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Date : 20140718


Dossier : IMM-5685-13

Référence : 2014 CF 719

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario) 18 juillet 2014

En présence de monsieur le juge Annis

ENTRE :

GORAN DIMITRIJEVIC

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.                   La nature de l’affaire

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire présentée en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la LIPR), à l’encontre de la décision rendue le 6 août 2013 par la Section de la protection des réfugiés (la SPR) de la Commission de l’immigration et du statut du réfugié (la Commission). Le membre de la Commission (le commissaire) a jugé que le demandeur, Goran Dimitrijevic, n’était pas un réfugié au sens de la Convention ou une personne à protéger en vertu des articles 96 et 97 de la LIPR.

[2]               Pour les motifs qui suivent, la Cour conclut que son intervention est nécessaire et elle accueille la demande de contrôle judiciaire.

II.                Le contexte

[3]               Le demandeur est citoyen de la Serbie et appartient à l’ethnie rom. Il a fui la Serbie pour le Canada, où il a demandé l’asile, au motif qu’il avait été victime de discrimination en Serbie en raison de son appartenance à l’ethnie rom.

[4]               Dans la version initiale de son formulaire de renseignements personnels (le FRP), le demandeur n’a fait mention d’aucun incident spécifique de persécution qu’il aurait vécu, mais a plutôt parlé des nombreuses façons dont il percevait que les Roms faisaient l’objet de discrimination en Serbie.

[5]               Dans la réponse modifiée à la question 31 de son FRP (le FRP modifié), le demandeur a déclaré que, le 15 juin 2012, son épouse l’avait quitté, en emmenant leurs deux filles avec elle. Le 21 novembre 2012, leur divorce fut prononcé.

[6]               Le demandeur a allégué que, par la suite, les nationalistes serbes n’avaient pas permis à sa fille de retourner vivre avec son père comme elle le souhaitait. Il a allégué qu’il avait été agressé par des hommes qui avaient brûlé la nourriture de sa vache et lui avaient dit de quitter le pays, sinon ils le tueraient. Il n’a jamais porté plainte auprès des autorités au sujet de cet incident.

[7]               Il a également allégué que la police l’interceptait régulièrement et l’amenait au poste de police, bien qu’il ait prétendu, au moins à une occasion, qu’il n’avait jamais commis de crime.

III.             La décision contestée

[8]               Le commissaire n’a pas trouvé le demandeur crédible.

[9]               Le commissaire a jugé que le demandeur n’avait fait mention d’aucun acte spécifique dans son FRP, mais avait plutôt parlé de discrimination générale à l’égard des Roms. Dans son FRP modifié, il a mentionné pour la première fois que, lorsqu’un incident survenait dans le village, la police venait systématiquement le chercher pour l’amener au poste, où il était battu jusqu’à ce qu’il se déclare coupable d’un crime qu’il n’avait pas commis et qu’il restait détenu pendant deux ou trois jours.

[10]           Le commissaire a fait ressortir des contradictions entre le FRP du demandeur et le FRP modifié ainsi que son témoignage, ce qu’il n’a pu expliquer. Le commissaire a conclu que, si le demandeur avait été soumis à une telle discrimination systématique, il en aurait fait mention dans son premier FRP.

[11]           Dans son FRP modifié, il faisait mention de menaces de mort qu’il n’avait pas mentionnées dans son premier FRP et, une fois de plus, il ne fut pas en mesure d’expliquer cette différence.

[12]           De plus, le commissaire a conclu que le demandeur n’avait pas réfuté la présomption de protection adéquate de l’État. Les allégations du demandeur relativement à de mauvais traitements subis aux mains des policiers locaux étaient insuffisantes, étant donné que l’absence de protection policière efficace au niveau local ne signifie pas que la protection de l’État est inadéquate.

[13]           Le commissaire a également cité un mémo du guide opérationnel de l’agence frontalière du Royaume-Uni qui traite des améliorations dans le traitement des Roms en Serbie.

[14]           Par suite de ses conclusions quant à la crédibilité et à la protection de l’État, le commissaire a conclu que le demandeur n’était pas un réfugié au sens de la Convention.

IV.             La norme de contrôle

[15]           La norme de contrôle applicable à une conclusion de la Commission portant sur la crédibilité est la raisonnabilité (Wei c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 911, au paragraphe 28; Aguebor c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1993] ACF no 732; Elmi c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 773, au paragraphe 21, et Wu c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 929, au paragraphe 17).

[16]           La norme de contrôle applicable à l’examen et au traitement de la preuve auxquels l’agent a procédé est la raisonnabilité (voir, par exemple, YZ c Canada (Ministre de la Citoyenneté et l’Immigration), 2009 CF 749, [2009] ACF no 904, au paragraphe 22).

V.                Les questions en litige

[17]           Il y a deux questions pertinentes en l’espèce :

1.         La conclusion du commissaire relativement à la crédibilité était-elle raisonnable?

2.         Les motifs de la Commission relativement à la protection de l’État expliquent-ils suffisamment sa décision et permettent-ils d’en arriver à la conclusion que la décision appartient aux issues acceptables et raisonnables?

VI.             Analyse

A.                Les conclusions du commissaire relativement à la crédibilité

[18]           Dans sa décision, le commissaire a conclu que les questions déterminantes soulevées par la demande du demandeur étaient sa crédibilité et la disponibilité de la protection de l’État. Le demandeur soutient que la conclusion défavorable à laquelle le commissaire en est arrivé relativement à la crédibilité se fonde uniquement sur la nature plus générale des allégations contenues dans son premier FRP, par opposition aux allégations plus spécifiques qu’il a soumises dans son FRP modifié.

[19]           Le demandeur soutient que le commissaire a omis d’analyser ou même de faire mention de [traduction] « l’état mental » du demandeur afin d’expliquer son omission de faits importants dans son FRP initial. Il fait référence à un rapport psychologique médico-légal que son procureur a obtenu et qui conclut qu’il souffrait d’une dépression sévère, du syndrome de stress post-traumatique et que la simple remémoration de son passé nuisait à son attention et à sa concentration.

[20]           C’est une règle de droit bien connue que l’appréciation de la crédibilité est la chasse gardée de la Commission. Le commissaire a insisté sur le fait que, dans la version initiale de son FRP, le demandeur ne mentionnait aucun acte de persécution spécifique, mais parlait plutôt de discrimination générale contre les Roms. Ce n’est que dans le FRP modifié qu’il a parlé de mauvais traitements subis aux mains de la police. Le demandeur a expliqué cette omission en alléguant qu’il souffrait du syndrome de stress post-traumatique et que, par conséquent, il n’avait pu remplir son FRP comme il se devait. Le demandeur a reçu l’aide d’un conseil pour la préparation du FRP, et il est difficile d’accepter que tout mauvais traitement qu’il aurait pu subir aux mains de la police ou d’autres autorités ait échappé à son examen.

[21]           De plus, en examinant le rapport du psychologue, on constate que l’opinion fut émise dans le but de renforcer le « caractère bien‑fondé » subjectif de la crainte du demandeur d’être renvoyé en Serbie. Le rapport n’a pas été écrit pour appuyer la conclusion suivant laquelle le demandeur n’aurait pu remplir son FRP comme il se devait sous les indications de son conseil et il ne contient aucune opinion à cet effet.

[22]           Les demandeurs d’asile qui omettent des faits importants dans leur FRP le font à leurs propres risques. Les tentatives visant à combler les lacunes sur le plan de la crédibilité provenant d’omissions importantes dans les documents en retenant les services de spécialistes en médecine légale, particulièrement lorsque cela est fait sous les indications d’un conseil, sont vouées à l’échec et ne peuvent remplacer le rôle du décideur lorsque vient le temps d’apprécier la crédibilité du témoin. Tel que le juge Pinard l’a clairement déclaré dans Jin c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 595 (Jin), au paragraphe 22, il incombe au demandeur d’inclure tous les faits pertinents dans son FRP, et la SPR est justifiée de tirer des inférences défavorables des omissions dans le FRP (Jin, au paragraphe 11).

[23]           Le commissaire a également fondé sa conclusion quant à la crédibilité sur les contradictions dans le témoignage du demandeur. Lorsqu’il a été interrogé sur ses interactions avec la police, il a confirmé et nié à la fois, à différents moments de son témoignage, avoir commis des crimes. Si la police l’interceptait systématiquement sans raison, ce fait aurait dû être mentionné dans son premier FRP, parce qu’il est le pivot de son récit. Les contradictions et omissions relativement à des faits importants qui se trouvaient dans le FRP du demandeur justifiaient le commissaire de tirer une conclusion défavorable quant à la crédibilité (voir Aragon c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 144, au paragraphe 22).

[24]           Par conséquent, je juge que les conclusions du commissaire quant à la crédibilité sont étayées par la preuve dont il disposait et ne constituent pas une erreur susceptible de contrôle.

B.                 La suffisance des motifs quant à la protection de l’État

[25]           En dépit des conclusions défavorables quant à la crédibilité, le demandeur reconnaît que la Commission doit tout de même examiner et apprécier pleinement la preuve documentaire démontrant le risque auquel les personnes se trouvant dans une situation similaire sont exposées, étant donné que sa demande se fonde sur son profil et sur le traitement des personnes se trouvant dans une situation similaire aujourd’hui en Serbie; voir B231 c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 1218 (juge Kane), citant Maimba c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 226, 70 Imm LR (3d) 305, au paragraphe 22; Kanesaratnasingham c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 48, [2008] ACF no 61, au paragraphe 8.

[26]           Je suis d’accord avec le demandeur suivant lequel le commissaire a choisi de façon inexplicable de faire référence à seulement deux documents, qui ne sont plus à jour, se trouvant dans le Cartable national de documentation sur la Serbie (le Cartable), faisant fi des documents plus récents qui contiennent une preuve au contraire, sans aucune tentative de fournir une analyse ou d’expliquer son raisonnement.

[27]           Par exemple, parmi les nombreux documents qui composent le Cartable, la Commission a choisi de ne faire référence qu’à celui de l’agence frontalière du Royaume‑Uni se trouvant au rapport d’étape sur la Serbie (pour l’année 2007) de la Commission européenne et à celui du Département d’État des États‑Unis (pour l’année 2007). La brève référence concluante qui ressort de ces documents indique qu’en dépit de la discrimination sociétale dont les Roms sont victimes, cela ne constituait pas de la persécution; on faisait remarquer que la possibilité de se réinstaller dans une autre région de la Serbie afin d’échapper à la persécution était une option.

[28]           Les motifs ne contiennent aucune référence à la documentation contradictoire qui se trouve dans le Cartable dont, à titre d’exemple, le Country Reports on Human Rights Practices des États-Unis pour l’année 2011. Sous les titres de [TRADUCTION] « Personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays et Minorités nationales/raciales/ethniques » on y trouve l’affirmation suivante :

[TRADUCTION]

Il y avait environ 22 000 Roms officiellement enregistrés qui étaient déplacés à l’intérieur du pays. Toutefois le HCR estimait qu’entre 40 000 et 45 000 Roms déplacés vivaient dans le pays, dont un grand nombre ne possédait pas les documents personnels nécessaires pour enregistrer leur statut. Bien qu’une partie des Roms déplacés vivait dans des centres collectifs bénéficiant du soutien de l’État, les Roms (appartenant aux populations locales et déplacées) vivaient pour la plupart dans le dénuement. Les municipalités locales étaient souvent réticentes à les prendre en charge. Si les Roms restaient, ils vivaient souvent près de villes ou agglomérations importantes dans des habitats précaires clandestins, isolés et privés d’électricité, d’eau, d’assainissement ou d’autres services publics.

Les Roms, qui constituaient 1,4 % de la population dans le recensement de 2002, mais dont on estimait le nombre véritable à environ 5,4 %, représentaient encore la communauté minoritaire la plus vulnérable et étaient la cible de violence policière, de discrimination sociétale et de harcèlement verbal et physique.

Le 27 juin 2010, six personnes furent condamnées pour incitation à la haine raciale et nationale et à l’intolérance dans le village de Jabuka. Les six se virent imposer des peines inférieures au minimum prévu par la loi qui est de un à huit ans d’emprisonnement. Quatre reçurent des peines de cinq mois de probation et deux d’entre elles, qui furent condamnées en tant que mineures, se virent imposer des « mesures correctionnelles ».

[Non souligné dans l’original.]

[29]           La jurisprudence selon laquelle il existe une présomption de protection de l’État est claire, et le revendicateur qui cherche à la réfuter doit produire « […] une preuve pertinente, digne de foi et convaincante qui démontre au juge des faits, selon la prépondérance des probabilités, que la protection accordée par l’État en question est insuffisante » (voir Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Carrillo, 2008 CAF 94, au paragraphe 30). En outre les demandeurs doivent démontrer devant la Cour que la décision de la Commission portant sur la suffisance de la protection (en tenant pour acquis qu’il s’agit de la question déterminante) n’appartient pas aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit ou n’est pas suffisamment claire pour permettre à la cour de révision d’en arriver à la conclusion que la décision est raisonnable.

[30]           J’adopte le raisonnement suivant du juge Hansen dans Polgari c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2001 CFPI 626, en ce qui a trait à l’absence d’analyse ou de traitement de la documentation contradictoire tel qu’il est énoncé au paragraphe 32 :

Deuxièmement, les documents soumis par les demandeurs et ceux contenus dans les documents communiqués par l’ACR sèment des doutes et en fait contredisent la disponibilité et l’efficacité de la protection de l’État pour les Hongrois rom. Si, d’une part, il était raisonnable pour le tribunal de tirer les conclusions qu’il a tirées, d’autre part l’absence d’analyse de la volumineuse documentation contenue dans la trousse d’information sur les causes types hongroises, des documents de la trousse de documents communiqués par l’ACR et des documents soumis par les demandeurs, jointe à un traitement inadéquat des documents contradictoires et à l’absence d’explications sur ses préférences pour la preuve sur laquelle il s’est fondé, justifient l’intervention de la Cour.

[Non souligné dans l’original.]

Voir également les décisions Mohacsi c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CFPI 429, au paragraphe 54, et Sivapathasuntharam c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 486, au paragraphe 22.

[31]           Le défendeur a tenté d’attirer la Cour dans un examen de la preuve contenue dans le dossier pour démontrer que les motifs étaient suffisants au regard de l’arrêt de la Cour suprême du Canada dans l’affaire Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c Newfoundland and Labrador (Conseil du trésor), 2011 CSC 62 (Newfoundland Nurses). Toutefois, dans cet arrêt, la Cour suprême a ainsi expliqué le rôle des motifs dans le processus de révision, aux paragraphes 14 et 16 :

[14] Je ne suis pas d’avis que, considéré dans son ensemble, l’arrêt Dunsmuir signifie que l’« insuffisance » des motifs permet à elle seule de casser une décision, ou que les cours de révision doivent effectuer deux analyses distinctes, l’une portant sur les motifs et l’autre, sur le résultat (Donald J. M. Brown et John M. Evans, Judicial Review of Administrative Action in Canada (feuilles mobiles), §§12:5330 et 12:5510).  Il s’agit d’un exercice plus global : les motifs doivent être examinés en corrélation avec le résultat et ils doivent permettre de savoir si ce dernier fait partie des issues possibles.  Il me semble que c’est ce que la Cour voulait dire dans Dunsmuir en invitant les cours de révision à se demander si « la décision et sa justification possèdent les attributs de la raisonnabilité » (par. 47).

[…]

[16] Il se peut que les motifs ne fassent pas référence à tous les arguments, dispositions législatives, précédents ou autres détails que le juge siégeant en révision aurait voulu y lire, mais cela ne met pas en doute leur validité ni celle du résultat au terme de l’analyse du caractère raisonnable de la décision.  Le décideur n’est pas tenu de tirer une conclusion explicite sur chaque élément constitutif du raisonnement, si subordonné soitil, qui a mené à sa conclusion finale (Union internationale des employés des services, local no 333 c. Nipawin District Staff Nurses Assn., [1975] 1 R.C.S. 382, p. 391).  En d’autres termes, les motifs répondent aux critères établis dans Dunsmuir s’ils permettent à la cour de révision de comprendre le fondement de la décision du tribunal et de déterminer si la conclusion fait partie des issues possibles acceptables.

[Non souligné dans l’original.]

[32]           Dans la même veine, dans l’arrêt Alberta (Information and Privacy Commissioner)c Alberta Teachers’ Association, 2011 CSC 61, [2011] 3 RCS 654, rendu le jour suivant celui dans l’affaire Newfoundland Nurses, la Cour suprême du Canada a commenté ainsi les limites au pouvoir de la cour de reformuler les motifs du tribunal, au paragraphe 54 :

54.              Je ne laisse cependant pas entendre qu’une cour de justice n’a pas à tenir dûment compte des motifs du tribunal administratif lorsque ceux-ci existent.  L’invitation à porter une attention respectueuse aux motifs « qui pourraient être donnés à l’appui d’une décision » ne confère pas à la cour de justice le [TRADUCTION] « pouvoir absolu de reformuler la décision en substituant à l’analyse qu’elle juge déraisonnable sa propre justification du résultat » (Petro-Canada c. Workers’ Compensation Board (B.C.), 2009 BCCA 396, 276 B.C.A.C. 135, par. 53 et 56).  Elle ne doit pas non plus « être interprétée comme atténuant l’importance de motiver adéquatement une décision administrative » (Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Khosa, 2009 CSC 12, [2009] 1 R.C.S. 339, par. 63, le juge Binnie).  Au contraire, la déférence inhérente à la norme de la raisonnabilité se manifeste optimalement lorsqu’une décision administrative est justifiée de façon intelligible et transparente et que la juridiction de révision contrôle la décision à partir des motifs qui l’étayent. […]

[Non souligné dans l’original.]

[33]           Conformément à ces directives, je conclus que les motifs de la Commission étaient sélectifs, étant donné qu’ils se fondaient sur un rapport sur le pays qui était désuet, ce rapport se trouvant dans le Cartable national de la documentation pour l’année 2012, alors qu’elle a omis de tenir compte des documents se trouvant dans ce cartable et qui contredisaient le rapport sur le pays, ou de procéder à une analyse étayant sa préférence dans l’appréciation des documents, ce qui fait en sorte que je ne peux comprendre comment la Commission en est arrivée à sa décision ni ne peux déterminer si la conclusion appartient aux issues acceptables.

[34]           Je remarque que le défendeur a également tenté de soulever des questions relativement à l’omission du demandeur de chercher à se prévaloir de la protection de la police ou de laisser entendre que les conditions dans le reste du pays ne devraient pas être inférées des conditions locales. Ces questions n’ont pas été soulevées dans l’analyse de la Commission et ne sont ni pertinentes ni déterminantes quant à la décision de la Cour au vu de mes conclusions décrites ci‑dessus.

VII.          Conclusion

[35]           La demande de contrôle judiciaire sera accueillie. L’affaire sera renvoyée à un tribunal différemment constitué pour nouvelle décision.

[36]           Aucune question de portée générale n’a été proposée en vue de la certification.

 


JUGEMENT

LA COUR STATUE que :

1.         la demande de contrôle judiciaire est accueillie;

2.         aucune question de portée générale n’est certifiée.

« Peter Annis »

Juge

Traduction certifiée conforme

C. Laroche


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-5685-13

 

INTITULÉ :

GORAN DIMITRIJEVIC c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Montréal (QuÉbec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 23 JUIN 2014

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE ANNIS

 

DATE DU JUGEMENT

ET DES MOTIFS :

 

LE 18 JUILLET 2014

COMPARUTIONS :

Viken Artinian

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Soury Phommachakr

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Viken Artinian

Avocat

Montréal (Québec)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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