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Date : 20140502


Dossier : IMM-5234-13

Référence : 2014 CF 418

Ottawa (Ontario), le 2 mai 2014

En présence de monsieur le juge Noël

ENTRE :

SOLANGE MUSEME ZAMASEKA

 

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

I.          Introduction

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire présentée en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, ch 27 [LIPR] à l’encontre de la décision rendue le 17 juin 2013 par Renée Bourque, commissaire de la Section de la protection des réfugiés [SPR] de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada [CISR], dans laquelle on concluait que la demanderesse n’est ni une réfugiée au sens de la Convention pour l’application de l’article 96 de la LIPR, ni une personne à protéger selon le paragraphe 97(1) de la LIPR.

II.        Faits

[2]               La demanderesse est née le 17 juillet 1979 et est citoyenne de la République démocratique du Congo [RDC].

[3]               L’audience devant la SPR a eu lieu le 23 avril 2013, et la demanderesse a alors soumis ce qui suit. En août 2010, elle se trouvait à bord d’un véhicule dont tous les passagers ont subi un contrôle de l’identité par des soldats. Lorsque les soldats ont appris qu’elle venait de Kinshasa, la demanderesse a été arrêtée et questionnée parce qu’on la soupçonnait d’être une espionne. Elle a été violentée et violée par un commandant de l’armée [le Commandant] alors qu’elle était détenue, mais on l’a ensuite libérée. Après-coup, elle est allée au poste de police où, avec l’aide d’une accompagnatrice provenant d’une organisation non gouvernementale venant en aide aux femmes [l’ONG], elle a porté plainte contre le Commandant. Ce dernier et la demanderesse ont alors été convoqués à se présenter au poste de police. Toujours en août 2010, des militaires ont visité la famille de la demanderesse pour la menacer et celle-ci s’est enfuie. En décembre 2010, des militaires ont également tenté de la kidnapper, mais ils ont appréhendé sa cousine par erreur. De décembre 2010 à février 2011, la demanderesse est restée cachée.

[4]               Elle est arrivée au Canada et a demandé l’asile le 4 février 2011.

III.       Décision contestée

[5]               La SPR a entamé son analyse en précisant avoir respecté les Directives no 4 du président – Revendicatrices du statut de réfugié craignant d’être persécutées en raison de leur sexe [Directives no 4] au cours de l’audience.

[6]               Malgré certaines inquiétudes, la SPR s’est finalement déclarée convaincue de l’identité de la demanderesse, mais elle a néanmoins rejeté la demande de celle-ci au motif qu’elle a livré un témoignage jugé non crédible en raison des incohérences, des omissions et des contradictions énoncées ci-dessous.

[7]               La SPR n’a pas cru à l’existence du prétendu agresseur, le Commandant, puisque malgré qu’elle ait porté plainte contre lui à la police, la demanderesse ne connaît pas son nom. En outre, selon la SPR, il n’était pas crédible que la demanderesse ait simplement identifié du doigt le Commandant sans qu’elle demande le nom du Commandant au policier qui a reçu sa plainte ou sans que celui-ci mentionne le nom. De plus, la demanderesse était accompagnée par un membre d’une ONG qui vise à aider les femmes et qui lui aurait certainement suggéré de demander le nom de son prétendu agresseur.

[8]               La SPR a par ailleurs rejeté l’allégation de la demanderesse selon laquelle elle aurait été violée. À cet égard, la demanderesse a également omis certains détails concernant la prétendue agression dans son récit écrit, notamment pour ce qui est de la présence d’autres soldats que le Commandant. Elle affirmait craindre d’avoir contracté le VIH/SIDA des suites du viol, mais elle n’a pas subi de tests de dépistage malgré toutes les occasions de ce faire qui se sont présentées à elle. Celle-ci s’est également contredite quant à la durée de son hospitalisation à la suite de la prétendue agression, et la SPR a rejeté la validité du certificat médical, notamment parce qu’il n’avait pas d’en-tête et que la SPR ne croyait pas que la demanderesse a été violée.

[9]               La demanderesse a aussi livré des récits contradictoires en ce qui concerne les adresses où elle a vécu, puisque la demanderesse a affirmé, dans son questionnaire, avoir demeuré à Kinshasa pendant les 10 années qui ont précédé son départ du pays, ce qui est en contradiction avec le témoignage selon laquelle elle habitait à Zake, où le viol serait survenu. La SPR n’a pas retenu les explications de la demanderesse à cet égard.

[10]           La SPR a aussi examiné la question de savoir si la demanderesse, advenant son retour en RDC, serait à risque en raison de son appartenance au groupe social des femmes. On a conclu que le profil de la demanderesse ne correspondait pas à celui des femmes qui sont exposées davantage à un risque d’être violées et que, par conséquent, il n’y avait pas de possibilité sérieuse qu’elle soit victime de persécution.

[11]           Puisque la SPR n’a pas cru la demanderesse crédible relativement à l’article 96 de la LIPR, on a également conclu qu’elle n’était pas visée par le paragraphe 97(1)(b) de la LIPR. De plus, la preuve présentée ne permettait pas d’établir l’existence d’un risque selon le paragraphe 97(1)(a) de la LIPR.

IV.       Arguments de la demanderesse

[12]           La demanderesse fait valoir que la décision de la SPR n’est pas raisonnable, et ce, pour les trois raisons suivantes.

[13]           Premièrement, la SPR a fait fi d’éléments de preuve qui viennent corroborer les principales allégations au soutien de la demande d’asile, dont le fait que la demanderesse a subi un viol, qu’elle a reçu l’aide d’une ONG, qu’elle a été convoquée par le poste de police, que sa famille a dû se déplacer en raison de la persécution dont elle faisait l’objet, et qu’elle présentait les symptômes habituels d’une femme ayant subi une agression sexuelle.

[14]           Deuxièmement, la SPR a procédé à une mauvaise analyse de la crédibilité. En ce qui concerne l’existence du Commandant, les circonstances relatées par la demanderesse n’avaient rien d’invraisemblable. Par ailleurs, les conclusions de la SPR sur les circonstances du viol allégué sont déraisonnables notamment parce qu’elles ne respectent pas les Directives no 4 puisque l’on n’a pas tenu compte de l’état d’esprit particulier de la demanderesse résultant de ce qu’elle a vécu. Aussi, la demanderesse ne s’est aucunement contredite pour ce qui est de son hospitalisation et, relativement aux différents endroits où elle a vécu, la demanderesse a fourni de réelles explications, mais elles n’ont pas été prises en compte.

[15]           Troisièmement, la conclusion de la SPR sur l’appartenance de la demanderesse au groupe social des femmes n’est pas raisonnable notamment parce que la SPR n’aborde pas les éléments de preuve contraires à ses conclusions, parce que le réseau familial de la demanderesse est géographiquement éloigné, et parce que, contrairement à ce qu’affirme la décision, la demanderesse habite chez sa tante et non chez son conjoint, de qui elle s’est séparée.

V.        Arguments du défendeur

[16]           Le défendeur argue que la décision de la SPR est tout à fait raisonnable et que la demanderesse, qui est simplement en désaccord avec les conclusions, demande à la présente Cour de substituer sa propre opinion.

[17]           La SPR est arrivée à la conclusion que la demanderesse n’était pas crédible en s’appuyant sur des motifs suffisamment importants. La demanderesse n’a pas posé de question sur l’identité du Commandant lorsqu’elle a porté plainte contre lui à la police, et la SPR a par ailleurs conclu que le déroulement général de la prise de la plainte par la police était invraisemblable. Qui plus est, selon la SPR, la demanderesse a présenté des versions contradictoires quant au nombre de personnes présentes lors de l’agression et aux endroits où elle a vécu, son comportement après l’hospitalisation n’était pas compatible avec sa propre crainte alléguée et son témoignage entrait en contradiction avec sa propre preuve. L’ensemble de ces divergences, dont l’évaluation relevait de la compétence de la SPR, suffisait amplement pour rejeter la crédibilité de la demanderesse.

[18]           En réponse aux arguments de la demanderesse, le défendeur fait valoir que la SPR est présumée avoir tenu compte de toute la preuve dont elle était saisie, mais que dans le cas plus particulier du certificat médical, la SPR était d’autant plus justifiée de l’écarter puisqu’elle avait déjà rejeté la crédibilité de l’histoire sur laquelle il s’appuyait. De plus, la SPR s’est montrée très sensible à l’égard de l’état d’esprit de la demanderesse tout au long de l’audience et elle a par conséquent respecté les Directives no 4 et la jurisprudence applicable à ce sujet. En outre, pour ce qui est de l’appartenance de la demanderesse au groupe social des femmes, celle-ci avait le fardeau d’établir qu’elle correspond au profil d’une femme plus à risque que les autres femmes d’être victimes de viol, ce qu’elle n’a pas fait.

VI.       Question en litige

[19]           La SPR a-t-elle commis une erreur en concluant que la demanderesse n’était pas crédible?

VII.     Norme de contrôle

[20]           Les conclusions de la SPR concernant la crédibilité d’un demandeur sont une question de fait qui doit être contrôlée selon la norme de la décision raisonnable (Aguebor c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1993] ACF no 732, au para 4; Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 RCS 190 [Dunsmuir]). La présente Cour devra donc limiter son examen du caractère raisonnable de la décision à « la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit. » (Dunsmuir, précité, au para 47)

VIII.    Analyse

[21]           La décision de la SPR présente des erreurs qui la rendent déraisonnable et qui justifient l’intervention de la Cour. Le dossier de la demanderesse n’était pas sans faille, mais, en raison des erreurs exposées ci-dessous, il devra tout de même être renvoyé devant un autre agent de la SPR aux fins de réexamen.

[22]           La SPR a rejeté la crédibilité de la demanderesse, et c’est justement dans son appréciation de la crédibilité que la décision de la SPR ne peut être considérée comme raisonnable.

[23]           Premièrement, la SPR a conclu à l’invraisemblance des prétentions de la demanderesse concernant l’identification du Commandant au poste de police. La SPR était d’avis qu’il n’était pas vraisemblable que la demanderesse ne connaissait pas le nom de son agresseur et que les gens l’appelaient simplement « Commandant », qu’elle ne se soit pas informée de son véritable nom lorsqu’elle a déposé sa plainte, et ce, en dépit d’avoir été accompagnée par un membre d’une ONG, et qu’elle n’ait pas été informée du nom en question par le policier qui a reçu la plainte. Or, comme l’a soulevé la demanderesse, le recours aux conclusions d’invraisemblance doit se limiter aux cas les plus clairs (Valtchev c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2001 CFPI 776 au para 7, [2001] ACF no 1131, [Valtchev]). La décision-clé à ce sujet demeure Valtchev, précitée, dans laquelle le juge Muldoon indique ce qui suit, au para 7 :

[7]        Un tribunal administratif peut tirer des conclusions défavorables au sujet de la vraisemblance de la version des faits relatée par le revendicateur, à condition que les inférences qu’il tire soient raisonnables. Le tribunal administratif ne peut cependant conclure à l’invraisemblance que dans les cas les plus évidents, c’est-à-dire que si les faits articulés débordent le cadre de ce à quoi on peut logiquement s’attendre ou si la preuve documentaire démontre que les événements ne pouvaient pas se produire comme le revendicateur le prétend. Le tribunal doit être prudent lorsqu’il fonde sa décision sur le manque de vraisemblance, car les revendicateurs proviennent de cultures diverses et que des actes qui semblent peu plausibles lorsqu’on les juge en fonction des normes canadiennes peuvent être plausibles lorsqu’on les considère en fonction du milieu dont provient le revendicateur [voir L. Waldman, Immigration Law and Practice (Markham, ON, Butterworths, 1992) à la page 8.22]. [Non souligné dans l’original.]

En effet, les explications de la demanderesse sont éloquentes et établissent clairement que d’autres scénarios pouvaient raisonnablement justifier ses prétentions. De plus, comme l’indique le passage ci-dessus dans Valtchev, le tribunal administratif, en l’occurrence la SPR, doit demeurer sensible aux différences culturelles et veiller à ne pas tirer de conclusions d’invraisemblance en appliquant des normes strictement canadiennes. Ainsi, la SPR aurait dû tenir compte des conditions qui prévalent en RDC, surtout en ce qui concerne la judiciarisation des plaintes en cas de violences sexuelles et de la culture policière et militaire du pays, éléments qui sont abordés par la documentation nationale sur la RDC. Compte tenu de ce contexte, dans le petit village où se serait produite l’agression, lequel village n’était pas celui de la demanderesse, était-il vraisemblable que l’agresseur, qui détenait un grade militaire élevé, ait pu être reconnu parmi la population comme le « Commandant » et reconnu par l’agent de police en se faisant simplement pointer du doigt par la demanderesse? Chose certaine, ces explications n’ont rien d’invraisemblable et rien ne « démontre que les événements ne pouvaient pas se produire comme le revendicateur le prétend » (Valtchev, précité, au para 7). Il ne s’agit pas d’un des cas les plus évidents comme l’exige la jurisprudence. La conclusion d’invraisemblance de la SPR à cet égard n’est aucunement justifiée d’autant plus que, en raison de celle-ci, la SPR affirme ne pas croire en l’existence de l’agresseur, élément essentiel pour les revendications de la demanderesse.

[24]           La Cour estime également que la SPR a commis une erreur relativement aux circonstances entourant l’agression que la demanderesse a subie.

[25]           D’une part, la SPR a erré en concluant que la demanderesse s’est contredite en ce qui concerne les personnes présentes lors de l’agression sexuelle qu’elle a subie. Dans son formulaire de renseignements personnels [FRP], la demanderesse affirme avoir été violée par le Commandant, tandis qu’à l’audience, la demanderesse a indiqué qu’elle avait été violée par le Commandant alors que des militaires la retenaient au sol. La Cour constate que les deux versions sont sensiblement les mêmes. Une est simplement plus étoffée que l’autre. À ce sujet, l’intervenante de la demanderesse a témoigné que la demanderesse était, lors de la préparation du FRP, dans un « état aigu de symptômes de détresse » en raison de l’agression subie (voir la lettre de l’intervenante, dans le Dossier de la demanderesse à la p. 56), et puisqu’il s’agit beaucoup plus d’une omission que d’une contradiction, la SPR aurait dû apprécier le témoignage de la demanderesse en fonction des Directives no 4 et se demander si les écarts – minimes – entre les versions ne résultaient pas de troubles psychologiques liés à l’agression :

[17]      Au lieu de faire preuve de sensibilité aux difficultés que pouvait éprouver la demanderesse à parler de son passé, la Commission semble avoir été très critique des différences qui existaient entre le témoignage de la demanderesse et son FRP. La Commission a adopté cette attitude même si elle s’est principalement fondée sur des omissions plutôt que sur des contradictions (qui sont plus troublantes) et si la demanderesse a expliqué à l’audience qu’elle avait eu de la difficulté, pour des raisons émotives, à remplir son FRP (voir, par exemple, le dossier du tribunal certifié à la p. 373).

[18]      À mon avis, compte tenu de tout cela, la Commission aurait dû se demander si les écarts qu’elle a constatés et sur lesquels elle s’est fondée pour mettre en question la crédibilité de la demanderesse découlaient de problèmes psychologiques et non pas de la volonté de fabriquer des preuves. La Commission n’était certes pas tenue d’accepter le témoignage de la demanderesse, mais elle était néanmoins tenue, en l’espèce, de l’apprécier en fonction des Directives concernant la persécution fondée sur le sexe. À mon avis, ce n’est pas ce qu’elle a fait.

[Jones c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 405, [2006] ACF no 591].

[26]           D’autre part, après s’être penchée sur le comportement de la demanderesse après son hospitalisation, la SPR a conclu que « le tribunal ne croit pas que ce viol a eu lieu. » Selon la SPR, la demanderesse, si elle avait réellement été violée et si elle craignait d’avoir été contaminée par le VIH/SIDA, se serait soumise à des tests de dépistage. À cet égard, comme pour la question du FRP, la Cour est d’avis que la SPR n’a pas respecté les Directives no 4. Une lecture de la preuve documentaire révèle que les actions de la demanderesse étaient tout à fait cohérentes avec celles de nombreuses femmes victimes d’agressions sexuelles, qui hésitent à se faire traiter. La SPR aurait dû être plus sensible à l’état d’esprit de la demanderesse avant de tirer une conclusion pourtant déterminante pour l’évaluation de la demande, soit que le viol n’a pas eu lieu. En effet, si la SPR ne croit pas que la demanderesse a été violée, les chances de réussite de sa demande sont, dans l’ensemble, nettement affaiblies.

[27]           La SPR a également commis une erreur en concluant que la demanderesse s’est contredite au sujet de la durée de son hospitalisation. Questionnée à ce sujet, la demanderesse a clairement expliqué avoir reçu des soins pendant trois jours, mais être demeurée hospitalisée pendant une semaine. Rien dans le FRP de la demanderesse n’indique qu’elle aurait reçu des soins pendant une semaine. La demanderesse ne s’est donc pas contredite, et cette conclusion de fait, au surplus des autres, a malencontreusement nui à la crédibilité de la demanderesse aux yeux de la SPR.

[28]           Enfin, la SPR a rejeté le certificat médical de la demanderesse en ne lui accordant aucune valeur probante, notamment « car il ne croit pas à la survenance du viol. » Puisque la Cour a déjà qualifiée de déraisonnable la conclusion de la SPR sur la survenance du viol, il va sans dire que la conclusion sur le rejet du certificat médical doit elle aussi être écartée. Il se peut que le certificat médical ne soit pas authentique, toutefois la Cour note que la SPR s’était déjà forgé une opinion quant à la non-survenance du viol et, en plus, que le dossier du tribunal ne contient aucun document mentionnant que les documents d’hôpitaux doivent afficher l’en-tête de l’institution.

[29]           Pour ce qui est des adresses de la demanderesse, la présente Cour conclut également que des explications raisonnables ont été fournies à l’audience à cet égard et que la SPR s’est contentée de relater qu’une partie des explications. En effet, la demanderesse a indiqué qu’elle ne comprenait pas bien les questions qui lui étaient posées par l’agent au port d’entrée, mais elle avait précisé que c’était aussi parce qu’elle était épuisée, troublée et apeurée de retourner en RDC, ce que la SPR n’a aucunement rapporté dans sa décision. Une explication plus développée aurait été nécessaire pour appuyer une telle décision, qui aurait dû tenir compte des réponses de la demanderesse à ce sujet.

[30]           En revanche, je constate que l’analyse de la SPR au sujet de l’appartenance de la demanderesse au groupe social des femmes est juste : la demanderesse n’a pas su établir que son profil correspondait à celui d’une femme qui est plus à risque que d’autres femmes d’être victimes d’agressions sexuelles (N.G.M. c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2013 CF 372 au para 15, [2013] ACF No 390).

[31]           Les erreurs de la SPR énoncées ci-dessus sont fatales pour sa décision à un point tel qu’elle en devient déraisonnable, de telle sorte que, malgré la déférence dont la Cour doit faire preuve à l’égard des décisions de la SPR, les erreurs commises commandent néanmoins que la Cour accueille la demande de contrôle judiciaire en l’espèce.

[32]           Les parties ont été invitées à présenter une question aux fins de certification, mais aucune question ne fut proposée.

 


ORDONNANCE

            LA COUR ORDONNE que :

1.      La demande de contrôle judiciaire est accordée;

2.      Le dossier de la demanderesse sera retourné devant un autre agent de la SPR aux fins de réexamen;

3.      Aucune question n’est certifiée.

“Simon Noël”

Juge

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

imm-5234-13

 

INTITULÉ :

SOLANGE MUSEME ZAMASEKA c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

mONTRÉAL (qUÉBEC)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 30 AVRIL 2014

 

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE :

LE JUGE NOËL

 

DATE DES MOTIFS :

LE 2 mai 2014

 

COMPARUTIONS :

Me Mylène Barrière

 

pour lA demandeRESSE

 

 

Me Émilie Tremblay

 

pour le défendeur

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Me Mylène Barrière

Avocate

Montréal (Québec)

 

pour lA demanderESSE

 

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

pour le défendeur

 

 

 

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