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Date : 20140408


Dossier :

IMM-13216-12

 

Référence : 2014 CF 341

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 8 avril 2014

En présence de madame la juge Strickland

 

ENTRE :

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

demandeur

et

A069

 

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

[1]               La présente demande de contrôle judiciaire concerne une autre décision rendue par la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada (la Commission) portant sur des demandes d’asile faites par des demandeurs d’asile tamouls arrivés au Canada à bord des navires Ocean Lady ou Sun Sea.

 

[2]               En guise de contexte, l’article 96 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, ch.27 (LIPR) prévoit que les demandeurs qui craignent d’être persécutés du fait de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de leur appartenance à un groupe social ou de leurs opinions politiques, obtiendront le statut de réfugié s’ils ne peuvent pas, ou du fait de cette crainte, ne veulent pas obtenir de protection du pays dont ils ont la nationalité ou dans lequel ils ont leur résidence habituelle. Afin d’établir la qualité de réfugié au sens de la Convention en vertu de l’article 96, un demandeur d’asile doit prouver, selon la prépondérance des probabilités, qu’il existe davantage qu’une simple possibilité, ou une possibilité raisonnable, qu’il serait exposé à la persécution s’il retournait dans son pays d’origine (Adjei c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1989] 2 CF 680, p. 683 (CAF), expliqué dans Ospina c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 681, par. 22-34; Hinzman c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 420, par. 184; conf. par 2007 CAF 171).

 

[3]               Dans la présente affaire, le défendeur, un citoyen du Sri Lanka âgé de 33 ans, était à bord du Ocean Lady et est arrivé au Canada le 17 octobre 2009. La Commission a conclu qu’il avait qualité de réfugié au sens de la Convention, en raison de sa crainte fondée de persécution du fait de sa nationalité et de son appartenance à un groupe social : jeunes hommes tamouls soupçonnés d’entretenir des liens avec les Tigres de libération de l’Eelam tamoul (TLET) parce qu’ils se sont rendus au Canada à bord du Ocean Lady. Cette situation le place dans la troisième catégorie possible des groupes sociaux décrits par la Cour suprême dans Canada (procureur général) c. Ward, [1993] 2 RCS 689, pages 726-744, étant ceux « associés par un ancien statut volontaire immuable en raison de sa permanence historique ».

 

[4]               La Commission a jugé le défendeur crédible. Elle a aussi conclu qu’il était un réfugié sur place, selon le Guide et principes directeurs sur les procédures et critères à appliquer pour déterminer le statut de réfugiés du HCR (le guide du HCR), en raison de sa crainte fondée de persécution s’il devait retourner au Sri Lanka. Même s’il n’existe aucune preuve démontrant que lorsqu’il vivait au Sri Lanka, il était membre des TLET ou aurait été considéré comme ayant des liens avec les TLET, la Commission a conclu que son profil a changé lorsqu’il est monté à bord de l’Ocean Lady, un navire appartenant aux TLET et géré par les TLET et dont certains passagers étaient membres des TLET. La Commission a conclu que le lien du défendeur avec l’un des motifs prévus dans la Convention est passé de l’appartenance au groupe social de [TRADUCTION] « jeunes hommes tamouls de Jaffna non soupçonnés d’être membres des TLET ou de les soutenir » à l’appartenance au groupe social des [TRADUCTION] « jeunes hommes tamouls de Jaffna, passagers de l’Ocean Lady, soupçonnés d’appartenir aux TLET ou de détenir des renseignements au sujet de membres des TLET qui se trouvaient à bord de l’Ocean Lady ». En raison de son arrivée au Canada à bord de ce navire et de sa demande d’asile subséquente, la Commission a conclu que les autorités sri-lankaises finiraient probablement par en être informées. Compte tenu de cette situation, et après examen de la preuve documentaire, la Commission a conclu qu’il existait plus qu’une simple possibilité que le défendeur soit arrêté, détenu, interrogé, torturé, ou qu’il disparaisse ou soit même tué par les autorités sri-lankaises s’il retournait dans son pays.

 

[5]               Le demandeur soutient que la Commission a commis une erreur en concluant que le défendeur avait un lien avec un motif prévu dans la Convention. Plus précisément, il soutient que la Commission a commis une erreur en concluant que le défendeur était un réfugié au sens de la Convention du fait de sa nationalité et de son appartenance à un groupe social.

 

[6]               En ce qui concerne la nationalité, le demandeur affirme que la Commission n’a invoqué aucun motif à l’appui de sa conclusion selon laquelle la demande d’asile du défendeur avait un lien avec le motif de la nationalité prévu dans la Convention. Le simple fait de l’identifier comme un Sri-Lankais et de faire référence aux conditions susceptibles d’être problématiques dans le pays ne permettra pas de conclure à l’existence d’un lien reposant sur la nationalité et, par conséquent, la conclusion ne sera pas justifiable, transparente et cohérente (Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile) c. Baraniroobasingam, 2010 CF 92, par. 6; Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Fouodjl, 2005 CF 1327, par. 20; Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c. Terre-Neuve-et-Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62, par. 16) [Newfoundland Nurses]).

 

[7]               En ce qui concerne le groupe social, le demandeur soutient que la conclusion de la Commission était contraire aux règles de droit applicables à la portée de l’« appartenance à un groupe social » aux fins de la définition de réfugié au sens de la Convention. À cet égard, le demandeur fait valoir que la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Ward, précité, a conclu que la catégorie de groupe n’avait pas pour objet d’inclure quelconque association ayant certains points en commun, mais elle doit plutôt tenir compte des thèmes sous-jacents généraux de la défense des droits de la personne et de la lutte contre la discrimination qui viennent justifier l’initiative internationale de protection des réfugiés. La troisième catégorie – décrite par la Cour suprême comme « groupes associés par un ancien statut volontaire immuable en raison de sa permanence historique » – ne prend pas en considération les jeunes hommes tamouls qui s’associent volontairement en raison de leur passage sur l’Ocean Lady, étant donné qu’il n’existe aucun lien avec le thème sous-jacent de la défense des droits de la personne et de la lutte contre la discrimination (Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. B380, 2012 CF 1334, par. 24 [B380]; Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. A011, 2013 CF 580, par. 40 [A011]; Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. B171, B169, B170, 2013 CF 761, par. 7 [B171, B169, B170]; Zefi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CFPI 636, par. 31-41).

 

[8]               Le demandeur soutient également que, parce que la Commission n’a pas rendu d’autre conclusion en ce qui a trait au lien, autre que la nationalité et le groupe social, la Cour est limitée par l’arrêt Ward et une insuffisance de motifs relative à une interprétation portant sur un lien avec d’autres motifs, comme l’origine ethnique et les opinions politiques présumées (Ward, précité, par. 78; B171, B169, B170, précité, par. 10; Newfoundland Nurses, précité, par. 16-17; Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Harvey, 2013 CF 717, par.58-60; Agidi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2013 CF 691, par. 8-9; Alberta Teachers’ Association c. Alberta, 2011 CSC 61, par. 54; A011, précité, par. 42; Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. B377, 2013 CF 320, par. 27 [B377]).

 

[9]               De plus, même si le fait d’être Tamoul fait partie du motif de la race au sens de la Convention, la Commission n’a pas conclu que le défendeur ferait face à un risque de persécution pour ce motif. Par conséquent, tous les motifs mixtes sur l’origine ethnique ou la race doivent être rejetés, car il n’est pas démontré clairement que la Commission a examiné l’origine ethnique ou la race du défendeur avant de rendre sa conclusion. Au contraire, la Commission a conclu qu’aucun élément de preuve n’établissait que son profil de jeune homme tamoul de Jaffna créait un risque de persécution. La Cour ne peut pas distinguer les conclusions de la Commission sur le profil du défendeur avant que celui-ci ne quitte le Sri Lanka d’avec le profil aux fins de sa demande d’asile sur place. Une conclusion de motifs mixtes équivaudrait à de la spéculation (Kengeswaran Thanpalasingham c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2013 CF 380, par. 16; Jegatheeswaran Ganeshan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2013 CF 841, par. 35).

 

[10]           Le demandeur soutient également que des décisions récentes appuient sa position (Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. B472, 2013 CF 151, par. 27-28, 32; Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. B323, 2013 CF 190, par 6; A011, précité, par. 42; PM c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2013 CF 77, par. 13; SK c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2013 CF 78, par. 21; B171, B169, B170, précité, par. 10). De plus, on peut distinguer des décisions dans lesquelles les demandes de contrôle judiciaire faites par le ministre ont été refusées (Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. B399, 2013 CF 260 [B399]; Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. A032, 2013 CF 322, par. 18-21 [A032]; Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. B420, 2013 CF 321, par. 23, 26; B377 par. 27).

 

[11]           La décision rendue le 19 novembre 2013 par la juge Gleason dans l’affaire Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. A068, 2013 CF 1119 [A068] a été abordée au cours de l’audience de la présente affaire sans être citée dans les observations écrites du demandeur. Cette décision est importante dans le cadre du présent contrôle judiciaire pour bon nombre de raisons. Premièrement, parce que dans l’affaire A068, la juge Gleason a procédé à une analyse attentive et fouillée des décisions rendues par la présente Cour en ce qui concerne les personnes qui sont arrivées au Canada à bord de l’Ocean Lady ou du Sun Sea. Deuxièmement, parce que les questions soulevées et les observations présentées par le ministre dans l’affaire A068 ressemblent aux questions et aux observations de la présente affaire. Et troisièmement, parce que la décision rendue par la Commission dans l’affaire A068 est quasiment identique à la décision rendue par la Commission dans la présente affaire, mise à part sa prise en considération de la crédibilité de chaque demandeur d’asile.

 

[12]           Dans cette affaire comme en l’espèce, la Commission a conclu que le demandeur d’asile avait qualité de réfugié en raison du risque auquel il était exposé du fait de sa présence à bord de l’Ocean Lady. La Commission a jugé que sa présence à bord du navire et la situation dans laquelle il se trouvait l’exposeraient à un risque possible de torture par les autorités sri-lankaises s’il devait retourner dans ce pays, parce que les autorités le soupçonneraient d’être un membre ou un sympathisant des TLET ou voudraient lui soutirer des renseignements sur les membres ou les sympathisants des TLET qui étaient avec lui à bord de l’Ocean Lady.

 

[13]           En ce qui concerne la question de savoir si le demandeur d’asile dans l’affaire A068 était membre d’un groupe social au sens de l’article 96, la juge Gleason a examiné les décisions rendues récemment concernant les demandeurs d’asile qui étaient à bord du Sun Sea et de l’Ocean Lady, ainsi que les principes établis dans l’arrêt Ward. Elle a conclu que la décision rendue par la Commission devait être maintenue sur le fondement de sa conclusion selon laquelle le demandeur d’asile serait exposé à un risque du fait de sa situation et de la possibilité que les autorités sri-lankaises le prennent pour un sympathisant des TLET. Elle a souligné que le fondement de son analyse est semblable à celui appliqué par les juges O’Reilly, Noël et de Montigny dans Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. B420, 2013 CF 321, Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. B344, 2013 CF 447, Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. B272, 2013 CF 870 [B272], et B399, A032, B377, précité. Pour cette raison, elle a conclu qu’il était inutile de se pencher sur la question de savoir si A068 était ou pas membre d’un groupe social.

 

[14]           Dans l’affaire entendue par la juge Gleason, comme dans ces affaires, la Commission a évoqué à plusieurs reprises dans les décisions qu’elle a rendues le risque auquel serait exposé le demandeur d’asile du fait d’être un jeune homme tamoul originaire du nord du Sri Lanka qui serait perçu par les autorités sri-lankaises comme étant un membre ou un sympathisant des TLET (et soupçonné de détenir des renseignements sur cette organisation) en raison de sa situation et de sa présence à bord de l’Ocean Lady.

 

[15]           Dans cette affaire comme en l’espèce, la Commission a indiqué ce qui suit dans sa décision :

[7]        Le demandeur d’asile a qualité de réfugié au sens de la Convention, car il craint avec raison d’être persécuté au Sri Lanka pour des motifs prévus par la Convention du fait de sa nationalité et de son appartenance à un groupe social, soit celui des jeunes hommes tamouls qui seraient soupçonnés d’entretenir des liens avec les TLET parce qu’ils se sont rendus au Canada à bord du MS Ocean Lady […]

 

[16]           Dans cette affaire comme en l’espèce, à plusieurs autres endroits dans la décision, la Commission a fait des observations sur le risque de torture auquel pourrait fort bien être exposé le demandeur d'asile à son retour au Sri Lanka, puisque les autorités présumeraient qu'il entretient des liens avec les TLET. La juge Gleason a donné plusieurs exemples, citant des paragraphes de la décision de la Commission dans A068. Il n’est pas nécessaire de les reproduire ici. Ce qui est pertinent, c’est que des huit paragraphes cités, six se retrouvent aussi dans la décision de la Commission en l'espèce (les paragraphes 23, 27, 29 31, 41, 44 dans A068 correspondent aux paragraphes 16, 21, 23, 25, 36 et 38 de la décision en cause).

 

[17]           Dans l’affaire A068, comme c'est le cas en l'espèce, la Commission n’a pas utilisé les mots « opinion politique » ou « opinion politique présumée » dans ces passages. Cependant, la juge Gleason a conclu que la Commission a établi clairement que le risque auquel le demandeur d’asile ferait face est lié en partie au fait qu’il serait soupçonné par les autorités sri-lankaises d’avoir entretenu des liens avec les TLET. Et alors que dans B420, A032, B377, B272 et B399, la Commission a expressément utilisé les mots « opinion politique présumée », cela n’était pas le cas dans l’affaire B344 dans laquelle le juge Noël a confirmé la décision de la Commission en se fondant sur une analyse des « motifs mixtes » (par. 37 et 45). La juge Gleason a conclu ce qui suit :

 

[36]      J’estime que le raisonnement des juges de Montigny, O’Reilly, Blanchard et Noël est convaincant et qu’on devrait considérer en l’espèce que la Commission a rattaché ses conclusions quant au lien à la race ou à la nationalité et aux opinions politiques présumées. À cet égard, il convient de rappeler que la norme de la décision raisonnable n’exige pas que les motifs soient parfaits ou qu’ils aient une forme quelconque, pourvu qu’ils permettent aux parties et à la cour de révision de comprendre les raisons pour lesquelles une décision a été rendue (Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c Terre‑Neuve‑et‑Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62, [2011] 3 RCS 708, au paragraphe 16). Dans le cas présent, comme le démontrent les citations reproduites ci‑dessus, il est clair que c’est la combinaison de la race ou la nationalité et des opinions politiques présumées du demandeur d’asile, une perception découlant de sa situation et de sa présence à bord du MS Ocean Lady, qui a amené la Commission à conclure qu’il avait qualité de réfugié au sens de la Convention sur les réfugiés.

 

[37]      Sur cette base, la confirmation de la décision de la Commission va dans le sens de l’arrêt Ward de la Cour suprême. Dans cette affaire, la Cour suprême a rejeté l’argument selon lequel le demandeur d’asile était un réfugié parce qu’il appartenait à un groupe social, à savoir qu’il était un ancien membre de l’Irish National Liberation Army. Par contre, la Cour a jugé que le demandeur d’asile avait des raisons de craindre d’être persécuté en raison de ses opinions politiques, même si ce motif n’avait été invoqué ni devant la Commission ni devant la Cour d’appel fédérale (à la page 745, renvoi au RCS). Par conséquent, l’arrêt Ward établit que, si les faits démontrent que le demandeur d’asile craint avec raison d’être persécuté pour ses opinions politiques, il est loisible à une cour de révision de tenir compte de ce motif, même si les parties ont formulé la question en litige dans le contexte de l’appartenance à un groupe social.

 

[38]      Par conséquent, la conclusion de la Commission selon laquelle il existait un lien avec un motif prévu par la Convention est raisonnable.

 

 

[18]           La juge Gleason s’est ensuite penchée sur les conclusions factuelles tirées par la Commission en ce qui concerne la probabilité d’un risque pour le demandeur d’asile et a conclu qu’il y avait de multiples éléments de preuve sur lesquels se fonder pour conclure à l’existence de ce risque et en a donné des exemples. La juge Gleason a aussi établi une distinction entre l’affaire dont elle est saisie et B380, que le juge en chef a tranchée, sur ce fondement. Elle a conclu que la décision rendue par la Commission était fondée sur une conclusion raisonnable de l’existence d’un lien avec un motif énoncé à la Convention, et sur le caractère raisonnable des conclusions factuelles quant à l’existence d’une possibilité raisonnable que le demandeur d’asile soit persécuté s’il était renvoyé au Sri Lanka; par conséquent, la décision rendue par la Commission a été confirmée en l’espèce.

 

[19]           Dans la présente affaire, le dossier montre que beaucoup des mêmes éléments de preuve avaient été portés à la connaissance de la Commission lorsque celle-ci a rendu sa décision concernant B069. Les ressemblances comprennent ce qui suit : des articles de divers médias établissant un lien entre les navires et les TLET, notamment un article du Toronto Star dans lequel le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile a déclaré que les TLET [TRADUCTION] « sont derrière des opérations de migration clandestines au Canada »; les éléments de preuve que la GRC et le gouvernement du Canada ont communiqués au gouvernement sri-lankais (Décision, par. 18, 19 et 20; Media index, CTR pp. 789-793), et des rapports provenant de divers organismes gouvernementaux et d’organisations non gouvernementales indiquant que les personnes soupçonnées d’être associées aux TLET risquent d’être victimes de violence ou de torture à leur retour (Décision, par. 32; CTR pp. 701, 712, 1475, 1493, 1500, 1527). De plus, la preuve documentaire relevait ici dans de nombreuses sources qu’au moins 25 des 76 personnes à bord de l’Ocean Lady étaient membres des TLET (Décision, par. 16, 17).

 

[20]           Étant donné les questions communes, les preuves documentaires similaires et les motifs quasi identiques contenus dans la décision rendue par la Commission dans l’affaire A068, je ne vois pas de raison de s’écarter du raisonnement et des conclusions de la juge Gleason. En conséquence, la demande de contrôle judiciaire doit être rejetée.

 

[21]           Le défendeur a présenté en l’espèce l’existence de circonstances spéciales qui appuieraient une adjudication des dépens en sa faveur (invoquant le raisonnement suivi dans l’affaire A44, précité, par. 43-46). Il a porté l’affaire A068 à l’attention du demandeur et a demandé l’abandon de celle-ci étant donné qu’il était manifeste et évident, en s’appuyant sur cette décision, que cette question n’avait aucune chance de succès. De plus, ayant pu bénéficier des affaires A068, A061, A025, A44 et d’autres décisions, l’empressement avec lequel le demandeur a déposé la présente demande justifie également une adjudication des dépens. D’un autre côté, le demandeur fait valoir que les décisions rendues par la présente Cour dans les affaires relatives à l’Ocean Lady et au Sun Sea ne sont pas toujours favorable aux demandeurs d’asile, ce qui montre que des questions valables ont été posées devant la Cour.    

 

[22]           On peut comprendre pourquoi le défendeur pourrait trouver qu’une adjudication des dépens serait justifiée dans la présente affaire, je ne suis pas convaincu que le critère élevé qui s’applique à l’établissement de l’existence de raisons spéciales a été appliqué dans cette circonstance spéciale permettant de s’écarter de la Règle 22. En conséquence, aucuns dépens ne seront accordés.

 

[23]           Les parties n’ont proposé aucune question à certifier et aucune ne se pose.


JUGEMENT

LA COUR ORDONNE :

  1. La présente demande de contrôle judiciaire est rejetée.
  2. Aucuns dépens ne sont adjugés.
  3. Aucune question n'est certifiée.

 

 

 

« Cecily Y. Strickland »

Juge

 

 

Traduction certifié conforme

Caroline Tardif, LL.B, B.A. trad.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 


DOSSIER :

IMM-13216-12

 

INTITULÉ :

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION c. A069

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

                                                           Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

                                                            lE 13 MARS 2014

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT            LA JUGE STRICKLAND

DATE DES MOTIFS :

                                                              LE 8 AVRIL 2014

COMPARUTIONS :

Laoura Christodoulides

POUR LE DEMANDEUR

 

Kumar S. Sriskanda

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Kumar S. Sriskanda

Avocats

Scarborough (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

 

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