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Date : 20140604


Dossier : IMM-2254-13

Référence : 2014 CF 542

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

 

Ottawa (Ontario), le 4 juin 2014

En présence de monsieur le juge Phelan

ENTRE :

TAMAS FARKAS

TAMASNE FARKAS

TAMAS FARKAS

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE

L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS DU JUGEMENT

I.                   Introduction

[1]               La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire de la décision par laquelle la Section de la protection des réfugiés [SPR] a rejeté la demande d’asile des demandeurs (des Roms de Hongrie). Les questions de fond sont le droit des demandeurs de présenter des éléments de preuve après l’audience et l’obligation de la SPR de faire part aux demandeurs des doutes que ces éléments de preuve soulèvent quant à leur crédibilité.

II.                Faits

[2]               La cause des demandeurs a été entendue le 15 octobre 2012. Ils soutenaient que, en tant que Roms, ils étaient victimes de discrimination et de harcèlement en Hongrie en raison de leur origine ethnique rom. Plus particulièrement, les deux époux avaient été menacés et agressés par des membres de la Garde hongroise, un groupe d’autodéfense de droite autodésigné. La police était intervenue à la suite des deux incidents particuliers sur lesquels les demandeurs s’appuyaient pour fonder leur demande d’asile.

[3]               Le commissaire de la SPR a d’abord eu des doutes à propos du récit des demandeurs selon lequel ils avaient demandé l’aide de la police en raison de l’absence de rapports de police corroborant leurs dires. Ces doutes concernant l’exposé circonstancié des demandeurs leur ont été communiqués à l’audience.

[4]               Le 14 novembre, après l’audience, l’avocat des demandeurs à l’époque a demandé l’autorisation de présenter des éléments de preuve qui consistaient uniquement en [traduction] « documents médicaux ou documents de la police corroborants » pour répondre aux doutes sur la crédibilité des demandeurs exprimés par le commissaire lors de l’audience relativement aux principaux événements.

[5]               L’article 43 des Règles de la Section de la protection des réfugiés, DORS/2012-256, permet une telle présentation d’éléments de preuve après l’audience :

43. (1) La partie qui souhaite transmettre à la Section après l’audience, mais avant qu’une décision prenne effet, un document à admettre en preuve, lui présente une demande à cet effet.

43. (1) A party who wants to provide a document as evidence after a hearing but before a decision takes effect must make an application to the Division.

(2) La partie joint une copie du document à la demande, faite conformément à la règle 50, mais elle n’est pas tenue d’y joindre un affidavit ou une déclaration solennelle.

(2) The party must attach a copy of the document to the application that must be made in accordance with rule 50, but the party is not required to give evidence in an affidavit or statutory declaration.

(3) Pour statuer sur la demande, la Section prend en considération tout élément pertinent, notamment :

(3) In deciding the application, the Division must consider any relevant factors, including

a) la pertinence et la valeur probante du document;

(a) the document’s relevance and probative value;

b) toute nouvelle preuve que le document apporte aux procédures;

(b) any new evidence the document brings to the proceedings; and

c) la possibilité qu’aurait eue la partie, en faisant des efforts raisonnables, de transmettre le document aux termes de la règle 34.

(c) whether the party, with reasonable effort, could have provided the document as required by rule 34.

[6]               La SPR, ayant déterminé qu’il s’agissait d’éléments de preuve essentiels à sa décision, a accepté la demande des demandeurs.

[7]               Les demandeurs n’ont pas présenté le genre de documents dont la production après l’audience avait été autorisée. Les éléments de preuve présentés consistaient en une deuxième lettre de l’association nationale de défense des minorités ethniques et en une lettre rédigée par un avocat.

[8]               Les deux éléments de preuve présentés après l’audience soulèvent plus de questions qu’ils n’apportent de réponses. Les deux sont remplis d’incohérences, dont certaines avaient déjà été soulevées par la SPR.

[9]               La SPR a conclu que, en raison de problèmes de crédibilité, les demandeurs n’avaient pas établi au moyen d’éléments de preuve crédibles et dignes de foi qu’ils avaient déjà été victimes de persécution. De plus, la SPR a conclu que les demandeurs n’avaient pas démontré qu’ils ne pouvaient bénéficier de la protection de l’État.

III.             Analyse

[10]           La seule question en litige dans le présent contrôle judiciaire est celle de savoir si la SPR a commis une erreur dans son appréciation des éléments de preuve présentés après l’audience en ne donnant pas aux demandeurs l’occasion de dissiper toute conclusion défavorable qu’elle avait pu tirer de ces éléments de preuve.

[11]           Il s’agit d’une question d’équité procédurale susceptible de contrôle selon la norme de la décision correcte.

[12]           Premièrement, comme il a été conclu dans la décision Aguilera c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 507, 167 ACWS (3d) 967, la Commission de l’immigration et du statut de réfugié n’est pas tenue de recevoir des éléments de preuve après l’audience ni de permettre leur présentation. L’autorisation de présenter des éléments de preuve après l’audience accordée en l’espèce était une circonstance exceptionnelle que les demandeurs ont gaspillée.

[13]           Deuxièmement, il est important de souligner que les documents qui ont en fait été présentés après l’audience ne correspondaient pas au genre de documents dont la SPR avait autorisé la production, à savoir des [traduction] « documents médicaux ou documents de la police corroborants ». Comme les éléments de preuve présentés après l’audience n’étaient pas visés par l’autorisation accordée par la SPR, leur rejet par la SPR aurait été justifié. Toutefois, ayant admis ces éléments de preuve, la SPR devait les traiter adéquatement, et c’est ce qu’elle a fait. Cela étant dit, le fait que les demandeurs n’aient pas réussi à dissiper les doutes de la SPR à l’aide des éléments de preuve qu’ils ont présentés après l’audience constitue un bon motif pour tirer une conclusion défavorable.

[14]           Troisièmement, il est difficile de trouver un quelconque manquement à l’équité procédurale quand les demandeurs ont été informés des doutes que la SPR avait à l’égard de leur crédibilité lors de l’audience et que l’occasion de dissiper ces doutes leur a été accordée après l’audience. Les demandeurs ont profité de l’occasion pour produire des éléments de preuve contradictoires et non pertinents, et ont voulu avoir encore la possibilité de dissiper les doutes soulevés par ces nouveaux éléments de preuve.

[15]           Les demandeurs ont eu plus de possibilités de pallier les lacunes de leur cause que ce qu’ils avaient le droit de réclamer. Ils peuvent difficilement se plaindre encore une fois alors qu’ils n’ont pas réussi à dissiper les doutes de la SPR.

[16]           Quoi qu’il en soit, les éléments de preuve présentés après l’audience n’ont pas aidé les demandeurs, et les conclusions tirées par la SPR en l’espèce étaient raisonnables.

[17]           Par conséquent, aucun manquement à l’équité procédurale ne s’est produit, malgré les efforts que le nouvel avocat des demandeurs a déployés pour persuader la Cour du contraire.

IV.             Conclusion

[18]           La demande de contrôle judiciaire sera donc rejetée. Il n’y a pas de question à certifier.


JUGEMENT

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

« Michael L. Phelan »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Johanne Brassard, trad. a.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-2254-13

 

INTITULÉ :

TAMAS FARKAS, TAMASNE FARKAS, TAMAS FARKAS c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 28 MAI 2014

 

JUGEMENT ET MOTIFS DU JUGEMENT :

LE JUGE PHELAN

 

DATE DES MOTIFS :

LE 4 JUIN 2014

 

COMPARUTIONS :

Wennie Lee

 

POUR Les demandeurs

 

Suzanne M. Bruce

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Lee & Company

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR Les demandeurs

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

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