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Date : 20140409


Dossier :

IMM-6198-13

 

Référence : 2014 CF 345

Montréal (Québec), le 9 avril 2014

En présence de madame la juge Tremblay-Lamer

 

ENTRE :

AMA BAH (AUSSI CONNUE SOUS LE NOM DE RAMATOULAYE BAH)

 

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

 

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire présentée en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la Loi], d’une décision d’un agent d’immigration de Citoyenneté et Immigration Canada rendue le 10 septembre 2013, rejetant la demande de résidence permanente de la demanderesse pour considérations d’ordre humanitaire [demande CH] au sens de l’article 25 de la Loi. 

 

CONTEXTE FACTUEL

[2]               La demanderesse est citoyenne de la Guinée. Elle est arrivée au Canada pour la première fois le 16 août 1998 avec un visa de visiteur sous l’identité de Ramatoulaye Bah, née le 1er janvier 1977.

 

[3]               Le 5 octobre 1999, la demanderesse est entrée pour une deuxième fois au Canada, toujours avec un visa de visiteur, mais sous l’identité d’Ama Bah, née le 17 décembre 1982.

 

[4]               Le 12 octobre 1999, la demanderesse a présenté une demande d’asile sous cette deuxième identité. Le 10 mars 2000, elle a obtenu le statut de réfugiée, et le 13 juin 2000, elle a obtenu la résidence permanente, toujours sous l’identité d’Ama Bah.

 

[5]               Le 23 mars 2007, à la suite d’une dénonciation faite par une tierce personne, la Commission de l’immigration et du statut de réfugié a annulé son statut de réfugiée au motif qu’elle avait obtenu ce statut en utilisant une identité frauduleuse. La demanderesse a conséquemment perdu son statut de résidente permanente. La demande d’autorisation et de contrôle judiciaire de cette décision de la Commission a été rejetée par la Cour fédérale le 26 juillet 2007.

 

[6]               Le 21 juillet 2010, elle a déposé une demande d’évaluation des risques avant renvoi [ERAR] qui fut rejetée le 10 avril 2011.

 

[7]               Le 26 juin 2012, la demanderesse a donné naissance à son fils à la suite d’une grossesse à risque. Afin de pouvoir mener cette grossesse à terme, elle a dû subir quatre chirurgies utérines dues à des kystes utérins avec fibromes.

 

[8]               Le 5 juillet 2012, la demanderesse a déposé une demande de résidence permanente basée sur des motifs d’ordre humanitaire, laquelle fut rejetée le 10 septembre 2013. Elle fait l’objet de la présente demande de contrôle judiciaire.

 

LA DÉCISION DU TRIBUNAL

[9]               L’agent note tout d’abord que la demanderesse n’a soumis aucune preuve documentaire supportant son allégation qu’elle a toujours travaillé et payé ses factures. Il fait toutefois remarquer que de travailler et ne pas être une charge pour l’État est une attente normale et raisonnable.

 

[10]           L’agent indique ensuite que la demanderesse n’a pas présenté de documents indiquant qu’elle a suivi une formation comme préposée aux bénéficiaires. Même en donnant le bénéfice du doute à la demanderesse, l’agent est d’avis que la demanderesse n’a pas démontré qu’elle ne serait pas en mesure de poursuivre cet emploi dans son pays d’origine, et que ses compétences constitueraient même un atout déterminant.

 

[11]           Bien que l’agent reconnaisse que la demanderesse fait du bénévolat et qu’il s’agisse d’un facteur positif pour son l’établissement, l’agent est d’avis qu’une telle implication bénévole est courante pour une personne étrangère vivant dans un autre pays.

 

[12]           L’agent souligne de plus le fait que la demanderesse s’est établie au Canada par l’obtention frauduleuse de son statut de résidente permanente. L’agent note que la demanderesse continue de bénéficier de services sociaux, médicaux et communautaires sous son nom d’emprunt, et que depuis 2007, date à laquelle elle a dû dévoiler sa véritable identité, elle continue à utiliser son nom d’emprunt pour différentes démarches administratives.

 

[13]           Ainsi, l’agent est d’avis que ces éléments relatifs à l’établissement de la demanderesse ne peuvent être considérés comme des motifs d’ordre humanitaire.

 

[14]           Bien que l’agent mentionne être sensible à l’intérêt de l’enfant de la demanderesse, il conclut qu’aucun renseignement documenté et factuel n’a été soumis pour supporter les prétentions de la demanderesse voulant que son fils serait ostracisé et considéré comme un enfant illégitime en Guinée. De plus, l’agent considère que la demanderesse n’a pas réussi à prouver ses allégations relativement à l’impossibilité pour le père de prendre en charge son enfant. Ainsi, l’agent conclut qu’il ne lui a pas été prouvé que l’enfant vivrait des difficultés inhabituelles, injustifiées ou démesurées s’il accompagnait sa mère en Guinée.

 

[15]           L’agent aborde ensuite la question de l’état de santé à risque de la demanderesse. À cet effet, il fait principalement référence à la lettre rédigée par le Dr Marcoux, obstétricienne et gynécologue traitant la demanderesse. L’agent souligne que ces documents, quoi qu’indiquant que la demanderesse a subi des interventions chirurgicales et qu’il existe un risque de récidive, révèlent que la demanderesse est en rémission et qu’elle est réticente à procéder à une hystérectomie. L’agent est donc d’avis qu’aucun élément probant ne permet de justifier que de présenter sa demande de l’extérieur du Canada représenterait pour la demanderesse une difficulté inhabituelle ou injustifiée.

 

[16]           De surcroît, l’agent mentionne avoir examiné la preuve documentaire présentée par la demanderesse sur la situation médicale en Guinée. Il conclut ne lui accorder qu’un faible poids puisqu’il n’y retrouve aucune donnée tangible, documentée et objective. L’agent doute en effet de l’authenticité des titres et compétences des individus ayant décrit l’état du système de santé en Guinée. Il écarte également l’information présentée par certains organismes communautaires puisque les rapports y étant cités et sur lesquels sont basées les prétentions sur l’état du système de santé en Guinée n’ont pas été soumis.

 

[17]           Finalement, l’agent accorde peu de poids à l’argument de la demanderesse selon lequel elle serait ostracisée comme mère monoparentale au motif qu’aucune information factuelle impartiale n’a été soumise. L’agent est également d’avis que la demanderesse pourrait bénéficier d’un soutien familial puisque ses parents, trois sœurs et un frère vivent toujours en Guinée.

 

QUESTION EN LITIGE

[18]           La seule question en litige en l’espèce est de savoir si les conclusions de l’agent étaient raisonnables, plus particulièrement quant à l’établissement de la demanderesse au Canada, à son état de santé et à l’intérêt supérieur de son enfant canadien.

 

 

 

NORME DE CONTRÔLE

[19]           L’article 25 de la Loi accorde au ministre un large pouvoir discrétionnaire quant à l’évaluation des considérations humanitaires soulevées dans le cadre d’une demande de résidence basée sur de tels motifs, et il est de jurisprudence constante que la norme applicable face à une telle situation est celle de la raisonnabilité (voir, de façon générale, Baker c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 RCS 817 [Baker]. Voir également Kisana c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CAF 189 au para 18 ; Thandal c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 489 au para 7 ; De Leiva c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 717 au para 13 ; Nsongi c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 1291 au para 8).

 

[20]           Cette Cour doit donc faire preuve de déférence et exercer une grande retenue en déterminant si les conclusions sont justifiées, transparentes et intelligibles de sorte qu’elles appartiennent « aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9 au para 47).

 

ARGUMENTS DES PARTIES

Arguments de la demanderesse

[21]           La demanderesse soutient d’abord que, bien que l’agent ait indiqué être sensible aux 14 années que la demanderesse a passées au Canada, ses conclusions sont déraisonnables. En effet, son raisonnement quant au travail et à l’implication bénévole de la demanderesse est illogique. Il suppose que, puisqu’il est normal pour un individu de travailler et de s’impliquer dans sa communauté, ces facteurs ne devraient pas être considérés. Or, ce sont justement de tels éléments qui doivent être pris en compte pour évaluer le degré d’établissement d’un individu lors de l’analyse d’une demande CH.

 

[22]           Les conclusions de l’agent quant au fait que ses compétences comme préposée aux bénéficiaires constitueraient un atout dans son pays d’origine ne sont que des spéculations qui ne sont pas supportées par la preuve présentée. De plus, il était déraisonnable de ne pas prendre en considération les circonstances ayant mené la demanderesse à utiliser une fausse identité lors de son arrivée au Canada.

 

[23]           Quant à l’intérêt de l’enfant, il appert de la jurisprudence qu’il s’agit d’un facteur à analyser dans une demande CH et qu’un poids non négligeable doit lui être accordé (Ribic c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1985] DSAI No 4; Chieu c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CSC 3; et Baker, précitée). L’agent a mentionné être sensible à ce facteur, mais son analyse ne démontre aucune sensibilité.

 

[24]           De plus, l’agent a erré en rejetant les documents déposés par différents organismes communautaires indiquant que le fils de la demanderesse serait ostracisé puisqu’il était né hors mariage, car ces organismes sont indépendants. La demanderesse est également d’avis qu’il était déraisonnable de rejeter ses allégations quant à l’absence du père de l’enfant simplement sur la base que le père n’avait pas confirmé de telles allégations.

 

[25]           Relativement à l’état de santé de la demanderesse, l’agent a été sélectif dans les éléments à retenir du dossier médical de la demanderesse. L’agent a fait abstraction de certains passages de la lettre du Dr Marcoux indiquant la gravité de la maladie, le haut risque de récidive, la forte probabilité d’une intervention chirurgicale, et la nécessité d’un suivi médical serré.

 

[26]           La demanderesse soutient de plus qu’il est faux de prétendre qu’aucune preuve ne permettait de confirmer les compétences médicales des individus ayant témoigné de l’état du système de santé en Guinée, puisqu’une carte d’identité nationale du Dr Mathieu Loua, indiquant la profession de médecin, a été déposée devant l’agent.

 

[27]           Quant aux informations fournies par les organismes communautaires, ils font clairement référence aux rapports relatant l’état du système de santé en Guinée, et l’agent aurait facilement pu accéder à ces rapports. Similairement, la preuve soumise par les organismes sur la situation des femmes monoparentales en Guinée aurait dû être considérée, puisque ces organismes sont des sources sérieuses et indépendantes.

 

[28]           Finalement, la demanderesse souligne que bien que certains membres de sa famille vivent en Guinée, elle n’entretient avec eux aucun lien et ne pourrait donc pas bénéficier de leur support.

 

Arguments du défendeur

[29]           Le défendeur est d’avis que l’agent a analysé chacune des prétentions de la demanderesse de même que la preuve soumise, et que la demanderesse n’a pas prouvé que les conclusions de l’agent étaient déraisonnables.

 

[30]           En effet, l’agent a bel et bien considéré les circonstances ayant mené à l’utilisation d’une fausse identité. Toutefois, compte tenu du fait que la demanderesse a continué à utiliser son identité d’emprunt même après que la fraude ait été découverte, il était raisonnable de considérer cet élément comme étant négatif. De plus, il était loisible à l’agent de conclure que le travail de la demanderesse et ses activités de bénévolat n’étaient pas en soi suffisants pour accorder la dispense.

 

[31]           Concernant l’intérêt de l’enfant, les motifs de l’agent démontrent qu’il a été réceptif à cet élément, mais que la preuve soumise ne l’a pas convaincu que l’enfant serait ostracisé dans l’éventualité d’un déplacement en Guinée. Il était également raisonnable de ne pas accorder beaucoup de poids aux allégations de la demanderesse quant à l’absence du père puisque la preuve soutenant de telles allégations était insuffisante.

 

[32]           En ce qui a trait à l’état de santé de la demanderesse, l’agent a bel et bien considéré la lettre du Dr Marcoux et a raisonnablement souligné que cette lettre mentionnait qu’il n’y avait pour le moment aucun risque de récidive et que la demanderesse avait choisi de ne pas procéder à la chirurgie.

 

[33]           Le défendeur soutient que la demanderesse ne s’est pas déchargée du fardeau de prouver que les soins nécessaires à sa condition ne seraient pas disponibles en Guinée. Il lui incombait également de fournir les rapports cités par les organismes si elle désirait que l’agent en tienne compte.

 

[34]           Finalement, il était raisonnable de mentionner qu’aucune preuve documentaire n’avait été soumise pour corroborer les opinions exprimées par les organismes communautaires dans leurs lettres de soutien. Il était également raisonnable, en l’absence de preuve contraire, de conclure que la demanderesse serait à même de bénéficier du soutien des membres de sa famille en Guinée.

 

ANALYSE

[35]           Je traite d’abord du facteur relatif à l’état de santé de la demanderesse puisque l’agent a erré dans l’analyse de ce facteur et que cette erreur est déterminante quant à l’issue du dossier.

 

[36]           Bien qu’un décideur ne soit pas tenu de faire référence à l’entièreté de la preuve, une preuve substantielle soutenant l’opinion contraire ne peut être ignorée comme l’affirmait le juge John Evans dans Cepeda-Gutierrez c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1998] ACF no 1425 au para 17 :

[…] Qui plus est, quand l’organisme fait référence de façon assez détaillée à des éléments de preuve appuyant sa conclusion, mais qu’elle passe sous silence des éléments de preuve qui tendent à prouver le contraire, il peut être plus facile d’inférer que l’organisme n’a pas examiné la preuve contradictoire. […]

 

[37]           En l’espèce, la lettre 17 juin 2013, rédigée par le Dr Marcoux à peine quelques mois avant la décision de l’agent, indique clairement l’incertitude quant à l’état de santé de la demanderesse, et la nécessité d’un suivi médical serré.

[…] Ama estime que sa condition clinique se détériore. Elle se plaint de douleurs pelviennes chroniques depuis plusieurs mois.

 

[…] Compte tenu du peu d’informations médicales publiées sur cette pathologie rare, il est excessivement difficile de prédire la rapidité de la croissance ou les probabilités de récidives d’une telle lésion. Il nous est également impossible, par ailleurs, de prédire à quel moment une lésion pourrait réapparaître : quelques mois après l’accouchement ou pourrait-elle demeurer en rémission plus longtemps?

 

[…]

 

[…] une hystérectomie s’imposera certainement pour traiter une récidive de son agiomyolipome. Cependant, un an après son accouchement, force est d’admettre que sa maladie semble en rémission. Mais pour combien de temps? Elle a déjà subi au moins 3 récidives depuis 2008.

 

[…] À ce moment, il ne semble pas y avoir d’indication d’hystérectomie, chirurgie radicale chez une jeune femme […] Dans son cas également, j’hésite à procéder immédiatement à cette chirurgie qui sera probablement très difficile compte tenu de ses chirurgies antérieures […] alors qu’il ne semble pas y avoir en ce moment d’évidence de récidive. Les risques chirurgicaux, en ce moment, semblent excéder les bénéfices potentiels d’une telle intervention. La patiente est également très réticente à procéder à l’hystérectomie sans évidence de récidive.

 

J’ai donc accepté de ne pas procéder à l’hystérectomie pour l’instant. Un suivi clinique serré s’impose cependant pour cette maladie qui récidivera probablement et demandera alors une chirurgie difficile dans un centre spécialisé.

 

[je souligne]

 

[38]           Les lettres de 2012 rédigées par le Dr Lachapelle et le Dr Marcoux soulignent également la gravité de la condition médicale de la demanderesse et la nécessité d’un suivi au Canada :

Lettre du Dr Lachapelle du 24 septembre 2012

 

[…] Le diagnostic de Ms Bah est rare et nécessite un suivi en Centre universitaire par un Gynécologue spécialisé en oncologie. La chirurgie sera très complexe vu les cinq chirurgies antérieures de Madame.

 

En conclusion Ms Ama Bah a besoin d’un suivi spécialisé qui n’est pas disponible en Guinée.

 

 

 

 

Lettre du Dr Marcoux du 30 octobre 2012

 

[…] Son histoire médicale et chirurgicale est dramatique et compliquée. Je crois fermement qu’elle nécessite des soins chirurgicaux essentiels à sa survie et que ceux-ci ne pourraient être prodigués de façon sécuritaire dans son pays d’origine.

 

[…]

 

[…] Ama Bah est maintenant en attente d’une chirurgie qui sera compliquée par le fait qu’elle a subi plusieurs chirurgies récemment […]. Je crois fermement qu’il serait dangereux pour sa santé de la voir quitter le pays. Elle serait privée de soins essentiels qui ne peuvent être fournis, à mon avis, que dans un système de santé comme le nôtre. […] elle pourrait devoir attendre plus de 6 mois pour sa chirurgie, elle sera suivie de façon rapprochée d’ici-là. […]

 

[je souligne]

 

[39]           Les lettres médicales doivent être vues dans leur ensemble, et il était déraisonnable de conclure à la stabilité de l’état de santé de la demanderesse, mais ignorer l’incertitude reliée à cette stabilité et la nécessité d’un suivi au Canada.

 

[40]           Quant à la preuve soumise par la demanderesse sur l’état du système de santé en Guinée, bien qu’il aurait été diligent pour la demanderesse de fournir davantage de preuve documentaire, il était déraisonnable de rejeter la lettre du Dr Mathieu Loua au motif qu’on ne pouvait vérifier l’authenticité de ses compétences et de son statut professionnel. Sa profession de médecin est prouvée par la carte d’identité nationale sur laquelle il est inscrit médecin comme profession, qui a été jointe à sa lettre. Le médecin qui pratique en Guinée pouvait offrir une preuve crédible sur la réalité des installations médicales en Guinée ainsi que des soins disponibles.

 

[41]           Ainsi, il apparaît clairement de la preuve médicale soumise que la demanderesse ferait face à des difficultés inhabituelles, injustifiées et disproportionnées à cause de son état de santé à haut risque si elle devait retourner en Guinée pour y présenter sa demande de résidence permanente. Il était donc déraisonnable pour l’agent d’ignorer l’ensemble de cette preuve pour conclure que l’état de santé de la demanderesse était stable. Ce motif est suffisant à lui seul pour annuler la décision. Il n’est donc pas nécessaire d’analyser le bien-fondé des conclusions de l’agent quant aux facteurs de l’établissement et de l’intérêt de l’enfant. J’ajouterais cependant, quant à l’intérêt supérieur de l’enfant, que l’agent ne pouvait faire fi, sans raison valable, de la preuve soumise par la demanderesse composée de lettres d’organismes indépendants crédibles qui confirmaient que le fils de la demanderesse, né hors mariage, serait fortement ostracisé.

 

[42]           Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est accueillie et l’affaire est retournée pour être redéterminée par un nouvel agent.

 


JUGEMENT

LA COUR STATUE que

1.                  La demande de contrôle judiciaire est accueillie;

2.                  La décision de l’agent est annulée;

3.                  L’affaire est retournée pour être redéterminée par un nouvel agent; et

4.                  Aucune question d’importance générale n’est certifiée.

 

 

« Danièle Tremblay-Lamer »

Juge

 

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 


DOSSIER :

IMM-6198-13

 

INTITULÉ :

AMA BAH (AUSSI CONNUE SOUS LE NOM DE RAMATOULAYE BAH) c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

                                                            Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

                                                            LE 7 avril 2014

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT :

                                                            LA JUGE TREMBLAY-LAMER

DATE DES MOTIFS :

                                                            LE 9 AVRIL 2014

COMPARUTIONS :

Me Vincent Desbiens

Pour la demanderesse

 

Me Suzanne Trudel

Pour le défendeur

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Me Vincent Desbiens

Avocat

Montréal (Québec)

 

Pour la demanderesse

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

 

Pour le défendeur

 

 

 

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