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Date : 20140327


Dossier :

IMM-11647-12

 

Référence : 2014 CF 297

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 27 mars 2014

En présence de madame la juge Kane

 

ENTRE :

MANIVANNAN YATHAVARAJAN

 

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

[1]               Le demandeur, un citoyen sri-lankais d’origine tamoule, a présenté une demande d’asile à son arrivée au Canada le 13 août 2010, en même temps que les 492 autres passagers et membres d’équipage du MS Sun Sea.

 

[2]               Le 23 octobre 2012, la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission) a rejeté sa demande d’asile en vue d’obtenir la qualité de réfugié au sens de la Convention et celle de personne à protéger, suivant les articles 96 et 97 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés LC 2001, c 27 [la Loi].

 

[3]               Le demandeur sollicite à présent le contrôle judiciaire de cette décision en vertu de l’article 72 de la Loi.

 

[4]               Pour les motifs qui suivent, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

 

Contexte

[5]               Le demandeur a décrit les mauvais traitements dont il a été victime durant la guerre civile qui a opposé les Tigres de libération de l’Eelam tamoul [TLET] au gouvernement du Sri Lanka : il aurait été soumis sur une base régulière à des inspections à des postes de contrôle et à domicile, à du harcèlement, à des arrestations arbitraires, à la torture et à un danger mortel. Durant les pourparlers de paix qui se sont déroulés entre 2002 et 2005, le demandeur et sa famille se sont réinstallés dans la ville de Vavuniya, contrôlée par le gouvernement. Pendant cette période, le demandeur a hébergé d’autres parents, notamment son cousin, réputé être un membre de haut rang des TLET. Après la rupture des pourparlers de paix, le demandeur a été sommé de se présenter à un poste de l’armée pour être interrogé en raison de ses liens soupçonnés avec les TLET. Craignant d’être persécutés, sa famille et lui ont déménagé dans une zone plus centrale de Vavuniya où ils sont restés, essentiellement sans connaître de problèmes jusqu’à la fin de la guerre civile en 2009.

 

[6]               Après la guerre civile, le demandeur et sa famille sont retournés dans leur ville natale. Le demandeur affirme qu’en 2010, l’armée s’est rendue chez lui pour s’enquérir de son cousin et a informé sa femme qu’il était également soupçonné d’avoir des liens avec les TLET, et qu’il devait se présenter à la base militaire à son retour chez lui. Craignant la persécution, le demandeur s’est enfui en Thaïlande, a tenté de s’inscrire auprès du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés [l’UNHCR], puis s’est enfui au Canada à bord du MS Sun Sea.

 

[7]               À son arrivée au Canada, le demandeur a été détenu et questionné par des agents de l’Agence des services frontaliers du Canada [l’ASFC]. Il ne leur a pas révélé que le gouvernement du Sri Lanka l’avait associé aux TLET à cause de son cousin, mais il l’a fait plus tard en remplissant son formulaire de renseignements personnels [le FRP].

 

La décision

[8]               La Commission a conclu que la crainte du demandeur d’être persécuté au Sri Lanka ne reposait pas sur un motif prévu par la Convention, et qu’il ne serait pas personnellement exposé à une menace à sa vie, ou à un risque de traitement ou de peine cruels ou inusités ou de torture, s’il retournait dans ce pays.

 

[9]               La Commission a tiré plusieurs conclusions quant à la crédibilité et l’invraisemblance, qui procèdent toutes de l’incident clé ayant poussé le demandeur à fuir le Sri Lanka :

         La Commission a fait remarquer que dans toutes ses entrevues avec l’ASFC, le demandeur n’a jamais indiqué qu’il avait fui le Sri Lanka parce que l’armée l’avait associé aux TLET à cause de son cousin, qui en était un membre de haut rang. La Commission a rejeté l’explication selon laquelle il avait gardé le silence parce qu’il ne voulait pas être considéré comme un partisan des TLET. Estimant qu’il n’était pas logique qu’il ait cru devoir dissimuler cette « information essentielle », la Commission a fait remarquer que si les événements s’étaient déroulés comme il le prétend, il se serait empressé d’expliquer la raison de sa crainte dans le pays où il demandait l’asile.

 

         La Commission a souligné l’incohérence entre le témoignage qu’il a livré de vive voix et sa déposition écrite quant à la raison pour laquelle il n’a pas informé l’ASFC des motifs de sa fuite du Sri Lanka; il a déclaré à l’audience que l’ASFC ne lui avait pas posé la question, alors qu’il indique dans son FRP qu’il ne voulait pas passer pour un partisan des TLET. La Commission a observé que contrairement à ce qu’il a prétendu, l’ASFC lui a effectivement demandé s’il avait déjà eu des problèmes avec le gouvernement ou d’autres groupes, et plus précisément s’il avait eu des démêlés avec l’armée. Le demandeur n’a jamais signalé que l’armée l’avait associé à son cousin.

 

         La Commission doutait que l’armée ait vraiment été à sa recherche en 2010, car si elle voulait l’appréhender en raison de ses liens soupçonnés avec les TLET, elle n’aurait pas prévenu sa femme en lui donnant ainsi la possibilité de s’échapper.

 

         La Commission a jugé improbable qu’après six ans et la fin de la guerre civile, les autorités sri-lankaises s’intéressent aux liens du demandeur avec son cousin. Elle a fait remarquer que le frère du demandeur, qui vit encore au Sri Lanka, n’a connu aucun problème.

 

         La Commission a jugé invraisemblable que le demandeur pût obtenir un passeport sri-lankais authentique s’il était véritablement recherché par l’armée. Il lui a semblé illogique qu’il se présente et s’identifie dans un bureau des passeports du gouvernement s’il était recherché par l’armée.

 

[10]           La Commission a conclu que « [d]ans leur ensemble, les incohérences et les invraisemblances susmentionnées m’amènent à conclure que la preuve du demandeur d’asile quant au fait qu’il est recherché par la SLA n’est pas crédible ».

 

[11]           La Commission a reconnu que le demandeur était un Sri-lankais d’origine tamoule arrivé à bord du MS Sun Sea, et s’est demandé si cela avait suscité sa demande d’asile ou si sa présence à bord de ce navire donnait lieu à une demande d’asile sur place.

 

[12]           La Commission a examiné des documents concernant la situation dans le pays, notamment un rapport du groupe Freedom from Torture selon lequel les Tamouls ayant des liens réels ou perçus avec des membres de tous rangs des TLET seraient exposés à un risque de torture à leur retour. La Commission a toutefois fait observer qu’il n’était pas possible d’évaluer la crédibilité de cette information puisque l’ONG en question avait refusé de fournir d’autres renseignements sur sa méthodologie ou ses contacts après que le ministre britannique de l’Immigration lui en eut fait la demande. La Commission a également examiné d’autres sources indiquant que la situation des jeunes hommes tamouls s’était améliorée depuis la fin de la guerre, et fait observer qu’en 2010, l’UNHCR avait modifié sa position concernant l’admissibilité des demandeurs d’asile tamouls, et que le gouvernement sri-lankais avait libéré depuis des individus soupçonnés d’avoir des liens avec les TLET et organisé le retour de personnes déplacées à l’intérieur du pays, ce qui démontrait que les mesures d’urgence et de sécurité avaient été relâchées. La Commission a conclu que les rapatriés n’étaient pas maltraités, compte tenu du manque de preuves objectives établissant qu’il y avait eu violation des droits de la personne, et des conclusions de missions de surveillance et d’établissement des faits effectuées par des autorités britanniques, canadiens et australiens.

 

[13]           La Commission a reconnu que la situation au Sri Lanka était loin d’être parfaite, eu égard à la forte présence militaire et paramilitaire dans le nord du pays chargée de superviser le processus de reconstruction, mais a jugé que de telles mesures étaient raisonnables pour s’assurer que les TLET n’aient pas de nouveau la haute main sur le Sri-Lanka.

 

[14]           La Commission a conclu que la preuve crédible était insuffisante pour établir que les autorités sri-lankaises considéraient que ce demandeur avait des liens avec les TLET, et qu’il ne serait exposé à aucun risque en revenant dans son pays comme un demandeur d’asile tamoul débouté.

 

[15]           Pour ce qui est de la demande d’asile présentée sur place, la Commission a estimé que même s’il était très probable qu’il soit identifié comme un passager du MS Sun Sea, pour autant qu’il dise la vérité à son retour, le demandeur serait interrogé, mais ne serait pas associé aux TLET. La Commission a souligné que les autorités sri-lankaises n’avaient aucune raison de soupçonner qu’il était un partisan de ce groupe lorsqu’il vivait au Sri Lanka, et ajouté : « Je ne dispose pas de suffisamment d’éléments de preuve crédibles me permettant de conclure que, depuis que le demandeur d’asile a fui le Sri Lanka, mise à part sa présence sur le MS Sun Sea, le gouvernement sri-lankais a d’autres raisons de croire qu’il a des liens avec les TLET. »

 

[16]           La Commission a constaté qu’après une enquête détaillée, le demandeur a été relâché par l’ASFC et n’a pas été soumis à une enquête à d’autres égards, ce qui est de nature à confirmer que, pendant des années, il n’était pas une personne d’intérêt pour les autorités sri-lankaises. La Commission a ajouté que le fait pour lui d’avoir subi un examen approfondi de la part des autorités canadiennes pourrait très bien agir en sa faveur à son retour au Sri-Lanka, quoiqu’elles tireraient à leurs propres conclusions.

 

Questions en litige

[17]           Le demandeur allègue que la Commission a tiré des conclusions erronées quant à la vraisemblance et la crédibilité, notamment parce qu’elle s’est livrée à des conjectures, et qu’elle a ignoré ou rejeté à tort des éléments de preuve ou qu’elle a s'est fondée de manière sélective sur ceux qui étayaient ses conclusions.

 

Norme de contrôle

[18]           L’évaluation de la crédibilité par la Commission et ses conclusions relatives au risque et à la demande d’asile sur place sont soumises à la norme de contrôle de la raisonnabilité.

 

[19]           Le rôle de la Cour, lors des contrôles judiciaires où la norme de la raisonnabilité s’applique, est de déterminer si la décision de la Commission « appartient aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (Dunsmuir, au paragraphe 47). « Il peut exister plus d’une issue raisonnable. Néanmoins, si le processus et l’issue en cause cadrent bien avec les principes de justification, de transparence et d’intelligibilité, la cour de révision ne peut y substituer l’issue qui serait à son avis préférable. » (Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, [2009] 1 RCS 339, au paragraphe 59.)

 

[20]           Il est également bien établi que les organismes et tribunaux administratifs sont les mieux placés pour évaluer la crédibilité des demandeurs d’asile (Aguebor c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1993), 160 NR 315, [1993] ACF no 732 (CAF), au paragraphe 4 [Aguebor]), et qu’en raison de son rôle d’arbitre des faits, les conclusions de la Commission relative à la crédibilité appellent une retenue appréciable (Lin c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 1052, [2008] ACF no 1329, au paragraphe 13; Fatih c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 857, 415 FTR 82, au paragraphe 65).

 

Les conclusions de la Commission quant à la crédibilité et la vraisemblance sont-elles raisonnables?

[21]           Le demandeur soutient que les conclusions de la Commission quant à la crédibilité reposent sur des analyses et des conjectures erronées touchant l’invraisemblance.

 

[22]           Le demandeur fait valoir que la Commission a eu tort de conclure qu’il était invraisemblable que des individus sans véritable lien avec les TLET soient en danger. D’après lui, le simple fait que la situation au Sri Lanka ne soit pas plus absolument dangereuse au point que tous les Tamouls du Nord soient reconnus comme une classe de réfugiés, n’autorise pas à conclure qu’aucun d’eux n’a cette qualité. Il ajoute que sa propre expérience incontestée montre qu’il n’est pas nécessaire que des liens perçus avec les TLET, ou des allégations en ce sens, soient prouvés ni qu’ils répondent à une logique particulière pour attirer l’attention des autorités sri-lankaises.

 

[23]           Le demandeur soutient que la Commission n’a tiré aucune conclusion spécifique quant à sa crédibilité relativement à ses expériences antérieures à l’incident qui l’a poussé à fuir; par conséquent, les allégations selon lesquelles il était depuis longtemps associé aux TLET étaient tenues pour véridiques et confirment qu’il est toujours considéré comme un individu lié à ce groupe, ainsi qu’il le prétend.

 

[24]           Le demandeur soutient par ailleurs que la Commission a eu tort de conclure que l’incohérence entre sa déposition écrite et le témoignage qu’il a livré de vive voix rendait son récit invraisemblable. Le défaut de livrer un compte rendu complet ou exact à la première occasion ne lui paraît pas suffisant pour remettre sa crédibilité en question, et la Commission doit tenir compte de sa situation et de ses antécédents personnels.

 

[25]           Le demandeur ajoute que son récit n’était pas contradictoire, mais plutôt incomplet, et qu’il a expliqué de manière plausible pourquoi il n’avait pas tout dévoilé lors de ses entrevues avec l’ASFC.

 

[26]           Le demandeur affirme que la Commission a eu tort de s’en tenir au fait qu’il n’avait pas informé l’ASFC des liens de son cousin avec les TLET. Il compare sa situation à celle du demandeur d’asile qui ne révèle pas son intention de demander l’asile lorsqu’il présente une demande de visa. Il signale qu’en pareil cas, la jurisprudence a établi que l’absence de franchise à l’égard des fonctionnaires canadiens pouvant faire obstacle à cette demande n’est pas incompatible avec une demande d’asile authentique (Kukhon c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CFPI 69 [Kukhon]; Bhatia c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CFPI 2010 [Bhatia]). Le demandeur cite des décisions analogues concernant des demandeurs d’asile qui ne s’étaient pas montrés tout à fait francs à l’entrevue au point d’entrée (Okoli c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 332 [Okoli]).

 

[27]           Le demandeur invoque aussi le jugement Valtchev c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2001 CFPI 776, 208 FTR 267, au paragraphe 6 [Valtchev], pour souligner que les conclusions relatives à la vraisemblance ne devraient être tirées que dans les cas les plus évidents et qu’elles ne devraient pas reposer sur ce qui paraît plausible d’un point de vue strictement canadien.

 

[28]           Fort de ces principes, le demandeur soutient à présent que son expérience avec les autorités sri-lankaises d’application de la loi et ses observations sur la manière dont les passagers du MS Sun Sea ont été traités à leur arrivée au Canada, expliquent sa méfiance à l’égard des agents de l’ASFC et son choix de taire une partie de son témoignage. Il prétend par ailleurs qu’il n’a pas fourni les renseignements en question parce qu’on ne le lui a jamais demandé.

 

[29]           Le défendeur fait valoir que le demandeur interprète mal la décision de la Commission. Cette dernière n’a pas tiré une conclusion générale selon laquelle les individus qui n’ont pas de véritables liens avec les TLET ne courent aucun risque au Sri Lanka : elle a plutôt estimé que des éléments essentiels de la demande d’asile du demandeur étaient invraisemblables, que le gouvernement du Sri Lanka ne s’intéressait pas réellement à lui et qu’il ne serait donc pas en danger.

 

[30]           Quant à l’incohérence entre le témoignage livré de vive voix par le demandeur et sa déposition écrite, le défendeur souligne que celui-ci avance une nouvelle explication qui n’avait pas été présentée à la Commission. Il affirme que les conclusions de la Commission relatives à la crédibilité et l’invraisemblance sont raisonnables compte tenu de la preuve et des explications dont elle disposait.

 

[31]           Le défendeur ajoute qu’il n’est pas contesté que le demandeur a justifié de deux manières différentes le fait qu’il n’ait pas mentionné que son cousin était associé aux TLET, qu’il n’a pas du tout expliqué à la Commission le caractère contradictoire de ses réponses, et que les précisions qu’il apporte à présent dans le cadre du contrôle judiciaire, à savoir sa crainte de l’ASFC, n’a pas été présenté à la Commission.

 

[32]           Le défendeur fait valoir que les circonstances de l’espèce se distinguent de celles de l’affaire Valtchev. La Commission n’a pas « imposé sa propre version des faits sans disposer d’éléments de preuve justifiant ses conclusions », mais a fondé les siennes sur le sens commun et la preuve.

 

Les conclusions de la Commission quant à la crédibilité et à l’invraisemblance sont raisonnables

[33]           Il est bien établi que la Commission peut juger de la vraisemblance des témoignages, et que ses conclusions appellent une certaine déférence. Dans l’arrêt Aguebor, précité, la Cour d’appel a fait remarquer ce qui suit au paragraphe 4 :

Il ne fait pas de doute que le tribunal spécialisé qu’est la Section du statut de réfugié a pleine compétence pour apprécier la plausibilité d’un témoignage. Qui, en effet, mieux que lui, est en mesure de jauger la crédibilité d’un récit et de tirer les inférences qui s’imposent? Dans la mesure où les inférences que le tribunal tire ne sont pas déraisonnables au point d’attirer notre intervention, ses conclusions sont à l’abri du contrôle judiciaire. Dans Giron, la cour n’a fait que constater que dans le domaine de la plausibilité, le caractère déraisonnable d’une décision peut-être davantage palpable, donc plus facilement identifiable, puisque le récit apparaît à la face même du dossier. Giron, à notre avis, ne diminue en rien le fardeau d’un appelant de démontrer que les inférences tirées ne pouvaient pas raisonnablement l’être. L’appelant, en l’espèce, ne s’est pas déchargé de ce fardeau. [Non souligné dans l’original.]

 

[34]           La Commission n’a pas conclu, comme le prétend le demandeur, qu’il était invraisemblable que les individus n’ayant pas de liens véritables avec les TLET courent un risque au Sri Lanka, mais a plutôt estimé que son récit était invraisemblable, ce qui a nui à sa crédibilité et conduit à la conclusion qu’il ne serait exposé à aucun danger s’il retournait au Sri Lanka puisqu’il n’était pas considéré comme ayant des liens avec les TLET. La Commission a bien expliqué cette inférence après avoir examiné le récit du demandeur, et elle a tiré des conclusions claires quant à la crédibilité et à l’invraisemblance, lesquelles, prises « [d]ans leur ensemble », mettaient en doute la crédibilité de l’allégation du demandeur selon laquelle il était recherché par l’armée sri-lankaise.

 

[35]           Même si la Commission doit veiller à ne pas analyser le comportement du demandeur en adoptant une logique et un raisonnement nord-américains, il était raisonnable de sa part de conclure que son récit était invraisemblable.

 

[36]           L’incohérence entre le FRP du demandeur et le témoignage qu’il a livré devant la Commission, de même que ses diverses explications concernant le fait qu’il n’a pas informé l’ASFC des événements qui ont précipité son départ du Sri Lanka, ont raisonnablement amené la Commission à tirer des conclusions défavorables quant à sa crédibilité. Cette incohérence n’avait rien à voir avec ses entrevues et avec ses autres rapports avec les agents de l’ASFC, dont il se méfiait, à ce qu’il affirme à présent. Lorsqu’il explique qu’il n’ait pas informé l’ASFC parce qu’il craignait d’être associé aux TLET, il ne dit pas pourquoi il a justifié cette omission de deux autres différentes manières. De plus, il était raisonnable de la part de la Commission de conclure qu’il était illogique que le demandeur taise à ceux dont il réclamait la protection la raison principale pour laquelle il craignait d’être persécuté.

 

[37]           Comme je l’ai fait remarquer plus haut, l’explication que le demandeur offre à présent pour ne pas avoir divulgué les liens de son cousin avec les TLET n’a pas été présentée à la Commission durant l’audience. Il affirme également n’avoir jamais été questionné sur sa crainte des autorités ou de l’armée, mais nous savons que ce n’est pas le cas, puisque l’ASFC a exploré cette question.

 

[38]           Le demandeur a cité la jurisprudence, notamment les jugements Kukhon, Bhatia et Okoli, dans lesquels la Cour a conclu qu’il était déraisonnable de douter de la crédibilité des demandeurs d’asile qui n’ont pas révélé aux agents des visas leur intention ultime lorsqu’ils ont essayé d’obtenir un visa. Je ne pense pas que l’affaire qui nous occupe soit comparable à la situation du demandeur d’asile qui ne révèle pas son intention de demander l’asile lorsqu’il demande un visa. En pareil cas, cet aveu ferait échouer la demande de visa. En l’espèce, le demandeur se trouvait déjà au Canada et le fait de divulguer à l’ASFC les liens de son cousin avec les TLET ne l’aurait pas empêché de présenter une demande d’asile. De plus, il s’agissait d’un élément essentiel de sa demande d’asile.

 

[39]           Le demandeur a déclaré qu’il ne nourrissait aucune crainte subjective avant que l’armée ne se présente chez lui en 2010. Les incidents antérieurs, qu’il tente d’invoquer comme une preuve crédible du danger auquel il était exposé, sont tous aléatoires et n’éclairent en rien le risque auquel il est désormais exposé.

 

[40]           La présente affaire se distingue aussi du jugement Valtchev. Comme les conclusions de la Commission touchant la vraisemblance reposaient sur la logique et la preuve, on ne saurait affirmer qu’elle « a imposé sa propre version des faits sans disposer d’éléments de preuve justifiant ses conclusions » ou qu’elle s’est livrée à de « pure[s] conjecture[s] ». Dans le jugement Valtchev, la Cour a relevé de nombreuses conclusions erronées, faisant observer ce qui suit au paragraphe 17, quant à la vraisemblance :

[17]      Le tribunal n’a pas appliqué au demandeur le principe posé dans l’arrêt Maldonado, précité. Le tribunal a écarté à tort le témoignage vraisemblable du demandeur et a imposé sa propre version des faits sans disposer d’éléments de preuve justifiant ses conclusions. Finalement, le tribunal a agi de façon abusive en reprochant au demandeur de s’être plaint à des fonctionnaires de l’expulsion forcée de sa mère de son appartement, sous-entendant de ce fait qu’il était responsable de ses propres malheurs. [Non souligné dans l’original.]

 

[41]           Cependant, la Cour ajoute de manière plus générale, au paragraphe 7 :

[7]        Un tribunal administratif peut tirer des conclusions défavorables au sujet de la vraisemblance de la version des faits relatée par le revendicateur, à condition que les inférences qu’il tire soient raisonnables. Le tribunal administratif ne peut cependant conclure à l’invraisemblance que dans les cas les plus évidents, c’est-à-dire que si les faits articulés débordent le cadre de ce à quoi on peut logiquement s’attendre ou si la preuve documentaire démontre que les événements ne pouvaient pas se produire comme le revendicateur le prétend. Le tribunal doit être prudent lorsqu’il fonde sa décision sur le manque de vraisemblance, car les revendicateurs proviennent de cultures diverses et que des actes qui semblent peu plausibles lorsqu’on les juge en fonction des normes canadiennes peuvent être plausibles lorsqu’on les considère en fonction du milieu dont provient le revendicateur [voir L. Waldman, Immigration Law and Practice (Markham, ON, Butterworths, 1992) à la page 8.22].

 

[42]           Dans le cas présent, la Commission était la mieux placée pour tirer des conclusions quant à la crédibilité et à l’invraisemblance à partir de la preuve dont elle disposait. Les conclusions sont justifiées, transparentes, intelligibles et raisonnables.

 

La Commission a-t-elle ignoré des éléments de preuve ou s’est-elle fondée sur certains d’entre eux de manière sélective?

[43]           Le demandeur affirme que la Cour a ignoré des éléments de preuve indiquant qu’il était exposé à un risque de persécution à son retour.

 

[44]           Le demandeur fait valoir que la Commission a eu tort de rejeter le rapport du groupe Freedom from Torture au motif que cet organisme avait ignoré les demandes de renseignements du gouvernement britannique. Il ajoute que l’ONG a décrit sa méthodologie dans un autre rapport soumis à la Commission et que d’autres ONG crédibles, dont Amnesty International, ont confirmé que le retour au pays constituait un facteur de risque. Le demandeur soutient que la preuve documentaire indique dans son ensemble que les demandeurs d’asile qui reviennent au pays ainsi que tous les individus susceptibles d’être associés d’une manière ou d’une autre aux TLET sont en danger. Il affirme que la Commission a accepté sans réserve les conclusions d’enquêtes gouvernementales, tout en n’accordant que peu de foi aux rapports des ONG.

 

[45]           Le demandeur soutient par ailleurs que la jurisprudence récente a mis en évidence l’analyse requise de la persécution des Tamouls du Sri Lanka du fait de leur appartenance à un groupe.

 

[46]           Le demandeur affirme qu’il est exposé à un risque en tant que demandeur d’asile débouté, Tamoul du Nord et passager du MS Sun Sea, et aussi en raison des accusations passées de liens avec les TLET. Il prétend notamment que la Commission ne s’est pas demandé si son voyage à bord du MS Sun Sea pouvait établir un lien réel ou perçu avec les TLET.

 

[47]           Le demandeur fait également valoir que la remarque de la Commission selon laquelle les autorités sri-lankaises pourraient en partie tenir compte du fait qu’il a été blanchi au Canada de tout soupçon de liens avec les TLET est déraisonnable, la jurisprudence ayant établi que les résultats des enquêtes menées par les autorités canadiennes, qu’ils soient favorables ou non, ne laissaient pas présager de manière concluante le traitement que les autorités sri-lankaises réserveraient aux demandeurs d’asile déboutés à leur retour (Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) c B272, 2013 CF 870, 19 Imm LR (4th) 93, aux paragraphes 69 et 70 [B272]).

 

[48]           Le défendeur soutient que la Commission a évalué toute la preuve pertinente, et qu’elle n’a ni ignoré ni rejeté celle qui contredisait ses conclusions. Il souligne que la preuve documentaire émanant d’Amnesty International signale simplement que les demandeurs d’asile déboutés ne seraient exposés à un risque que s’ils sont soupçonnés d’avoir des liens avec les TLET. Le défendeur ajoute que la Commission n’a pas [traduction] « rejeté » le rapport du groupe Freedom from Torture, mais plutôt qu’elle ne lui a accordé qu’un poids minime, vu l’absence de détails sur les victimes alléguées et l’impossibilité d’évaluer la crédibilité de cette information.

 

[49]           Le défendeur répète que la Commission n’a pas d’obligation générale de citer tous les documents concernant le pays susceptibles d’étayer sa décision. La Commission a adéquatement tenu compte de l’expérience du demandeur et de son profil de Tamoul ayant voyagé à bord du MS Sun Sea, et conclu de même qu’il n’était pas et ne serait pas considéré comme étant associé aux TLET.

 

[50]           Selon le défendeur, la décision de la Commission n’est pas déraisonnable simplement parce que d’autres demandeurs d’asile tamouls et passagers du MS Sun Sea ont été acceptés comme réfugiés, chaque cas étant un cas d’espèce. La Commission a examiné la question essentielle qui est celle de savoir si ce demandeur serait considéré comme ayant des liens avec les TLET, et a raisonnablement conclu qu’il ne le serait pas.

 

La Commission n’a pas ignoré des éléments de preuve

[51]           La Commission a minutieusement examiné la preuve documentaire concernant la situation des Tamouls au Sri Lanka. Elle a reconnu qu’elle restait difficile, mais a néanmoins conclu, sur la base de l’évaluation individuelle du cas du demandeur, que son profil ne l’exposerait pas à un risque s’il retournait dans ce pays.

 

[52]           La Commission n’est pas tenue de citer chaque élément de preuve, mais elle doit tenir compte de ceux qui contredisent directement ses conclusions finales (Cepeda-Gutierrez c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1998), 157 FTR 35, [1998] ACF no 1425, aux paragraphes 16 et 17). Dans le cas présent, la Commission a examiné la preuve contraire, mais lui a accordé moins de poids ‑ comme elle était en droit de le faire ‑, tout en expliquant ses raisons.

 

[53]           Même si la Commission avait accordé plus d’importance aux rapports du groupe Freedom from Torture et d’Amnesty International, cela n’aurait pas influencé sa conclusion finale portant que le profil du demandeur ne l’exposait pas à un risque en cas de retour. Ces rapports indiquent que les individus soupçonnés d’avoir des liens avec les TLET seraient exposés à un risque à leur retour. Cependant, la Commission a examiné de nombreux facteurs, y compris la crédibilité du récit du demandeur, le temps écoulé depuis la fin de la guerre et le fait que son frère vit au Sri Lanka relativement sans problème, avant de conclure que le demandeur n’avait jamais été activement recherché par l’armée et qu’il ne serait pas associé aux TLET.

 

[54]           La Commission a bien tenu compte du fait que le demandeur était un passager sur le MS Sun Sea – ce qu’il était difficile d’ignorer. Elle a conclu que les demandeurs d’asile déboutés ne seront pas présumés avoir des liens avec les TLET à leur retour au Sri Lanka simplement parce qu’ils se trouvaient sur le navire. Une telle présomption s’appliquerait plutôt aux passagers du MS Sun Sea à l’égard desquels le gouvernement a conclu qu’ils avaient déjà des liens avec ce groupe. Comme je l’ai indiqué, la Commission a estimé que ce n’était pas le cas du demandeur.

 

[55]           Dans les jugements PM c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2013 CF 77, [2013] ACF no 136 [PM], et SK c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2013 CF 78, [2013] ACF no 137, la juge Snider a conclu que la décision de la Commission était raisonnable, puisqu’elle a évalué individuellement la question de savoir si le demandeur concerné était exposé à un risque en raison de liens perçus avec les TLET. La juge Snider a réitéré le principe très bien établi selon lequel c’est le risque auquel le demandeur concerné est personnellement exposé qu’il faut évaluer.

 

[56]           En l’espèce, la Commission a soigneusement tenu compte du profil de risque auquel le demandeur était personnellement exposé pour évaluer sa demande sur place, et notamment des risques auxquels il était exposé avant son départ du Sri Lanka, ou du fait des événements subséquents, comme sa présence à bord du MS Sun Sea.

 

[57]           Bien que le demandeur ait cité des décisions dans lesquelles la Commission a conclu que des demandeurs en situation analogue devaient être protégés, que chaque cas est différent et que chacun doit être évalué par la Commission selon les faits qui lui sont propres.

 

[58]           Le fait que les demandes d’autres demandeurs d’asile tamouls et passagers du MS Sun Sea aient été accueillies ne rend pas déraisonnable la conclusion contraire tirée en l’espèce.

 

[59]           Dans le jugement PM, précité, au paragraphe 17, la juge Snider a examiné un argument similaire :

[17]      En outre, et il s’agit d’un facteur encore plus important, la décision est susceptible de contrôle selon la norme de la raisonnabilité. Il est possible de parvenir à des conclusions différentes à partir de faits similaires. Je reconnais que le demandeur a mis de l’avant un raisonnement logique à l’appui de la conclusion qu’il était exposé à un risque, en raison de son arrivée au pays à bord du NM Sun Sea. Cela ne signifie toutefois pas que le raisonnement adopté par la Commission était déraisonnable. L’existence d’un éventail d’issues possibles est la caractéristique principale de la norme de la raisonnabilité et elle constitue la fondation de la déférence envers les décideurs. La question de savoir si le demandeur en l’espèce serait exposé à plus qu’une simple possibilité de persécution était une question factuelle qui relevait de la Commission. Malgré le fait qu’il soit possible que moi, ou qu’un autre commissaire, ayons pu parvenir à une conclusion différente, il était raisonnablement loisible à ce tribunal de la Commission d’en arriver à cette décision, au vu du dossier de preuve en l’espèce. La Cour ne devrait pas intervenir. [Non souligné dans l’original.]

 

[60]           Des faits semblables peuvent déboucher sur des issues différentes susceptibles d’être jugées raisonnables ou non à l’étape du contrôle judiciaire. La question dont la Commission était saisie dans la présente affaire était de savoir si le demandeur en l’espèce serait considéré comme ayant des liens avec les TLET. La Commission a estimé qu’il ne le serait pas. La question que la Cour doit trancher est celle de savoir si cette conclusion est raisonnable.

 

[61]           Le demandeur a également contesté la remarque de la Commission selon laquelle les autorités sri-lankaises apprendraient que les instances canadiennes avaient conclu qu’il n’avait pas de liens avec les TLET. Je conviens que la Cour a estimé que les résultats des enquêtes des autorités canadiennes, qu’ils soient favorables ou non, ne laissent pas présager de façon concluante le traitement que les autorités sri-lankaises réserveront aux demandeurs d’asile déboutés à leur retour.

 

[62]           Dans le jugement B272, dans lequel le ministre interjetait appel de la décision de faire droit à la demande d’asile, le commissaire avait rejeté l’argument de ce dernier voulant que le blanchiment de tout soupçon par le Canada ait un certain poids au retour, et signalé que les autorités sri-lankaises effectueraient leur propre enquête. Dans le jugement B272, le demandeur d’asile était d’ailleurs visé par d’autres facteurs de risque. Au paragraphe 70, le juge de Montigny faisait remarquer ce qui suit :

[70]      Il va sans dire que les autorités sri-lankaises, préoccupées qu’elles sont par la résurgence possible des TLET, voudront tirer leurs propres conclusions pour ce qui est de savoir qui est et qui n’est pas membre ou sympathisant de cette organisation. Elles ne se fieraient pas forcément à la décision d’un gouvernement étranger à cet égard, ne serait-ce que par ce qu’elles appliqueraient des lois différentes ainsi que des normes juridiques, des règles de procédure et des normes de preuve différentes. Une telle conclusion appartient sans nul doute aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit.

 

[63]           Or, la Commission n’a commis aucune erreur. En fait, le principe énoncé dans le jugement B272 correspond exactement à ce que la Commission a fini par reconnaître au paragraphe 73 de sa décision, à savoir que les autorités sri-lankaises parviendraient à leurs propres conclusions, indépendamment de celles des autorités canadiennes :

Les autorités sri-lankaises tireront évidemment leurs propres conclusions sans tenir compte des décisions prises par les autorités canadiennes; cependant, rien ne les empêche de les prendre en considération. En effet, le fait que le demandeur d’asile était à bord du MV Sun Sea et qu’il a donc subi un examen extrêmement approfondi de la part des autorités canadiennes pourrait très bien agir en sa faveur à son retour au Sri Lanka puisque le Canada a maintenant confirmé les conclusions auxquelles en sont venues manifestement les autorités sri-lankaises avant qu’il ne décide de s’enfuir.

 

Conclusion

[64]           La Commission n’a ignoré aucune preuve; elle a plutôt accordé plus d’importance à certains éléments, et indiqué ceux qu’elle a écartés en expliquant ses motifs. La Commission a évalué individuellement le cas du demandeur et a conclu qu’à son retour au Sri Lanka, il serait interrogé, sans toutefois être exposé à une menace à sa vie, ou à un risque de traitement ou de peine cruels et inusités ou de torture, parce qu’il ne serait pas soupçonné d’avoir des liens avec les TLET, ou considéré comme tel. La décision de la Commission est raisonnable.

 

[65]           La demande de contrôle judiciaire est rejetée. Le demandeur a songé à proposer une question à certifier, mais ne l’a pas fait.

 


JUGEMENT

 

LA COUR :

 

1.                  REJETTE la demande de contrôle judiciaire.

 

2.                  DÉCLARE qu’aucune question n’a été proposée aux fins de certification.

 

 

 

« Catherine M. Kane »

Juge

Traduction certifiée conforme

Linda Brisebois, LL.B.

 

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 


 

DOSSIER :

IMM-11647-12

 

INTITULÉ :

MANIVANNAN YATHAVARAJAN c

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L'AUDIENCE :

                                                                        Toronto (Ontario)

 

DATE DE L'AUDIENCE :

                                                                        LE 6 MARS 2014

 

MOTIFS DU JUGEMENT
ET JUGEMENT :

                                                                                    LA JUGE KANE

DATE DES MOTIFS :

                                                            LE 27 MARS 2014

COMPARUTIONS :

Sarah L. Boyd

 

pour le demandeur

 

Rachel Hepburn Craig

pour le défendeur

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Jackman & Associates

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LE demandeur

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE défendeur

 

 

 

 

 

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