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Date : 20140915


Dossier : T‑1736‑10

Référence : 2014 CF 876

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Toronto (Ontario), le 15 septembre 2014

En présence du juge responsable de la gestion de l’instance, Kevin R. Aalto

ENTRE :

APOTEX INC.

demanderesse

et

PFIZER CANADA INC., WARNER LAMBERT COMPANY LLC ET PFIZER INC.

défenderesses

ET ENTRE :

WARNER LAMBERT COMPANY, LLC

ET PFIZER INC.

demanderesses reconventionnelles

et

APOTEX INC.

défenderesse reconventionnelle

ORDONNANCE ET MOTIFS

Les meilleurs plans organisés des souris et des hommes tombent souvent à l’eau*

[1]               Et il en va ainsi** également pour les décisions en matière de gestion d’instance. La présente requête est un autre chapitre de l’interminable saga que constitue la demande d’Apotex Inc. (Apotex) en vue d’obtenir des dommages‑intérêts au titre de l’article 8 à l’égard du produit de marque Lipitor des défenderesses/demanderesses reconventionnelles (Pfizer), dont l’ingrédient pharmaceutique actif (IPA) est l’atorvastatine.

[2]               Dans la présente requête, Pfizer cherche à modifier à nouveau sa nouvelle défense et demande reconventionnelle modifiée (défense). Étant donné qu’aucune communication préalable n’a encore eu lieu, même si l’action a été engagée en 2010, il est presque évident que ces modifications seraient autorisées si elles sont bien fondées. Cependant, la requête est vigoureusement contestée parce qu’elle est présentée cinq mois après qu’une ordonnance de disjonction eut été rendue au sujet d’une question qui, eu égard aux faits uniques de la présente affaire, est nouvelle [voir Apotex Inc. c. Pfizer Canada Inc. et al, 2014 CF 159]. En termes simples, la question visée par la requête en disjonction est la suivante : « Quelle est la date de début en ce qui concerne la demande de dommages‑intérêts d’Apotex au titre de l’article 8? » (question de la date de début).

Les faits à l’origine du litige

[3]               Je résumerai les faits en disant que la question de la date de début se pose parce que le ministre de la Santé (le ministre) a délivré deux lettres de « suspension liée au brevet » à l’égard de différentes dates se rapportant à deux formulations différentes d’atorvastatine d’Apotex. Le résumé des faits qui suit est tiré des motifs de l’ordonnance de disjonction.

[4]               Pfizer est titulaire d’un certain nombre de brevets inscrits dans le registre des brevets relativement au médicament Lipitor, et notamment à diverses formes polymorphes de l’atorvastatine. Pfizer vend des médicaments génériques au Canada par l’entremise de sa division GenMed; elle a reçu un avis de conformité pour le GDatorvastatine le 15 novembre 2006.

[5]               Le 27 septembre 2006, Apotex a signifié deux avis d’allégation relativement aux brevets de Pfizer sur les formulations polymorphes. La présentation d’Apotex concernant son atorvastatine amorphe (premier produit d’Apotex) a donné lieu à une « suspension liée au brevet » par le ministre de la Santé le 15 mai 2007. Pfizer a délivré des avis de demande conformément au Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité) (le Règlement) en vue d’obtenir des ordonnances d’interdiction. Ces demandes ont finalement fait l’objet d’un désistement.

[6]               Le 19 février 2009, Apotex a remis à Santé Canada un avis d’allégation se rapportant à sa présentation d’un produit contenant du solvate atorvastatine propylène glycol (le deuxième produit d’Apotex) à l’égard des brevets de Pfizer sur la formulation polymorphe. Pfizer a répondu à cet avis en présentant des avis de demande en vertu du Règlement. La présentation d’Apotex touchant le deuxième produit d’Apotex a été suspendue, pour des motifs relatifs au brevet, par le ministre de la Santé le 22 février 2010.

[7]               Il semble qu’un des problèmes que l’inventeur cherchait à résoudre avec le deuxième produit d’Apotex était la baisse de stabilité associée aux formes de l’atorvastatine comme sa forme amorphe, soit le premier produit d’Apotex.

[8]               Apotex a obtenu un avis de conformité tant pour son premier produit que pour son deuxième le 19 mai 2010, et ne commercialise depuis au Canada que son deuxième produit. Lorsqu’elle a lancé son deuxième produit sur le marché, Apotex a publié un communiqué de presse le 19 mai 2010 pour expliquer que sa propre forme cristalline de l’atorvastatine avait en fait résolu les problèmes de stabilité associés aux autres formes de ce médicament. Apotex déclarait dans ce communiqué qu’elle avait [traduction] « consacré de nombreuses années et des millions de dollars à la mise au point de ce produit et aux litiges qui s’y rapportent ». Les demandes d’interdiction présentées par Pfizer en réponse aux avis d’allégation d’Apotex ont fait l’objet d’un désistement sur consentement le 26 mai 2010.

[9]               Un certain nombre de fabricants de médicaments génériques ont apparemment présenté des avis d’allégation à l’égard d’au moins l’un des brevets inscrits dans le registre des brevets relativement au Lipitor. Les 19 et 20 mai 2010, en plus des avis de conformité délivrés à Apotex, le ministre a délivré des avis de conformité à sept autres fabricants de médicaments génériques pour des médicaments génériques de l’atorvastatine. Six fabricants additionnels de médicaments ont reçu de tels avis pour leurs produits d’atorvastatine respectifs.

[10]           Dans la présente action, Apotex sollicite des dommages‑intérêts au titre de l’article 8 pour une période de trois ans débutant le 15 mai 2007 et se terminant le 19 mai 2010. Pfizer soutient que les dommages‑intérêts auxquels a droit Apotex au titre de l’article 8 se limitent à la période de trois mois débutant le 10 février 2010 et se terminant le 19 mai 2010. De l’avis de Pfizer, il ne peut y avoir de dommages‑intérêts au titre de l’article 8 pour une période plus longue parce que la période de trois ans concerne le premier produit d’Apotex, que celle‑ci n’a jamais commercialisé.

[11]           Pfizer a demandé que la question de la date de début soit examinée dans une instance distincte. Une ordonnance de disjonction a ainsi été rendue le 20 février 2014. Elle incluait pour l’essentiel les conditions que Pfizer avait demandées. Apotex n’a pas interjeté appel de cette ordonnance.

[12]           C’est dans ce contexte que Pfizer présente une autre requête à la Cour, cette fois‑ci pour modifier à peu près tous les paragraphes de sa nouvelle défense et demande reconventionnelle modifiée (modifications proposées) qui sont mentionnés dans l’ordonnance de disjonction. Afin de placer la question en litige en perspective, je reproduis ci‑dessous les extraits pertinents de l’ordonnance de disjonction :

1.             Dans la présente ordonnance :

a)                  « question de la date de début » S’entend de la date pertinente à partir de laquelle la période de responsabilité (le cas échéant) a débuté aux termes de l’alinéa 8(1)a) du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité), DORS/93‑133, dans sa version modifiée. Il est entendu que la résolution des enjeux soulevés aux paragraphes 17 à 23 de la déclaration modifiée du 30 mai 2011, aux paragraphes 10 à 17, 19 à 21 et 23 à 25 de la nouvelle défense et demande reconventionnelle modifiée du 25 avril 2012, et aux paragraphes 5 à 9 de la nouvelle réponse et défense reconventionnelle modifiée du 28 juillet 2011, procède de la même question.

b)                  « phase relative à la date de début » S’entend des communications préalables et de toutes les autres étapes menant au procès, y compris celui‑ci ou toute autre résolution de la question de la date de début, notamment tout appel.

c)                  « autres questions » S’entend de toutes les questions autres que celle de la date de début soulevées dans le cadre de la présente action.

2.             La question de la date de début doit être tranchée séparément et avant les autres.

3.             Dans la mesure où elle soulève les autres questions, la présente action sera suspendue en attendant la fin de la phase relative à la date de début; durant cette phase, aucune preuve documentaire ni autre communication préalable sur un objet concernant exclusivement les autres questions ne sera présentée.

4.             Les parties conféreront sur le calendrier à suivre pour résoudre la phase relative à la date de début. Si elles ne parviennent pas à s’entendre sur un calendrier, l’une d’elles peut présenter une requête à la Cour afin d’obtenir des instructions.

5.             Les autres questions seront tranchées séparément, et seulement au terme de la phase relative à la date de début.

[13]           À ce stade‑ci des procédures, les parties ont échangé des affidavits de documents concernant certaines questions en litige, mais les interrogatoires préalables n’ont pas encore débuté. Tant Apotex que Pfizer soutiennent que l’autre partie n’a pas produit les documents pertinents. Les interrogatoires préalables concernant la question de la date de début devraient débuter très bientôt.

[14]           Une période de quatre jours a été réservée à l’instruction de la question de la date de début, qui doit débuter le 22 juin 2015.  

[15]           Depuis que l’ordonnance de disjonction a été rendue, Pfizer a changé d’avocats, ce qui a donné lieu à un certain délai, parce que les nouveaux avocats ont dû prendre connaissance du dossier et des questions en litige. Ce changement a également donné lieu à la présente requête visant à obtenir l’autorisation de déposer les modifications proposées.

[16]           Pfizer demande aujourd’hui l’autorisation de modifier presque tous les paragraphes mentionnés dans la définition de la question de la date de début. Cela signifie que toute modification de ces paragraphes de la défense donnera lieu à une modification de l’ordonnance de disjonction. Pfizer a présenté et plaidé sa requête comme une requête visant à modifier un acte de procédure et non à modifier une ordonnance. Cependant, le résultat qu’entraînerait inévitablement le fait de permettre les modifications proposées ne saurait être ignoré, pas plus que les répercussions que ces modifications auraient sur la question de la date de début. Les modifications proposées sont jointes aux présents motifs à l’annexe A.

[17]           Le dilemme que créent ces modifications proposées tient au fait que, malgré ce que soutient Pfizer, elles élargissent la portée de points litigieux de la question de la date de début; elles ne faisaient pas partie du dossier initial lors de la requête en disjonction et n’ont pas été examinées dans le contexte de cette requête; de plus, si elles sont autorisées, l’examen de la question de la date de début sera plus long et plus complexe. Comme le souligne Apotex, le fait de séparer les modifications proposées de la question de la date de début ne constitue pas une solution. En conséquence, comme c’est le cas dans bien des instances, il faut tenter d’atteindre un équilibre afin d’accommoder les intérêts de toutes les parties aux fins de la présentation de leur cause.     

La thèse de Pfizer

[18]           Pfizer soutient que les modifications proposées [traduction] « ne modifient pas radicalement les arguments invoqués et n’exigent pas non plus que l’ordonnance de disjonction soit modifiée » [paragraphe 34, pas de caractères gras dans l’original, observations écrites de Pfizer]. Sur ce dernier point, elle a raison puisque l’ordonnance de disjonction renvoie simplement aux numéros de paragraphes et qu’aucune modification de ces paragraphes n’est nécessaire. Cependant, les modifications proposées se trouvent dans les numéros de paragraphes actuels et changer la défense équivaut à changer l’ordonnance de disjonction en élargissant la portée de celle‑ci afin de couvrir les nouvelles allégations. En ce qui concerne le premier point, malgré les arguments très sérieux des avocats de Pfizer, le fait d’affirmer que les modifications proposées ne modifient pas « radicalement » les arguments invoqués a pour effet de reconnaître implicitement que les modifications en question modifient, en réalité, les arguments.

[19]           Pfizer fait valoir que les modifications proposées appartiennent à trois grandes catégories : 1) les modifications relatives aux avis d’allégation; 2) les modifications relatives au choix et 3) les modifications de mise à jour. 

[20]           En ce qui concerne les modifications relatives aux avis d’allégation, Pfizer cherche à modifier différents paragraphes de la défense afin de soutenir que les avis d’allégation de 2006 d’Apotex ne produisent aucun effet juridique parce que les renseignements exigés par le Règlement ne s’y trouvaient pas. Il s’agit d’une allégation que Pfizer avait formulée dans ses requêtes visant à obtenir une ordonnance d’interdiction, mais qui n’a jamais été tranchée, parce que les requêtes en question ont fait l’objet d’un désistement. Pfizer affirme qu’Apotex était au courant de cette allégation, que cette dernière n’a rien de nouveau et que le fait de permettre les modifications en question ne crée aucun préjudice ou injustice pour Apotex. Selon Pfizer, il est essentiel que le juge chargé de présider l’audience relative à la question de la date de début ait un tableau complet de tous les points en litige, et cette modification fait partie du tableau. Cependant, l’effet juridique des avis d’allégation n’a pas été plaidé dans la requête en disjonction et n’a pas été examiné non plus dans ce contexte.

[21]           Les modifications relatives au choix soulèvent une question de droit ésotérique au sujet de la décision d’Apotex de commercialiser uniquement son deuxième produit. Selon Pfizer, en prenant cette décision, Apotex a perdu le droit de demander des dommages‑intérêts pour la période de trois ans. Les modifications en question portent également sur la décision d’Apotex de modifier la formulation et la substance pharmaceutique de ses produits, puis de lancer sur le marché uniquement son deuxième produit. Au soutien de son argument selon lequel les modifications relatives au choix ne touchent pas l’ordonnance de disjonction, Pfizer souligne que ces modifications constituent simplement des arguments juridiques et qu’elles ont pour effet de clarifier et de préciser ces points. Cependant, si la question en litige est déjà énoncée dans les actes de procédure actuels, pourquoi ces modifications sont‑elles nécessaires? 

[22]           Quant aux modifications de mise à jour, Pfizer fait valoir qu’elles traduisent l’importance de l’exactitude dans les actes de procédure. Les modifications de mise à jour visent simplement à corriger des renvois dans la défense de Pfizer et n’élargissent la portée de la question de la date de début. Ainsi, au paragraphe 13, qui concerne les avis d’allégation de 2009 d’Apotex, il est mentionné que celle‑ci a fait une « présentation abrégée de drogue » à l’égard de son deuxième produit, alors qu’il appert des documents du ministre qu’il s’agissait d’un « supplément à une présentation abrégée de drogue nouvelle ». De toutes les modifications proposées, ce groupe de modifications est celui qui se rapproche le plus des modifications techniques ou modifications de clarification.

[23]           En résumé, Pfizer soutient qu’aucun préjudice n’est causé à Apotex et que l’intérêt de la justice exige que ces modifications proposées, qui sont des modifications courantes, soient autorisées.

La thèse d’Apotex

[24]           Pour sa part, Apotex conteste vigoureusement la prétention de Pfizer selon laquelle les modifications proposées ne rallongeront pas l’examen de la question de la date de début ni n’élargiront la portée de celle‑ci. Apotex fait valoir que les modifications proposées [traduction] « sont réelles et importantes et créent un préjudice ». Selon Apotex, les modifications proposées ne sont ni des éclaircissements, ni des précisions ou des modifications techniques, mais constituent de nouveaux éléments importants qui modifient en profondeur la portée de la question de la date de début à son détriment. La principale raison qu’Apotex invoque pour contester les modifications proposées réside dans le préjudice qu’elle subira en ce qui concerne l’instruction de la question de la date de début.

[25]           Apotex soutient que les modifications proposées sont indésirables, parce qu’elles (i) visent à modifier la question de la date de début et à en élargir la portée; (ii) constituent un « changement radical » de la thèse de Pfizer; (iii) ne sont pas pertinentes ou ne révèlent aucune cause d’action valable; (iv) auraient dû être soulevées plus tôt.

[26]           Eu égard au résultat de la présente requête, il n’est pas nécessaire d’examiner en détail les prétentions d’Apotex sur chacune des modifications proposées. Un bref examen suffira. Ainsi, Apotex soutient que la modification proposée au paragraphe 14 ne constitue pas un moyen de défense à l’égard de la demande de dommages‑intérêts au titre de l’article 8, parce qu’elle invite la Cour à réexaminer la question de savoir si les avis d’allégation de 2006 d’Apotex étaient appropriés ou non et s’ils produisaient un effet en vertu du Règlement. Selon Apotex, cette modification a pour effet de rouvrir les procédures visées par le Règlement et, si elle était autorisée, elle nécessiterait la présentation d’une preuve d’expert sur des questions de réglementation et d’autres éléments de preuve sur la portée des procédures ayant fait l’objet d’un désistement.

[27]           Dans la même veine, la modification proposée au paragraphe 13 met en cause la décision du ministre de délivrer des avis de conformité à Apotex et la question de savoir si les produits de celle‑ci sont différents non seulement parce qu’ils découlent de formulations différentes (atorvastatine amorphe par opposition à solvate atorvastatine propylène glycol), mais aussi parce qu’ils apportent un changement à la substance pharmaceutique. Cette allégation nécessitera la présentation d’éléments de preuve scientifiques supplémentaires concernant les produits d’Apotex et l’IPA de celle‑ci. 

[28]           Les arguments d’Apotex au sujet des autres parties des modifications proposées montrent que les questions soulevées aujourd’hui n’ont pas été plaidées dans le cadre de la requête en disjonction. La question du choix, celle du bien‑fondé des avis d’allégation et le rôle du ministre ainsi que l’exercice du pouvoir discrétionnaire de celui‑ci nécessiteront d’autres éléments de preuve et communications préalables. Apotex soutient qu’en raison du temps de préparation supplémentaire, il lui sera difficile d’être prête d’ici neuf mois et que les questions supplémentaires ne pourront être débattues au cours de la période de quatre jours réservée à l’instruction de la question de la date de début.

Analyse

[29]           Bien que les modifications proposées aient pour effet de modifier l’ordonnance de disjonction, compte tenu de la décision relative à la présente requête, l’analyse effectuée porte sur la modification d’actes de procédure. La question de savoir si des modifications devraient être autorisées relève du pouvoir discrétionnaire de la Cour.

[30]           De nombreuses décisions ont été rendues au sujet des dispositions de l’article 75 des Règles des Cours fédérales (les Règles) et des facteurs à prendre en compte lors de l’examen de requêtes en modification. L’article 75 des Règles énonce que la Cour peut, à tout moment, autoriser une partie à modifier un document « aux conditions qui permettent de protéger les droits de toutes les parties ». Les principes fondamentaux applicables aux modifications sont énoncés dans la jurisprudence [voir, par exemple, Canderel Ltd. c Canada, [1994] 1 CF 3, au paragraphe 3 (CAF); Merck & Co. c Apotex Inc. (3302), 30 CPR (4th) 40, et Bristol Myers Squibb Co. c Apotex Inc., 2011 CAF 34]. L’énoncé classique au sujet des modifications est formulé comme suit dans l’arrêt Canderel, à la page 10 :

La modification des actes de procédure doit être autorisée lorsqu’il s’agit de cerner les véritables questions en litige, à condition cependant que cette autorisation n’entraîne pour l’autre partie aucune injustice qui ne puisse être réparée par l’adjudication des dépens et qu’une telle modification soit dans l’intérêt de la justice.   

[31]           Dans des décisions subséquentes, les tribunaux ont souligné que le pouvoir discrétionnaire d’autoriser des modifications doit être exercé en fonction de deux facteurs : 1) le préjudice et 2) l’intérêt de la justice. La partie requérante devrait satisfaire aux deux critères. La Cour doit tenir compte de tous les facteurs pertinents lors de l’évaluation des modifications. Les facteurs à prendre en compte comprennent les éléments suivants, lorsqu’ils s’appliquent :

Les modifications en cause visent‑elles la rétractation d’aveux et auraient‑elles pour conséquence un changement « radical » de la nature des questions en litige?

Les modifications faciliteront‑elles l’examen par la Cour des véritables questions en litige?

Les modifications ont‑elles été examinées au cours d’une conférence préparatoire?

La thèse adoptée par une partie a‑t‑elle amené l’autre partie à suivre une ligne de conduite qu’il serait difficile de modifier?

Comment se sont comportées les parties, plus particulièrement la partie qui propose les modifications?

Les modifications proposées retarderaient‑elles l’instruction expéditive de l’affaire?

La requête en modification a‑t‑elle été présentée en temps opportun?

Existe‑t‑il un préjudice qui ne peut être indemnisé par des dépens ou autrement?

[voir, de façon générale, Merck & Co. c Apotex Inc., 2003 CAF 488, au paragraphe 30, et Bristol Myers Squibb Co. c Apotex Inc., 2011 CAF 34, aux paragraphes 4, 5, 28 et 33]

[32]           Aucun de ces facteurs ne s’applique en l’espèce, car il n’y a pas eu de conférence préparatoire et, malgré toutes les mesures prises jusqu’à maintenant, l’action se trouve encore à un stade relativement embryonnaire, puisqu’aucune communication préalable n’a encore eu lieu, bien que quatre ans se soient écoulés depuis son introduction.

[33]           Un autre facteur à prendre en compte est la question de savoir si les modifications proposées révèlent une cause d’action ou de défense valable. À cet égard, même si Apotex soutient que les modifications proposées ne constituent pas, pour la plupart, des moyens de défense reconnus à l’égard d’une demande d’indemnité au titre de l’article 8, la nouveauté d’une déclaration ou d’une défense, si elle est possible, ne devrait pas être déterminée à l’étape des actes de procédure. Les demandes de dommages‑intérêts fondées sur l’article 8 portent sur un aspect du droit qui évolue rapidement et il n’y a pas lieu de fermer arbitrairement la porte aux moyens de contestation pouvant être invoqués sans que le juge qui préside l’instruction ait été saisi d’un dossier complet sur la question. À moins qu’une déclaration ou une défense n’ait aucune chance de succès [voir Hunt c Carey Canada Inc., [1990] 2 RCS 959], sous réserve des considérations fondamentales liées à la justice et au préjudice, elle devrait être autorisée. À ce stade‑ci, je ne suis pas disposé à conclure que l’une ou l’autre des modifications proposées n’a aucune chance de succès.

[34]           Lorsque j’examine les facteurs applicables énoncés ci‑dessus, j’estime que, tout bien considéré, les modifications proposées devraient être autorisées. Les modifications touchent quelques‑unes des questions en litige, mais elles ne sont pas radicales au point de constituer des arguments nouveaux et différents. De plus, il s’agit de questions accessoires qui se posaient depuis un certain temps déjà, compte tenu des procédures antérieures ayant opposé les parties aux termes du Règlement. 

[35]           Les modifications proposées n’ont pas amené Apotex à suivre une ligne de conduite qui ne pourrait être modifiée, sauf en ce qui concerne l’examen de la question de la date de début, que j’examinerai plus loin. Apotex soutient que la présente requête n’a pas été déposée en temps opportun et reproche à Pfizer de l’avoir présentée après l’audition de la requête en disjonction. Pfizer était au courant de toutes les questions soulevées dans les modifications proposées bien avant que la requête en disjonction ne soit débattue. Cependant, Pfizer a changé d’avocats et il est possible de régler ces préoccupations d’Apotex au moyen d’une réparation, d’autant plus que les modifications proposées en cause touchent l’instruction expéditive de la question de la date de début.

[36]           À mon avis, il est possible de régler les préoccupations liées à l’intérêt de la justice et au préjudice au moyen d’une réparation.

Conclusion

[37]           Je souscris pour l’essentiel aux prétentions d’Apotex en ce qui a trait aux répercussions des modifications proposées sur l’ordonnance de disjonction. Sans solliciter directement une modification de l’ordonnance en question, Pfizer modifie indirectement celle‑ci. Toutes ces modifications proposées ont pour effet d’élargir sensiblement la portée de la question de la date de début et rendent presque impossible l’examen de cette question de la façon initialement envisagée lorsque Pfizer a sollicité et obtenu l’ordonnance de disjonction. 

[38]           Fait intéressant à souligner, dans ses observations relatives à la requête en disjonction, Pfizer a soutenu, notamment, qu’[traduction] « une décision rapide au sujet de la question de la date de début pourrait se traduire par des économies de temps et d’argent importantes pour les deux parties et pour la Cour » [paragraphe 90] et que le règlement de cette question [traduction] « aura vraisemblablement pour effet de réduire le nombre de différends interlocutoires entre les parties, ce qui diminuera le délai précédant le procès » [paragraphe 108].

[39]           Le dernier point sonne déjà faux. Le nombre de requêtes interlocutoires augmente. Pfizer a présenté une requête en production en même temps que la présente requête, et ce, malgré le fait que, lors de la requête en disjonction, elle a affirmé dans ses observations écrites que les parties avaient échangé des affidavits et des documents. Les documents demandés aujourd’hui à Apotex concernent principalement les modifications proposées. L’examen au fond de cette requête a été reporté jusqu’à l’issue de la présente requête.

[40]           Qui plus est, Apotex a fait savoir à l’audition de la présente requête qu’elle souhaite maintenant présenter sa propre requête en production, parce que Pfizer n’a pas respecté une date mentionnée dans une ordonnance fixant l’échéancier en ce qui concerne la production de données financières. Les lettres envoyées à la Cour après l’audition de la présente requête montrent indéniablement que les parties ne s’entendent toujours pas au sujet de la production et que la Cour devra intervenir. Non seulement toutes ces mesures interlocutoires ne permettent pas de respecter les dates fixées pour l’instruction de la question de la date de début, mais il se pourrait que d’autres mesures interlocutoires mettent en péril les dates prévues pour le procès lui‑même.

[41]           Compte tenu des délais et du débat en cours entre les parties au sujet de la production, je ne crois pas que la question de la date de début pourra être instruite au milieu de l’année 2015, eu égard aux modifications proposées, et surtout à la tendance des parties à porter devant la Cour la moindre question sur laquelle elles ne s’entendent pas. Tel qu’il est mentionné plus haut, la Cour a récemment reçu de chacune des parties des lettres dans lesquelles elles se reprochent l’une l’autre de ne pas avoir produit des documents pertinents.

[42]           Par ailleurs, à titre de juge chargé de la gestion de l’instance, je me fais dire, à l’occasion de presque toutes les conférences et de toutes les requêtes, qu’il s’agit de l’affaire la plus importante concernant l’article 8 et que des dommages‑intérêts de plus d’un milliard de dollars pourraient être en jeu. L’économie de coûts envisagée par l’article 3 des Règles n’est tout simplement pas un objectif réaliste en l’espèce. La présente affaire ne soulève aucune question extraordinaire qui toucherait en profondeur la société ou même les gros litiges pharmaceutiques de façon générale. Elle se ramène à une simple question d’argent et du nombre de zéros que comportera le montant des dommages‑intérêts à accorder à l’une ou l’autre de ces deux entités très expérimentées. La présente affaire sera tranchée en fonction de ses propres faits lorsque le procès débutera le 4 avril 2016.

[43]           En conséquence, les modifications proposées sont autorisées et l’ordonnance de disjonction concernant la question de la date de début est annulée. Les parties doivent être prêtes pour TOUTES les questions en litige lors du procès qui débutera le 4 avril 2016. Le juge de première instance a toujours le pouvoir discrétionnaire de déterminer, dans le cadre de la gestion du procès, les questions qui seront débattues et l’ordre dans lequel elles le seront. À cette fin, et eu égard à la tendance des parties à se quereller à propos de tout et de rien, je ne suis guère optimiste quant à la possibilité qu’elles établissent un échéancier raisonnable en temps opportun afin que l’affaire soit prête à être instruite. En conséquence, il est nécessaire d’imposer unilatéralement et arbitrairement des échéances et des restrictions quant au déroulement du litige afin de veiller à ce que le procès débute à la date fixée.

[44]            Dans l’ensemble, l’expectative de la Cour en ce qui concerne la question de la date de début a été exposée comme suit dans les motifs de l’ordonnance de disjonction :

[…] Cependant, il ne me paraît pas nécessaire que la séparation d’une question conduise inexorablement à la résolution de tout le litige; il suffit que la détermination d’une question permette, selon la prépondérance des probabilités, de raccourcir le procès, de circonscrire les communications préalables, de contenir la production et de réduire la preuve d’expert. Telle est l’expectative en l’espèce si la question de la date de début est réglée en premier lieu.

[2014 CF 159, au paragraphe 47]

[45]           Et il en va ainsi, ces plans si bien préparés sont complètement tombés à l’eau.


ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE :

1.                  Pfizer est autorisée à modifier sa nouvelle défense et demande reconventionnelle modifiée, en la forme prévue à l’annexe A ci‑jointe.

2.                  Pfizer doit délivrer sa deuxième nouvelle défense et demande reconventionnelle modifiée dans les dix jours suivant la date de la présente ordonnance.

3.                  Apotex doit délivrer sa réponse et défense modifiée à la demande reconventionnelle dans les vingt jours suivant la signification de la deuxième nouvelle défense et demande reconventionnelle modifiée.

4.                  L’ordonnance de disjonction datée du 20 février 2014 est annulée et les dates fixées pour instruction de la question de la date de début sont également annulées.

5.                  Le procès de la présente action débutera le 4 avril 2016 pour toutes les questions en litige, sous réserve du pouvoir discrétionnaire du juge qui présidera le procès.

6.                  Les parties communiqueront l’une avec l’autre afin de s’entendre sur un calendrier relatif aux communications préalables, lesquelles devront être terminées au plus tard le 31 mars 2015.

7.                  Tous les affidavits de documents et tous les documents à produire qui y sont mentionnés ainsi que tous les documents pertinents quant aux actes de procédure modifiés doivent être délivrés au plus tard le 31 octobre 2014. Plus précisément, Pfizer doit se conformer au paragraphe 1 de l’ordonnance de la Cour datée du 25 juillet 2014 et, à cette fin, produire les données financières concernant les ventes de son médicament, les dommages découlant de la contrefaçon de brevet, y compris les coûts et la taille du marché de l’atorvastatine, les projections, les données sur la mise en marché et tous autres documents similaires; par ailleurs, Apotex doit produire des documents concernant la question de la date de début, y compris la correspondance relative aux présentations réglementaires de ses produits ainsi que les documents se rapportant aux inscriptions aux formulaires et aux ristournes.

8.                  Aucune requête portant sur un refus ne pourra être présentée. Toutes les parties devront répondre aux questions pertinentes posées lors des interrogatoires préalables et, en cas de désaccord au sujet de la pertinence, le paragraphe 95(2) des Règles s’appliquera quant aux réponses à donner à ces questions.

9.                  Les interrogatoires préalables sont limités par les présentes à une période de huit jours pour Apotex et de huit jours pour Pfizer et auront lieu aux moments qui conviendront à la Cour ainsi qu’aux parties. Dans la mesure du possible, la Cour sera disponible pour trancher toute objection n’ayant pas fait l’objet d’une réponse conformément au paragraphe 95(2) des Règles. Si Apotex interroge des inventeurs, elle disposera d’une autre journée pour l’interrogatoire de chaque inventeur en plus de la période de huit jours susmentionnée.   

10.              Les parties devront remettre tous les rapports d’expert au plus tard le 18 septembre 2015.

11.              Tous les rapports d’expert en réponse devront être remis au plus tard le 30 novembre 2015.

12.              Une conférence préparatoire relative à la présente action aura lieu à la date qui conviendra à la Cour et aux parties au cours de la semaine du 25 janvier ou du 1er février 2016.

13.              La question des dépens, le cas échéant, de la présente requête sera débattue ultérieurement.

« Kevin R. Aalto »

Juge responsable de la gestion de l’instance

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Sandra de Azevedo, LL.B.

 


ANNEXE A

Modifications proposées à la nouvelle défense et demande reconventionnelle de Pfizer datée du 25 avril 2012 (paragraphes 10 à 17, 19 à 21 et 23 à 25)

Procédures antérieures ayant opposé les parties aux termes du Règlement

 

[traduction]

10.       Apotex a signifié pour la première fois un avis d’allégation daté du 18 novembre 2005 au sujet de l’atorvastatine amorphe le 21 novembre 2005. En réponse à cet avis d’allégation, Pfizer Canada Inc. a introduit une demande portant le numéro de dossier T‑16‑06.

11.       Le 2 janvier 2008, la demande déposée dans le dossier numéro T‑16‑06 a été rejetée.

12.       En septembre 2006, Apotex a signifié des avis d’allégation dans lesquels elle a allégué l’absence de contrefaçon de brevets additionnels autres que le brevet canadien 2,021,546 (les « brevets additionnels ») en septembre 2006 à l’égard, notamment, de formes cristallines d’atorvastatine (les « avis d’allégation de septembre 2006 »). Selon les Même s’il était mentionné dans les avis d’allégation de septembre 2006 qu’Apotex avait déposé une présentation de drogue abrégée (la « première présentation abrégée de drogue nouvelle d’Apotex relative à l’atorvastatine amorphe) au ministre de la Santé pour ses produits contenant de l’hémicalcium d’atorvastatine amorphe anhydre) (le « premier produit d’Apotex »), Apotex n’avait pas déposé de présentation abrégée de drogue nouvelle en réalité et n’a pas inclus l’attestation exigée dans ses documents. Les allégations d’absence de contrefaçon étaient fondées sur le fait que le premier produit d’Apotex était un produit amorphe et ne contenait aucune des formes cristallines revendiquées dans les brevets additionnels.

13.       En février 2009, Apotex a signifié des nouveaux avis d’allégation additionnels dans lesquels elle a allégué l’absence de contrefaçon des brevets additionnels (les « avis d’allégation de février 2009 »). Même s’il était mentionné dans les Les avis d’allégation de février 2009 qu’Apotex avait fait déposé une présentation de drogue nouvelle abrégée auprès du ministre de la Santé le 9 juillet 2008 (la « deuxième présentation de drogue nouvelle abrégée d’Aportex »), La deuxième présentation de drogue nouvelle abrégée d’Apotex concernait un nouveau, la présentation était en réalité un supplément à une présentation abrégée de drogue nouvelle (le « supplément à une présentation abrégée de drogue nouvelle relative à l’atorvastatine PGS ») à l’égard d’un changement touchant la substance et la formulation d’un produit pharmaceutique, soit le solvate atorvastatine propylène glycol (le « deuxième produit d’Apotex »). Les allégations d’absence de contrefaçon étaient fondées sur le fait que le deuxième produit d’Apotex ne contenait aucune des formes cristallines revendiquées dans les brevets additionnels. Apotex a choisi de présenter le deuxième produit d’Apotex au moyen d’un supplément à une présentation de drogue nouvelle abrégée (et non d’une nouvelle présentation abrégée de drogue nouvelle) et, en conséquence, elle a choisi de remplacer la formulation et la substance de son produit pharmaceutique et de remplacer la présentation de drogue nouvelle abrégée relative à l’atorvastatine amorphe par le supplément à la présentation abrégée de drogue nouvelle relative à l’atorvastatine PGS.

14.       Les procédures découlant des En ce qui concerne les avis d’allégation de septembre 2006, Pfizer Canada Inc. et Warner Lambert Company ont introduit deux demandes, soit les demandes nos T‑1995‑06 et T‑2145‑06 (qui ont plus tard été réunies) (ces procédures, ainsi que celles du dossier no T‑16‑06, sont appelées ci‑après les « procédures de 2006 »). Dans les procédures de 2006, Pfizer a fait valoir que les avis d’allégation de septembre 2006 ne constituaient pas des avis d’allégation en bonne et due forme et ne produisaient aucun effet juridique aux termes du Règlement. Les procédures de 2006 se rapportant aux avis d’allégation de septembre 2006 ont fait l’objet d’un désistement entre le 19 mai 2010 et le 10 juin 2010 et n’ont jamais été tranchées au fond.

15.       Les procédures découlant desEn ce qui concerne les avis d’allégation de février 2009, Pfizer Canada Inc. et Warner Lambert Company ont introduit deux demandes, soit les demandes nos T‑579‑09 et T‑580‑09 (les « procédures de 2009 »). Les procédures de 2009 ont fait l’objet d’un désistement le 20 mai 2010. Apotex a décidé de ne pas présenter de demande fondée sur l’article 8 à l’égard des procédures de 2009.

16.       Le 19 mai 2010, Apotex a reçu des avis de conformité à l’égard de ses premier et deuxième produits le 19 mai 2010. Les avis de conformité ont pour effet d’approuver des produits contenant deux ingrédients médicinaux différents correspondant aux deux produits d’Apotex prévoient une autorisation relative à une identification numérique uniquement à l’égard du deuxième produit d’Apotex. Apotex a présenté une seule monographie de produit tant à l’égard de la présentation de drogue nouvelle abrégée relative à l’atorvastatine amorphe qu’à l’égard du supplément à une présentation abrégée de drogue nouvelle relative à l’atorvastatine PGS, laquelle renvoyait uniquement au deuxième produit d’Apotex. Apotex ne possède pas de monographie de produit ni de série de numéros d’identification qui lui permettraient de vendre le premier produit d’Apotex. Apotex n’a jamais été en mesure de vendre son premier produit.

17.       Apotex a commencé à fabriquer, à utiliser, à mettre en vente et à vendre de l’Apo‑Atorvastatine vers le 19 mai 2010. Apotex ne vend pas et n’a jamais vendu le premier produit d’Apotex.

Demande d’indemnité d’Apotex

19.       Dans sa déclaration modifiée (« demande »), Apotex sollicite des dommages‑intérêts au titre de l’article 8 depuis le 15 mai 2007 jusqu’au 19 mai 2010. Apotex n’a invoqué aucun fait dans sa demande pour justifier cette la date de début qu’elle a proposée. Plus précisément, Apotex n’a pas :

a)         fourni de date, attestée par le ministre, à laquelle un avis de conformité relatif au premier ou au deuxième produit d’Apotex aurait été délivré (« la date pertinente »);

b)         précisé lequel du premier ou du deuxième produit d’Apotex pouvait apparemment être approuvé, comme elle l’allègue, à la date pertinente, à la date de début qu’elle a proposée;

c)         confirmé que le produit qui, selon elle, pouvait être approuvé à la date pertinente à la date de début qu’elle a proposée est le produit qu’elle commercialise actuellement au Canada sous le nom d’Apo‑Atorvastatine.

20.       Les défenderesses nient que le premier ou le deuxième produit d’Apotex pouvait être approuvé le 15 mai 2007 et somment Apotex de prouver clairement cette allégation.

21.       Les défenderesses ajoutent que le seul produit commercialisé sous le nom d’Apo‑Atorvastatine est le deuxième produit d’Apotex à l’égard duquel celle‑ci n’a déposé une présentation de drogue nouvelle abrégée  un supplément à une présentation abrégée de drogue nouvelle qu’en juillet 2008 et à l’égard duquel elle n’a signifié un des avis d’allégation que le 19 février 2009.

Délai relatif au Dépôt d’une présentation de drogue nouvelle abrégée d’un supplément à une présentation abrégée de drogue nouvelle et signification des avis d’allégation.

23.       Les défenderesses nient que le 15 mai 2007 représente une date pertinente, ou toute autre date, constitue une « date de début » appropriée aux fins de la demande d’Apotex, parce que étant donné que le produit actuellement mis en marché sous le nom d’Apo‑Atorvastatine est le deuxième produit d’Apotex, lequel ne pouvait être approuvé le 15 mai 2007 et ne faisait pas l’objet des procédures de 2006. Apotex ne peut demander de dommages‑intérêts à l’égard de préjudices qu’elle n’a pas subis depuis le 15 mai 2007, étant donné qu’elle n’a jamais signifié d’avis d’allégation appropriés ni n’a appliqué correctement le Règlement en ce qui concerne les procédures de 2006.

24.       Apotex a choisi de reporter le dépôt de la deuxième présentation de drogue nouvelle abrégée d’Apotex jusqu’en juillet 2008 et de reporter la signification des avis d’allégation à l’égard du deuxième De plus, il appert clairement de ses relations avec Santé Canada qu’Apotex a choisi de remplacer sa présentation de drogue nouvelle abrégée à l’égard de l’atorvastatine amorphe et le premier produit d’Apotex se rapportant aux procédures de 2006 par le supplément à la présentation abrégée de drogue nouvelle relative à l’atorvastatine PGS, d’utiliser une seule série de numéros d’identification de médicaments et de commercialiser le deuxième produit d’Apotex se rapportant aux procédures de 2009. Compte tenu de la doctrine de l’option, en droit ou en equity, Apotex ne peut demander d’indemnité à l’égard de la présentation de drogue nouvelle abrégée relative à l’atorvastatine amorphe,  au premier produit d’Apotex avant ou l’année suivante aux procédures de 2006. Les défenderesses affirment que ces choix empêchent Apotex de demander des dommages‑intérêts.

25.       Subsidiairement, si le deuxième produit d’Apotex pouvait être approuvé le 15 mai 2007, les défenderesses font valoir qu’Apotex a choisi de poursuivre les procédures de 2006 et de reporter la signification d’avis d’allégation à l’égard du deuxième produit d’Apotex jusqu’à près de deux ans plus tard, soit jusqu’au 19 février 2009. Les défenderesses ajoutent que le choix par Apotex de reporter le dépôt de sa présentation de drogue nouvelle abrégée et ou de son supplément à une présentation abrégée de drogue nouvelle ainsi que/ou la signification d’avis d’allégation à l’égard de son produit du deuxième produit d’Apotex lui ont fait perdre le droit de demander des dommages‑intérêts au cours de cette période.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DoSSIER :

T‑1736‑10

INTITULÉ :

APOTEX INC.

c. PFIZER CANADA INC., WARNER LAMBERT

COMPANY LLC ET PFIZER INC.

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 31 JUILLET 2014

MOTIFS DE L’ordonnance ET ordonnance :

LE PROTONOTAIRE AALTO

DATE DES MOTIFS :

LE 15 SeptembRe 2014

COMPARUTIONS :

Jerry Topolski

POUR LA demanderesse

APOTEX INC.

Orestes Pasparakis

Allyson Whyte Nowak

Jason C. Markwell

POUR LES DÉFENDERESSES

PFIZER CANADA INC., WARNER LAMBERT

COMPANY LLC ET PFIZER INC.

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Goodmans LLP

POUR LA demanderesse

APOTEX INC.

Norton Rose Fulbright Canada S.E.N.C.R.L.

POUR LES DÉFENDERESSES

PFIZER CANADA INC., WARNER LAMBERT

COMPANY LLC ET PFIZER INC.

 



*« To a Mouse », (1785), par Robert Burns, traduction française de la maxime originalement formulée en gaélique « The best‑laid schemes o’ mice an’ men / Gang aft a‑gley) » et rendue comme suit en anglais : The best‑laid plans of mice and men / Often go awry”.

**Avec mes excuses à Kurt Vonnegut et Billy Joel pour mon emprunt de leur « And so it goes »

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