Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20140617


Dossier : IMM-2887-13

Référence : 2014 CF 573

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 17 juin 2014

En présence de madame la juge Kane

ENTRE :

BRANDON CARL HUNTLEY

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

Aperçu

[1]               M. Huntley est un citoyen de race blanche de l’Afrique du Sud qui est arrivé au Canada pour la première fois en 2004, muni d’un permis de travail temporaire. Il a demandé l’asile en 2008, alléguant être victime de persécution du fait de sa race et de ses opinions politiques. La Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission) lui a accordé le statut de réfugié en 2009. Dans Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Huntley, 2010 CF 1175, (Huntley no 1), au terme d’un contrôle judiciaire, le juge Russell a conclu que la décision de la Commission était déraisonnable, a infirmé cette décision et a ordonné que la demande d’asile soit réexaminée par une formation différemment constituée de la Commission.

[2]               Le formulaire de renseignements personnels (FRP) initial de M. Huntley, qu’il a signé le 27 mai 2008, décrivait ce qu’il avait vécu à titre d’homme blanc en Afrique du Sud, y compris au moins six agressions dont il aurait été victime commises par des Sud‑Africains noirs.

[3]               Le 29 août 2012, il a présenté un FRP mis à jour dans lequel il a raconté des événements plus récents qui se sont déroulés en Afrique du Sud; ce FRP inclut sa demande d’asile « sur place » (c’est-à-dire fondée sur des événements survenus pendant qu’il se trouvait au Canada), qui repose sur la couverture médiatique suscitée par la décision initiale de la Commission de lui accorder le statut de réfugié. Le demandeur avait parlé aux médias à l’époque, faisant valoir que son statut de réfugié confirmait ses allégations selon lesquelles le racisme contre les Blancs en Afrique du Sud était endémique. La couverture médiatique était internationale et a sans aucun doute atteint l’Afrique du Sud.

[4]               L’audience de novo a eu lieu les 23 et 24 octobre 2012. Dans sa décision datée du 10 janvier 2013, la Commission a conclu qu’il n’était pas un réfugié au sens de la Convention aux termes de l’article 96, ni une personne à protéger aux termes de l’article 97 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la Loi).

[5]               En l’espèce, le demandeur, M. Huntley, sollicite le contrôle judiciaire de cette décision conformément à l’article 72 de la Loi.

[6]               Dans le cadre du présent contrôle judiciaire, le demandeur soutient que le juge Russell, dans Huntley no 1, a conclu que la décision de 2009 était déraisonnable en raison du manque d’éléments de preuve objectifs attestant du racisme et de la persécution à l’endroit des Sud‑Africains blancs. Il soutient avoir recueilli ces éléments de preuve et les avoir présentés à la Commission lors de l’audience de novo. Toutefois, cette dernière a ignoré ou mal saisi ces éléments de preuve, et a préféré d’autres éléments de preuve, sans procéder à une analyse appropriée et sans expliquer pourquoi elle avait écarté ou rejeté la preuve du demandeur.

[7]               Le demandeur a soulevé des allégations sérieuses concernant les risques auxquels sont exposés les Blancs en Afrique du Sud et a fait valoir que le présent contrôle judiciaire était crucial pour l’avenir des futurs demandeurs d’asile. Dans son exposé écrit, il soutient que la position du défendeur, le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, est une tentative voilée de cacher une réalité qu’il convient de mettre en lumière. Une telle déclaration ne tient pas compte du but d’un contrôle judiciaire, qui est de chercher à savoir si la décision de la Commission, selon laquelle M. Huntley n’était ni un réfugié au sens de la Convention, ni une personne à protéger, est raisonnable.

[8]               Je partage l’avis exprimé par le juge Russell dans Huntley no 1, au paragraphe 235 :

Je tiens à souligner une fois de plus que j’ai affaire à une décision précise au sujet d’un Sud-Africain en particulier, dans les limites étroites de la jurisprudence canadienne concernant les erreurs susceptibles de contrôle. Cette décision ne peut pas, et ne devrait pas, être considérée comme une opinion ou une évaluation personnelle ou politique au sujet des difficultés que peuvent subir les Sud-Africains blancs depuis la fin de l’apartheid.  [Souligné dans l’original.]

[9]               Pour les motifs exposés ci-après, je conclus que la décision de la Commission est raisonnable et que la demande doit être rejetée.

Contexte

[10]           M. Huntley est arrivé au Canada en juillet 2004, muni d’un visa de travail temporaire valide pour une période de cinq mois; il était parrainé par un employeur canadien. Il est retourné en Afrique du Sud après l’expiration de son visa en novembre 2004 et a de nouveau présenté une demande de visa de travail temporaire. Il est revenu au Canada en juin 2005. Par la suite, il a présenté de nouvelles demandes de visa de travail de l’intérieur du Canada, jusqu’à ce qu’il ne soit plus admissible à de tels visas. Son dernier visa de travail a expiré le 31 décembre 2006. Il est demeuré au Canada sans statut et a présenté une demande d’asile en avril 2008.

[11]           La demande d’asile de M. Huntley est fondée sur sa crainte d’être persécuté et d’être exposé à une menace pour sa vie s’il retourne en Afrique du Sud.

[12]           Dans son FRP initial, il a relaté les incidents suivants :

         En 2000, dans un hôpital où tout le personnel était noir, on a tardé à lui prodiguer des soins médicaux (points de suture et examen radiologique) pour accorder la priorité aux patients Noirs;

         Il voulait présenter une demande de passeport au Home Office et a dû revenir trois jours de suite pour soumettre sa demande parce qu’on permettait aux citoyens noirs de le devancer dans la file d’attente;

         Les autorités l’avaient obligé de soumettre de la documentation additionnelle, chose qui n’a pas été exigée aux demandeurs noirs, lorsqu’il a fait sa demande de permis de travail au Canada;

         Il ne pouvait pas obtenir d’emploi en Afrique du Sud à cause des mesures en faveur des groupes désavantagés;

         Il a été agressé et poignardé au moins six fois depuis son adolescence par des Sud-Africains noirs à cause de sa race. Durant ces incidents, ses agresseurs lui ont lancé des insultes racistes;

         Il connaît d’autres Sud-Africains blancs qui ont été victimes de détournements de véhicules et/ou d’agressions;

         Lors des dernières élections, des membres du Congrès national africain (ANC) ont scandé des slogans comme [traduction] « Tuons les Blancs »;

         Des membres de sa famille à Roodeport, en Afrique du Sud, ont embauché un service de sécurité pour les suivre lorsqu’ils doivent prendre la route en soirée.

[13]           Le demandeur n’a pas signalé les agressions aux autorités, car il croyait qu’elles ne prendraient aucune mesure. Selon le demandeur, quand il est retourné en Afrique du Sud en novembre 2004, il s’est rendu compte qu’il ne pourrait pas vivre dans ce pays parce qu’il avait constamment peur d’être agressé ou volé.

[14]           Dans son FRP mis à jour, le demandeur affirme qu’il s’est adressé aux médias après la décision favorable lui accordant le statut de réfugié en 2009 parce qu’il était [traduction] « si convaincu que des millions de gens ne savaient pas ce qui se passait en Afrique du Sud en ce qui concerne le sort des Sud-Africains blancs […] ». En réponse aux reportages des médias sur la décision de la Commission, le gouvernement sud-africain a affirmé que la décision était [traduction] « raciste » et portait atteinte à la relation entre le Canada et l’Afrique du Sud. 

[15]           Le demandeur soutient que des sources d’information sud‑africaines ont fait des reportages sur la décision de lui accorder l’asile, si bien que son visage est maintenant bien connu du public; de plus, des journalistes sud-africains continuent de communiquer avec son avocat pour se renseigner sur sa situation. La mère du demandeur a vu une publicité pour un journal sur un autobus et la publicité comportait une photo de lui. De plus, des messages affichés sur Facebook à la suite de ces reportages incluaient des menaces contre lui. À cause de cette exposition médiatique, le demandeur craint des représailles pour avoir présenté une demande d’asile à l’égard de l’Afrique du Sud et pour avoir rendu publique sa démarche à l’échelle internationale. Il croit qu’il serait repéré à l’aéroport dès son arrivée.

[16]           Le demandeur affirme aussi que les dirigeants du Congrès national africain (ANC) continuent de scander et de chanter des chansons qui encouragent ou tolèrent le meurtre de gens blancs. Il signale qu’il a peur des citoyens noirs qui se conformeront aux messages de leurs dirigeants politiques et qu’il ne pourra pas se prévaloir de la protection de l’État.

La décision visée par la demande de contrôle

[17]           Dans une décision qui compte 38 pages, la Commission a affirmé que les questions déterminantes étaient la crédibilité du demandeur et le caractère adéquat de la protection de l’État.

[18]           Selon la Commission, le fait que le demandeur ait attendu jusqu’en avril 2008 pour présenter sa demande d’asile minait sa crédibilité en ce qui concerne sa crainte subjective de persécution. Son explication pour justifier ce délai n’était pas raisonnable étant donné que, lors de son témoignage, il a affirmé avoir pris connaissance qu’il pouvait présenter une demande d’asile en juin 2007, soit 10 mois avant qu’il ne présente effectivement sa demande.

[19]           La Commission a aussi noté que le demandeur était retourné en Afrique du Sud pour plusieurs mois en novembre 2004.

[20]           La Commission a également conclu que la crédibilité du demandeur était minée par les incohérences dans son témoignage à l’audience initiale et à l’audience de novo. Au cours de cette dernière audience, il a signalé les insultes racistes qui lui avaient été lancées durant les agressions; toutefois, à la première audience, il n’en avait pas fait mention.

[21]           La Commission a reconnu qu’il y a de graves problèmes sur le plan des droits de la personne en Afrique du Sud, mais a noté que le système judiciaire est indépendant, qu’il est possible d’avoir recours aux tribunaux pour intenter des poursuites civiles pour violation des droits de la personne et qu’il y a des organisations non gouvernementales (ONG) et la Commission sud-africaine des droits de la personne qui font la promotion des droits de la personne au sein de l’État et de la population.

[22]           La Commission a examiné la preuve documentaire volumineuse soumise par le demandeur ainsi que la preuve documentaire faisant partie du cartable national de documentation (CND). Elle a accordé un poids important à un ensemble de rapports produits par le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies (CDHNU) à la suite de son examen périodique universel qui englobait l’Afrique du Sud. Selon la Commission, les rapports des Nations Unies indiquent que l’Afrique du Sud s’est engagée à promouvoir les droits de la personne. La Commission a aussi noté que le CDHNU signalait des allégations de corruption au sein de la police en Afrique du Sud. Toutefois, on a signalé une baisse des taux de criminalité et, selon des représentants sud-africains, les allégations de corruption donnent lieu à des procédures administratives et criminelles.

[23]           La Commission a examiné la preuve d’expert soumise par le demandeur, mais a conclu que les préoccupations qui y sont exposées ne trouvaient pas d’écho dans les rapports publiés par le CDHNU ou dans d’autres documents du CND.

[24]           La Commission a aussi fait renvoi aux rapports du ministère de l’Intérieur du Royaume-Uni et de Freedom House, qui confirmaient que certains dirigeants politiques continuent de chanter et de scander des chansons assimilables à des crimes haineux et que, même s’ils ont été sanctionnés pour ces écarts de conduite et ont reçu l’ordre de cesser, cette conduite a généré des tensions raciales. Elle a conclu que ces rapports ne confirment pas qu’il y a des préparatifs en cours pour un génocide, comme l’a laissé entendre le professeur Stanton, qui a soumis de la preuve documentaire pour le compte du demandeur.

[25]           La Commission a pris note des observations du demandeur selon lesquelles les rapports du département d’État américain, d’Amnistie et de Human Rights Watch ne recensaient pas de relever les meurtres de Blancs ou le fait que ces meurtres découlaient des motifs raciaux parce que l’examen périodique universel, sur lequel se fondent ces rapports, ne comporte pas de données sur l’origine ethnique des victimes.

[26]           La Commission a également renvoyé à la décision Huntley no 1 du juge Russell, dans laquelle ce dernier a conclu que les politiques en faveur des groupes désavantagés mises en place par le gouvernement sud-africain ne pouvaient pas raisonnablement être assimilées à de la persécution. Le juge Russel a également établi une distinction entre le sort des agriculteurs blancs qui sont victimes de violence et la situation personnelle du demandeur, car ce dernier n’est pas agriculteur.

[27]           La Commission a conclu que les documents versés dans le CND, y compris les rapports du CDHNU, constituaient des preuves crédibles et dignes de foi en raison de la fiabilité des organisations qui ont produit ces rapports et des contributions concrètes apportées à ces rapports. La Commission a expressément signalé qu’elle avait accordé plus de poids à ces éléments de preuve qu’aux documents soumis par le demandeur, mais a ajouté que « les opinions et les informations mises en preuve par le demandeur soulèvent de profondes inquiétudes ».

[28]           La Commission s’est penchée sur les principes permettant de distinguer la discrimination d’avec la persécution; elle a indiqué que certains incidents de discrimination pouvaient équivaloir à une persécution, mais a conclu que ce n’était pas le cas en l’espèce. La Commission a conclu que le demandeur n’avait pas démontré que les agressions survenues avant 2004 étaient liées à son origine raciale.

[29]           La Commission a ensuite examiné la demande d’asile « sur place », dans laquelle il affirme qu’il serait exposé à la persécution en raison de la décision favorable lui ayant accordé le statut de réfugié en 2009 et de la couverture médiatique générée par cette décision; toutefois, elle a conclu que, à la lumière de la totalité de la preuve, cette affirmation relève de la pure conjecture. Le demandeur n’a pas présenté de preuve objective démontrant qu’il serait la cible d’attaques en raison de ses démarches au Canada.

[30]           La Commission a déclaré qu’il fallait regarder au-delà de la situation personnelle du demandeur pour évaluer le risque auquel il serait exposé, et elle a examiné les observations de ce dernier selon lesquelles il appartient à un groupe qui est persécuté du fait de sa race et ce groupe est peut-être menacé d’un génocide.

[31]           De l’avis de la Commission, la preuve dans son ensemble ne confirme pas l’existence d’une oppression généralisée des Blancs ou l’existence de préparatifs en vue d’un génocide contre eux en Afrique du Sud. Par conséquent, le demandeur n’a pas démontré l’existence d’une possibilité raisonnable ou d’une possibilité sérieuse qu’il soit persécuté à son retour en Afrique du Sud du simple fait qu’il appartient à un groupe racial ou ethnique constitué des citoyens blancs de l’Afrique du Sud.

[32]           La Commission a ensuite examiné la question du caractère adéquat de la protection de l’État. Elle a fait observer que le demandeur n’avait jamais signalé les agressions aux autorités sud-africaines avant son départ en 2004. Selon la Commission, le fait que la police ait agi de manière illégale dans certaines régions du pays ne démontre pas que l’État dans son ensemble est un agent de persécution ou qu’il n’est pas en mesure de protéger les victimes d’actes criminels.

[33]           De l’avis de la Commission, il était raisonnable de s’attendre à ce que le demandeur tente d’obtenir la protection de son pays avant de présenter une demande d’asile; toutefois, il n’a fait aucun effort pour s’en prévaloir. Dans les circonstances, il n’a pas réfuté la présomption de protection de l’État.

[34]           La Commission a reconnu que, même si l’Afrique du Sud est une jeune démocratie où des problèmes persistent, il s’agit d’une démocratie fonctionnelle dotée d’institutions judiciaires indépendantes.

[35]           En conclusion, la Commission a écrit, au paragraphe 76 :

Bref, je juge que le demandeur n’a pas présenté devant moi des éléments de preuve établissant qu’il a, dans le passé, fait le nécessaire, dans les circonstances et dans le contexte, pour alerter les autorités sud-africaines et tenter d’obtenir leur protection, ni, qu’à l’avenir, il serait empêché d’informer les autorités sud-africaines et d’obtenir leur protection, s’il devait faire face à de la persécution, à des menaces à sa vie ou à de la torture.

Norme de contrôle

[36]           La norme de la décision raisonnable s’applique au contrôle des décisions de fait, des décisions mixtes de fait et de droit et des décisions relatives à la crédibilité. Le rôle de la Cour dans le cadre d’un contrôle judiciaire est donc de déterminer si la décision de la Commission « [appartient] aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (Dunsmuir, au paragraphe 47). Bien qu’il puisse y avoir plus d’une issue raisonnable, « si le processus et l’issue en cause cadrent bien avec les principes de justification, de transparence et d’intelligibilité, la cour de révision ne peut y substituer l’issue qui serait à son avis préférable » (Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, [2009] 1 RCS 339, au paragraphe 59).

[37]           Les conclusions relatives à la crédibilité sont de nature factuelle, propres au cas particulier et fondées sur l’évaluation que fait le décideur de plusieurs facteurs, entre autres l’observation des témoins et leurs réponses aux questions posées. La Commission est en droit de tirer des conclusions fondées sur les invraisemblances, le bon sens et la raison (Aguebor c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1993), 160 NR 315, [1993] ACF no 732 (CAF), au paragraphe 4). Étant donné que la Commission exerce le rôle de juge des faits, ses conclusions quant à la crédibilité appellent une retenue considérable (Lin c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 1052, au paragraphe 13, [2008] ACF n1329; Fatih c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 857, au paragraphe 65, 415 FTR 82).

[38]           Le caractère adéquat des motifs est également assujetti à la norme de la décision raisonnable (Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c Terre-Neuve-et-Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62, aux paragraphes 21 et 22, [2011] 3 RCS 708, [Newfoundland Nurses]).

[39]           Bref, la Cour ne procède pas à une nouvelle appréciation de la preuve et ne rend pas une nouvelle décision; elle examine si la décision rendue par la Commission est raisonnable, à la lumière des principes établis par la jurisprudence et du dossier à la disposition de la Cour.

Les questions à trancher

[40]           Le demandeur soutient que la décision n’est pas raisonnable parce que la Commission a commis des erreurs à plusieurs égards : les motifs de la Commission sont inadéquats, particulièrement en ce qui concerne les conclusions sur la crédibilité; la Commission a tiré des conclusions vagues et dépourvues de pertinence sur la crédibilité du demandeur en se fondant sur des événements passés; elle a ignoré, mal interprété ou mal compris la preuve documentaire volumineuse et a omis d’expliquer pourquoi elle préférait sa propre preuve à celle fournie par le demandeur; la Commission n’a pas appliqué le bon critère relativement à l’article 96; et l’analyse de la protection de l’État effectuée par la Commission était défectueuse.

La Commission a-t-elle fourni des motifs adéquats?

[41]           Le demandeur soutient que la Commission n’a pas fourni de motifs adéquats à l’appui de sa décision, ce qui rend difficile sa tâche de présenter des arguments dans le cadre du contrôle judiciaire. Même si elle affirme que la crédibilité du demandeur concernant sa crainte subjective est minée par la présentation tardive de sa demande d’asile et les incohérences dans son témoignage, la Commission ne précise pas si ces conclusions ne font qu’atténuer sa crédibilité ou si elles mènent à une conclusion sur un manque général de crédibilité concernant sa crainte subjective.

[42]           Selon le demandeur, on ne sait pas trop si la Commission a accepté le contenu des affidavits d’expert qu’il a soumis pour démontrer l’existence d’une persécution fondée sur la race et les opinions politiques en Afrique du Sud, car la décision semble à la fois accepter et rejeter ces témoignages d’expert.

[43]           Le demandeur soutient également qu’il est difficile de savoir si la Commission a pris en compte les nouvelles craintes exprimées dans sa demande de 2012, car la décision ne contient pas de conclusion expresse sur ce point. Selon le demandeur, cela démontre que la Commission n’a pas examiné ses craintes à la lumière de la situation actuelle en Afrique du Sud.

[44]           De son côté, le défendeur soutient que les motifs de la Commission étaient clairs et transparents : elle a examiné toute la preuve qui lui a été présentée, a fourni des explications à l’appui de ses conclusions et a fait renvoi aux éléments de preuve qui étayaient ces conclusions.

Les motifs de la Commission sont adéquats

[45]           Les observations du demandeur au sujet des motifs de la Commission sont dépourvues de fondement. La Commission a fourni des motifs clairs et détaillés à l’appui de ses conclusions.

[46]           La Commission a relevé trois problèmes précis en ce qui a trait à la crédibilité du demandeur, comme nous le verrons ci-après.

[47]           Comme nous le verrons ci-après, il ressort clairement des motifs que la Commission a accepté et examiné attentivement les témoignages par affidavit des experts du demandeur, mais elle a accordé plus de poids à la preuve documentaire versée dans le cartable national de documentation.

[48]           Il est également clair que la Commission a pris en compte les nouvelles craintes de persécution signalées par le demandeur dans son FRP de 2012. La Commission mentionne ce volet de la demande d’asile, l’analyse et explique de manière succincte pourquoi elle rejette la demande sur place.

[49]           La Commission a pris acte du témoignage du demandeur selon lequel il craint d’être persécuté à l’avenir en raison des slogans et des messages des dirigeants politiques qui incitent à la persécution des Blancs et parce que de nombreux meurtres de Blancs en Afrique du Sud découlaient de motifs raciaux et qu’il serait reconnu, car sa photo et son nom ont été diffusés.

[50]           Dans l’arrêt Newfoundland Nurses, la Cour suprême du Canada a affirmé ce qui suit :

[16]      Il se peut que les motifs ne fassent pas référence à tous les arguments, dispositions législatives, précédents ou autres détails que le juge siégeant en révision aurait voulu y lire, mais cela ne met pas en doute leur validité ni celle du résultat au terme de l’analyse du caractère raisonnable de la décision.  Le décideur n’est pas tenu de tirer une conclusion explicite sur chaque élément constitutif du raisonnement, si subordonné soit‑il, qui a mené à sa conclusion finale (Union internationale des employés des services, local no 333 c. Nipawin District Staff Nurses Assn., [1975] 1 R.C.S. 382, p. 391). En d’autres termes, les motifs répondent aux critères établis dans Dunsmuir s’ils permettent à la cour de révision de comprendre le fondement de la décision du tribunal et de déterminer si la conclusion fait partie des issues possibles acceptables.

[51]           En l’espèce, les motifs de la Commission révèlent pourquoi elle a rendu sa décision et permettent à la Cour de vérifier si cette décision est raisonnable. Les arguments détaillés du demandeur dans le cadre du présent contrôle judiciaire démentent sa prétention selon laquelle le caractère inadéquat des motifs l’a désavantagé dans la préparation de la présente demande de contrôle judiciaire.

La Commission a-t-elle commis une erreur en tirant des conclusions vagues sur la crédibilité du demandeur en se fondant sur des événements passés?

[52]           Le demandeur fait valoir que si la Commission a tiré une conclusion sur son manque général de crédibilité relativement à sa crainte subjective de persécution, elle a commis une erreur. Selon lui, une telle conclusion reposait sur une appréciation des faits ainsi qu’ils ont été exposés dans son FRP initial. D’après le demandeur, il était déraisonnable de la part de la Commission de prendre en compte des incidents qui auraient eu lieu entre 1991 et 2003 pour évaluer sa crédibilité relativement à sa demande d’asile de 2012, particulièrement en ce qui a trait à sa demande sur place.

[53]           Le demandeur soutient que même si la Commission conclut au manque de crédibilité, elle doit tout de même procéder à l’évaluation de la demande sur place (Mohajery c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 185, aux paragraphes 31 et 32, [2007] ACF no 252).

[54]           Le demandeur signale que des événements plus récents en Afrique du Sud, survenus depuis 2008, ont alimenté ses craintes de persécution. Il soutient que la Commission s’est contentée de résumer la preuve documentaire volumineuse se rapportant à ces événements, mais ne l’a pas analysée et n’a pas tiré de conclusion sur sa crédibilité relativement à ses craintes de 2012. Selon le demandeur, cela démontre que la Commission a fondé ses conclusions sur des événements passés qui sont sans rapport avec la demande sur place.

[55]           Il fait aussi valoir que, de toute manière, toute conclusion mettant en doute sa crédibilité était déraisonnable : la Commission l’avait trouvé crédible lors de l’examen de sa demande d’asile en 2008 et le juge Russell avait accepté cette conclusion concernant sa crédibilité dans le cadre du contrôle judiciaire.

[56]           Selon le demandeur, la Commission a commis une erreur en concluant qu’il n’avait pas fait mention des insultes racistes proférées durant les agressions décrites dans sa première demande d’asile. Il signale qu’on ne lui a pas posé de questions au sujet des insultes racistes à l’audience initiale, mais qu’il les avait mentionnées dans son FRP initial.

[57]           Le demandeur soutient également qu’il était déraisonnable de la part de la Commission de tirer des conclusions défavorables du fait qu’il était retourné en Afrique du Sud en novembre 2004, car il avait expliqué qu’il devait y retourner pour soumettre une nouvelle demande de permis de travail au Canada.

[58]           Le défendeur soutient qu’il faut faire preuve d’une grande retenue à l’égard des conclusions de la Commission, car cette dernière est la mieux placée pour évaluer la crédibilité. La conclusion concernant le manque de crédibilité du demandeur avait trait à son affirmation selon laquelle il avait été agressé du fait de sa race et est compatible avec les motifs du juge Russell sur la demande de contrôle judiciaire dans la décision initiale. Il y écrit que la violence en Afrique du Sud est généralisée et ne peut être assimilée à une persécution des Sud‑Africains blancs (Huntley no 1, au paragraphe 169).

[59]           Selon le défendeur, le demandeur a indiqué que sa demande d’asile reposait à la fois sur les événements passés et les événements plus récents; de plus, lors d’une audience de novo, la Commission est en droit de prendre en considération la totalité du dossier. Les conclusions concernant la crédibilité lors de la première audience ne lient pas le deuxième tribunal de la Commission. De plus, le défendeur note que le juge Russell n’a pas formulé de conclusion concernant la crédibilité du demandeur.

[60]           D’après le défendeur, il était raisonnable de la part de la Commission de se fonder sur la présentation tardive de la demande d’asile en 2008 pour conclure que la crédibilité de la crainte subjective de persécution était minée.

Les conclusions de la Commission concernant la crédibilité du demandeur sont raisonnables

[61]           Ainsi qu’il est signalé ci-dessus, il faut faire preuve d’une grande retenue à l’égard des conclusions de la Commission. Cette dernière a longuement entendu et questionné le demandeur à l’audience de novo. Le demandeur a indiqué que sa demande reposait à la fois sur les événements passés et les événements plus récents.

[62]           La Commission était en droit de tenir compte de l’ensemble du dossier et n’est pas liée par les conclusions concernant la crédibilité que le premier tribunal avait tirées.

[63]           Il semble que la Commission n’ait relevé ni le signalement des insultes racistes dans le FRP initial, malgré son examen de la transcription précédente, ni l’explication du demandeur selon laquelle il était retourné en Afrique du Sud en 2004 afin d’obtenir un nouveau permis de travail. Néanmoins, la Commission était en droit de se fonder sur le retard du demandeur à présenter sa demande d’asile – une démarche qu’il n’a entreprise qu’en 2008 bien qu’il ait affirmé s’être rendu compte en 2004 qu’il ne pourrait retourner vivre en Afrique du Sud et qu’il soit revenu au Canada en 2005.

[64]           La Commission a déclaré que le fait de ne pas demander l’asile dès son arrivée au pays peut jeter le doute sur la crédibilité d’un demandeur, mais que le retard ne se mesure qu’à compter de la date à laquelle le demandeur commence à craindre la persécution. Elle a mitraillé le demandeur de questions sur les raisons de son retard à présenter sa demande d’asile. Il a donné diverses réponses : ce n’est qu’en juin 2007 qu’il a su qu’il pouvait présenter une demande d’asile; il y a eu un retard additionnel parce qu’il croyait qu’il fallait être bilingue pour obtenir la résidence permanente; puis, il avait d’autres choses à faire; et puis, il a fallu un certain temps pour remplir les formulaires. La Commission a conclu que l’explication du demandeur pour justifier son retard n’était pas raisonnable.

[65]           De plus, à l’audience de novo, lorsqu’il s’est fait demander s’il avait personnellement été victime de persécution du fait de sa race, il a répondu par la négative. Il est raisonnable de la part de la Commission de demander pourquoi il a plus tard changé sa version des faits.

[66]           La Commission a clairement conclu que le retard minait la crédibilité du demandeur relativement à sa crainte subjective de persécution advenant son retour en Afrique du Sud. Elle a ajouté que cette conclusion concernant la crédibilité ne compromettait pas toutes les facettes de la demande d’asile et a continué d’examiner cette demande.

La Commission a-t-elle ignoré, mal interprété ou mal compris la preuve documentaire volumineuse et a-t-elle omis d’expliquer pourquoi elle préférait sa propre preuve à celle fournie par le demandeur? 

[67]           Le demandeur soutient que les témoignages par affidavit de deux experts et les nombreux articles et reportages démontrent l’existence d’une persécution fondée sur l’origine raciale et les opinions politiques en Afrique du Sud. Or, la Commission a préféré la preuve versée dans le cartable national de documentation sans donner d’explications.

[68]           Le demandeur a fait renvoi à la preuve importante fournie par le professeur Stanton et Adriana Stuijt qu’il a présentée et qui appuie la thèse selon laquelle l’Afrique du Sud en est aux dernières étapes des préparatifs en vue d’un génocide. Le demandeur soutient que la Commission a omis d’expliquer de quelle manière elle a apprécié ces témoignages et, si elle les a rejetés, pourquoi elle l’a fait.

[69]           Le demandeur fait valoir que la Commission a indiqué que la documentation versée dans le cartable standard provient d’organisations qui sont réputées pour leur travail sérieux et dont les rapports se sont avérés fiables, et que les documents issus de l’examen périodique universel sont le résultat de la rencontre de membres de la société civile sud-africaine et de représentants de l’État à un forum international où ils présentent leurs points de vue et engagent un dialogue. Le demandeur soutient que cette explication est insuffisante; la Commission doit expliquer pourquoi la preuve documentaire d’une partie est préférée à celle de l’autre partie. De plus, il soutient qu’il ne faut pas se fier aux documents de l’examen périodique universel parce que ceux-ci ne confirment pas que les points de vue de la société civile sud-africaine ont été pris en compte. Le demandeur signale également que le rapport du ministère de l’Intérieur du Royaume-Uni auquel s’est fiée la Commission était basé sur l’examen périodique universel, auquel il ne faut pas se fier parce que les statistiques sur les actes criminels ne tiennent pas compte de l’origine ethnique des victimes; par conséquent, ces rapports ne rendent pas compte des actes criminels commis pour des motifs raciaux.

[70]           Le demandeur soutient que le raisonnement de la Commission manque de cohérence étant donné qu’elle se dit préoccupée par les renseignements sur un génocide possible avancés par le professeur Stanton et Adriana Stuijt, mais qu’elle préfère tout de même sa propre preuve. Selon le demandeur, la Commission doit formuler une conclusion sans équivoque sur ces renseignements, mais omet de le faire.

[71]           Le demandeur affirme en outre que la Commission doit expliquer pourquoi elle préfère sa propre preuve. Elle est tenue de relever les « facteurs opposés » au sein de la preuve et de procéder à une analyse comparative (Guerrero c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 384, aux paragraphes 31 et 32, [2010] ACF no 448 [Guerrero]).

[72]           La position du défendeur est qu’il y avait une quantité considérable d’éléments de preuve et qu’il est clair que la Commission les a tous examinés, leur a accordé le poids qu’elle jugeait approprié, et a accordé plus de poids au CND (y compris aux documents de l’examen périodique universel) parce que ces rapports étaient plus récents et plus crédibles. Il serait déraisonnable de s’attendre à ce que la Commission fasse des renvois précis à plus de 1 000 pages de preuve. De plus, selon le défendeur, la Commission a conclu que les affidavits d’expert présentés par le demandeur soulevaient des préoccupations à la lumière de la preuve objective à l’effet contraire.

La Commission n’a ignoré aucun élément de preuve; elle a apprécié la preuve et justifié de manière adéquate pourquoi elle préférait la preuve versée dans le cartable national de documentation à celle fournie par le demandeur.

[73]           La décision de la Commission passe en revue de manière minutieuse l’ensemble de la preuve présentée : celle du demandeur, qui était volumineuse, et celle faisant partie du cartable national de documentation. La Commission a signalé les éléments de preuve contradictoires et a noté les préoccupations sérieuses soulevées dans la preuve fournie par le demandeur.

[74]           Il est clair que la Commission n’a pas rejeté la preuve du demandeur. Toutefois, elle a conclu que la preuve faisant partie du CND – qui ne faisait pas état, dans la même mesure, de problèmes de violence raciale à l’endroit des Blancs et qui ne signalait pas du tout la possibilité d’un génocide – était plus crédible. Il incombe à la Commission d’examiner et d’apprécier la preuve, et c’est ce qu’elle a fait. Il n’incombe pas à la Cour de procéder à une nouvelle appréciation de la preuve.

[75]           La Commission a fait observer que même si les rapports des Nations Unies soulevaient de nombreuses préoccupations liées aux droits de la personne, les organismes internationaux n’ont pas signalé que la discrimination contre la population blanche était un problème important.

[76]           La Commission a expressément renvoyé à la preuve soumise par le demandeur, soit les affidavits du professeur Stanton et d’Adriana Stuijt et les articles joints. Toutefois, elle a conclu que les rapports publiés dans le cadre de l’examen périodique universel concernant l’Afrique « ne font absolument pas écho aux inquiétudes exprimées tant par le Professeur Stanton que par Mme Stuijt quant à l’imminence de la planification d’un génocide visant les Africains du Sud de couleur blanche. Pas plus d’ailleurs que les rapports produits par les différents organismes et qui sont compris dans le Cartable national de documentation sur l’Afrique du Sud ».

[77]           La Commission n’aurait pas pu tirer cette conclusion si elle n’avait pas analysé la preuve présentée par le demandeur.

[78]           Le demandeur soutient que la Commission manque de cohérence du fait qu’elle signale les préoccupations soulevées par sa preuve, mais écarte cette preuve. Je ne suis pas d’accord qu’il s’agit là d’un manque de cohérence. Cela fait partie de la tâche d’apprécier la preuve et de décider s’il convient d’accorder plus de poids à certains éléments de preuve qu’à d’autres. La Commission a reconnu que les renseignements laissant planer la préparation d’un génocide étaient préoccupants, mais que des mesures pouvaient être prises maintenant pour corriger les présumées atteintes aux droits de la personne. Elle a conclu qu’il convenait d’accorder plus de poids à la preuve versée dans le CND.

[79]           Comme l’a signalé le juge Mosley dans Smith c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 1283, [2012] ACF no 1376 [Smith], la Commission a le pouvoir discrétionnaire d’accepter ou de rejeter la preuve et de lui accorder le poids qu’elle juge appropriée :

[49]      Il appert de la décision que le commissaire a lu et examiné tous les avis d’expert présentés. Il avait le pouvoir discrétionnaire de rejeter certains ou l’ensemble de ces éléments de preuve. La Cour reconnaît que le commissaire aurait pu parvenir à une conclusion différente à partir de l’ample documentation soumise par la demanderesse relativement aux expériences des gais et des lesbiennes dans l’armée américaine. La Cour n’a pas à réévaluer cette preuve, mais plutôt à déterminer si la Commission en a fait un usage déraisonnable. Que le commissaire ait sommairement récapitulé les documents et les raisons qui l’ont amené à les écarter ne suffit pas à invalider son choix. Comme l’expliquait la Cour suprême dans Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c Terre‑Neuve‑et‑Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62, [2011] RCS 708 :

[16]      Il se peut que les motifs ne fassent pas référence à tous les arguments, dispositions législatives, précédents ou autres détails que le juge siégeant en révision aurait voulu y lire, mais cela ne met pas en doute leur validité ni celle du résultat au terme de l’analyse du caractère raisonnable de la décision. Le décideur n’est pas tenu de tirer une conclusion explicite sur chaque élément constitutif du raisonnement, si subordonné soit‑il, qui a mené à sa conclusion finale (Union internationale des employés des services, local no 333 c. Nipawin District Staff Nurses Assn., [1975] 1 R.C.S. 382, p. 391). En d’autres termes, les motifs répondent aux critères établis dans Dunsmuir s’ils permettent à la cour de révision de comprendre le fondement de la décision du tribunal et de déterminer si la conclusion fait partie des issues possibles acceptables.

[80]           Se fondant sur Coitinho c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 1037, [2004] ACF no 1269 [Coitinho], le demandeur a fait valoir qu’un décideur est tenu de fournir des motifs justifiant sa préférence d’un ensemble de preuve documentaire à un autre. Je note que le demandeur a présenté la même observation à la Commission et que cette dernière a fait précisément renvoi au passage de la décision Coithino sur lequel se fondait le demandeur. En l’espèce, la Commission a bel et bien expliqué pourquoi elle préférait la preuve versée dans le CND, si bien que la situation n’est pas assimilable aux motifs mis en cause dans Coithino.

[81]           Au paragraphe 7 de la décision Coithino, la juge Snider a conclu ce qui suit :

[7]        La Commission tire ensuite une conclusion très troublante. Sans affirmer que la preuve présentée par les demandeurs n’est pas crédible, la Commission « accorde plus de poids à la preuve documentaire parce qu’elle provient de sources connues, informées et qui n’ont aucun intérêt dans l’issue de la présente audience ». Cela revient à dire qu’on devrait toujours privilégier la preuve documentaire aux dépens de la preuve présentée par le demandeur d’asile parce que ce dernier a un intérêt dans l’issue de l’audience. Si on l’acceptait, ce raisonnement aurait pour effet de toujours écarter la preuve soumise par un demandeur d’asile. La décision de la Commission ne fait pas état des raisons pour lesquelles la preuve présentée par les demandeurs, bien qu’elle fût censée être présumée véridique (Adu, précité), a été jugée suspecte. De plus, ce raisonnement ne tient pas eu égard aux faits de la présente affaire.

[Non souligné dans l’original.]

[82]           Comme nous l’avons vu, la Commission est en droit d’apprécier la preuve et de préférer celle qui provient de sources réputées et bien informées. Le problème soulevé dans Coithino était que la preuve avait aussi été préférée parce qu’elle provenait de sources n’ayant aucun intérêt dans l’issue de l’audience. Rien ne permet de conclure que la Commission a appliqué le même raisonnement en l’espèce.

[83]           Pour ce qui est de l’argument du demandeur selon lequel la Commission est tenue de relever les facteurs opposés (ou les éléments de preuve opposés ou contradictoires), de mener une analyse comparative et d’expliquer en quoi certains facteurs étaient plus convaincants que d’autres, j’estime que le précédent sur lequel il se fonde n’est pas du tout analogue ou applicable et qu’il n’appuie pas un tel principe général.

[84]           Dans la décision Guerrero, précitée, la question était de savoir si la Commission avait pris en considération de manière raisonnable la preuve visant à réfuter la présomption que le demandeur avait commis un crime grave de nature non politique et si elle avait omis de présenter l’analyse se rapportant à sa décision.

[85]           Dans les passages sur lesquels se fonde le demandeur, la Cour a fait observer ce qui suit :

[31]      En l’espèce, la SPR a certainement renvoyé à Jayasekara et énuméré les facteurs qui y sont énoncés, et j’estime que le demandeur a raison de dire que, implicitement du moins, la SPR a manifestement démontré un processus d’appréciation et que, en définitive, elle a décidé que les facteurs atténuants invoqués par le demandeur ne suffisaient pas à réfuter la présomption d’un crime grave de droit commun. Or la décision ne va pas plus loin.

[32]      Nous ne connaissons pas les raisons pour lesquelles la SPR a conclu que certains facteurs étaient plus convaincants que d’autres. Il n’y a pas d’évaluation véritable des divers facteurs ni rien qui explique comment et pourquoi la SPR est arrivée à sa conclusion. La décision n’est encore qu’une énumération de facteurs suivie d’une conclusion imprécise, même s’il est clair, implicitement, que la SPR n’a pas considéré les circonstances atténuantes invoquées par le demandeur comme suffisamment convaincantes pour réfuter la présomption.

[86]           Les faits et le contexte de la décision rendue par la Commission dans Guerrero étaient complètement différents. En l’espèce, il n’y a pas de facteurs atténuants ou aggravants à prendre en considération ou à pondérer en vue de décider si une présomption a été refusée; il y a plutôt une grande quantité de preuve à apprécier pour déterminer si le demandeur serait exposé à la persécution. Il serait déraisonnable d’exiger que la Commission renvoie à chaque document sur lequel un demandeur s’est fondé ou auquel il a fait renvoi, qu’elle accorde un poids précis à chaque document ou qu’elle attribue une cote comparative aux compétences de chaque expert ou auteur d’un rapport.

[87]           En l’espèce, la Commission ne s’est pas contentée de dresser une liste des facteurs ou des éléments de preuve qui appuyaient la position de M. Huntley et une liste des éléments de preuve qui réfutaient sa position. Elle a apprécié la preuve, a signalé les préoccupations qui en découlaient et a expliqué pourquoi elle préférait la preuve contenue dans le CND, qui incluait des rapports du ministère de l’Intérieur du Royaume-Uni, le rapport des Nations-Unies issu de l’examen périodique universel et le rapport de Freedom House.

[88]           La décision de la Commission est conforme aux principes établis dans Cepeda-Gutierrez c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1998), 157 FTR 35, [1998] ACF n1425 [Cepeda-Gutierrez]. Comme l’a affirmé le juge Evans au paragraphe 17 de Cepeda-Gutierrez,

plus la preuve qui n’a pas été mentionnée expressément ni analysée dans les motifs de l’organisme est importante, et plus une cour de justice sera disposée à inférer de ce silence que l’organisme a tiré une conclusion de fait erronée « sans tenir compte des éléments dont il [disposait] » : Bains c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), (1993), 63 F.T.R. 312 (C.F. 1re inst.). Autrement dit, l’obligation de fournir une explication augmente en fonction de la pertinence de la preuve en question au regard des faits contestés. Ainsi, une déclaration générale affirmant que l’organisme a examiné l’ensemble de la preuve ne suffit pas lorsque les éléments de preuve dont elle n’a pas discuté dans ses motifs semblent carrément contredire sa conclusion. Qui plus est, quand l’organisme fait référence de façon assez détaillée à des éléments de preuve appuyant sa conclusion, mais qu’elle passe sous silence des éléments de preuve qui tendent à prouver le contraire, il peut être plus facile d’inférer que l’organisme n’a pas examiné la preuve contradictoire pour en arriver à sa conclusion de fait.

[89]            En l’espèce, la Commission n’a pas passé sous silence des éléments de preuve et ne s’est pas contentée d’une déclaration générale affirmant qu’elle avait examiné l’ensemble de la preuve. Elle a renvoyé à la preuve du demandeur de manière détaillée et a signalé les différences entre cette preuve et la preuve figurant dans le CND. Il est clair qu’elle n’a pas ignoré les éléments de preuve contradictoires. Elle est arrivée à ses conclusions sur la base de son appréciation de la preuve, ce qu’elle était en droit de faire.

La Commission a-t-elle commis une erreur en appliquant le mauvais critère factuel relativement à l’article 96 en vue de décider si M. Huntley pourrait être exposé à la persécution en Afrique du Sud?

[90]           Selon le demandeur, la Commission exigeait, à titre de condition préalable pour démontrer qu’il existe un risque de persécution, [traduction] « l’existence d’une oppression généralisée de la population blanche ou l’existence de préparatifs en vue d’un génocide contre cette population en Afrique du Sud ». Il soutient que la Commission a commis une erreur en appliquant ce critère relativement à l’article 96. Le bon critère consiste à vérifier s’il y a à la fois une crainte subjective véritable d’être persécuté et des éléments de preuve objectifs étayant cette crainte.

[91]           Le demandeur soutient avoir fourni suffisamment de preuves pour démontrer à la fois sa crainte subjective et le fondement objectif de cette crainte. Il affirme qu’il n’est pas tenu de démontrer qu’il serait effectivement persécuté, mais seulement qu’il a une crainte véritable et qu’il fait partie du groupe qui est présentement exposé aux risques allégués (Salibian c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1990] 3 CF 250, [1990] ACF no 454 (CAF), Fi c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 1125, [2007] 3 RCF 400) [Fi].

[92]           Selon le demandeur, il fait partie d’un groupe de Blancs qui sont habités par la crainte et c’est tout ce qu’il a à démontrer; il n’y aucun autre élément plus personnel ou plus précis à établir. Il soutient que la Commission a omis de prendre en compte ses craintes à l’égard du président et des autres dirigeants politiques qui scandent des slogans et chantent des chansons qui incitent à la violence contre les Blancs.

[93]           Selon le défendeur, la Commission a correctement examiné la question de savoir si le demandeur avait une crainte fondée de persécution et est arrivée à la décision raisonnable que ce n’était pas le cas. La Commission a signalé que des événements passés peuvent justifier des craintes actuelles, mais que les événements passés décrits par le demandeur n’étaient pas liés à son origine raciale. Ensuite, elle a correctement examiné les allégations du demandeur concernant de nouvelles craintes de persécution du fait liée au fait qu’il est de race blanche et qu’il a nui à la réputation de son pays en prenant la parole en public à la suite de l’issue favorable de sa première demande d’asile. La Commission s’est penchée sur la question de savoir s’il y avait des éléments de preuve objectifs démontrant l’existence d’une crainte fondée de persécution. Elle a conclu que le demandeur n’avait pas présenté de preuve objective à l’appui de sa crainte subjective que quelqu’un voudrait lui causer du tort s’il retournait en Afrique du Sud.

La Commission a appliqué le bon critère relativement à l’article 96

[94]           La Commission a appliqué le bon critère pour décider si le demandeur a une crainte fondée de persécution. Elle a clairement énoncé le critère auquel il faut satisfaire :

[…] il n’est pas nécessaire de prouver qu’il a été dans le passé ou qu’il sera à l’avenir l’objet de mesures de persécution. En fait, ce que la preuve doit établir, c’est que le demandeur craint avec raison d’être persécuté pour l’une des raisons énoncées dans la Loi. En outre, pour conclure à l’existence d’une crainte raisonnable de persécution ou, autrement dit, d’une possibilité raisonnable ou sérieuse de persécution, il n’y a pas à y avoir une possibilité supérieure à 50% (c’est-à-dire une probabilité), mais il doit exister davantage qu’une possibilité minime, étant entendu qu’entre ces deux limites, il n’y a pas d’exigence intermédiaire [renvois omis].

[95]           Voilà le critère qu’il faut appliquer (Adjei c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1989] 2 CF 680, [1989] ACF no 67, au paragraphe 8 (CAF)) et il ressort des motifs que la Commission a appliqué ce critère.

[96]           La Commission a longuement questionné le demandeur au sujet de ses craintes. La transcription révèle que ses réponses étaient vagues et variées. Il a affirmé être un homme [traduction] « marqué », mais sa description de ce qui se produirait à son arrivée à l’aéroport en Afrique du Sud relevait de la conjecture. Il a reconnu qu’il ne faisait l’objet d’aucun mandat d’arrestation.

[97]           La Commission a noté les affirmations du demandeur selon lesquelles il est maintenant connu en Afrique du Sud en raison de sa notoriété médiatique antérieure et il ne fait pas confiance au système judiciaire du pays. Elle a aussi signalé le témoignage du demandeur selon lequel les dirigeants politiques scandent des slogans pour inciter à la haine contre les Blancs et les Blancs sont ciblés, agressés et tués à cause de la couleur de leur peau. Toutefois, lors de son propre témoignage à la Commission, le demandeur a affirmé qu’il n’était au courant d’aucun homme blanc tué par un Noir en raison des slogans et des chansons des dirigeants politiques.

[98]           Même après avoir conclu que le demandeur n’avait soumis aucune preuve objective à l’appui de ses prétendues craintes, la Commission a examiné la question de savoir s’il était possible de démontrer la crainte de persécution en examinant le traitement de personnes dans des situations similaires à celles du demandeur. Elle a examiné la preuve documentaire fournie, mais a conclu qu’elle ne permettait pas de conclure que le demandeur avait une crainte fondée de persécution.

[99]           Le demandeur soutient que la Commission a ignoré un principe qu’elle a en fait reconnu – soit que la preuve ne doit pas nécessairement démontrer que le demandeur a subi ou subira la persécution, mais doit établir qu’il « craint avec raison d’être persécuté pour l’une des raisons énoncées dans la Loi ». 

[100]       La Commission a renvoyé aux observations du juge Martineau dans Fi et a cité des extraits de cette décision. Dans Fi, le juge Martineau a expliqué ce qui suit :

[14]      Cela dit, il est bien établi en droit que l’existence de la persécution en vertu de l’article 96 de la LIPR peut être établie par un examen du traitement de personnes qui sont dans une situation semblable à celle du demandeur et que celui‑ci n’a pas à prouver qu’il a été persécuté dans le passé ou qu’il serait persécuté à l’avenir. Lorsqu’il s’agit de revendications fondées sur des situations où l’oppression est généralisée, la question n’est pas de savoir si le demandeur est plus en danger que n’importe qui d’autre dans son pays, mais plutôt de savoir si les manœuvres d’intimidation ou les mauvais traitements généralisés sont suffisamment graves pour étayer une revendication du statut de réfugié. Si une personne comme le demandeur est susceptible de faire l’objet d’un préjudice grave de la part des autorités de son pays et si ce risque est attribuable à son état civil ou à ses opinions politiques, alors elle est à juste titre considérée comme une réfugiée au sens de la Convention. (Salibian c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1990] 3 C.F. 250 (C.A.), à la page 259; Ali c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] A.C.F. no 63 (C.A.) (QL).

[…]

[16]      Par conséquent, une demande d’asile présentée dans un contexte de violence généralisée dans un pays donné doit satisfaire aux mêmes exigences que toute autre demande. Le contenu de ces exigences n’est pas différent pour une telle demande et celle‑ci ne fait pas l’objet d’exigences supplémentaires ou de déchéance. À la différence de l’article 97 de la LIPR, en vertu de l’article 96 de la LIPR, il n’y a aucune obligation que le demandeur démontre que sa crainte de la persécution est « personnalisée » s’il peut démonter autrement qu’elle est « entretenue [. . .] par un groupe auquel il est associé ou, à la rigueur, par tous les citoyens en raison d’un risque de persécution fondé sur l’un des motifs énoncés dans la définition [de réfugié au sens de la Convention] » (Salibian, susmentionnée, à la page 258).

[101]       La Commission a noté qu’il fallait regarder au-delà de la situation personnelle du demandeur pour évaluer le risque auquel il est exposé. Elle a pris en considération les observations du demandeur selon lesquelles il fait partie d’un groupe qui est persécuté du fait de sa race en Afrique du Sud et que ce groupe est peut-être menacé d’un génocide.

[102]       Toutefois, de l’avis de la Commission, étant donné que cette preuve dans son ensemble ne confirme pas l’existence d’une oppression généralisée de la population blanche ou l’existence de préparatifs en vue de commettre un génocide contre cette population en Afrique du Sud, le demandeur n’avait pas établi l’existence d’une possibilité raisonnable ou d’une possibilité sérieuse de persécution advenant son retour en Afrique du Sud du simple fait qu’il appartient à un groupe racial ou ethnique constitué des citoyens blancs de l’Afrique du Sud.

[103]       La Commission a conclu qu’il n’y avait pas d’oppression générale, mais, contrairement à ce que soutient le demandeur, elle n’a pas conclu qu’il s’agissait d’une [traduction] « condition préalable »; elle a conclu qu’il n’y avait pas de preuve objective à l’appui de sa crainte. Étant donné que le demandeur se fondait sur l’existence d’une oppression générale pour démontrer sa crainte, il n’a pas établi qu’il craint d’être persécuté.

[104]       En ce qui a trait à la demande d’asile sur place et à l’observation du demandeur selon laquelle la crédibilité liée aux événements passés n’a aucun rapport avec sa demande sur place, je conviens que, dans Mohajery, le juge Blanchard a indiqué qu’il fallait examiner la demande sur place (au paragraphe 32) :

Il convient de mentionner que cette analyse doit être faite, et ce, même si le récit du demandeur dans son entier ou sur ses activités dans son pays d’origine n’a pas été cru, dans la mesure où des éléments de preuve digne[s] de foi établissent les activités au Canada au soutien de la demande de réfugié sur place.

[105]       Contrairement à ce que soutient le demandeur, la Commission a analysé la demande sur place.

[106]       Même si l’analyse de la Commission est concise, son raisonnement est clair lorsqu’on l’examine conjointement avec le dossier, comme le préconise l’arrêt Newfoundland Nurses, précité.

[107]       La Commission a rejeté la demande sur place, en notant ce qui suit :

[…] le témoignage du demandeur relève de la pure spéculation. Autrement dit, le demandeur n’a présenté pendant son témoignage et dans les documents qu’il a déposés en preuve aucun élément de preuve objectif permettant d’établir que du simple fait que son nom a été mentionné dans les journaux sud-africains ou lors d’émissions de télévision en lien avec sa demande d’asile au Canada et des réactions qui ont suivi, il découle que l’on voudra s’en prendre à lui.

[108]       Cette conclusion est raisonnable; le demandeur n’a pas fourni la preuve requise pour étayer sa demande sur place. Par exemple, il affirme dans son FRP mis à jour que des menaces ont été proférées contre lui sur Facebook, mais il n’était pas en mesure de présenter de preuve à l’appui. De même, il affirme que sa mère a vu son visage sur un autobus dans une publicité pour un journal, mais il ne savait pas le nom de ce journal.

[109]       La Commission s’est penchée sur la question clé : est-ce que le demandeur, au moyen de son témoignage et compte tenu de l’ensemble de la preuve documentaire, a établi qu’il avait raison de craindre d’être persécuté à l’avenir du fait de sa race, de sa nationalité ou de ses opinions politiques s’il devait retourner en Afrique du Sud? Elle est arrivée à la conclusion raisonnable que tel n’était pas le cas.

La Commission a-t-elle commis une erreur en concluant qu’il existait une protection adéquate de l’État en Afrique du Sud et que le demandeur n’avait pas réfuté cette présomption?

[110]       Selon le demandeur, la Commission a conclu qu’il existe une protection adéquate de l’État sur la base d’institutions étatiques et de lois qui n’assurent que [traduction] « théoriquement » des moyens de recours en cas de persécution. Selon le demandeur, sa preuve démontre que la police et l’État n’assurent pas cette protection. Il signale le nombre de plaintes déposées contre les policiers (5 869) comparativement aux déclarations de culpabilité recensées (59) pour démontrer l’échec de ces mécanismes de protection (en citant le rapport du département d’État américain (DOS) 2011 Country Reports on Human Rights Practices: South Africa). Le demandeur a fait renvoi à la preuve volumineuse qu’il a soumise, notamment le rapport intitulé « Broken Blue Line » qui signale que les policiers sont souvent les auteurs de la persécution et de la violence.

[111]       Le demandeur soutient que la décision de la Commission ne fait que décrire le système judiciaire, sans expliquer en quoi cela démontre que la protection de l’État est adéquate.

[112]       Il soutient aussi que le fait de ne pas avoir tenté de se prévaloir de la protection de l’État il y a plus de neuf ans, avant son arrivée initiale au Canada, n’a aucun rapport avec sa présente demande d’asile.

[113]       Selon le défendeur, la conclusion de la Commission selon laquelle le demandeur n’a pas réfuté la présomption de la protection de l’État est raisonnable. Il incombe au demandeur d’établir, selon la prépondérance des probabilités, que la protection de l’État est inadéquate. La présomption n’est pas réfutée du simple fait que la documentation soumise est abondante : Smith, au paragraphe 51.

[114]       D’après le défendeur, la Commission a conclu que, malgré les indices de corruption au sein de la police, il y a des mécanismes de la protection de l’État en Afrique du Sud. Par conséquent, le demandeur devait tenter de se prévaloir de cette protection dans son pays d’origine avant de demander l’asile dans un autre pays; or, il n’a fait aucune démarche en ce sens.

La conclusion de la Commission selon laquelle la protection de l’État était adéquate et le demandeur n’avait pas réfuté la présomption de la protection de l’État est raisonnable

[115]       La conclusion de la Commission concernant la possibilité de se prévaloir de la protection de l’État en Afrique du Sud est raisonnable.

[116]       Voici ce que le juge Mosley a écrit à cet égard dans la décision Smith :

[50]      Comme l’a déclaré la Cour d’appel fédérale dans Carillo c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de ’Immigration), 2008 CAF 94, au paragraphe 38, le demandeur d’asile qui soutient que la protection de l’État est inadéquate ou inexistante dans son pays d’origine doit s’acquitter du fardeau de présentation en produisant une preuve à cet effet, de même que du fardeau ultime de convaincre le juge des faits que la demande d’asile est, à cet égard, fondée.

[51]      La norme de preuve applicable est la prépondérance des probabilités, et la présomption voulant que la demandeure d’asile puisse se prévaloir de la protection de l’État peut être réfutée par une preuve claire et convaincante. Le simple fait de soumettre une preuve abondante sous forme d’opinion, ou le sentiment de la demandeure d’asile que de la protection de l’État lui est refusée,  ne suffiront pas : Judge c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 1089, aux paragraphes 8 à 10. En l’absence de preuve montrant qu’elle a cherché à obtenir ladite protection, il est impossible de savoir si elle aurait obtenu quelque chose. Spéculer sur le caractère inadéquat de la protection de l’État ne suffit pas : Hinzman, Re, 2007 CAF 171, aux paragraphes 57 et 58

[52]      Les demandeurs d’asile sont tenus de chercher à obtenir la protection adéquate que l’État peut leur offrir, même si elle n’est ni parfaite ni toujours efficace. Il est déraisonnable d’attendre d’une demandeure d’asile qu’elle mette sa vie en danger pour démontrer que cette protection échoue, mais les actes d’oppression commis par certaines personnes en position d’autorité en un lieu et à un moment précis ne permettent pas forcément de conclure que l’État, dans son ensemble, est un agent de persécution, ou qu’il n’offre aucune protection. Quelle que soit sa crainte subjective de persécution, la demanderesse doit réfuter la présomption objective voulant que l’État soit en mesure de la protéger. Ce fardeau est encore plus lourd lorsqu’il s’agit d’un pays qui reconnaît la primauté du droit, comme les États‑Unis : arrêt Hinzman, précité, au paragraphe 46. La protection d’un autre pays ne doit être demandée qu’en dernier recours, et non comme une solution de rechange commode ou préférable.

[117]       La Commission a pris en considération et appliqué les principes pertinents de la jurisprudence.

[118]       La Commission a ensuite examiné la question de savoir si le demandeur pouvait s’attendre à obtenir une protection adéquate de l’État à son retour – compte tenu de sa crainte de persécution et de sa crainte d’être exposé à une menace pour sa vie advenant un tel retour. Elle a questionné le demandeur au sujet de ce qui, d’après lui, se produirait à son retour en Afrique du Sud. Ses réponses étaient vagues et hypothétiques.

[119]       La Commission a fait renvoi aux observations du demandeur selon lesquelles une note du ministère de l’Intérieur du Royaume-Uni, soit la UK Border Agency Operational Guidance Note for South Africa (February 2012), démontre que la protection de l’État en Afrique du Sud n’est ni efficace ni adéquate.  

[120]       La Commission a reconnu que ce document atteste de l’existence de problèmes en Afrique du Sud du fait que certains policiers agissent avec impunité. Toutefois, elle a signalé la preuve documentaire figurant dans le CND qui fait renvoi à une conduite similaire des policiers et qui donne des exemples des mesures correctives mises en place, notamment la création de la Direction indépendante d’examen des plaintes contre la police, le dépôt d’accusations et des poursuites qui ont porté fruit. La Commission a pris acte de l’existence de retards excessifs dans le système judiciaire, mais a aussi signalé que les juges sont indépendants. Elle a renvoyé aux rapports du ministère de l’Intérieur du Royaume-Uni et de Freedom House sur le système judiciaire de l’Afrique du Sud, à la hiérarchie des tribunaux et à leurs compétences respectives, et à l’indépendance du pouvoir judiciaire. La Commission a signalé que la Cour constitutionnelle de l’Afrique du Sud s’était penchée sur la discrimination à l’encontre des Blancs.

[121]       La Commission a également renvoyé à la Constitution et aux lois qui interdisent la discrimination.

[122]       De plus, la Commission a signalé le témoignage du demandeur concernant sa crainte de persécution à l’avenir en raison des slogans et messages des dirigeants politiques qui incitent à la persécution des Blancs et en raison de sa notoriété à la suite de sa première demande d’asile.

[123]       La Commission s’est penchée sur la question de savoir si le demandeur était tenu de solliciter la protection de l’État ou s’il n’y était pas tenu en raison de sa crainte d’être persécuté par des policiers qui sont des agents de l’État. Selon elle, « la bonne question à se poser est de savoir s’il est raisonnable d’exiger du demandeur qu’il ait, d’une façon ou d’une autre, dans le passé, sollicité la protection de son État ou qu’à l’avenir, il sollicite cette protection, et ce même s’il existe des policiers qui, dans certains cas, sont des agents persécuteurs ».

[124]       La Commission a noté que le demandeur avait indiqué qu’il aurait peur de signaler un incident à un policier blanc, car les policiers blancs travaillent avec des policiers noirs. Il a indiqué que toute dénonciation serait futile, que les juges ne sont pas indépendants et qu’il existe une attitude générale à l’égard des citoyens blancs. Toutefois, il a admis devant la Commission, en réponse à ses questions, qu’il n’avait aucune preuve que [traduction] « sa dénonciation n’ira[it] nulle part ». s’il sollicitait la protection de l’État ou signalait un incident.

[125]       La Commission a aussi noté que le demandeur n’avait fourni aucune preuve démontrant que des policiers agissaient de façon concertée ou que la dénonciation d’une situation de persécution du fait de son origine raciale ou de ses opinions politiques l’exposerait à des risques.

[126]       La Commission a conclu que, faute de telles preuves, il faut tenir pour acquis qu’il existe en Afrique du Sud un processus judiciaire équitable et impartial, et ce, « malgré les faiblesses qui sont les siennes. »

[127]       La Commission a passé en revue plusieurs recours possibles à la disposition du demandeur, tout en notant qu’il ne s’était prévalu d’aucune d’entre elles.

[128]       La Commission a conclu qu’il était raisonnable de s’attendre à ce que le demandeur tente d’obtenir la protection de son propre pays avant de présenter une demande d’asile. Étant donné qu’il n’avait fait aucun effort en ce sens, il n’avait pas, compte tenu de toutes les circonstances, réfuté la présomption de la protection de l’État. Les conclusions de la Commission sont raisonnables.

[129]       La présomption de la protection de l’État est le reflet et la confirmation de la raison d’être de la protection internationale à titre de mesure auxiliaire qui entre en jeu lorsque les demandeurs ne disposent d’aucune solution de rechange (Canada (Procureur général) c Ward, [1993] 2 RCS 689, 103 DLR (4th) 1 [Ward]).  L’Afrique du Sud est une démocratie fonctionnelle, malgré les difficultés qu’elle peut avoir, tout comme de nombreux autres pays démocratiques. Par conséquent, le demandeur doit présenter des éléments de preuve clairs et convaincants pour démontrer que, selon la prépondérance des probabilités, il ne pouvait pas obtenir la protection de l’État (Carrillo c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CAF 94, au paragraphe 26) ou ne pourrait pas l’obtenir s’il retournait en Afrique du Sud et la sollicitait.

[130]       Comme l’a signalé le juge Rennie dans Sow c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 646, au paragraphe 10, [2011] ACF no 824, le fardeau qui incombe à un demandeur de réfuter la présomption de la protection de l’État varie selon le degré de démocratie :

[10]      Ce principe s’inscrit dans un contexte, toutefois, et il n’est pas absolu, la présomption variant selon la nature de la démocratie dans le pays en cause. Le fardeau de preuve incombant au demandeur d’asile est proportionnel au degré de démocratie dans ce pays et à la place qu’y occupe l’État dans l’« éventail démocratique » (Kadenko c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1996] ACF no 1376, au paragraphe 5; Avila c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 359, au paragraphe 30; Capitaine c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 98, aux paragraphes 20 à 22).

[131]       Par conséquent, les efforts du demandeur en vue de réfuter la présomption ont été examinés à la lumière du degré de démocratie et du caractère adéquat de la protection de l’État. Toutefois, le demandeur est tenu de prendre certaines mesures – même lorsqu’il présente une demande sur place – et ne peut se fonder sur sa conviction personnelle que la police ne fera rien.

[132]       Dans Ruszo c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2013 CF 1004, [2013] ACF no 1099, le juge en chef a récemment passé en revue la jurisprudence en matière de protection de l’État et a écrit ce qui suit au paragraphe 33 :

[33]      À cet égard, remettre en doute l’efficacité de la protection de l’État sans vraiment la mettre à l’épreuve ou simplement faire valoir une réticence subjective à faire intervenir l’État ne suffit pas à réfuter la présomption de protection de l’État (décisions Ramirez et Kim, précitées). En l’absence d’une explication convaincante, le défaut de prendre des mesures raisonnables pour épuiser toutes les avenues raisonnablement existantes dans l’État d’origine avant de demander l’asile à l’extérieur, est généralement considéré comme un fondement raisonnable pouvant justifier la SPR de conclure qu’un demandeur d’asile n’a pas réfuté la présomption de protection de l’État au moyen d’une preuve claire et convaincante (décision Camacho, précitée).

[133]       Le demandeur a soutenu, en fait, qu’il n’avait aucune obligation de réfuter la présomption parce ce qu’il ne disposerait d’aucune protection adéquate de l’État en Afrique du Sud : la police a la principale responsabilité d’assurer la protection d’État, mais elle est complice de la persécution qu’il craint; et les tribunaux et autres mécanismes de surveillance sont inefficaces. Autrement dit, il serait futile pour lui de faire appel à la police.

[134]       Il n’a fait aucune démarche pour se prévaloir de la protection de l’État en 2004 avant de quitter l’Afrique du Sud, bien qu’il ait affirmé avoir subi six agressions à caractère raciste. Il soutient que cela n’a aucun rapport avec sa présente demande d’asile, qui est fondée sur ses craintes actuelles, et sa demande sur place découlant d’événements plus récents et de la situation en Afrique du Sud. Le demandeur séjourne au Canada sans interruption depuis 2005 et soutient que c’est dans ce contexte qu’il faut examiner la question des efforts en vue de solliciter la protection de l’État.

[135]       Le demandeur n’a pas fourni de preuve suffisante pour convaincre la Commission que la protection de l’État est inadéquate; il n’a par ailleurs produit aucune preuve pour réfuter la présomption qu’il ne disposerait pas d’une telle protection s’il retournait en Afrique du Sud.   Il n’a pas fourni de preuve démontrant que des personnes dans des situations similaires à la sienne avaient été victimes de persécution ou de crimes commis pour des motifs raciaux ou politiques, ou de tout autre type de crime ou de violence, et qu’elles n’avaient pu obtenir la protection de l’État.

[136]       Le demandeur a exprimé uniquement sa croyance subjective que la protection de l’État ne lui serait pas accordée et sa réticence à se prévaloir d’une telle protection. Il n’a pas démontré à la satisfaction de la Commission que cette croyance ou cette réticence étaient fondées. La conclusion de la Commission selon laquelle le demandeur n’a pas réfuté la présomption de la protection de l’État est raisonnable.

[137]       Comme nous l’avons vu, la protection des réfugiés est considérée comme étant une protection auxiliaire en cas de défaillance de la protection nationale. Les personnes persécutées sont tenues de faire appel à leur pays d’origine pour obtenir une protection et d’épuiser tous les recours qui sont raisonnables dans les circonstances avant de demander l’asile dans d’autres pays. 

Question certifiée proposée

[138]       Le demandeur a proposé que la question suivante soit certifiée :

[traduction] Un tribunal a-t-il une obligation plus étendue, lorsqu’il explique le rejet d’un témoignage d’expert, que celle de simplement affirmer que le cartable national de documentation – ou toute autre preuve ne provenant pas d’un expert sur laquelle se fonde le tribunal – ne renferme pas la même information que celle du témoignage d’expert?

[139]       La Cour d’appel fédérale a exposé le critère applicable à la certification d’une question au paragraphe 4 de Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Liyanagamage, [1994] ACF no 1637, 51 ACWS (3d) 910 (CAF)). La question doit transcender les intérêts des parties au litige et porter sur des questions ayant des conséquences importantes et qui sont de portée générale; elle doit également être déterminante quant à l’issue de l’appel.

[140]       Ou, selon la formulation plus simple adoptée dans des affaires subséquentes, pour qu’une question soit certifiée, il doit s’agir d’une question grave de portée générale qui permettrait de régler l’appel.

[141]       Le demandeur soutient que le rejet par la Commission de la preuve sur laquelle il se fondait pour établir sa crainte de persécution était crucial pour sa demande d’asile. Par conséquent, si la réponse à cette question lui est favorable, elle permettrait de régler son appel parce qu’elle signifierait que la Commission a commis une erreur en rejetant sa preuve. Si la preuve d’expert était ensuite acceptée, ce qui établirait que l’Afrique du Sud en est aux ultimes étapes de la préparation d’un génocide, sa crainte objective serait fondée.

[142]       Il affirme que cette question transcende ses propres intérêts étant donné que des milliers de Sud-Africains sont exposés aux mêmes risques que lui, lesquels sont décrits dans sa preuve d’expert. Il réitère que le CND ne renfermait pas la même information que sa preuve d’expert en ce qui concerne la persécution des Blancs et la préparation d’un génocide, car les données sur les actes criminels recueillies par l’examen périodique universel ne tiennent pas compte de l’origine ethnique des victimes. Par conséquent, l’explication de la Commission pour son rejet de la preuve d’expert n’est pas raisonnable.

[143]       Selon le défendeur, la question proposée ne satisfait pas au critère de certification. La question a trait à l’examen et à l’appréciation de la preuve par la Commission, qui se font au cas par cas et qui relèvent de la compétence de la Commission.

[144]       De plus, le défendeur soutient qu’il serait déraisonnable d’imposer une obligation plus étendue à la Commission quant aux motifs à donner lorsqu’elle compare les opinions de personnes désignées comme étant des spécialistes de la situation dans un pays à d’autres éléments de preuve au dossier. Le défendeur signale que cette question a été réglée dans la décision Smith.

[145]       À mon avis, il n’y a pas lieu de certifier la question proposée par le demandeur. J’ai déjà conclu que la Commission n’avait pas rejeté la preuve présentée par le demandeur. La Commission a examiné cette preuve attentivement, mais lui a accordé moins de poids. J’ai également conclu qu’elle avait justifié ce choix. La Commission a signalé l’observation du demandeur selon laquelle l’examen périodique universel ne comportait pas de données sur l’origine ethnique des victimes; toutefois, selon la Commission, cela ne suffisait pas pour accorder moins de poids à l’examen périodique universel ou aux rapports qui reposent sur l’examen périodique universel.

[146]       À l’audition de la présente demande de contrôle judiciaire, le demandeur a soutenu que la Commission est tenue d’effectuer une évaluation comparative de tous les éléments de preuve soumis et d’expliquer ou d’indiquer le poids accordé à tous ces éléments de preuve. Dans une cause telle que la présente, où le demandeur a produit plus de 1 000 pages de preuve provenant de ses témoins experts à l’appui de sa position, il est irréaliste de s’attendre à ce que la Commission fasse renvoi à chaque document et indique pourquoi elle a accordé plus ou moins de poids à chaque document, ou à ce qu’elle vérifie l’expertise particulière de chaque auteur de rapport et leur accorde une cote relative.

[147]       La question proposée donne à entendre que le demandeur a soumis de la preuve d’expert et que le CND renfermait de la preuve de profane. Le demandeur n’avait peut‑être pas cette intention, mais il n’en demeure pas moins que cette proposition est fausse. De toute manière, la Commission a expliqué pourquoi elle accordait un poids important à la documentation du CND, notamment parce qu’elle provenait d’organismes réputés et dignes de foi, comme les Nations Unies.

[148]       Le rôle de la Commission est d’apprécier la preuve. La question proposée vise à modifier les principes établis et reconnus dans la jurisprudence selon lesquels il s’agit du rôle de la Commission, ainsi qu’il est indiqué dans la décision Smith, précitée. De plus, comme nous l’avons vu, la Commission s’est conformée aux principes de la décision Cepeda-Gutierrez, a analysé tous les éléments de preuve importants et s’est acquittée de son obligation de fournir des motifs.

 


JUGEMENT

LA COUR STATUE que la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée. Il n’y a pas de question à certifier.

« Catherine M. Kane »

Juge

Traduction certifiée conforme

Sandra de Azevedo, LL.B.

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


 

DOSSIER :

IMM-2887-13

 

INTITULÉ :

BRANDON CARL HUNTLEY c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

OTtawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 24 MARS 2014

 

JUGEMENT ET MOTIFS DU JUGEMENT:

lA JUGE KANE

 

DATE DES MOTIFS :

Le 17 JUIN 2014

 

COMPARUTIONS :

Leah Garvin

POUR Le demandeur

 

Russell Kaplan

 

POUR LE défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Kaplan Immigration Law Professional Corporation

Avocat

Ottawa (Ontario)

 

POUR Le demandeur

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

 

POUR Le défendeur

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.