défendeurs interjette appel de la décision de la juge Bédard devant la Cour d’appel fédérale. Le 19 décembre 2011, la Cour d’appel fédérale rejette une requête du défendeur de surseoir au jugement en attendant le prononcé de la décision en appel. L’appel est abandonné plus tard.

         21 novembre 2011 – L’audience reprend et des décisions préliminaires sont communiquées à M. Felix

         20 décembre 2011 – L’audience reprend pour une troisième journée. M. Felix mentionne au Comité d’appel qu’il craint que l’audience ne soit pas menée conformément à la décision de la juge Bédard de procéder en vertu de la Loi électorale et quitte l’audience avant de témoigner. Le tribunal d’appel rejette son appel.

         4 mai 2012 – M. Felix présente une requête d’ordonnance pour outrage au tribunal en vertu du paragraphe 467(3)(2) des Règles.

         Décembre 2012 – Il y a une réunion de la Bande pour choisir le chef et les directeurs adjoints des élections ainsi qu’un tribunal d’appel en vue de l’élection de 2013.

         Début 2013 – Les fonctionnaires électoraux se rencontrent pour fixer les dates des élections de 2013.

         6 mars 2013 – M. Felix et d’autres candidats présentent aux fonctionnaires électoraux des déclarations de leur intention de briguer le poste de chef.

         13 mars 2013 – La Cour fédérale instruit la requête d’ordonnance pour outrage au tribunal présentée par M. Felix en vertu du paragraphe 467(3)(2) des Règles.

         20 mars 2013 – L’assemblée de mise en candidature en vue des élections aux postes de chef et de conseillers a lieu au Sturgeon Lake Community Hall (la salle communautaire). Le chef des finances atteste à cette date que M. Felix ne doit pas d’argent à la Première Nation.

         25 et 26 mars 2013 – Tenue de scrutins anticipés.

         26 mars 2013 – La juge Snider rend des motifs d’ordonnance et une ordonnance rejetant la requête pour outrage au tribunal et condamne M. Felix aux dépens.

  • 27 mars 2013

-                      Le scrutin de la Sturgeon Lake First Nation pour l’élection du 27 mars 2013 a lieu.

-                      Les fonctionnaires électoraux diffusent et affichent un document non signé et non daté (appelé l’« exposé des faits ») au scrutin de la Sturgeon Lake First Nation. Ce document indique que M. Felix doit de l’argent à la Sturgeon Lake First Nation aux termes de l’ordonnance de la juge Snider et qu’il est par conséquent inéligible au poste de chef.

-                      Juste après la fermeture du scrutin de Sturgeon Lake, les fonctionnaires électoraux supervisent le dénombrement des voix pour le poste de chef. M. Felix reçoit 325 voix.

-                      Le directeur général des élections, Gary Turner, déclare que M. Felix est inéligible.

         29 mars 2013 – Les fonctionnaires électoraux produisent un rapport d’élection et y consignent le « rejet » des 325 voix enregistrées en faveur de M. Felix. Le rapport indique que M. Felix a été déclaré inéligible parce qu’il doit de l’argent à la Bande aux termes de l’ordonnance de la juge Snider en date du 26 mars 2013.

         6 avril 2013 – M. Felix interjette appel devant le tribunal d’appel.

         11 avril 2013 – Les membres du groupe de travail, Garry Daniels, Gertrude Felix, Garry Wichihin, Ramona Felix Cook et David Badger, introduisent des appels devant le tribunal d’appel.

         Le 12 avril 2013 (ou vers cette date) – Le tribunal d’appel rend une décision préliminaire qui rejette les appels, mais décide également de tenir une audience.

         29 et 30 avril 2013 – Le tribunal d’appel tient une audience.

         3 mai 2013 – M. Felix interjette appel devant la Cour d’appel fédérale à l’encontre de l’ordonnance prononcée parla juge Snider dans l’affaire Felix n2. Cet appel n’a pas encore été entendu.

         6 mai 2013 – Le tribunal d’appel rend sa décision et annule les appels des requérants.

         9 mai 2013 – Le groupe de travail reçoit un avis de la décision du tribunal d’appel.

  • 21 mai 2013 – M. Felix écrit à Duane Storey, de la Sturgeon Lake First Nation, pour demander une preuve de ses dettes. D’après son affidavit, il n’avait obtenu aucune réponse en date du 14 juin 2013.

Annexe B

Sturgeon Lake First Nation Election Act, 2009 (la Loi électorale)

Les dispositions pertinentes sont énoncées ci-après :

 

[traduction]

Article 2.5 – « Candidat » Personne qui satisfait à tous les critères suivants :

[...]

e)         personne qui ne doit pas d’argent à la Bande comme en font foi les plus récents états financiers vérifiés [cette interdiction exclut les fonds avancés en casd’urgence ou pour des études postsecondaires];

Article 5. 1      Le directeur général des élections veille à ce qu’il soit satisfait aux conditions suivantes :

[...]

b)         Seuls les membres de la Sturgeon Lake First Nation qui :

[...]

(vii)      ne doivent pas d’argent à la Bande;

peuvent être mis en candidature en vertu de l’article 2.5 de la présente loi.

Article 8.18     Il est interdit à quiconque le jour du scrutin :

a)         pendant que l’on est dans un bureau de scrutin, d’avoir sur soi ou

b)         d’afficher sur les lieux ou dans un rayon de cent cinquante mètres (150 m) d’un bureau de scrutin ou dans une fenêtre ou sur une porte d’un bureau de scrutin ou sur les murs ou toute partie de l’immeuble où se trouve un bureau de scrutin

de la documentation, un emblème, un insigne, un macaron, une étiquette, une bannière, une carte ou un dispositif qui pourrait être considéré comme une indication de soutien à un candidat en particulier.

Article 11- Un tribunal d’appel est nommé lors du déclenchement d’une élection.

[...]

11. 2    Aucun membre du tribunal d’appel ne peut participer à l’élection ou à l’élection partielle, que ce soit comme candidat, personne qui propose un candidat, personne qui seconde, ou électeur.

11.3     Le tribunal d’appel supervise et administre tous les appels relatifs à une élection ou élection partielle conformément à la Loi électorale. Il peut siéger de nouveau pour statuer sur toute question disciplinaire se posant au cours du mandat d’un élu conformément aux dispositions du Sturgeon Lake First Nation Executive Act, 2009.

11.4     Il incombe au tribunal d’appel d’attester le résultat de l’élection ou de l’élection partielle du conseil de la Première nation si un appel est formé après la tenue de l’une ou de l’autre.

Article 12 – La procédure d’appel est la suivante :

[...]

12.3     Dans les sept (7) jours suivant la réception de la plainte, le tribunal d’appel détermine s’il y a lieu d’entendre la plainte compte tenu de la suffisance de la preuve qui y est présentée.

[...]

12.5     Si le tribunal d’appel décide d’instruire l’appel, l’instruction a lieu dans les quatorze (14) jours suivant la réception de la plainte. Toutes les parties en bonne et due forme [appelant(s) et intimé(s)] reçoivent par courrier recommandé un préavis de la date, de l’heure et du lieu de l’audience et des motifs de l’appel.

12.6     À l’audience, l’appelant présente sa preuve. Les intimés en bonne et due forme ont le droit de soumettre une réponse et une défense complètes. L’appelant a alors la possibilité de présenter une contre-preuve. Les parties [appelantes et intimées] peuvent être représentées par un avocat ou par un conseiller à leurs propres frais. Le tribunal d’appel peut recourir à un avocat dont les honoraires sont payés par la Bande.

12.7     Le tribunal d’appel entend toute la preuve pertinente soumise par les appelants et (ou) les intimés.

12.8     Le tribunal d’appel prend l’une des décisions suivantes dans les sept (7) jours suivant l’instruction de l’appel :

a)         rejeter l’appel aux motifs que la preuve présentée n’indiquait pas une infraction à la Loi, qu’il n’y avait pas de preuve (ou des preuves insuffisantes) de manœuvres frauduleuses et (ou) que le candidat n’avait pas été déclaré inéligible et en informer la Bande et le plaignant;

b)         accueillir l’appel, mais permettre le maintien de l’élection, aux motifs que l’infraction ne pourrait être raisonnablement considérée comme ayant eu une incidence sur les résultats de l’élection;

c)         accueillir l’appel et déclencher une nouvelle élection [tous les résultats de l’élection sont suspects] ou une élection partielle [seuls certains résultats de l’élection sont suspects] dans les vingt et un (21) jours suivant la détermination de l’appel pour la totalité ou une partie des postes qui ont été contestés, en donnant des directives claires aux fonctionnaires électoraux de manière à ce que le motif de l’appel initial [erreur ou omission] soit corrigé.

Il n’y aura pas de mises en candidature nouvelles ou additionnelles outre celles qui figurent sur la liste pour l’élection ou l’élection partielle qui fait l’objet de l’appel; cependant, aucun candidat n’est tenu de laisser son nom figurer sur la liste dans le cadre de la nouvelle élection ou élection partielle.

12. 9    Si le tribunal d’appel reçoit un appel en vertu de l’article 12.1, il doit :

a)         dans les sept (7) jours suivant la réception de l’appel, transmettre une copie de l’avis d’appel avec les documents justificatifs à chacune des parties désignées à l’article 12.4;

b)         dès que possible, acheminer une copie de sa décision préliminaire par courrier recommandé à chacune des parties susmentionnées;

c)         informer chacune des parties susmentionnées, en personne ou par courrier régulier ou électronique et (ou) par télécopieur, de la date, de l’heure et du lieu de l’audience, le cas échéant, et des motifs de l’appel;

d)         informer chacune des parties susmentionnées par courrier recommandé de la décision du tribunal d’appel.

12. 10  La décision du tribunal d’appel est définitive.

[...]

Article 15        Les vacances surviennent dans les circonstances suivantes :

15.1     Les postes de chef et de conseiller deviennent immédiatement vacants lorsque la personne qui exerce ces fonctions :

[...]

g)         ne respecte pas le serment professionnel, le règlement administratif de la Bande ou toute autre loi de la Bande dûment promulguée, y compris la présente loi et la Loi exécutive;

[...]

(i)         est déclarée inéligible aux fonctions en vertu de la présente loi ou des modifications qui s’y appliquent. 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-927-13

 

INTITULÉ :

HENRY J. FELIX SR. ET AL c THE STURGEON LAKE FIRST NATION, (« LA BANDE ») ET AL

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

SASKATOON (SASKATCHEWAN)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 21 AOÛT 2014

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT :

LA JUGE KANE

 

DATE :

23 SEPTEMBRE 2014

 

COMPARUTIONS :

Ron Cherkewich

 

PoUr Le DEMANDEUR

(HENRY J. FELIX)

 

Josephine de Whytell

POUR LES DEMANDEURS

(LE « GROUPE DE TRAVAIL » DE LA STURGEON LAKE FIRST NATION ET AL)

 

Victoria Elliott-Erickson

 

POUR LES DÉFENDEURS

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Cherkewich Legal Services

Prince Albert (Saskatchewan)

 

POUR LE DEMANDEUR

(HENRY J. FELIX)

 

Semaganis Worme

Avocats

Saskatoon (Saskatchewan)

 

POUR LES DEMANDEURS

(LE « GROUPE DE TRAVAIL » DE THE STURGEON LAKE FIRST NATION ET AL)

 

Zatlyn Law Office

Prince Albert (Saskatchewan)

POUR LES DÉFENDEURS

 

 

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