Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20140626


Dossier : IMM-11849-12

Référence : 2014 CF 621

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 26 juin 2014

En présence de monsieur le juge Roy

ENTRE :

PARMINDER KAUR AMARINDER SINGH

demanderesse

et

MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

Ordonnance et motifs

[1]               VU la demande de contrôle judiciaire de la décision rendue par un agent d’immigration, le 18 octobre 2012, par laquelle l’agent d’immigration a rejeté la demande de résidence permanente au Canada fondée sur les considérations d’ordre humanitaire [les CH] présentée par la demanderesse;

[2]               APRÈS AVOIR examiné attentivement le dossier présenté par les parties dans la présente demande de contrôle judiciaire;

[3]               ET APRÈS AVOIR entendu les parties le 19 juin 2014;

[4]               Pour les motifs qui suivent, la demande de contrôle judiciaire doit être rejetée.

[5]               La présente demande de contrôle judiciaire, présentée en vertu de l’article 72 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la LIPR], doit être rejetée parce que la demanderesse ne s’est pas acquittée du fardeau qui pesait sur elle en raison d’une contestation de cette nature. Fondamentalement, la demanderesse allègue que sa vie au Canada est meilleure que sa vie en Inde, son pays d’origine. Toutefois, tel n’est pas le fardeau.

[6]               Il ressort clairement de la LIPR que la personne qui veut devenir une résidente permanente de ce pays doit présenter sa demande avant de solliciter l’entrée au Canada. Toutefois, la LIPR prévoit qu’il est possible de faire une telle demande de l’intérieur du Canada. Il appartiendra au ministre d’exercer son pouvoir discrétionnaire et d’octroyer le statut demandé « s’il estime que des considérations d’ordre humanitaire relatives à l’étranger le justifient, compte tenu de l’intérêt supérieur de l’enfant directement touché. »

[7]               En l’espèce, la demanderesse déclare de façon très honnête qu’elle aimerait rester au Canada parce qu’elle a beaucoup de membres de sa famille ici et qu’elle y réside maintenant depuis de nombreuses années.

[8]               Malheureusement, comme je l’ai déclaré, tel n’est pas le critère. Le ministre dispose d’un vaste pouvoir discrétionnaire lorsqu’il examine si une demande présentée au titre de l’article 25 de la LIPR devrait ou ne devrait pas être accueillie. L’exercice du pouvoir discrétionnaire est susceptible de contrôle selon la norme de la décision raisonnable (Okoloubu c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CAF 326 [Okoloubu]), ce qui entraîne une grande déférence à l’égard du décideur. S’il y a justification, transparence et intelligibilité du processus décisionnel, la décision sera jugée raisonnable tant qu’elle appartient aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit (Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9; [2008] 1 RCS 190, au paragraphe 47).

[9]               Contrairement à l’argumentation de l’avocat de la Couronne, l’article 25 n’établit pas d’exigence selon laquelle les circonstances ne doivent pas avoir été prévues par les dispositions légales. Comme la Cour d’appel l’a conclu dans l’arrêt Okoloubu, le ministre, ou son représentant, « se limite à déterminer si des motifs d’ordre humanitaire justifient que l’intimé soit dispensé de l’application rigoureuse des exigences d’une demande de résidence permanente, et non de statuer sur la validité d’une mesure de renvoi délivrée contre l’intimé » (au paragraphe 63).

[10]           En réalité, les considérations d’ordre humanitaire ne se limitent pas non plus aux difficultés. Au paragraphe 41 de l’arrêt Agraira c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2013 CSC 36, [2013] 2 RCS 559 [Agraira], la Cour suprême a fait un résumé des considérations, au titre de l’article 25 :

[41]      […] Les considérations d’ordre humanitaire s’entendent notamment des droits, des besoins et des intérêts supérieurs des enfants, du maintien des liens entre les membres d’une famille et du fait d’éviter de renvoyer des gens à des endroits où ils n’ont plus d’attaches (voir Baker, par. 67 et 72).

[11]           Par contre, il incombe à la demanderesse de convaincre la Cour que l’exercice du pouvoir discrétionnaire était déraisonnable dans les circonstances de son affaire. Pour cela, la demanderesse a invoqué les lignes directrices établies à l’intention des agents d’immigration lorsqu’ils exercent le pouvoir discrétionnaire conféré au ministre, dans une tentative de montrer que ces lignes directrices n’avaient pas été suivies en l’espèce. Les lignes directrices sont d’une utilité limitée. Au paragraphe 12:4421 de leur ouvrage intitulé Judicial Review of Administrative Action in Canada (Brown and Evans, Judicial Review of Administrative Action in Canada (Toronto, Ontario : Carswell, 2013) (feuillets mobiles, mis à jour en 2014, version no 1)), les auteurs Brown et Evans ont souligné ce qui suit :

[traduction]

Néanmoins, des lignes directrices et des politiques valides peuvent être prises en compte dans l’exercice du pouvoir discrétionnaire, à condition que le décideur se concentre sur les circonstances précises de l’affaire. En fait, un tribunal peut faire référence aux lignes directrices établies à l’intention de ceux à qui on a conféré l’exercice du pouvoir discrétionnaire comme une indication des facteurs que le décideur doit prendre en compte, et peut-être leur poids relatif, lorsqu’on contrôle une décision discrétionnaire selon la norme de la décision raisonnable.

[12]           Les lignes directrices peuvent seulement être d’une utilité limitée, parce qu’elles ne peuvent pas entraver le pouvoir discrétionnaire octroyé par le Parlement. Dans l’arrêt Agraira, la Cour suprême a examiné le guide opérationnel en cause parce que celui-ci « peut aider la Cour à bien saisir la façon dont le ministre a implicitement interprété l’“intérêt national” » (au paragraphe 59).

[13]           Selon moi, l’argument de la demanderesse se résume à un désaccord avec le poids accordé par le décideur aux facteurs avancés dans sa demande présentée au titre de l’article 25. La pondération des facteurs pertinents demeure l’apanage du ministre (Legault c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2002] 4 CF 358, 2002 CAF 125, au paragraphe 11). Les lignes directrices ne sont pas censées établir comment les facteurs énumérés doivent être appliqués, et quel poids doit leur être accordé. Il appartient au décideur d’exercer son pouvoir discrétionnaire de façon raisonnable. On ne s’est pas acquitté du fardeau d’établir que la décision n’appartient pas aux issues possibles acceptables.

[14]           L’avocat de la demanderesse, de façon très équitable, est revenu sur l’argument avancé dans la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire selon lequel le décideur avait fait preuve de partialité ou qu’il y avait une crainte raisonnable de partialité.

[15]           En conséquence, la demande de contrôle judiciaire est rejetée. Il n’y a pas de question à certifier.


ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit rejetée. Il n’y a pas de question à certifier.

« Yvan Roy »

Juge

Traduction certifiée conforme

Laurence Endale


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-11849-12

 

INTITULÉ :

PARMINDER KAUR AMARINDER SINGH

c

MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 19 JUIN 2014

 

ORDONNANCE ET MOTIFS :

LE JUGE ROY

 

DATE DE L’ORDONNANCE

ET DES MOTIFS :

 

LE 26 JuIn 2014

COMPARUTIONS :

Richard M. Addinall

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Balqees Mihirig

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Avocat

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.