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Date : 20140731


Dossier : IMM-2174-13

Référence : 2014 CF 769

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

 

Ottawa (Ontario), le 31 juillet 2014

En présence de monsieur le juge Russell

ENTRE :

AHILAN SELVARAJAH

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

INTRODUCTION

[1]               La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire,  présentée en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la Loi], visant la décision en date du 6 février 2013 [la décision] par laquelle la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié [la SPR ou la Commission] a refusé de reconnaître au demandeur la qualité de réfugié au sens de la Convention ou de personne à protéger aux termes des articles 96 et 97 de la Loi.

CONTEXTE

[2]               Le demandeur, qui est âgé de 37 ans, est un citoyen sri-lankais d’origine ethnique tamoule. Il est arrivé au Canada en 2010 à bord du MS Sun Sea. Il vient d’Ampara dans la Province orientale, où vivent encore, si l’on se fie à son formulaire de renseignements personnels [FRP], son épouse, ses deux filles, sa mère et quatre frères et sœurs. Il est titulaire d’un baccalauréat en beaux-arts de l’Université de Jaffna et, entre 2005 et novembre 2009, il a gagné sa vie comme fermier indépendant, enseignant et agent financier pour l’ONG CARE International.

[3]               Le demandeur prétend qu’en juillet 2008, un inconnu a commencé à l’appeler et à lui réclamer de l’argent pour des raisons mystérieuses. Il soutient qu’il a été enlevé à la fin de décembre 2009 et détenu jusqu’au 3 février 2010. L’un de ses ravisseurs lui a proposé de l’aider à s’enfuir en échange d’une moindre somme que celle qu’exigeaient ses acolytes. Après avoir versé 10 lakhs à cet individu, le demandeur a été relâché. Il a déclaré qu’il a appris ultérieurement que ses ravisseurs appartenaient au groupe Karuna – un groupuscule paramilitaire ayant des liens avec le gouvernement sri-lankais –, car ils ont appelé et sont allés voir son épouse après son départ du Sri Lanka.

[4]               Le demandeur a fui le Sri Lanka le 13 février 2010 avec l’aide du même ravisseur qui l’avait relâché. Il est arrivé en Thaïlande puis a embarqué sur le MS Sun Sea, et a débarqué au Canada le 13 août 2010.

[5]               Le demandeur prétend qu’il craint un groupe tamoul paramilitaire appelé le groupe Karuna parce qu’il leur a promis une grosse somme d’argent qu’il ne leur a jamais versée. Il affirme également qu’il s’expose aux représailles des autorités gouvernementales en cas de retour au Sri Lanka parce qu’il a voyagé à bord du MS Sun Sea, qui a été désigné comme le navire des Tigres de libération de l’Eelam tamoul (les TLET).

DÉCISION SOUS CONTRÔLE

[6]               La SPR a conclu que le demandeur n’était ni un réfugié au sens de la Convention ni une personne à protéger au sens de l’article 97 de la Loi. La Commission a déclaré que la crédibilité était l’enjeu déterminant.

[7]               En ce qui a trait à la crédibilité du demandeur, la Commission a estimé que les raisons qu’il a avancées pour expliquer qu’il se sentait pris pour cible étaient très générales et ne se rapportaient pas à lui personnellement. Le demandeur soutient qu’on le croyait très riche parce qu’il travaillait comme agent financier pour CARE International, et qu’il était soupçonné de détourner leurs fonds au profit des TLET. Le demandeur a précisé que des rumeurs circulaient à ce sujet, et que le gouvernement disait la même chose des gens qui travaillaient pour des ONG.

[8]               La SPR a estimé que le demandeur devait montrer qu’il n’avait pas réussi à obtenir de l’aide parce que l’État n’était pas en mesure de le protéger. Elle a d’ailleurs noté qu’il travaillait pour une grande ONG internationale dont il n’avait pas sollicité l’assistance.

[9]               La SPR a fait observer que lorsque l’Agence des services frontaliers du Canada (l’ASFC) a contacté l’épouse du demandeur pour savoir quand elle l’avait vu pour la dernière fois, celle-ci a déclaré qu’il était resté à ses côtés tous les jours de janvier à mars 2010, ce qui contredisait l’enlèvement et la date de départ allégués par ce dernier. Lorsqu’on lui a demandé pourquoi son épouse n’avait pas précisé qu’il avait été enlevé, le demandeur a répondu qu’il lui avait donné pour instruction de ne rien dire de peur qu’il n’arrive quelque chose à elle ou aux enfants. Lorsque la SPR a voulu savoir pourquoi il était parti en laissant sa famille, le demandeur a déclaré que son épouse était enceinte à l’époque et que ses parents lui avaient dit de partir en premier. La SPR a estimé que ce comportement n’était pas celui d’une personne ayant une crainte subjective, et que si le demandeur avait vraiment peur, il n’aurait pas laissé sa famille seule dans ce pays. À cet égard, la SPR a prêté foi à la déclaration de l’épouse plutôt qu’à celle du demandeur et a conclu qu’il n’avait pas été enlevé, qu’un ancien ravisseur ne l’avait pas aidé à quitter le pays et qu’il était parti parce qu’il n’aimait pas le Sri Lanka.

[10]           De plus, eu égard aux contradictions entre les allégations du demandeur et les réponses que son épouse a fournies à l’ASFC, la Commission a conclu que, de façon générale, il n’était généralement pas crédible. Partant de là, elle a jugé que le profil du demandeur ne l’exposait pas à un grave danger.

[11]           Selon la SPR, le demandeur n’a jamais été arrêté, n’était pas recherché par la police, passait les postes de contrôle sans difficulté, ne s’était pas déclaré à Colombo parce qu’il n’avait pas eu besoin de le faire et avait quitté le pays sans incident. Lorsqu’on lui a demandé pourquoi le gouvernement se figurerait qu’il était à bord du navire MS Sun Sea, le demandeur a répondu que le Congrès tamoul, un parti politique tamoul, détenait les noms de tous les passagers du bateau et qu’il communiquerait ces renseignements au gouvernement.

[12]           La SPR n’a accordé aucun poids à la lettre dans laquelle l’épouse du demandeur déclarait qu’il était recherché par le service d’enquêtes criminelles (CID), estimant qu’il ne s’agissait pas d’un élément de preuve indépendant puisque son épouse ferait tout son possible pour l’aider.

[13]           La SPR a conclu que la crainte du demandeur se rapportait à la criminalité, à savoir la crainte d’être extorqué par des criminels tamouls connus sous le nom de groupe Karuna, ce qui ne constituait pas un lien avec un motif prévu par la Convention.

[14]           Quant à la menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités, la SPR a conclu, selon la prépondérance des probabilités, que le demandeur ne s’exposait pas à un risque différent de celui auquel les autres se heurtent en général au Sri Lanka, y compris les Tamouls. La SPR a indiqué que la crainte du demandeur concordait avec la méthode d’extorsion décrite dans les documents concernant le pays (citant la réponse aux demandes d’information (RDI) LKA103588.EF de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du 27 septembre 2010). La SPR a reconnu que le demandeur passait pour avoir gagné beaucoup d’argent, ou pour avoir de l’argent à sa disposition, parce qu’il avait travaillé pour une ONG internationale; elle a toutefois estimé qu’il était dans la même situation que d’autres employés d’ONG et, qu’à ce titre, il s’exposait aux mêmes risques auxquels se heurtent généralement les gens en affaires ou ayant de l’argent. Selon la SPR, toute personne qui présente une demande de protection doit non seulement démontrer la probabilité d’être personnellement exposée à un risque, mais aussi que ce danger ne concerne pas l’ensemble de ceux qui se trouvent dans le même pays ou qui en sont originaires. La SPR a conclu que le demandeur ne l’avait pas fait.

[15]           En ce qui concerne la demande d’asile présentée sur place, la Commission a noté que le demandeur prétendait qu’il ne pouvait pas retourner au Sri Lanka parce qu’il était un passager du MS Sun Sea. En raison de la couverture médiatique dont ce navire a fait l’objet et du fait que les autorités canadiennes l’ont désigné comme un navire des TLET, il soutenait qu’il risquait d’être persécuté parce qu’il serait perçu comme un partisan des TLET. La SPR a fait observer que, d’après les documents divulgués à l’audience, seules quatre personnes revenues au Sri Lanka avaient été arrêtées à leur arrivée, et qu’il s’agissait d’individus ayant des antécédents criminels et recherchés par la justice, contrairement au demandeur. De plus, le haut-commissariat de Grande-Bretagne, qui surveille les retours au pays, a remarqué que les personnes concernées réussissent à passer les contrôles de routine à l’aéroport et qu’ils ne sont pas maltraités. Selon la Commission, les documents relatifs au pays montraient que la situation au Sri Lanka s’améliorait et qu’un nombre croissant de personnes revenaient d’Inde ou d’ailleurs. Les documents indiquent aussi que cette tendance devrait s’accélérer et que le processus de rapatriement avait été amorcé dès octobre 2011 par le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR).

[16]           La SPR a noté que le Guide des procédures et critères à appliquer pour déterminer le statut de réfugié au regard de la Convention de 1951 et du Protocole de 1967 relatifs au statut des réfugiés du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (Guide de l’UNHCR) indiquait ce qui suit à propos de la définition d’un réfugié « sur place » :

95. Une personne devient réfugié « sur place » par suite d’événements qui surviennent dans son pays d’origine pendant son absence. Des diplomates et autres fonctionnaires en poste à l’étranger, des prisonniers de guerre, des étudiants, des travailleurs migrants et d’autres personnes ont demandé la reconnaissance de leur statut de réfugié alors qu’ils résidaient à l’étranger et le statut de réfugié leur a été reconnu.

96. Une personne peut devenir réfugié « sur place » de son propre fait, par exemple en raison des rapports qu’elle entretient avec des réfugiés déjà reconnus comme tels ou des opinions politiques qu’elle a exprimées dans le pays où elle réside. La question de savoir si de tels actes suffisent à établir la crainte fondée de persécution doit être résolue à la suite d’un examen approfondi des circonstances. En particulier, il y a lieu de vérifier si ces actes sont arrivés à la connaissance des autorités du pays d’origine et de quelle manière ils pourraient être jugés par elles.

[17]           Même si le demandeur allègue que c’est à cause de la couverture médiatique canadienne qu’il sera identifié comme un TLET au Sri Lanka, la SPR a estimé que cette question ne se posait pas au Sri Lanka, un pays toujours en paix qui consacre de grands efforts à sa reconstruction. La SPR a déclaré qu’elle devait déterminer si l’opinion médiatique canadienne concernant les passagers du MS Sun Sea serait portée à l’attention des autorités sri-lankaises.

[18]           La SPR a examiné les documents divulgués par le ministre, qui se rapportaient notamment au MS Sun Sea et au MS Ocean Lady. La Commission a décidé qu’elle ne tiendrait compte que des documents concernant le MS Sun Sea parce que le MS Ocean Lady est susceptible de soulever d’autres enjeux puisqu’il s’agit d’un navire différent. La Commission a tenu compte de la déclaration solennelle d’un sergent de la GRC quant au processus de traitement des demandes d’asile des passagers du MS Ocean Lady, estimant que les mêmes procédures se seraient appliquées aux passagers du MS Sun Sea.

[19]           La SPR a noté que le Royaume-Uni avait interrompu les expulsions sur le fondement de l’existence éventuelle d’éléments de preuve pouvant établir que des Tamouls déportés au Sri Lanka auraient été torturés, comme en font état les articles de presse fournis par le demandeur. La Commission a indiqué que ces articles étaient basés sur un rapport de Human Rights Watch du 29 mai 2012, qui « laisse entendre qu’il pourrait y avoir certains nouveaux éléments de preuve pertinents en ce qui concerne le risque de mauvais traitements », ce qui lui semblait contredire un document de l’UNHCR selon lequel la sécurité s’améliore au Sri Lanka et « le contexte opérationnel est passé de l’action humanitaire au redressement rapide et au développement ». Ce document mentionne également l’aide fournie aux rapatriés à divers stades de la réintégration et précise que l’UNHCR maintient des liens étroits avec les ministères gouvernementaux et la Force opérationnelle présidentielle chargée du rétablissement, du développement et de la sécurité dans la Province du Nord. La SPR a donné préséance à la preuve de l’UNHCR, estimant qu’elle « présent[ait] un plan de mesures de soutien avec le gouvernement du Sri Lanka, sur place et au Sri Lanka ».

[20]           La SPR a conclu que rien n’indiquait que le gouvernement sri-lankais s’intéresserait au demandeur, bien qu’il soit arrivé au Canada à bord du MS Sun Sea. Les documents divulgués par le ministre attestent que le gouvernement sri-lankais s’efforce d’établir la paix et la stabilité, que le pays est une « démocratie accomplie [qui] souhaite maintenir des traditions démocratiques », quoique la sécurité dans le pays continue d’être menacée par « de[s] méthodes indirectes », comme la capacité des TLET à faire entrer des armes en contrebande grâce à des fonds amassés à l’étranger, ou à faire sortir illégalement des personnes en contrepartie d’un gain financier. Les mêmes documents indiquent que les autorités du Sri Lanka ont pris le parti d’ignorer ce qu’elles qualifient de « propagande occidentale ». La SPR n’était pas convaincue que les autorités sri-lankaises s’intéresseraient à l’opinion médiatique canadienne concernant les passagers du MS Sun Sea, étant d’avis qu’elles n’y verraient que « de la propagande de l’Occident ».

[21]           La SPR a conclu que le gouvernement sri-lankais s’efforçait de reconstruire le pays. De plus, rien n’indiquait que le demandeur était considéré comme un sympathisant des TLET ou qu’il avait des liens avec cette organisation ou une autre. À ce titre, la Commission a estimé que son retour ne retiendrait pas l’intérêt des autorités sri-lankaises au-delà des interrogatoires de routine.

[22]           C’est sur la foi de ces considérations que la Commission a conclu que le demandeur n’était ni un réfugié au sens de la Convention ni une personne à protéger.

QUESTIONS EN LITIGE

[23]           Certaines des questions soulevées dans les observations écrites du demandeur ont été retirées à l’audience concernant la présente affaire. Les questions suivantes restent à être examinées par la Cour :

a.       Les conclusions de la SPR touchant la crédibilité étaient-elles déraisonnables?

b.      La SPR a-t-elle manqué d’examiner le risque que le demandeur soit soumis à la torture aux termes de l’alinéa 97(1)a) de la Loi alors que les circonstances l’imposaient?

NORME DE CONTRÔLE

[24]           Dans Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9 [Dunsmuir], la Cour suprême du Canada a indiqué qu’il n’était pas nécessaire de procéder dans chaque cas à une analyse de la norme de contrôle. Lorsque la norme qui s’applique à une question particulière que la Cour doit trancher est établie de manière satisfaisante par la jurisprudence, le tribunal de révision peut l’adopter. Il n’examinera les quatre facteurs de l’analyse liée à la norme de contrôle que si cet exercice s’avère infructueux ou si la jurisprudence semble désormais incompatible avec l’évolution récente du droit en matière de contrôle judiciaire : Agraira c Canada (Sécurité publique et protection civile), 2013 CSC 36, au paragraphe 48.

[25]           Il est bien établi qu’il faut faire preuve de déférence à l’égard des conclusions de la Commission en matière de crédibilité : voir Aguebor c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1993), 160 NR 315, [1993] ACF no 732 (CAF), au paragraphe 4; Zacarias c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 1155, au paragraphe 9. La question a. est donc susceptible de révision selon la norme de la raisonnabilité. La question b. intéresse l’appréciation de la preuve par la Commission et la question de savoir si une analyse fondée sur l’alinéa 97(1)a) était justifiée dans les circonstances. L’évaluation de la preuve par la Commission commande la retenue (voir Magid Sefeen c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 380, aux paragraphes 4 et 11; Garavito Olaya c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 913, aux paragraphes 48 et 68; Zrig c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CAF 178, au paragraphe 42, et la norme de la raisonnabilité s’applique donc également à la question b.

[26]           Lorsque que la Cour effectue le contrôle d’une décision selon la norme de la raisonnabilité, son analyse tient « à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit ». Voir l’arrêt Dunsmuir, précité, au paragraphe 47, ainsi que Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, au paragraphe 59. Autrement dit, la Cour ne doit intervenir que si la décision est déraisonnable en ce sens qu’elle n’appartient pas « aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit ».

DISPOSITIONS LÉGALES

[27]           Les dispositions suivantes de la Loi s’appliquent à la présente instance :

Définition de « réfugié »

Convention refugee

96. A qualité de réfugié au sens de la Convention — le réfugié — la personne qui, craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques :

96. A Convention refugee is a person who, by reason of a well-founded fear of persecution for reasons of race, religion, nationality, membership in a particular social group or political opinion,

a) soit se trouve hors de tout pays dont elle a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de chacun de ces pays;

(a) is outside each of their countries of nationality and is unable or, by reason of that fear, unwilling to avail themself of the protection of each of those countries; or

b) soit, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle, ne peut ni, du fait de cette crainte, ne veut y retourner.

(b) not having a country of nationality, is outside the country of their former habitual residence and is unable or, by reason of that fear, unwilling to return to that country.

Personne à protéger

Person in need of protection

97. (1) A qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et serait personnellement, par son renvoi vers tout pays dont elle a la nationalité ou, si elle n’a pas de nationalité, dans lequel elle avait sa résidence habituelle, exposée :

97. (1) A person in need of protection is a person in Canada whose removal to their country or countries of nationality or, if they do not have a country of nationality, their country of former habitual residence, would subject them personally

a) soit au risque, s’il y a des motifs sérieux de le croire, d’être soumise à la torture au sens de l’article premier de la Convention contre la torture;

(a) to a danger, believed on substantial grounds to exist, of torture within the meaning of Article 1 of the Convention Against Torture; or

b) soit à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités dans le cas suivant

(b) to a risk to their life or to a risk of cruel and unusual treatment or punishment if

(i) elle ne peut ou, de ce fait, ne veut se réclamer de la protection de ce pays,

(i) the person is unable or, because of that risk, unwilling to avail themself of the protection of that country,

(ii) elle y est exposée en tout lieu de ce pays alors que d’autres personnes originaires de ce pays ou qui s’y trouvent ne le sont généralement pas,

(ii) the risk would be faced by the person in every part of that country and is not faced generally by other individuals in or from that country,

(iii) la menace ou le risque ne résulte pas de sanctions légitimes — sauf celles infligées au mépris des normes internationales — et inhérents à celles-ci ou occasionnés par elles,

(iii) the risk is not inherent or incidental to lawful sanctions, unless imposed in disregard of accepted international standards, and

(iv) la menace ou le risque ne résulte pas de l’incapacité du pays de fournir des soins médicaux ou de santé adéquats.

(iv) the risk is not caused by the inability of that country to provide adequate health or medical care.

[…]

[…]

ARGUMENTS

Le demandeur

[28]           Comme nous l’avons déjà noté, le demandeur a retiré certains de ses arguments à l’audience concernant la présente affaire – plus précisément ceux qui figurent aux paragraphes 20 à 36 de son mémoire des arguments. Les questions suivantes restent soumises à l’examen de la Cour.

[29]           Le demandeur soutient que la conclusion de la Commission selon laquelle il aurait dû chercher à obtenir la protection des autorités sri-lankaises était déraisonnable, étant donné que sa demande d’asile reposait sur la crainte que lui inspiraient celles-ci et que le dossier contenait des éléments qui prouvent que ces autorités ou leurs associés pratiquent une torture systémique (dossier de demande, à la page 115). Il ajoute qu’il était aussi déraisonnable de la part de la Commission de conclure qu’il devait rechercher la protection de CARE International.

[30]           Le demandeur reconnaît qu’il était raisonnable que la Commission rejette son témoignage suivant lequel il avait été enlevé, compte tenu des réponses fournies par son épouse à l’ASFC. Cependant, la SPR a également rejeté la preuve dont faisait état la lettre dans laquelle cette dernière expliquait que le Service des enquêtes criminelles (le CID), s’était rendu à son domicile, qu’il était à sa recherche et l’accusait de défendre la cause des TLET. Le demandeur soutient que la SPR ne peut pas jouer sur deux tableaux : elle ne peut pas accepter le témoignage de son épouse lorsqu’il infirme le sien en ce qui intéresse le fondement de sa crainte, puis le rejeter lorsqu’il vient l’étayer. À cet égard, le demandeur affirme que les motifs de la Commission sont manifestement contradictoires.

[31]           Par ailleurs, affirme le demandeur, la SPR a commis une erreur de droit en n’accordant aucun poids à la lettre de son épouse simplement parce qu’il serait dans son intérêt d’aider son mari. Quoique la relation d’un témoin avec un demandeur d’asile puisse être pertinente pour décider du poids à accorder à son témoignage, elle ne peut constituer la seule raison de le rejeter ou de ne lui conférer que peu ou pas d’importance : R c Laboucan, [2010] 1 RCS 397, 2010 CSC 12, au paragraphe 11; Ugalde c Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2011 CF 458, aux paragraphes 25 à 29 [Ugalde].

[32]           Le demandeur soutient que sa crainte du groupe Karuna doit être analysée au regard de l’alinéa  97(1)a), qui concerne le risque d’être soumis à la torture au sens de l’article premier de la Convention contre la torture, et non de l’alinéa  97(1)b), car ce groupe est étroitement lié au gouvernement sri-lankais. La Cour l’a confirmé dans le cas d’un autre groupe paramilitaire étroitement lié au gouvernement sri-lankais, le Parti démocratique populaire de l’Eelam (EPDP) : Pathmanathan c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2013 CF 353, au paragraphe 25 [Pathmanathan]. Le demandeur affirme que le chef du groupe Karuna (alias le TMVP) siège au gouvernement en tant que sous-ministre du Rétablissement. D’après le Comité des Nations Unies contre la torture, les prisonniers dans les centres de détention paramilitaires au Sri Lanka sont torturés (dossier de demande, à la page 117). Le risque d’être soumis à la torture par des agents du gouvernement, ou une personne agissant à titre officiel ou avec l’assentiment d’un fonctionnaire gouvernemental, doit être évalué au titre de l’alinéa 97(1)a) de la Loi (Comité des Nations Unies contre la torture : Commentaire général numéro 2, paragraphes 15, 17 et 18). Quand bien même le demandeur serait torturé, maltraité ou faussement dénoncé aux autorités comme un partisan des TLET en vue d’une extorsion de fonds, il s’agit néanmoins de torture, et il ne peut être renvoyé et exposé à un tel risque.

[33]           Le demandeur fait remarquer que, contrairement à l’alinéa 97(1)b), le concept de risque généralisé n’entre pas dans l’analyse fondée sur l’alinéa 97(1)a), pas plus que celui de criminalité, puisque la torture est toujours criminelle. Il avance que la Commission a commis une grave erreur en n’appréciant pas la menace que représentait le groupe Karuna au titre de l’alinéa 97(1)a).

[34]           Le demandeur soutient que si la Cour est convaincue que des conclusions touchant la crédibilité sont erronées, ces erreurs sont importantes puisque les conclusions de cet ordre sont peu nombreuses, et la Cour doit donc renvoyer l’affaire en vue d’un réexamen : Mofrad c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 901, au paragraphe 11. L’affaire doit être renvoyée si la Cour « ne [peut] être certain[e] que la Commission, eut-elle correctement apprécié les faits, aurait nécessairement tiré la même conclusion » : Moagi c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1986), 69 NR 229, [1986] ACF no 326 (CAF); voir aussi Peng c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’immigration), [1993] ACF no 119, 19 Imm LR (2d) 220 (CA); Sitsabeshan c Canada (Secrétaire d’État), [1994] ACF no 973, aux paragraphes 13 et 14, 82 FTR 29 (1re inst); Abdullahi c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1996]  ACF no 31 (1re inst).

Le défendeur

[35]           Le défendeur fait valoir qu’il a été établi que le demandeur avait inventé un élément central de sa demande d’asile – à savoir qu’il avait été enlevé par le CID et retenu captif entre décembre 2009 et mars 2010 – sans soulever le moindre argument défendable à l’égard de cette conclusion. La Commission a estimé que cette allégation était essentielle au regard de la demande d’asile, puisque le demandeur a lui-même déclaré que cet incident l’avait amené à quitter le Sri Lanka; il n’a d’ailleurs pas contesté cette conclusion.

[36]           D’après le défendeur, lorsqu’elle évaluait la crédibilité du demandeur, la Commission a indiqué qu’il n’avait pas cherché à obtenir l’aide de CARE International. Cette crédibilité est minée par le fait qu’il ne semble avoir pris aucune mesure pour parer aux menaces répétées dont il est censé avoir fait l’objet, alors qu’il travaillait pour une organisation susceptible de lui venir en aide. Quoi qu’il en soit, suivant le défendeur, la décision de la Commission dans ce dossier ne reposait pas sur la protection de l’État, mais plutôt sur le manque de crédibilité.

[37]           Contrairement à ce que fait valoir le demandeur, le défendeur avance que la Commission n’était pas obligée d’admettre la lettre de son épouse comme un élément de preuve fiable établissant que le CID était à sa recherche, simplement parce qu’elle avait accepté son témoignage selon lequel que le demandeur avait vécu avec elle de janvier à mars 2010, alors qu’il prétendait être en captivité durant cette période. Le défendeur soutient qu’il s’agit là de deux éléments de preuve distincts dont chacun a été justement évalué par la Commission. En l’espèce, il lui était loisible de conclure que la lettre de l’épouse n’était pas fiable, puisqu’il s’agissait du seul élément produit donnant à penser que les autorités s’intéressaient au demandeur, et qu’il provenait d’une source qu’on ne pouvait pas considérer comme objective. La décision Ugalde citée par le demandeur indique d’ailleurs qu’il « est loisible au décideur de donner peu de poids à la preuve en raison de son caractère “intéressé” » : décision Ugalde, précitée, au paragraphe 25, citant Sokhi c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 140, au paragraphe 44; Hamid c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 220, au paragraphe 13; et Kahiga c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 1240, au paragraphe 12. La Commission a le droit d’accorder une valeur probante faible aux lettres écrites par des parties intéressées, et il faut faire preuve de déférence à l’égard de son évaluation de la preuve : Obeng c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 61, au paragraphe 31.

[38]           Le défendeur ajoute que la Commission a appliqué le bon critère en refusant la demande d’asile du demandeur en vertu de l’article 97 de la Loi. Même s’il prétendait craindre l’extorsion parce que son statut de rapatrié et d’ancien employé de CARE International le ferait passer pour quelqu’un de riche, de façon générale, d’autres gens au Sri Lanka s’exposent au même risque. Une demande de protection fondée sur l’article 97 peut être rejetée si le risque personnalisé auquel s’expose le demandeur concerne également un sous-groupe de la population suffisamment important, et qu’il peut raisonnablement être qualifié de répandu ou de courant dans ce pays. Ceci est particulièrement vrai lorsque le risque est lié à des activités ou des comportements criminels : Paz Guifarro c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 182, au paragraphe 32; Kuruparan c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 745, aux paragraphes 132 et 133 [Kuruparan]; Paramanatham c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 338, aux paragraphes 32 à 34 [Paramanatham]; Prophète c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 331, au paragraphe 23, conf par 2009 CAF 31; Acosta c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 213, au paragraphe 16; Lozano Navarro c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 768, aux paragraphes 34 et 35; Luna Pacheco c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 682, aux paragraphes 26 et 27. Par ailleurs, il était loisible à la Commission de conclure que le groupe Karuna était une organisation criminelle : Nageem c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 867, au paragraphe 18.

[39]           Le défendeur affirme que la Commission n’a pas commis d’erreur en n’évaluant pas séparément le risque que le demandeur soit soumis à la torture, parce que ce dernier a si peu démontré qu’il satisfaisait au critère requis – à savoir qu’il était plus probable que le contraire qu’il soit torturé ­– qu’une pareille analyse ne s’imposait pas. Même si la Commission aurait dû effectuer cette évaluation, vu les faits en présence, son omission de le faire n’entache pas sa décision de nullité : Li c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CAF 1, au paragraphe 38; voir également Bouaoui c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CF 1211, au paragraphe 42; Mbanga c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 738, au paragraphe 21.

Observations soumises en réponse par le demandeur

[40]           En ce qui concerne la lettre de son épouse qui a été écartée, le demandeur fait valoir qu’il est loisible à la Commission, eu égard à la jurisprudence précitée, d’écarter la preuve d’une partie intéressée s’il existe un motif de le faire, mais que le fait d’être une partie intéressée ne constitue pas en soi un tel motif.

[41]           Le demandeur soutient également que le défendeur a mal expliqué ce qu’il était tenu de prouver au titre de l’alinéa 97(1)a) : il n’avait pas à démontrer qu’il [traduction] « était plus probable que le contraire qu’il soit torturé à son retour au Sri Lanka », mais plutôt qu’il existait un risque de torture : Kedelashvili c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 465, au paragraphe 9.

ANALYSE

Crédibilité

[42]           Le demandeur se plaint de ce que, dans son analyse relative à la crédibilité, la Commission a conclu de manière déraisonnable qu’il [traduction] « devait chercher à obtenir la protection de CARE ».

[43]           En fait, la Commission a écrit ce qui :

Quand il a été demandé au demandeur d’asile s’il avait tout simplement pu partir pour retourner à Amapara étant donné que sa famille y habitait, il a répondu que ses parents se trouvaient seulement à quelques milles de lui. Lorsqu’il a été demandé au demandeur d’asile pourquoi il n’était pas allé à Colombo, il a répondu que c’était le même problème partout. Le demandeur d’asile doit démontrer qu’il a tenté d’obtenir de l’aide et que cela n’a pas été possible en raison de l’incapacité de l’État à le protéger. Le demandeur d’asile travaillait au sein d’une importante ONG internationale et ne leur a pas demandé d’aide, ce qu’il aurait raisonnablement pu faire étant donné son emploi et la gravité des allégations. Compte tenu du contexte, le demandeur d’asile n’a pas réussi à réfuter la présomption de protection de l’État.

[44]           La formulation est maladroite mais je pense que, eu égard au contexte, le sens de ce passage est clair. Cette conclusion ne concerne pas la protection de l’État. L’essentiel est que le demandeur prétendait vivre sous la menace mais n’a pas recherché la protection de l’État ou de l’ONG pour laquelle il travaillait.

[45]           Comme il s’agit d’une conclusion liée à la crédibilité, la Commission aurait dû étayer par certains éléments de preuve la présomption selon laquelle le demandeur aurait pu obtenir la protection de l’État ou de l’ONG. La Commission s’appuie d’ailleurs sur le fait qu’il n’a pas « réfut[é] la présomption de protection de l’État », mais sans effectuer d’analyse. En définitive, cela équivaut à une conclusion d’invraisemblance plutôt faible, suivant laquelle s’il avait été menacé, le demandeur aurait cherché à obtenir une certaine forme de protection de la part de l’État ou de l’ONG. La question de savoir si cette affirmation est fondée dépend de l’existence d’une telle protection, et les éléments de preuve étayant la conclusion de la Commission sont insuffisants. Toutefois, en dernière analyse, cette erreur ne suffit pas à infirmer l’élément essentiel de la conclusion de la Commission en matière de crédibilité :

[18]      Un agent de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) a téléphoné à l’épouse du demandeur d’asile et lui a demandé à quand remontait la dernière fois qu’elle avait été en compagnie de son époux. Selon les notes, elle a déclaré qu’elle était avec lui tous les jours de janvier à mars 2010, ce qui contredit directement les dates données par le demandeur d’asile liées à son enlèvement et à son départ du Sri Lanka.

[19]      Lorsque le demandeur d’asile a dû expliquer les déclarations de son épouse, il a déclaré qu’il lui avait dit de ne pas révéler ce qui lui était arrivé. Quand il lui a été demandé pourquoi il avait donné cette instruction, il a répondu que c’était parce qu’il craignait que son épouse et ses enfants aient des ennuis. Lorsqu’il a été demandé au demandeur d’asile pourquoi il avait laissé sa famille au Sri Lanka, il a répondu que ses parents lui avaient dit de quitter le pays en premier, et que son épouse était enceinte au moment où il avait quitté le pays. Le tribunal n’est pas satisfait de cette réponse et souligne que ce n’est pas le comportement d’une personne qui a une crainte subjective. Il avait une jeune famille et s’il avait vraiment été effrayé, il ne les aurait pas laissés seuls. Le tribunal tire une conclusion défavorable au sujet de sa réponse et trouve que les réponses de l’épouse du demandeur d’asile sont plus spontanées, et le tribunal les préfère, tandis que le demandeur d’asile a eu le temps de réfléchir aux réponses de son épouse. Si l’on accepte les déclarations de l’épouse du demandeur d’asile, ce dernier était à la maison, il n’a pas été victime d’un enlèvement et il a préféré quitter le Sri Lanka parce qu’il n’aimait pas le pays. Il en résulte d’importantes contradictions sur ce qui est arrivé au demandeur d’asile; le tribunal ne croit pas que le demandeur d’asile a été enlevé, pas plus qu’il ne croit que son ancien ravisseur l’a aidé à quitter le pays.

[46]           La contradiction directe entre le récit du demandeur concernant son enlèvement et les circonstances de son départ du Canada et ce que sa femme a rapporté aux agents de l’ASFC, à savoir qu’il se trouvait avec elle à toutes les dates pertinentes (contradiction dont la Commission a tiré des conclusions raisonnables, comme l’admet le demandeur), ne peut à mon sens être écartée à cause d’une conclusion d’invraisemblance faible concernant son défaut de rechercher une protection.

[47]           L’objection du demandeur selon laquelle la Commission a déraisonnablement rejeté la preuve concernant le risque futur dont fait l’état la lettre de son épouse, cependant, a plus de portée :

Le demandeur d’asile a fourni une lettre censée provenir de son épouse, dans laquelle il est écrit que des membres du CID sont à sa recherche. Le tribunal n’accorde aucun poids à cette lettre étant donné que l’épouse veut aider son époux par tous les moyens. Cette lettre ne fournit pas une preuve indépendante qu’il est vraiment recherché par le CID ou par tout autre groupe.

[Renvois omis.]

[48]           Le demandeur allègue que les motifs de la décision contiennent des erreurs en invoquant les arguments suivants :

a.       la SPR ne peut pas jouer sur deux tableaux. Elle ne peut pas accepter le témoignage de l’épouse concernant le lieu où il se trouvait, donné aux agents de l’ASFC, et rejeter la preuve qu’elle a fournie dans la lettre;

b.      la SPR ne peut pas rejeter la lettre au seul motif qu’elle a été rédigée par l’épouse du demandeur.

[49]           Si l’on examine le paragraphe 23 à la lumière de toute la décision, je ne pense pas que la Commission se soit montrée déraisonnable sur ce point.

[50]           À mon avis, le témoignage que l’épouse a fourni aux agents de l’ASFC lorsqu’elle ignorait ce que son mari voulait qu’elle dise n’a absolument rien à voir avec une preuve fournie (à la dernière minute) à la demande de son mari; ce dernier a d’ailleurs déclaré durant son témoignage qu’il lui avait donné comme instruction de mentir, ce qu’elle a fait (bien que ce mensonge n’ait pas été accepté par la Commission). Compte tenu de cette preuve, il n’y a rien de déraisonnable à ce que la Commission privilégie le témoignage que l’épouse a fourni sans avoir reçu d’instructions de son mari, et juge que la preuve qu’elle a présentée après coup n’était pas convaincante.

[51]           C’est aussi pourquoi, en l’espèce, la Commission n’a pas rejeté la preuve en question simplement parce qu’elle provenait d’une épouse (ce qui serait évidemment déraisonnable : voir la décision Ugalde, précitée, au paragraphe 26). La Commission a estimé que « l’épouse veut aider son époux par tous les moyens » et que la lettre « ne fournit pas une preuve indépendante qu’il est vraiment recherché par le CID ou par tout autre groupe » parce qu’elle a été fournie par une épouse sur les instructions de son mari, lequel, suivant son propre témoignage, lui avait demandé de mentir, ce qu’elle a fait. Je ne vois aucune erreur susceptible de contrôle dans la manière dont la Commission a traité la lettre de l’épouse.

[52]           J’estime que, dans leur ensemble, les conclusions touchant la crédibilité ne peuvent pas être considérées comme déraisonnables.

Alinéa 97(1)a)

[53]           Le demandeur affirme que le groupe Karuna est affilié au gouvernement et que la Commission n’a pas effectué d’évaluation sur le fondement de l’alinéa 97(1)a) comme il l’avait demandé.

[54]           Il s’appuie sur des décisions récentes rendues par la juge Strickland dans Rajadurai c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2013 CF 532, au paragraphe 73, et le juge Rennie dans l’affaire Pathmanathan, précitée, au paragraphe 25.

[55]           Comme le souligne le défendeur, le juge O’Keefe a fait cette importante remarque au sujet du groupe Karuna dans la décision Kuruparan, précitée :

[131]    Par ailleurs, la preuve montrait que certains membres de la faction Karuna extorquaient de l’argent aux civils, mais rien ne prouvait de façon convaincante que ces actes étaient commis avec la bénédiction des chefs des organisations. L’importance de cette observation est que, s’il était établi que la violence contre les Tamouls est encouragée par les chefs de l’organisation, on pourrait y voir un lien avec un motif prévu par la Convention. En revanche, si les membres de l’organisation commettent leurs méfaits à l’encontre de la population en général, alors il n’y a aucun lien du genre (voir la décision Prophète c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 331, [2008] ACF n° 415, au paragraphe 23; décision confirmée : 2009 CAF 31, [2009] ACF n° 143).

[56]           Le défendeur soutient que, quand bien même il aurait coché la case correspondant à l’alinéa 97(1)a) dans sa demande, le demandeur n’a pas produit d’éléments de preuve adéquats pour faire valoir cet argument, lequel, si l’on se fie au dossier, n’a pas été invoqué au début de l’audience comme une question en litige et n’a pas non plus été traité par l’avocat du demandeur dans les observations orales et écrites qu’il a présentées à la Commission.

[57]           Le défendeur souligne également que très peu d’éléments de preuve tendent à indiquer que le groupe Karuna représente un danger. L’argument principal du demandeur consistait à dire qu’il était une personne d’intérêt parce qu’il avait travaillé pour CARE International et qu’on le croyait riche. Il ne travaille plus pour cette organisation et rien n’indique qu’il le fera à son retour au Sri Lanka.

[58]           Le demandeur fait remarquer que la preuve relative au risque posé par le groupe Karuna était manifestement suffisante pour que la Commission examine le risque visé à l’alinéa 97(1)b) de la Loi; elle aurait donc dû se pencher également sur le risque visé à l’alinéa 97(1)a). Il cite notamment les paragraphes 31 à 33 de la décision :

[31]      La crainte du demandeur d’asile correspond à la méthode d’extorsion décrite ci-dessus. Le demandeur d’asile était perçu comme quelqu’un qui avait reçu une importante somme d’argent d’une ONG internationale, donc comme ayant une somme d’argent à extorquer, et comme quelqu’un de riche, étant donné qu’il avait de l’argent.

[32]      Nos tribunaux ont conclu que le fait qu’un demandeur d’asile soit personnellement exposé à un risque de préjudice ne signifie pas nécessairement que d’autres personnes du pays du demandeur d’asile n’y sont généralement pas exposées. La Cour a reconnu que deux éléments sont envisagés au sous-alinéa 97(1)b)(ii), et la personne qui demande l’asile doit démontrer non seulement la probabilité d’être personnellement exposée à un risque visé par cette disposition, mais également qu’il s’agit d’un risque auquel les autres personnes originaires de ce pays ou qui s’y trouvent ne sont généralement pas exposées. Dans une autre affaire, la Cour est allée jusqu’à dire que, malgré les quelques imprécisions de la langue, « d’autres personnes sont généralement exposées au même risque que le demandeur d’asile et que ce dernier ne satisfait donc pas aux exigences de la Loi ». En l’espèce, il est clairement souligné que le demandeur d’asile a travaillé au service de CARE, qu’il est donc perçu comme ayant accès à de l’argent, tout comme d’autres personnes travaillant pour l’ONG, mais qu’il ne connaît pas personnellement, ce qui fait qu’il est exposé à un risque auquel d’autres personnes en affaires ou ayant de l’argent sont généralement exposées. Il n’est pas différent des autres Tamouls qui retournent après un séjour dans d’autres pays.

[33]      Par conséquent, il n’y a pas de motif sérieux de conclure, selon la prépondérance des probabilités, que le demandeur d’asile sera exposé à une menace à sa vie autre que celle à laquelle sont généralement exposées les autres personnes au Sri Lanka, y compris les Tamouls. Le demandeur d’asile n’a pas qualité de personne à protéger puisqu’il ne serait pas personnellement exposé, par son renvoi, à une menace à sa vie, au risque de traitements ou peines cruels et inusités ou au risque d’être soumis à la torture.

(Renvois omis.)

[59]           Nous voyons ici que la Commission reconnaît que le demandeur est exposé à un risque en tant que personne qui passerait pour avoir de l’argent à sa disposition parce qu’il a travaillé pour CARE International, tout en l’excluant malgré tout, car il se heurte à « un risque auquel d’autres personnes en affaires ou ayant de l’argent sont généralement exposées ».

[60]           Nous ne savons pas si le demandeur s’expose au risque visé à l’alinéa 97(1)a). Pour commencer, cela dépend entièrement de la question de savoir si un futur agresseur de groupe Karuna agirait à titre de criminel indépendant ou à titre de représentant ou d’associé de l’État. Cependant, il est clair que la Commission a considéré le demandeur comme quelqu’un qui serait « perçu comme ayant accès à de l’argent » et donc « exposé à un risque auquel d’autres personnes en affaires ou ayant de l’argent sont généralement exposées ». Le demandeur allègue que le groupe Karuna a recours à la torture ainsi qu’à l’extorsion, et des éléments de preuve établissent que les criminels de ce groupe agissent parfois (si ce n’est tout le temps) à titre d’agents de l’État.

[61]           L’argument du défendeur reposant sur l’absence de preuve de danger ne peut l’emporter sur la conclusion même de la Commission, à savoir que le demandeur s’expose à un risque en tant que personne passant pour être riche. Compte tenu de cette conclusion, il était donc déraisonnable que la Commission n’ait pas envisagé l’éventuelle nécessité d’une protection au titre de l’alinéa 97(1)a).

[62]           Après analyse, je suis d’avis que cette question n’a pas été écartée; elle n’a pas non plus été explicitement mentionnée à l’audience comme une question à trancher. C’était cependant l’un des arguments invoqués par le demandeur dans son FRP en vue d’obtenir une protection.

[63]           Au début de l’audience, la commissaire de la SPR a fait mention du formulaire d’examen initial dans lequel sont énoncées les questions soulevées par la demande d’asile. (Ce formulaire est préparé par le personnel de la Commission et fourni aux parties et au commissaire de la SPR saisi de la demande.) Après avoir confirmé avec les parties que l’identité (initialement cochée dans ledit formulaire) ne posait plus problème, la Commission a entrepris de cerner les questions en jeu, et l’échange suivant a eu lieu avec l’avocat présent (DCT, à la page 1430) :

[traduction] 
COMMISSAIRE :
[…]

Donc, une autre question soulevée est celle de la possibilité de refuge intérieur…

La question suivante concerne la crédibilité. Et je crois comprendre que le ministre est présent, qu’il intervient relativement à ce motif. Il s’agit d’un élément très important de cette demande d’asile. Est-ce exact?

AVOCAT DU MINISTRE : Oui, c’est exact. Ainsi que l’intégrité des programmes (inaudible).

COMMISSAIRE : Oui, et l’intégrité des programmes, d’accord oui. Mmm.

Il faut aussi déterminer si vous répondez à la définition de réfugié au sens de la Convention. Donc plus précisément, qui est l’agent de persécution et peut-être que vous êtes la victime d’un crime. Donc, si vous n’avez pas de lien, si vous n’avez aucun rapport avec la définition de réfugié au sens de la Convention, je dois examiner la protection étendue qui concerne la menace à la vie et le risque de traitements ou peines cruels et inusités; à ce chapitre, nous cherchons d’habitude à déterminer si vous êtes la victime d’un crime, s’il s’agit d’un risque généralisé ou personnalisé.

La dernière question concerne le changement de situation, il n’y a pas de conflit, plus personne ne se bat et la guerre est finie depuis mai 2009. Donc il y a eu un changement de situation.

Il s’agit d’habitude des questions soulevées par les avocats dans leur – dans les observations que fournissent les deux parties. Mais vous savez que nous – cet aspect concerne aussi votre témoignage.

Donc, vous savez, je crois avoir couvert les questions.

AVOCAT : Je propose peut-être la demande sur place.

COMMISSAIRE : Sur place, quelle surprise.

[…]

C’est un sujet compliqué. Il s’agit d’une demande sur place puisqu’il est arrivé au Canada.

[…]

C’est – j’ai rajouté une petite case à cocher pour ça.

Il s’agit des questions…

[64]           Comme nous pouvons le voir, le commissaire n’a pas expressément évoqué la torture au titre de l’alinéa 97(1)a) comme question litigieuse (il n’a fait que mentionné la menace à la vie ou le risque de traitements ou peines cruels et inusités), et l’avocat du demandeur (qui n’était pas le même que celui qui le représente devant la Cour) ne l’a pas non plus expressément fait rajouter à la liste des questions à examiner (comme il l’a fait avec l’argument de la demande sur place).

[65]           Le formulaire d’examen initial peut être consulté aux pages 57 et 58 du DCT. Au haut de la page 58, figure la note normalisée suivante concernant les questions identifiées sur cette page :

Conformément aux Directives 7 (concernant la préparation et la tenue des audiences à la SPR), la SPR a cerné de façon préliminaire les questions qu’elle juge essentielles à la demande d’asile. Néanmoins, le demandeur d’asile devrait déposer des éléments de preuve, conformément aux Règles de la SPR, et être prêt à témoigner sur tous les aspects de la demande d’asile.

[66]           Sur ce formulaire, la case « MENACE À LA VIE OU TRAITEMENTS OU PEINES CRUELS ET INUSITÉS al. 97(1)b) » est cochée, mais pas la case « RISQUE DE TORTURE al. 97(1)a) ».

[67]           Cependant, dans son FRP (voir le dossier du demandeur, à la page 77), le demandeur a coché « Oui » en réponse à la question suivante : « Je demande l’asile à titre de personne à protéger parce que je suis exposé au risque d’être soumis à la torture au sens de l’article premier de la Convention contre la torture ».

[68]           La Commission disposait du FRP. À mon avis, cela revenait à lui demander d’examiner le risque de torture au titre de l’alinéa 97(1)a). Le fait que le personnel de la Commission ne l’ait pas identifié comme une question litigieuse sur le formulaire d’examen initial n’y change rien, puisque la SPR a seulement « défini de manière préliminaire les questions qu’elle juge essentielles au regard de la demande d’asile ». Le fait que l’avocat n’ait pas soulevé la torture comme une question à examiner peut cependant davantage prêter à conséquence. Le demandeur soutient que la Commission avait néanmoins l’obligation d’examiner l’alinéa 97(1)a) si une revendication s’y rapportant découlait des faits en présence. J’estime que ce point de vue doit l’emporter. Le juge Mosely a résumé le principe applicable dans Mmono c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 219, aux paragraphes 13 et 14 :

[13]      La Commission n’est pas tenue d’établir la preuve d’un demandeur ou d’examiner un motif qu’il n’a pas soulevé.

[14]      Toutefois, la Cour d’appel a obligé la Commission à examiner un motif qui ressort clairement de la preuve.

Comme notre Cour l’a exprimé récemment dans l’arrêt Louis c. M.E.I., l’on ne saurait reprocher à la Section du statut de ne pas s’être prononcée sur un motif qui n’avait pas été allégué et qui ne ressortait pas de façon perceptible de l’ensemble de la preuve faite. Accepter le contraire conduirait à un véritable jeu de cache-cache et de devinette et forcerait la Section du statut à se livrer à des enquêtes interminables pour éliminer des motifs qui ne s’appliquent pas de toute façon, que personne ne soulève et que la preuve ne fait ressortir en aucune manière, le tout sans compter les appels vains et inutiles qui ne manqueraient pas de s’ensuivre.

Guajardo-Espinoza c Ministre de l’Emploi et de l’Immigration (C.A.F.), 161 NR 132, 1993 CarswellNat 306, par. 5

[69]           Le demandeur et son avocat ont fait référence, le premier dans son témoignage (voir le DCT à la page 1433), le second dans ses observations (voir le DCT aux pages 1478, 1479 et 1485), au fait que le gouvernement collaborait avec des groupes paramilitaires armés et les « utilisait » pour commettre des violences et des enlèvements contre des Tamouls en s’épargnant la responsabilité de ces actes. L’avocat a également  renvoyé à la preuve selon laquelle les ONG internationales sont perçues par le gouvernement comme favorables aux TLET (DCT, à la page 1478), et le demandeur a déclaré durant son témoignage qu’il était soupçonné, en tant qu’employé d’une telle organisation ayant accès à ses fonds, de les détourner au profit des TLET (DCT, à la page 1434, et résumé du témoignage du demandeur par l’avocat du ministre à la page 1465). Il ressort du contexte que les observations de l’avocat du demandeur concernant la complicité des forces gouvernementales avec des groupes paramilitaires comme le groupe Karuna visaient la question de « l’agent de persécution » en lien avec l’article 96 (c.-à-d. que la persécution alléguée était fondée sur un motif prévu par la Convention et n’était pas seulement une violence ou un crime aléatoire), mais la même preuve pouvait aussi se rapporter à une allégation fondée sur l’alinéa 97(1)a).

[70]           L’argument du défendeur paraît être le suivant : le profil d’une personne susceptible d’être prise pour cible par des membres du groupe Karuna en vue d’une extorsion criminelle n’est pas le même que celui d’un individu que le même groupe pourrait torturer avec la complicité du gouvernement. Cela ressemble à la distinction établie par le juge O’Keefe dans la décision Kuruparan, précitée, entre, d’une part, la persécution fondée sur des motifs prévus par la Convention et dont le groupe Karuna est l’agent et, d’autre part, l’extorsion criminelle de civils par des membres individuels de ce groupe. Dans le contexte de l’alinéa 97(1)a), l’argument consisterait à dire que, comme il ne repose pas sur un objectif ou un mobile de l’auteur à l’égard duquel l’État aurait un intérêt, le risque est sans rapport avec la torture, même si l’auteur potentiel commet parfois des actes de torture sur ordre ou avec l’assentiment de l’État.

[71]           À mon avis, pareille analyse pouvait s’avérer raisonnable compte tenu des faits en présence. L’allégation du demandeur selon laquelle il était une cible du groupe Karuna, non seulement parce qu’il était censé avoir accès à de l’argent mais aussi parce qu’il passait pour un sympathisant des TLET, contredisait quelque peu son témoignage ultérieur voulant (du moins en ce qui concernait les autorités) qu’il n’ait jamais été soupçonné d’appartenir à cette organisation (DCT, à la page 1448) et que le CID ne se soit jamais intéressé à lui avant son départ du Sri Lanka (DCT à la page 1456). De plus, d’un point de vue prospectif, la raison pour laquelle le fait d’avoir travaillé pour CARE International il y a plusieurs années ferait aujourd’hui du demandeur une cible n’est pas claire (à moins qu’il ne soit véritablement passé pour un sympathisant des TLET). À ce titre, il s’agit d’un cas limite.

[72]           Cependant, ce type d’analyse semble être de celles que la Commission et non la Cour devrait effectuer. La Commission n’a pas établi de distinction comparable à celle que nous venons d’évoquer; je ne peux pas non plus affirmer, en prenant la décision dans son ensemble, que c’est ce que la Commission avait à l’esprit. Cette dernière n’a tout simplement pas examiné la demande d’asile au regard de l’alinéa 97(1)a).

[73]           Nous disposons d’une conclusion portant que le demandeur était menacé par le groupe Karuna et d’une preuve établissant que celle-ci se livre parfois à la torture (en particulier d’hommes tamouls) sur ordre ou avec l’assentiment des autorités sri-lankaises. Il reste à expliquer pourquoi cela ne représente pas un risque de torture auquel le demandeur se heurterait de manière réaliste s’il retournait au Sri Lanka.

[74]           À mon avis, le demandeur a donc établi que la Commission a commis une erreur susceptible de contrôle en n’examinant pas le risque visé à l’alinéa 97(1)a).

[75]           Les avocats des deux parties estiment qu’il n’y a aucune question à certifier, et la Cour est du même avis.


JUGEMENT

LA COUR STATUE que :

1.                          Il est fait droit à la demande. La décision est annulée et l’affaire est renvoyée à un autre commissaire aux fins de réexamen.

2.                          Il n’y a aucune question à certifier.

« James Russell »

Juge

 

Traduction certifiée conforme

Sandra de Azevedo, LL.B.

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-2174-13

 

INTITULÉ :

AHILAN SELVARAJAH c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 14 mai 2014

 

jugement et motifs :

le juge russell

 

DATE DES MOTIFS :

le 31 juillet 2014

 

COMPARUTIONS :

Micheal Crane

 

pour le défendeur

AHILAN SELVARAJAH

 

Catherine Vasilaros

 

pour le défendeur

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Micheal Crane

Avocat

Toronto (Ontario)

 

POUR LE demandeur

AHILAN SELVARAJAH

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE défendeur

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

 

 

 

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