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Date : 20140522


Dossier : IMM‑1848‑13

Référence : 2014 CF 490

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

 

Ottawa (Ontario), le 22 mai 2014

En présence de madame la juge Mactavish

ENTRE :

XING HUO LI

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET

DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]               Xing Huo Li sollicite le contrôle judiciaire de la décision par laquelle la Section d’appel de l’immigration de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié a rejeté l’appel qu’il avait interjeté à l’encontre du rejet de la demande de résidence permanente de son épouse. M. Li s’était engagé à parrainer cette dernière au titre de la catégorie du regroupement familial.

[2]               La Commission a motivé dans le détail la conclusion à laquelle elle est arrivée, à savoir que le mariage en cause n’était pas authentique et qu’il avait été contracté à des fins d’immigration. La Commission est arrivée à cette conclusion après avoir relevé de nombreuses contradictions entre le témoignage de M. Li et les renseignements donnés par son épouse putative au bureau des visas à Beijing.

[3]               Monsieur Li affirme avoir été traité avec iniquité par la Commission, celle‑ci ayant refusé de laisser témoigner son épouse en plus de rejeter la demande d’ajournement du ministre. Il prétend en outre que la décision de la Commission était substantiellement déraisonnable. Je ne suis pas d’avis qu’il y a eu quelque manquement à l’équité dans le déroulement de l’instance devant la Commission; au contraire, j’estime que la décision de la Commission était raisonnable. En conséquence, la demande sera rejetée.

I.                   La demande d’ajournement du ministre

[4]               Le ministre, naturellement, souhaitait prendre part à l’appel de M. Li, mais il a demandé à ce que l’audience soit ajournée du fait que son représentant ne pouvait s’y présenter. La Commission a refusé d’accorder l’ajournement demandé, de même que la demande de réouverture de l’instance présentée ultérieurement par le ministre afin de permettre un contre‑interrogatoire. En revanche, elle a autorisé le ministre à présenter des observations écrites, une fois qu’il aurait pris connaissance de l’enregistrement de l’audience.

[5]               Monsieur Li soutient que ces circonstances ont entraîné un manquement à l’équité procédurale, car le représentant du ministre aurait pu consentir à l’appel s’il avait été présent à l’audience.

[6]               Je ne puis retenir cet argument, et ce, pour plusieurs raisons.

[7]               La première est qu’il appert de la transcription que l’avocat de M. Li s’est opposé à la demande d’ajournement présentée à la Commission par le ministre. Or, à l’évidence, si M. Li estimait que la présence du représentant du ministre lors de l’instruction de son appel pouvait lui être utile d’une façon ou d’une autre et qu’elle était essentielle à l’équité de la procédure, on se serait attendu à ce qu’il appuie cette demande au lieu de s’y opposer.

[8]               Par ailleurs, il est difficile de voir en quoi la présence du représentant du ministre à l’instruction aurait pu aider M. Li. Si le représentant du ministre estimait qu’il y allait de l’intérêt de la justice, rien ne l’empêchait de consentir à ce que l’appel soit accueilli, que ce soit avant, pendant ou après l’audience.

[9]               En outre, d’après le dossier, il est clair que le ministre aurait en fait adopté une position contraire aux intérêts de M. Li s’il avait obtenu l’ajournement. Dans les observations écrites qu’il a déposées après l’audience, le représentant du ministre a soigneusement décrit les nombreux problèmes que soulevaient les récits de M. Li et de sa femme quant aux circonstances entourant leur mariage.

[10]           Au final, c’est au ministre, et non à M. Li, que le refus d’ajourner l’audience aura pu être préjudiciable. Le ministre n’a pas contesté ce refus; quant à M. Li, il n’a pas établi l’existence d’un manquement à l’équité procédurale à cet égard.

II.                Le défaut de l’épouse de M. Li de témoigner

[11]           Monsieur Li soutient également que la Commission l’a privé de son droit à l’équité procédurale en ne permettant pas que sa femme témoigne dans le cadre de l’appel.

[12]           Or, suivant le paragraphe 37(1) des Règles de la section d’appel de l’immigration, DORS/2002‑230, la partie qui souhaite faire comparaître un témoin à une audience de la SAI doit transmettre par écrit à la Commission et à l’autre partie le nom du témoin ainsi que d’autres renseignements à son sujet avant la tenue de l’audience. D’après la transcription qui a été faite de l’audience, il semble que l’avocat de M. Li ait omis de respecter cette condition.

[13]           Il est vrai que le paragraphe 37(4) des Règles confère à la Commission le pouvoir discrétionnaire d’autoriser une personne à témoigner même si les exigences prévues au paragraphe 37(1) en matière d’avis n’ont pas été respectées. Il incombe toutefois à la partie qui souhaite que ce pouvoir discrétionnaire soit exercé d’en faire la demande. Or, l’avocat de M. Li n’a présenté aucune demande en ce sens à la Commission.

[14]           Je reconnais que la Cour a statué, à ce sujet, que les commissaires pouvaient être tenus de faciliter la convocation de témoins lorsqu’une partie n’est pas représentée par un avocat : voir, par exemple, Kamtasingh c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 45, au paragraphe 10, [2010] ACF no 45. En l’espèce, toutefois, M. Li était représenté par un avocat d’expérience (qui n’est pas celui qui le représente dans le cadre de la présente demande) à qui il revenait de demander à la Commission l’autorisation de faire témoigner l’épouse de son client, s’il l’estimait utile.

[15]           De plus, M. Li a omis de déposer un affidavit souscrit pas son épouse à l’appui de sa demande de contrôle judiciaire. La Cour ne dispose donc d’aucun élément de preuve de ce que cette dernière aurait pu dire pour dissiper les sérieux doutes qu’avait la Commission quant à la crédibilité du dossier si on lui avait permis de témoigner.

[16]           Enfin, il faut rappeler que l’épouse de M. Li a eu la possibilité de présenter sa version des événements, ce qu’elle a fait de façon assez détaillée lors de son entrevue au bureau des visas à Beijing. Or, dans sa décision, la Commission a relevé plusieurs contradictions entre son récit et celui de M. Li.

[17]           M. Li a fait observer à juste titre que nous ne disposons d’aucune transcription de l’entrevue, mais simplement des notes versées au Système de traitement informatisé des dossiers d’immigration (le STIDI); cela étant, rien dans la preuve produite devant la Cour ne permet de penser que les notes du STIDI ne reflètent pas fidèlement ce qui a été dit par l’épouse de M. Li lors de son entrevue.

[18]           Dans ces circonstances, j’estime, en ce qui concerne la possibilité de l’épouse de M. Li de témoigner, qu’il n’y a pas eu de manquement à l’équité procédurale propre à justifier l’annulation de la décision de la Commission.

III.             La Commission a‑t‑elle rendu une décision substantiellement déraisonnable?

[19]           La Commission a exposé une vingtaine de réserves différentes qu’elle avait sur la question de la crédibilité et qui l’ont conduite à tirer sa propre conclusion, soit que le mariage de M. Li n’était pas authentique et qu’il visait principalement l’acquisition d’un statut ou d’un privilège sous le régime de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27.

[20]           Les réserves mentionnées portaient entre autres sur le fait que le mariage avait eu lieu six jours après la première rencontre en personne entre M. Li et son épouse, sur le peu que savait cette dernière des précédents mariages de M. Li, de ses amis et de sa vie au Canada et sur le fait qu’elle n’avait jamais même parlé au fils de M. Li.

[21]           Lors de l’instruction de la demande de contrôle judiciaire, M. Li a contesté uniquement l’une des conclusions de la Commission au chapitre de la crédibilité. Il s’agissait de la rapidité avec laquelle le mariage avait eu lieu et du fait que la Commission en avait conclu qu’il avait été contracté à des fins d’immigration.

[22]           Même si j’acceptais l’argument de M. Li selon lequel il était déraisonnable que la Commission tire une telle conclusion (ce qui n’est pas mon avis), les autres doutes que soulève l’affaire sur le plan de la crédibilité sont si importants que la Commission ne pouvait raisonnablement arriver à une conclusion différente.

IV.             Conclusion

Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est rejetée. Je conviens avec les parties que l’affaire ne soulève aucune question à certifier.


JUGEMENT

 

LA COUR STATUE :

 

1.         La présente demande de contrôle judiciaire est rejetée.

 

« Anne L. Mactavish »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Édith Malo, LL.B.

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM‑1848‑13

 

INTITULÉ :

XING HUO LI c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 15 MAI 2014

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE MACTAVISH

 

DATE DES MOTIFS :

LE 22 MAI 2014

 

COMPARUTIONS :

Robert Blanshay

 

pour le demandeur

 

Judy Michaely

 

pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Robert Israel Blanshay

Avocats

Toronto (Ontario)

 

pour le demandeur

 

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

pour le défendeuR

 

 

 

 

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