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Date : 20140401


Dossier :

T-1416-13

 

Référence : 2014 CF 318

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Vancouver (Colombie-Britannique), le 1er avril 2014

En présence de monsieur le juge Harrington

 

 

ENTRE :

COORS BREWING COMPANY ET

MOLSON CANADA 2005

 

demanderesses

et

ANHEUSER-BUSCH, LLC

 

défenderesse

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

(Prononcés à l’audience à Vancouver le 1er avril 2014, la Cour se réservant le droit de corriger les fautes de grammaire, s’il en est, et de compléter les citations)

 

[1]               Les demanderesses demandent la radiation de la marque de commerce canadienne « Grab Some Buds » déposée par la défenderesse. L’association internationale de marques de commerce « International Trade-Mark Association [INTA] a présenté une requête pour obtenir l’autorisation d’intervenir en vertu de l’article 109 des Règles des Cours fédérales. Dans une ordonnance datée du 11 mars 2014, le protonotaire Lafrenière a rejeté cette requête, d’où le présent appel.

[2]               L’article 109 des Règles des Cours fédérales régit les interventions. La Cour peut donner l’autorisation d’intervenir. Cette décision est donc discrétionnaire par nature. 

[3]               Les appels des décisions du protonotaire sont régis par l’article 51 des Règles des Cours fédérales et par l’importante jurisprudence s’y rapportant. Dans Merck & Co c Apotex Inc, [2004] 2 RCF 459, la Cour d’appel fédérale a conclu que l’ordonnance discrétionnaire d’un protonotaire ne devrait faire l’objet d’un nouvel examen que si les questions soulevées dans la requête sont déterminantes quant à l’issue de la cause ou si les ordonnances sont entachées d’une erreur flagrante en ce sens que l’exercice du pouvoir discrétionnaire a été exercé sur le fondement d’un mauvais principe ou sur une appréciation erronée des faits. Une décision rendue à l’égard d’une requête visant à obtenir l’autorisation d’intervenir n’est pas déterminante quant à l’issue de la cause. Par conséquent, la question consiste à déterminer si la décision est fondée sur un mauvais principe ou sur une appréciation erronée des faits.   

[4]               Plusieurs facteurs devraient être pris en compte par la Cour afin de déterminer si l’intervention d’une partie dans une instance devrait être autorisée. Le protonotaire Lafrenière a correctement relevé les facteurs énoncés par la Cour d’appel fédérale dans Syndicat canadien de la fonction publique (Division du transport aérien) c Canadian Airlines International Ltd, 2000 ACF no 220, 95 ACWS (3e) 249 [SCFP].

[5]               Les facteurs énoncés par la Cour dans cette décision relative au SCFP sont les suivants :   

a.       La partie qui se propose d’intervenir est-elle directement touchée par l’issue du litige?   

b.      Y-a-t-il une question relevant de la compétence des tribunaux ou un véritable intérêt public?

c.       S’agit-il d’un cas où il semble n’y avoir aucun autre moyen raisonnable ou efficace de soumettre la question à la Cour? 

d.      La position de la personne qui se propose d’intervenir est-elle défendue adéquatement par l’une des parties au litige? 

e.       L’intérêt de la justice sera-t-il mieux servi si l’intervention demandée est autorisée? et

f.       La Cour peut-elle entendre l’affaire et statuer sur le fond sans autoriser l’intervention? 

[6]               Lorsque la demande de Coors Brewing Company et de Molson Canada 2005 sera entendue au fond, la Cour devra se prononcer sur l’interprétation de l’alinéa 30d) et du paragraphe 16(2) de la Loi sur les marques de commerce. La personne qui se propose d’intervenir est une association internationale, chef de file dans son domaine, de propriétaires de marques de commerce, de professionnels et d’universitaires. Elle soutient qu’elle serait dans une position privilégiée pour offrir à la Cour une perspective internationale équilibrée sur des questions importantes de droit et de politique soulevées par la demande. Si j’avais été saisi de la demande en première instance, j’aurais pu accorder l’autorisation comme je l’ai fait dans Association canadienne du médicament générique c Le Gouverneur en conseil, le ministre de la Santé et le procureur général du Canada, 2007 CF 154. Il se peut que le débat soulève certaines obligations du Canada aux termes de traités internationaux. La cause mentionnée traitait de l’article 1711 de l’ALÉNA. J’y ai déclaré ce qui suit au paragraphe 30 :

[30] […] Néanmoins, le traitement de l’article 1711 de l’ALENA aux États‑Unis et au Mexique, à la fois par règlement et par la jurisprudence, peut avoir une importance considérable. Dans l’arrêt Foscolo, Mango & Co., Ltd. et al c. Stag Line Ltd., [1932] A.C. 328, (1931), 41 Lloyd’s List L.R. 165, la Chambre des lords a souligné que la législation intérieure qui donnait effet à un traité a, pour utiliser les mots de lord MacMillan, [traduction] « un caractère international ».

[7]               Toutefois, la question ne consiste pas à savoir ce que j’aurais décidé, la question consiste plutôt à déterminer si le protonotaire Lafrenière a commis une erreur. 

[8]               Le défaut de satisfaire à l’un des six facteurs énumérés par la Cour d’appel dans SCFP n’entraînera pas le rejet automatique de la requête présentée. Ce qui a amené le protonotaire Lafrenière à décider comme il l’a fait est que l’INTA a fait défaut de démontrer que l’intervention proposée ajouterait au débat un facteur qui en est absent. Il me semble qu’il s’agit d’une décision raisonnable. Les parties à la demande sont des sociétés importantes et sont toutes deux représentées par des procureurs chevronnés dans le domaine de la propriété intellectuelle. La position de la personne qui se propose d’intervenir peut être adéquatement défendue par l’une des parties. La Cour est certainement en mesure d’entendre la cause et de rendre un jugement au fond sans l’intervention proposée.  

[9]               La question de l’intérêt de la justice a également été soulevée suite à la décision du protonotaire. La demande sera entendue au fond le 15 avril 2014 à Ottawa. La question qui sera débattue porte sur l’éventuelle radiation d’une marque de commerce et si je devais exercer à nouveau mon pouvoir discrétionnaire, je conclurais, au vu de l’échéancier, que l’intérêt de la justice ne serait pas mieux servi par l’autorisation d’une intervention à une date aussi tardive. 

[10]           En ce qui a trait aux dépens, la personne qui se proposait d’intervenir a présenté son appel à Vancouver sans égard au fait que l’avocate des demanderesses réside à Ottawa et que l’avocat de la défenderesse réside à Toronto. La défenderesse n’a pas comparu, mais a consenti à l’intervention. Dans les circonstances, elle n’a droit à aucuns dépens et elle n’a pas à en payer.  

[11]           Toutefois, l’avocate des demanderesses a dû venir à Vancouver depuis Ottawa. Les dépens suivent habituellement le sort de la requête et je ne vois pas de motif de faire exception à cette règle. Les dépens sont taxés au milieu de la fourchette de la colonne III et comprennent les débours raisonnables de l’avocate des demanderesses qui a dû se rendre à Vancouver depuis Ottawa.

 


ORDONNANCE

LA COUR STATUE que l’appel est rejeté avec dépens. 

 

 

« Sean Harrington »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Claude Leclerc, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 


DOSSIER :

T-1416-13

 

INTITULÉ :

COORS BREWING COMPANY ET MOLSON CANADA 2005 c ANHEUSER-BUSCH, LLC

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

                                                                        Vancouver (COLOMBIE-BRITANNIQUE)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

                                                            le 1er AVril 2014

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                      LE JUGE HARRINGTON

 

 

DATE DES MOTIFS :

                                                            LE 1ER AVril 2014

COMPARUTIONS :

Susan Beaubien

 

POUR LES DEMANDERESSES

Mark L. Robbins

 

POUR LA DÉFENDERESSE

David Wotherspoon

 

POUR LA PERSONNE QUI SE PROPOSE D’INTERVENIR 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

MACERA & JARZYNA LLP

Avocats

Ottawa (Ontario)

 

POUR LES DEMANDERESSES

BERESKIN & PARR LLP

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DÉFENDERESSE

FASKEN MARTINEAU DUMOULIN SRL

Avocats

Vancouver (Colombie-Britannique)

POUR LA PERSONNE QUI SE PROPOSE D’INTERVENIR

 

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