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Date : 20140505


Dossier : IMM-13200-12

Référence : 2014 CF 425

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

 

Ottawa (Ontario), le 5 mai 2014

En présence de monsieur le juge O’Reilly

ENTRE :

VALERIA PRITCHIN

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

I.                   Contexte

[1]                En 2010, Mme Valeria Pritchin a présenté une demande de résidence permanente au Canada à titre de travailleuse qualifiée, à savoir graphiste. Elle a étudié le graphisme au Canada en 2008 et en 2009 pendant l’examen de sa demande d’asile (fondée sur une allégation de persécution en Israël). Elle a également travaillé pendant plus deux ans en tant que graphiste dans un petit magasin du nom de « VideoCorner ». Elle est retournée en Israël lorsque sa demande d’asile a été rejetée.

[2]               Dans le cadre de sa demande de résidence permanente, Mme Pritchin a présenté des éléments de preuve selon lesquels VideoCorner souhaitait élargir ses activités de graphisme et la réembaucher en tant que graphiste. Un agent des services consulaires du Canada à Tel Aviv a examiné la demande de Mme Pritchin, et, soucieux de la présence d’éventuelles divergences, l’a convoquée à une entrevue en 2012.

[3]               L’agent, qui, d’une part, estimait que Mme Pritchin n’était pas crédible et, d’autre part, n’était pas convaincu de l’authenticité de l’offre d’emploi au Canada, a rejeté la demande. Mme Pritchin soutient que l’agent l’a traitée de façon inéquitable en comparant son témoignage à un rapport préparé par l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) dont elle n’était pas au courant. Elle prétend également que l’agent a tiré une conclusion déraisonnable en se fondant sur les éléments de preuve. Elle me demande d’infirmer la décision de l’agent et d’ordonner le réexamen de sa demande par un autre agent.

[4]               À mon avis, l’agent a traité Mme Pritchin de façon équitable en lui accordant une entrevue au cours de laquelle elle pouvait répondre aux préoccupations soulevées par sa demande. Par ailleurs, la conclusion de l’agent n’était pas déraisonnable à la lumière des éléments de preuve mettant en doute l’authenticité de l’offre d’emploi. Par conséquent, je dois rejeter la présente demande de contrôle judiciaire.

[5]               Il y a deux questions à trancher :

1.      L’agent a‑t‑il traité Mme Pritchin de façon inéquitable?

2.      La conclusion de l’agent était‑elle déraisonnable?

II.                Décision de l’agent

[6]               L’agent a accordé à Mme Pritchin 55 points au total, soit 12 points de moins que le seuil d’acceptation d’une demande de résidence permanente. Cet écart est attribuable aux doutes qu’avait l’agent quant à l’expérience antérieure de Mme Pritchin à titre de graphiste et à l’authenticité de l’offre d’emploi chez VideoCorner. L’agent a accordé à Mme  Pritchin des points pour un an d’expérience à temps plein seulement étant donné qu’il n’était pas clairement établi qu’elle occupait un poste à temps plein. Plus particulièrement, des divergences sont ressorties au moment de comparer la description qu’elle a donnée de ses responsabilités et de ses conditions de travail chez VideoCorner et les éléments de preuve fournis par le gérant du magasin et un enquêteur de l’ASFC qui a visité les lieux. De plus, Mme Pritchin a déclaré un revenu annuel de 9 000 $ seulement au cours des années où elle a travaillé au magasin, ce qui porte à croire qu’elle y travaillait à temps partiel. L’agent a donné l’occasion à Mme Pritchin de répondre à ses questions, mais cette dernière n’avait rien à ajouter.

A.                Première question à trancher – L’agent a‑t‑il traité Mme Pritchin de façon inéquitable?

[7]               Mme Pritchin prétend que l’agent s’est injustement fondé sur des éléments de preuve extrinsèques fournis par l’ASFC relativement à l’authenticité de l’offre d’emploi. Les notes de l’agent de l’ASFC soulevaient des doutes quant à l’expérience de Mme Pritchin, à ses heures de travail et à ses responsabilités, mais Mme Pritchin soutient qu’elle n’a pas eu véritablement l’occasion de s’expliquer. Elle affirme que l’agent aurait dû lui faire part de ses préoccupations par écrit plutôt que de la confronter à ce sujet lors de l’entrevue.

[8]               Par ailleurs, Mme Pritchin prétend que l’agent n’aurait pas dû l’interroger au sujet de l’offre d’emploi puisqu’il n’avait pas compétence pour remettre sa validité en question. Mme Pritchin avait déjà reçu une offre d’emploi réservé certifiée authentique par Service Canada. La seule responsabilité de l’agent consistait à déterminer si Mme Pritchin était en mesure d’accomplir le travail. L’agent aurait donc dû lui accorder 10 points pour l’offre.

[9]               Je ne peux souscrire aux arguments de Mme Pritchin.

[10]           L’agent avait le droit de convoquer Mme Pritchin à une entrevue pour discuter des préoccupations que soulevait sa demande, et cette entrevue donnait une occasion convenable à Mme Pritchin de répondre aux préoccupations de l’agent (Kimball c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 428, au paragraphe 11). Elle n’était tout simplement pas en mesure de le faire et n’a pas demandé à ce qu’on lui accorde plus de temps pour soumettre une réponse. Je ne vois rien d’inéquitable dans la façon dont l’agent a traité Mme Pritchin.

[11]           Par ailleurs, l’agent avait également le droit de se pencher sur la question de l’authenticité de l’offre d’emploi. C’est à lui que revient la décision ultime d’accueillir ou de rejeter la demande, et il doit déterminer si la demanderesse est « en mesure d’exercer les fonctions de l’emploi et s’il est vraisemblable [qu’elle] acceptera de les exercer » (Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002‑227, au paragraphe 82(2)). Il va sans dire qu’un demandeur ne peut exercer les fonctions d’un emploi qui n’existe pas (Ghazeleh c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 1521, au paragraphe 20). Par conséquent, l’agent doit pouvoir juger de l’authenticité d’une offre.

B.                 Deuxième question à trancher – La conclusion de l’agent était‑elle déraisonnable?

[12]           Mme Pritchin prétend que l’agent n’a pas expliqué de façon intelligible ou transparente le motif du rejet de sa demande. L’agent a tout simplement affirmé que Mme Pritchin n’était pas en mesure d’expliquer les contradictions dans la preuve. De plus, en ce qui concerne son salaire, la demanderesse soutient que l’agent semblait lui reprocher de ne pas être au fait de son droit à un salaire minimum en vertu de la loi ontarienne sur les normes d’emploi.

[13]           À mon avis, la conclusion de l’agent était raisonnable et expliquée de façon convenable. L’agent a clairement indiqué les points soulevant des préoccupations, mais Mme Pritchin n’était tout simplement pas en mesure d’y répondre. Le fondement sur lequel l’agent a rejeté la demande de Mme Pritchin ressort clairement du dossier.

[14]           Par ailleurs, l’agent ne s’attendait pas à ce que Mme Pritchin connaisse la loi ontarienne sur les normes d’emploi. Il a plutôt déduit du salaire peu élevé de Mme Pritchin qu’elle n’occupait vraisemblablement pas un poste à temps plein. Le gérant du magasin a d’ailleurs confirmé que Mme Pritchin travaillait à temps partiel. Mme Pritchin aurait pu fournir d’autres éléments de preuve à ce sujet (p. ex. talons de paie), mais ne l’a pas fait.

[15]           De ce fait, je ne peux conclure que la décision de l’agent était déraisonnable. Elle appartenait aux issues pouvant se justifier au regard des faits et du droit.

III.             Conclusion et décision

[16]           L’agent qui a évalué la demande de Mme Pritchin a traité cette dernière de façon équitable et a tiré une conclusion raisonnable. Je dois donc rejeter la présente demande de contrôle judiciaire. Aucune des parties n’a proposé de question de portée générale à certifier, et aucune n’est énoncée.

 


JUGEMENT

LA COUR STATUE que la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée. Aucune question de portée générale n’est énoncée.

 

 

 

« James W. O’Reilly »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Stéphanie Pagé, traductrice


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-13200-12

 

INTITULÉ :

VALERIA PRITCHIN c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

20 FÉVRIER 2014

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT :

Le juge O’REILLY

 

DATE DES MOTIFS :

le 5 mai 2014

 

COMPARUTIONS :

Nikolay Y. Chsherbinin

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Daniel Engel

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Chsherbinin Litigation

Avocat

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

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