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Date : 20140206


Dossier : T-367-13

 

Référence : 2014 CF 133

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 6 février 2014

En présence de madame la protonotaire Mireille Tabib

 

 

ENTRE :

LA COMMISSAIRE À L’INFORMATION DU CANADA

 

demanderesse

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

défendeur

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]               La Cour est saisie de la présente requête présentée par le procureur général afin de faire radier la demande de renvoi présentée par la commissaire à l’information du Canada (la commissaire), en vertu de l’article 18.3 de la Loi sur les Cours fédérales. Selon le procureur général, l’office fédéral dont les fonctions sont de nature purement consultative plutôt que décisionnelle ne peut pas se prévaloir du renvoi prévu à l’article 18.3.

 

Le contexte

[2]               Le paragraphe 11(2) de la Loi sur l’accès à l’information, LRC 1985, c A-1 (la LAI) permet à l’institution fédérale à qui la demande est faite d’exiger le versement d’un montant déterminé par règlement s’il faut plus de cinq heures pour la recherche et la préparation du document demandé en vertu de la LAI. Ces droits peuvent être prévus et calculés par le Règlement adopté en vertu de la LAI. Le paragraphe 7(2) du Règlement sur l’accès à l’information, DORS/83‑507 (le Règlement) prévoit que lorsque le « document demandé […] n’est pas informatisé », l’institution fédérale peut exiger le versement d’un montant de 2,50 $ par quart d’heure pour chaque heure en sus de cinq passée à la recherche et à la préparation.

 

[3]               Lorsque la personne qui a présenté la demande estime que les droits établis conformément au paragraphe 11(2) de la LAI sont déraisonnables, elle peut présenter une plainte à la commissaire qui doit alors mener une enquête.

 

[4]               Selon le processus d’enquête prévu à la LAI, après que la commissaire a mené une enquête sur la plainte et a déclaré que celle‑ci est bien fondée, elle doit adresser au responsable de l’institution fédérale un rapport dans lequel elle présente ses conclusions et ses recommandations. Si elle le juge à propos, elle doit aussi demander à l’institution fédérale de lui donner avis, dans un délai déterminé, soit des mesures prises ou envisagées pour la mise en œuvre de ses recommandations, soit des motifs invoqués pour ne pas y donner suite. Lorsqu’une telle demande est faite, la commissaire doit attendre la réponse de l’institution fédérale (ou l’expiration du délai qu’elle a fixé pour la réception de la réponse) avant de transmettre les conclusions de son enquête au plaignant, notamment la réponse de l’institution fédérale à sa demande et tout commentaire qu’elle pourrait avoir à cet égard. Nonobstant les conclusions de l’enquête de la commissaire ou ses commentaires, un plaignant non satisfait de la réponse de l’institution fédérale peut alors demander le contrôle judiciaire de la réponse de l’institution, conformément à l’article 41 de la LAI.

 

[5]               En 2011, Ressources humaines et Développement des compétences Canada (RHDCC) a établi et exigé des droits relativement à une demande de renseignements dont la plupart des documents étaient conservés sous forme électronique. Le 6 octobre 2011, la commissaire a reçu une plainte relativement à ces droits.

 

[6]               Ce n’était pas la première fois que la commissaire était saisie d’une plainte relativement à des droits similaires exigés pour la recherche et la préparation de documents électroniques. La commissaire avait déjà mené une enquête relativement à des droits exigés par le ministère des Affaires étrangères et du Commerce extérieur (le MAECI), et avait conclu que les documents électroniques (les documents stockés dans un ordinateur ou créés à partir d’un ordinateur) ne pouvaient pas véritablement être qualifiés de « documents qui ne sont pas informatisés », et que les droits établis au titre du paragraphe 7(2) du Règlement ne pouvaient donc pas être exigés pour la recherche et la préparation de ces documents. Le MAECI était en désaccord avec l’interprétation de la commissaire. Bien qu’une demande de contrôle judiciaire ait été introduite par la partie requérante, elle a par la suite été abandonnée. Cette enquête et les conclusions qui s’en sont suivies ont fait l’objet d’un compte rendu dans le rapport annuel de 2011‑2012 de la commissaire déposé au Parlement.

 

[7]               Vu le contexte dans lequel le présent renvoi est présenté, en ce qui concerne la plainte portée en 2011 contre RHDCC, la commissaire a mené une enquête et a conclu que la majorité des documents demandés avait été conservés sous format électronique. La commissaire a fait part à RHDCC de ses conclusions dont il ressortait que la plainte était bien fondée et, faisant référence à l’interprétation qu’elle avait déjà faite quant au paragraphe 7(2) du Règlement, elle a recommandé que RHDCC cesse d’établir des droits pour la recherche et la préparation de documents électroniques. RHDCC était en désaccord avec l’interprétation de la commissaire et a avisé qu’il n’appliquerait pas la recommandation de la commissaire.

 

[8]               La commissaire a présenté le présent renvoi afin d’obtenir l’interprétation juste du paragraphe 7(2) du Règlement, avant de transmettre son rapport final au plaignant.

 

[9]               La commissaire mentionne qu’elle a par ailleurs reçu cinq autres plaintes relativement à des droits exigés pour la recherche et la préparation de documents électroniques qui en sont toutes en début de procédure.

 

La position du procureur général

[10]           Le procureur général soutient que comme la commissaire a seulement pour rôle de faire des recommandations non contraignantes qui n’ont aucun effet déterminant sur les droits juridiques de quiconque et qui ne comportent aucune conséquence juridique, il n’y a aucun différend susceptible d’être résolu par une réponse à la question posée dans le renvoi.

 

[11]           Selon le procureur général, selon une jurisprudence abondante et constante, les dispositions relatives au renvoi contenues dans la Loi sur les Cours fédérales ne confèrent pas le pouvoir de demander à la Cour une opinion à titre consultatif, ou de lui demander de trancher des questions théoriques qui ne sont pas de nature à produire un effet immédiat et direct dans une instance devant un tribunal inférieur.

 

[12]           À l’appui de cette prétention, le procureur général se fonde sur l’arrêt Alberta (Attorney General) c Westcoast Energy Inc., (1997), 208 NR 154, lequel a interprété directement l’article 18.3 et le paragraphe 28(2), tels qu’ils figurent actuellement dans la Loi sur les Cours fédérales, et d’autres arrêts de la Cour d’appel fédérale qui interprétaient l’ancien paragraphe 28(4) de la Loi sur la Cour fédérale, entre autres l’arrêt Martin Service Station Ltd c Canada (Ministre du Revenu national), [1974] 1 CF 398 et l’arrêt Rosen (Re), [1987] 3 CF 238.

 

Analyse

[13]           Il convient de souligner que c’est d’une requête préliminaire en radiation dont la cour est saisie. De telles requêtes ne devraient être présentées et accueillies que lorsque la demande est de toute évidence si inopportune qu’elle est dénuée de toute possibilité d’être recueillie. Autrement, la meilleure façon pour le défendeur de contester une demande qu’il estime sans fondement consiste à comparaître et à faire valoir ses prétentions lors de l’instruction de la demande. (David Bull Laboratories Canada Inc c Pharmacia Inc, [1995] 1 CF 588 (CAF)).

 

[14]           Le paragraphe 18.3(1) est libellé de la façon suivante :

 

« Les offices fédéraux peuvent, à tout stade de leurs procédures, renvoyer devant la Cour fédérale pour audition et jugement toute question de droit, de compétence ou de pratique et procédure. »

 

“A federal board, commission or other tribunal may at any stage of its proceedings refer any question or issue of law, of jurisdiction or of practice and procedure to the Federal Court for hearing and determination.”

 

 

[15]           Le paragraphe 2(1) définit l’office fédéral de la façon suivante :

 

« office fédéral » Conseil, bureau, commission ou autre organisme, ou personne ou groupe de personnes, ayant, exerçant ou censé exercer une compétence ou des pouvoirs prévus par une loi fédérale ou par une ordonnance prise en vertu d’une prérogative royale, à l’exclusion de la Cour canadienne de l’impôt et ses juges, d’un organisme constitué sous le régime d’une loi provinciale ou d’une personne ou d’un groupe de personnes nommées aux termes d’une loi provinciale ou de l’article 96 de la Loi constitutionnelle de 1867. »

 

“federal board, commission or other tribunal” means any body, person or persons having, exercising or purporting to exercise jurisdiction or powers conferred by or under an Act of Parliament or by or under an order made pursuant to a prerogative of the Crown, other than the Tax Court of Canada or any of its judges, any such body constituted or established by or under a law of a province or any such person or persons appointed under or in accordance with a law of a province or under section 96 of the Constitution Act, 1867.”

 

 

[16]           Le procureur général ne conteste pas que la commissaire à l’information est un office fédéral au sens de l’article 2 de la Loi sur les Cours fédérales.

 

[17]           L’article 18.3 a été adopté en 1990, mais le libellé du paragraphe 18.3(1) n’est pas très différent de celui de l’ancien paragraphe 28(4).

 

[18]           Le changement important apporté par l’adoption du nouvel article 18.3 visait à conférer à la Cour fédérale la compétence d’entendre et de trancher les renvois présentés par les offices fédéraux à l’égard desquels la Cour exerce des fonctions de contrôle judiciaire. La compétence d’entendre les renvois n’était autrefois conférée qu’à la Cour d’appel fédérale, et cette compétence ne visait que les offices fédéraux dont la Cour d’appel fédérale contrôlait judiciairement les décisions. Comme la juge Tremblay‑Lamer l’a relevé aux paragraphes 13 et 14 de la décision Air Canada c Canada (Commissaire aux langues officielles), [1997] ACF no 976, les organismes qui pouvaient renvoyer des questions à la Cour d’appel pour que celle‑ci les tranche, conformément au paragraphe 28(4) de la Loi sur la Cour fédérale, étaient tous des organismes ou tribunaux exerçant des pouvoirs de nature quasi‑judiciaire. Conformément à l’article 18.3, toute entité répondant à la définition d’« office fédéral » peut renvoyer des questions à la Cour fédérale, notamment les organismes qui exercent seulement des pouvoirs administratifs, et même les organismes qui exercent simplement des fonctions de nature consultative, comme c’est le cas de la commissaire.

 

[19]           Par conséquent, bien que les critères adoptés par la jurisprudence, élaborée relativement au paragraphe 28(4) de la Loi sur la Cour fédérale, puissent toujours servir de guide dans l’application de l’article 18.3, ils « devront être assouplis pour s’adapter au contexte de l’article 18.3 » (Air Canada, précitée, au paragraphe 14).

 

[20]           Les critères généraux appliqués par la Cour d’appel fédérale en ce qui a trait aux questions pouvant faire l’objet d’un renvoi en application du paragraphe 28(4) de la Loi sur la Cour fédérale ont été résumés de la façon suivante dans l’arrêt Loi sur l’Immigration (Canada) (Re), [1991] ACF no 1155, 137 NR 64 :

La jurisprudence de la Cour établit clairement qu’une question de droit, de juridiction ou de procédure ne peut faire l’objet d’un renvoi en vertu du paragraphe 28(4) de la Loi sur la Cour fédérale à moins que les conditions suivantes ne soient remplies :

 

1.             la question doit en être une dont la solution peut mettre fin au litige dont le tribunal est saisi;

2.             la question doit s’être soulevée au cours de l’instance devant le tribunal qui effectue le renvoi;

3.             la question doit résulter de faits qui ont été prouvés ou admis devant le tribunal; et

4.             la question doit être renvoyée à la Cour par une ordonnance du tribunal qui, en plus de formuler la question, doit relater les constatations de faits qui y ont donné naissance.

 

[21]           Dans la présente requête, le procureur général ne conteste pas le fait que la présente demande satisfait aux deuxième, troisième et quatrième conditions du critère. Toutefois, selon le procureur général, la commissaire ne satisfait pas à la première condition du critère, et ce, pour deux raisons : premièrement, parce que, l’« instance » qui se déroule devant la Cour tire essentiellement à sa fin, et deuxièmement, parce que quoi qu’il en soit, la commissaire n’exerce pas une fonction qui consiste à trancher des litiges ou à en disposer, et que le renvoi ne peut donc pas mettre fin à un « litige » dont elle est saisie.

 

[22]           Le premier argument du procureur général est fondé sur la décision rendue par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Alberta (Attorney General) c Westcoast Energy Inc, précité, lequel a rejeté, dans le cadre d’une requête préliminaire, un renvoi présenté par l’Office national de l’énergie après avoir conclu l’instance et avoir rendu une autorisation. La Cour d’appel a conclu que, dans les circonstances, la réponse à la question posée « n’[était] pas de nature à produire un effet immédiat et direct dans une instance devant un tribunal inférieur », et qu’elle était donc purement théorique.

 

[23]           Il est assez évident que les tâches et les fonctions de la commissaire relativement à la plainte qui a donné naissance au présent renvoi ne prendront fin, de façon formelle, que lorsqu’elle aura rédigé un compte rendu au plaignant. Toutefois, l’argument du procureur général est que, parce que la commissaire a déjà conclu que la plainte est fondée et qu’elle a transmis un rapport en ce sens à RHDCC, sa procédure tire essentiellement à sa fin et que, le raisonnement de la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Westcoast Energy s’applique.

 

[24]           Tout comme la commissaire, j’accepte que ses tâches et ses fonctions ne sont pas de nature décisionnelles et ne lui permettent pas de se prononcer sur les droits d’un requérant ni sur les obligations d’une institution fédérale. Il est bien établi que les tâches et les fonctions de la commissaire consistent à recevoir des plaintes et à mener des enquêtes sur celles‑ci, à faire des recommandations non contraignantes et à faire part au plaignant de ses conclusions, ses recommandations et ses commentaires.

 

[25]           L’argument du procureur général selon lequel la procédure de la commissaire tire « essentiellement » à sa fin en l’espèce écarte la dernière étape de l’obligation légale de la commissaire qui consiste à rendre compte au plaignant, parce qu’elle n’est qu’une simple formalité administrative et une tâche essentiellement insignifiante. Toutefois, une telle approche ne tient pas compte de l’importance que le législateur et les tribunaux ont accordée au rôle de la commissaire à titre d’agente jouant un rôle qui ressemble à celui d’un ombudsman, et de son rapport final remis au plaignant comme condition préalable à tout contrôle judiciaire du refus d’une institution fédérale d’accéder aux demandes d’information, comme cela ressort du paragraphe 51 de la décision Canada (Procureur général) c Commissaire à l’information du Canada, 2007 CF 1024 :

Le rôle que joue le commissaire en ce qui concerne l’atteinte de ces objectifs est capital. En tant que haut fonctionnaire du Parlement, le commissaire est chargé de recevoir les plaintes dont il est saisi en vertu du paragraphe 30(1) de la Loi, de faire enquête sur ces plaintes et de rendre compte des conclusions de son enquête au plaignant et au responsable de l’institution fédérale compétente, conformément à l’article 37 de la Loi. Le législateur a prévu que la décision du responsable de l’institution fédérale de refuser la communication des renseignements ne peut être prise qu’après que l’intéressé a eu la possibilité d’examiner les conclusions et recommandations du commissaire. La Cour d’appel fédérale souligne de la façon suivante l’importance que revêt l’enquête du commissaire :

 

L’enquête que doit mener le commissaire est la pierre angulaire du système d’accès à l’information. Elle représente une méthode informelle de résolution des conflits où l’institution fédérale se voit investie non pas d’un pouvoir décisionnel, mais bien d’un pouvoir de recommandation auprès de l’institution concernée. L’importance de cette enquête est soulignée par le fait qu’elle constitue un préalable à l’exercice du pouvoir de révision, selon que le prévoient les articles 41 et 42 de la Loi.

 

[26]           Les articles 41 et 42 de la LAI exigent comme condition préalable à ce que soit le plaignant soit la commissaire sollicitent le contrôle judiciaire du refus d’une institution fédérale de communiquer des renseignements, que la commissaire ait d’abord communiqué les résultats de son enquête au plaignant. Le législateur doit avoir voulu que la décision du plaignant de déposer ou non une demande de contrôle judiciaire soit éclairée par le rapport de la commissaire, notamment par toute évaluation qu’elle pourrait faire dans ce rapport en ce qui a trait à la réponse que l’institution fédérale a donnée à ses recommandations. Sur ce fondement, je ne peux pas conclure que la procédure de la commissaire tire « essentiellement» à sa fin au point où le renvoi ne devrait nécessairement pas aboutir, contrairement à ce qu’il a été prétendu.

 

[27]           De la jurisprudence traitant des renvois en général, le procureur général tire le principe selon lequel les pouvoirs de renvoi prévus à l’article 18.3 doivent être interprétés comme étant limités aux questions dont la solution permet de trancher un litige précis touchant aux droits des personnes en cause. Sur le fondement de cet argument et en raison de la nature non contraignante de la décision de la commissaire en ce qui a trait à la question de savoir si une plainte est fondée, la commissaire ne pourrait jamais présenter de renvoi relativement à toute question de droit qui autrement disposerait de la conclusion qu’elle doit tirer. La thèse du procureur général trouve également appui dans une décision qui a établi que, parce qu’elles ne touchent pas aux droits d’un plaignant ou ne les déterminent pas (Pieter c Canada (Procureur général), 2007 CF 556), les conclusions de la commissaire à l’information ou d’autres agents du type ombudsman ne sont pas susceptibles de contrôle judiciaire. Étant donné que les conclusions de la commissaire ne sont pas susceptibles de contrôle judiciaire, autoriser la commissaire à présenter un renvoi portant sur la justesse de ses conclusions lui permettrait de faire indirectement ce que ni elle ni le plaignant ne pouvaient faire directement.

 

[28]           Le libellé de l’article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales restreint de façon expresse à « quiconque est directement touché par l’objet de la demande », la possibilité de présenter une demande de contrôle judiciaire. Le libellé de l’article 18.3 ne contient pas, et cette restriction il ne restreint pas le genre de questions qui peuvent faire l’objet d’un renvoi à celles qui sont déterminantes quant aux droits d’une autre personne ou qui y ont directement trait. La Cour d’appel fédérale ainsi que la Cour fédérale ont conclu que les dispositions relatives au renvoi contenues dans la Loi sur les Cours fédérales limitaient les renvois aux questions dont la solution permet de régler l’instance ou l’affaire pendante devant le tribunal qui fait le renvoi (voir par exemple Westcoast Energy, précité, au paragraphe 16, Martin Service Station, précité, aux paragraphes 4 et 14, Air Canada, précité au paragraphe 15). Toutefois, il ne ressort pas de la jurisprudence que, en plus d’être une question dont la solution permet de régler le litige dont le tribunal est saisi, la question faisant l’objet du renvoi doit être déterminante en ce qui concerne les droits fondamentaux des parties devant le tribunal. Bien entendu, il se peut qu’il en eût été ainsi pour les organismes dont les fonctions sont de nature décisionnelle et qui, selon l’ancien paragraphe 28(4) de la Loi sur la Cour fédérale, étaient autorisés à présenter un renvoi, mais depuis que l’article 18.3 a étendu les dispositions relatives au renvoi aux organismes dont les fonctions ne sont pas de nature décisionnelle, il faut se garder d’interpréter les causes qui ont été tranchées en vertu de l’ancien paragraphe 28(4) comme exigeant que la question faisant l’objet du renvoi soit déterminante en ce qui concerne les droits fondamentaux des parties à une « instance devant un tribunal inférieur ». Dans l’arrêt Air Canada, précité, la Cour a décidé, dans le cadre d’une requête préliminaire en radiation qu’il était suffisant que l’une des réponses possibles aux questions faisant l’objet du renvoi puisse permettre au commissaire aux langues officielles de disposer du litige.

 

[29]           On peut certainement avancer que le législateur avait l’intention de conférer aux organismes dont les fonctions sont de nature consultative comme la commissaire à l’information, le droit de renvoyer à la Cour pour qu’elle les tranche, des questions de droit soulevées dans le cours de l’accomplissement de leurs tâches. S’il en est ainsi, on peut soutenir qu’il suffit de satisfaire aux exigences de l’article 18.3 voulant que la question puisse permettre de déterminer comment la commissaire doit se conduire. En l’espèce, une réponse positive à la question posée par la commissaire permettrait de disposer de la « question » dont elle est saisie. Elle n’aurait pas d’autre choix que d’aviser le plaignant que la plainte n’est pas fondée et que la décision de RHDCC de ne pas approuver ses recommandations est justifiée.

 

[30]           Pour ces motifs, je ne peux pas conclure que ce renvoi est si manifestement mal fondé qu’il n’a pas la moindre chance d’aboutir. Par conséquent, la requête préliminaire en radiation du procureur général doit être rejetée.

 


ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE :

 

1.                  La requête du défendeur est rejetée.

 

2.                  La demanderesse doit, dans un délai de 20 jours, en consultation avec le défendeur et après l’en avoir avisé, présenter la requête prévue à l’article 322 des Règles.

 

 

 

« Mireille Tabib »

Protonotaire

 

 

Traduction certifiée conforme

Laurence Endale

 

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 


DOSSIER :

T-367-13

 

INTITULÉ :

LA COMMISSAIRE À L’INFORMATION DU CANADA c

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              OTTAWA (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :             Le 21 novembre 2013

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                      LA PROTONOTAIRE TABIB

 

DATE DES MOTIFS :                                                         Le 6 février 2014

COMPARUTIONS :

Jill Copeland

Louisa Garib

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

 

Brian Harvey

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Sack Goldblatt Mitchell LLP

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

 

Commissariat à l’information

de la vie privée du Canada

Ottawa (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

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