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Federal Court

 

Cour fédérale



Date : 20140307

Dossier : IMM-3567-13

Référence : 2014 CF 228

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 7 mars 2014

En présence de monsieur le juge Annis

 

ENTRE :

ELENDU GEOFFREY

 

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION ET LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

 

défendeurs

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

[1]   Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire présentée en vertu de l’art. 72 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch.  27, en révision d’une décision rendue le 6 mai 2013 par laquelle l’agente d’examen des risques avant renvoi, L. St-Martin (l’agente) de Citoyenneté et Immigration Canada (CIC), a rejeté la demande présentée par le demandeur visant le parrainage par son épouse. Pour les motifs qui suivent, la demande est accueillie.

 

I.          Contexte

[2]   Le demandeur, Geoffrey Elendu, est citoyen du Nigeria. Il a quitté ce pays et est arrivé au Canada le 5 août 2005, où il a présenté une demande d’asile. Le 23 février 2006, CIC a rejeté sa demande. Le 14 mars 2006, la Cour fédérale a rejeté sa demande d’autorisation et de contrôle judiciaire de la décision défavorable.

 

[3]   Le 28 août 2005, le demandeur a rencontré Diaby Nakadidjata, et ils ont commencé à cohabiter le 1er juin 2006. Deux enfants sont nés de cette union, le premier, le 19 juin 2006 et le second, le 15 juillet 2008.

 

[4]   Le couple s’est marié le 19 août 2006. Le 19 mars 2009, le demandeur a présenté une demande de résidence permanente au titre de la catégorie des époux ou conjoints de fait au Canada.

 

[5]   Le 10 août 2010, CIC a procédé à une vérification de sécurité à l’égard du demandeur, comme l’indique le document d’analyse du dossier certifié du tribunal, qui semble renvoyer aux notes versées dans le Système de soutien des opérations des bureaux locaux (SSOBL). Il convient de souligner à ce stade que les défendeurs n’ont pas présenté une copie des notes du SSOBL tirées du dossier à la Cour et que, par conséquent, les seuls renseignements disponibles étaient l’analyse des notes a posteriori.

 

[6]   Dans un document du 18 octobre 2011, l’agente Carline Médée de CIC a convoqué le demandeur à une entrevue [TRADUCTION] « aux fins du traitement de [sa] demande. » Le 26 octobre 2011, l’agente en question a mené une entrevue avec le demandeur et sa femme en vue de procéder à l’évaluation d’admissibilité de sa demande de parrainage. Selon le témoignage du demandeur dans son affidavit, non contredit par les défendeurs, l’agente Médée a félicité le demandeur et sa femme et a déclaré qu’elle accueillait la demande de parrainage. Elle a délivré un permis de travail au demandeur. Le document d’analyse indique qu’à cette date, l’agente Médée a confirmé qu’elle envisageait d’approuver la demande après l’entrevue.

 

[7]   Étant donné l’absence de preuve en l’espèce, plus particulièrement les notes consignées dans le SSOBL, on ne sait pas ce qui s’est passé en ce qui a trait au dossier du demandeur entre le 26 octobre 2011 et le 26 avril 2013. Les défendeurs reconnaissent que le demandeur aurait dû recevoir une confirmation écrite de son approbation par la poste, mais que l’agente Médée n’avait pas envoyé la lettre en question pour des raisons demeurées inexpliquées. 

 

[8]   Selon le document d’analyse de CIC versé dans le dossier certifié du tribunal, Mme Nakadidjata a fait part d’un changement d’adresse le 8 novembre 2012.

 

[9]   Le 26 avril 2013, le dossier a été confié à l’agente St-Martin, comme l’ont indiqué son affidavit ainsi que le document d’analyse. Elle a communiqué avec Mme Nakadidjata, qui a confirmé qu’elle ne vivait plus avec le demandeur. Le couple s’était séparé en juillet 2012.

 

[10]           Le 29 avril 2013, l’agente St-Martin a rendu une décision par laquelle elle refusait la demande de parrainage.

 

[11]           Le 21 mai, une demande d’autorisation a été présentée auprès de la Cour fédérale.

 

II.        Décision

[12]           Le 11 juin 2013, l’agente St-Martin a rendu une décision par laquelle elle rejetait la demande de résidence permanente du demandeur au titre de la catégorie des époux ou conjoints de fait au Canada aux motifs qu’il n’avait pas démontré qu’il était l’époux ou le conjoint de fait d’un parrain, et qu’il cohabitait avec celui-ci au Canada.

 

III.       Questions en litige

[13]           Le demandeur présente les questions en litige comme suit :

 

1.         Dans quelle mesure l’agente a pu rendre une décision alors qu’une décision analogue avait déjà été rendue par une autre agente?

 

2.                  L’agente a-t-elle porté atteinte au droit du demandeur à l’équité procédurale en rendant une décision sachant que l’ancienne agente avait tenu une audience avec le demandeur?

 

3.                  L’agente a-t-elle porté atteinte au droit du demandeur à l’équité procédurale en ayant attendu longtemps avant de rendre une décision?

 

4.                  L’agente a-t-elle commis une erreur en omettant de consigner des renseignements particuliers?

 

[14]           Les défendeurs formulent les questions en litige comme suit :

 

1.         L’agente St-Martin avait-elle compétence pour traiter la demande de résidence permanente du demandeur à la seconde étape?

           

2.         L’agente St-Martin a-t-elle commis une erreur déraisonnable en rejetant la demande du demandeur à la seconde étape?

 

[15]           La Cour formule les questions en litige comme suit :

 

1.         Eu égard aux éléments de preuve consignés au dossier, la décision rendue le 26 octobre 2011 concernant la demande de parrainage du demandeur était-elle conforme au processus décisionnel de CIC?

 

IV.       Observations des parties

            Demandeur

[16]           Le demandeur soutient que l’entrevue avec la première agente de CIC constituait l’aboutissement du processus de parrainage, que les déclarations ainsi que le comportement de l’agente Médée au cours de l’entrevue (le fait qu’elle ait félicité le couple, qu’elle ait déclaré que le mariage avait été contracté de bonne foi, et qu’elle ait aidé au renouvellement du permis de travail du demandeur) indiquaient que la demande de parrainage avait été approuvée.

 

[17]           Le demandeur soutient qu’étant donné que l’agente Médée s’était déjà prononcée sur la question, compte tenu des principes de la chose jugée et de la préclusion découlant d’une question déjà tranchée, la question ne pouvait pas être réexaminée par l’agente St-Martin.

 

[18]           De plus, le demandeur soutient qu’un an et demi s’était écoulé depuis la première entrevue sans qu’une carte de résident permanent lui ait été délivrée, ce qui constituait un délai déraisonnable. Il allègue que 18 mois après l’entrevue, les seules raisons valides pour lesquelles sa demande pourrait être refusée seraient celles liées à l’interdiction de territoire.

 

[19]           Le demandeur soutient que la mention dans l’analyse des notes tirées du SSOBL selon laquelle le demandeur faisait l’objet d’accusations criminelles en suspens constitue une erreur étant donné que les accusations de voies de fait portées contre lui avaient été rejetées le 25 septembre 2012.

 

[20]           Le demandeur soutient également que l’agente St-Martin a commis une erreur en omettant de consigner le motif pour lequel le demandeur n’avait pas satisfait aux exigences conjugales dans la case appropriée du formulaire prévu à cette fin. Il fait valoir qu’il s’agit là d’une erreur fatale qui devrait invalider la décision.

 

            Défendeurs

[21]           Les défendeurs fournissent une explication pour la série d’évènements qui ont précédé le refus de la demande du demandeur comme suit : la demande a d’abord été approuvée par l’agente Médée, et a été par la suite confiée à l’agente St-Martin aux fins d’une seconde analyse du fait que l’on craignait que le demandeur soit interdit de territoire pour raison de sécurité. C’est à ce moment que l’agente St-Martin a pris connaissance du fait que le demandeur ne vivait plus avec sa femme; par conséquent, elle ne pouvait pas accueillir la demande étant donné que le demandeur ne satisfaisait plus aux critères énoncés à l’article 124 du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 [RIPR].

 

[22]           Les défendeurs soutiennent que la demande a été retardée pour les deux raisons suivantes : la déclaration du demandeur selon laquelle il a été membre du Mouvement pour la réalisation de l’État souverain du Biafra (MASSOB) de novembre 2002 à août 2005, et les accusations au criminel de voies de fait portées contre lui qui ont été déposées le 20 avril 2012.

 

[23]           Les défendeurs soulignent que les arguments du demandeur reposent sur la fausse prémisse suivant laquelle sa demande de résidence permanente avait été accueillie le 26 octobre 2011, alors qu’elle ne l’avait été qu’ « en principe », en attendant l’issue de la deuxième partie de l’évaluation.

 

[24]           L’annexe A des lignes directrices opérationnelles IP 8 – Catégorie des époux ou conjoints de fait au Canada, déposée par le demandeur dans ses observations écrites, énonce clairement qu’au Canada,  toutes les demandes de résidence permanente sont examinées en deux étapes. La première consiste à vérifier l’admissibilité du demandeur, c'est-à-dire à établir si le demandeur a contracté un mariage authentique, et si le parrain peut présenter une demande d’engagement. Si le demandeur satisfait aux critères, il sera considéré comme faisant partie de la catégorie des époux. Le demandeur a satisfait à tous les critères requis à cette étape et, par conséquent, l’agente Médée a indiqué au demandeur et à sa femme que leur demande avait été approuvée en principe, ce qui ne signifiait pas que la demande avait été accueillie et que le demandeur obtiendrait le statut de résident permanent au Canada.

 

[25]           Les défendeurs admettent que le demandeur aurait dû recevoir une confirmation écrite de son approbation à la première étape, ce qui n’a pas été fait pour des raisons qui demeurent inexpliquées. Ils expliquent qu’en second lieu, pour ce qui est d’une demande de résidence permanente présentée au Canada, il faut vérifier que toutes les autres exigences légales sont remplies, comme déterminer si le demandeur est interdit de territoire pour des raisons médicales, de sécurité ou pour criminalité, et vérifier qu’il est titulaire d’un passeport valide de son pays d’origine. Les demandeurs soutiennent qu’à cette deuxième étape, le demandeur doit tout de même satisfaire aux autres critères d’admissibilité à la catégorie des époux prévus à l’article 124 du RIPR, ce qui est confirmé par l’article 5.15 des lignes directrices opérationnelles IP 8 – Catégorie des époux ou conjoints de fait au Canada.

 

[26]           Les défendeurs expliquent ensuite qu’une fois que l’on a découvert que le demandeur pourrait être interdit de territoire pour raison de sécurité du fait de ses liens avec le MASSOB et d’accusations criminelles en suspens portées contre lui, son dossier a été confié à l’agente St-Martin, spécialisée dans des questions de sécurité, une pratique courante de CIC. Les défendeurs indiquent que tous ces éléments expliquent la raison pour laquelle la demande du demandeur n’a pas été traitée avant avril 2013, date à laquelle il a été décidé qu’il n’y avait pas suffisamment d’éléments de preuve pour conclure qu’il était interdit de territoire pour raison de sécurité.

 

[27]           En outre, selon les défendeurs, le traitement a été retardé en raison des accusations criminelles portées contre le demandeur le 20 avril 2012, conformément à l’article 11.1 des directives opérationnelles IP 8 – Catégorie des époux ou conjoints de fait au Canada, en vertu duquel [Traduction] les agents devraient retarder une rencontre aux fins de confirmation de la résidence permanente jusqu’à ce qu’une décision définitive soit prise au sujet des accusations criminelles. L’agente St-Martin a précisé dans son affidavit qu’elle avait remarqué que le demandeur avait fait l’objet d’accusations criminelles le 26 avril 2013, lorsqu’elle a pris en charge le dossier.

 

[28]           Lorsque l’agente St-Martin a découvert que le demandeur était séparé de sa femme, elle a procédé au traitement de sa demande, et a rendu une décision défavorable justifiée par le fait que le demandeur ne satisfaisait plus à tous les critères à prendre à considération dans la catégorie des époux. Elle n’a pas rendu une décision qui avait déjà été prise par l’agente Médée.

 

[29]           Le fait que les accusations criminelles portées contre le demandeur ont été rejetées est sans importance, étant donné que le décideur n’en était pas saisi (Isomi c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 1394 aux par. 6 à 11; Paul-Laforest c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 815 au par. 16). La raison pour laquelle il n’y a pas eu consignation dans le système des renseignements faisant état du rejet des accusations, s’explique par le fait que le demandeur ne s’était pas déchargé de son fardeau de mettre à jour sa demande en informant l’agente de son acquittement (Dios c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 1322; Matheen c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 395 au par. 17). Quoi qu’il en soit, cet élément n’a eu aucune répercussion sur la décision définitive.

 

V.        Analyse

[30]           Il s’agit en l’espèce de déterminer si l’agente Médée a rendu une décision compte tenu de l’entrevue qu’elle a menée avec le demandeur et sa femme le 26 octobre 2011, conformément aux processus décisionnels de CIC. Selon l’article 5.15 des lignes opérationnelles IP 8 – Catégorie des époux ou conjoints de fait au Canada de CIC, il faut répondre aux exigences de parrainage conjugal au moment de l’entrée de la décision concernant la résidence permanente dans le SSOBL. Cela semblerait indiquer qu’une décision est rendue par CIC à l’égard d’une demande de parrainage lorsque des renseignements en ce sens figurent dans le SSOBL.

 

[31]           De plus, on ne peut accorder trop d’importance au document d’analyse dans lequel on fait référence aux notes versées dans le SSOBL, étant donné que les entrées semblent ne pas suivre la chronologie et ont été modifiées a posteriori.

 

[32]           Par conséquent, les dossiers du SSOBL auraient été la meilleure preuve pour déterminer si une décision avait été prise le 26 octobre 2011. Compte tenu du fait que les défendeurs n’ont pas fourni les dossiers du SSOBL ou tout autre élément de preuve sur lequel on pourrait se fonder pour contredire le témoignage du demandeur selon lequel une décision a été prise à cette date, la Cour conclut qu’on a effectivement décidé le 26 octobre 2011d’accepter la demande du demandeur et de lui accorder le statut de résident permanent.

 

[33]           Pour parvenir à cette conclusion, on s’est fondé sur un élément déterminant à savoir l’absence de notes versées dans le SSOBL. On considère ces dernières comme étant des éléments de preuve fiables et acceptables des activités au dossier; et d’après ce que la Cour a pu comprendre, on ne peut les modifier a posteriori. Par conséquent, si une action tient à une entrée dans le SSOBL, il est important que les notes qui y sont versées soient déposées en preuve. En l’espèce, les défendeurs ne l’ont pas fait, et on peut donc tirer une conclusion défavorable de cette omission de présenter des éléments de preuve essentiels.

 

[34]           Le demandeur a précisé que, suivant l’entrevue du 26 octobre 2011, sa demande avait en fait été acceptée de manière définitive; il fait reposer cette prétention sur divers éléments.

 

[35]           Cet argument est appuyé par la lettre convoquant le demandeur à une entrevue avec l’agente Médée, dans laquelle il était précisé que l’entrevue était [Traduction] « essentielle pour terminer le traitement de [sa] demande ».

 

[36]           De plus, le demandeur a déclaré dans son affidavit que l’agente Médée avait indiqué au cours de l’entrevue du 26 octobre 2011 qu’elle accueillait sa demande. Cet élément de preuve n’est pas contredit par les défendeurs. Si l’intention de l’agente Médée avait été autre que l’approbation de la demande, on aurait exigé de sa part la production d’un affidavit. L’agente Médée n’a pas produit d’affidavit. L’agente St-Martin a indiqué dans son affidavit que cela s’expliquait par le fait que l’agente Médée était en vacances. Toutefois, l’agente Médée demeure membre de CIC, et elle aurait pu et aurait dû produire un affidavit, plus particulièrement compte tenu de l’absence de notes dans le SSOBL.

 

[37]           Les seuls éléments de preuve des actions et de l’intention de l’agente Médée figurent dans le document d’analyse produit a posteriori, et dans l’affidavit de l’agente St-Martin.

.

[38]           Selon le paragraphe 81(2) des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106 :

 

 

Règles des Cours fédérales,

DORS/98-106

 

81. (2) Lorsqu’un affidavit contient des déclarations fondées sur ce que croit le déclarant, le fait de ne pas offrir le témoignage de personnes ayant une connaissance personnelle des faits substantiels peut donner lieu à des conclusions défavorables.

 

 

[39]           En l’espèce, étant donné que les notes versées dans le SSOBL n’ont pas été produites, je suis prêt à tirer une décision défavorable du fait de l’omission d’avoir produit un affidavit de la part de l’agente Médée, qui aurait pu servir de preuve directe des mesures prises par suite de l’entrevue du 26 octobre 2011 avec le demandeur, au lieu des notes versées dans le SSOBL.

 

[40]           En fait, les défendeurs demandent à la Cour de se fonder sur une preuve par ouï-dire reposant sur une preuve par ouï-dire. Si les dossiers du SSOBL avaient été déposés en preuve, ils auraient été produits à titre des documents exposant les activités au dossier sur lesquels l’agente Médée se serait très probablement fondée à titre de consignation des faits (en fait, elle se serait reposée sur un document créé par le témoin au lieu de ses souvenirs) (voir David M. Paciocco et Lee Stuesser, The Law of Evidence, 6e éd. (Toronto: Irwin Law Inc. 2011) à la page 422). Non seulement les dossiers du SSOBL n’ont pas été produits en preuve, mais il n’y a aucune preuve directe expliquant pourquoi l’entrevue avec le demandeur n’a pas été consignée, comme le prétendent les défendeurs. De plus, l’agente St-Martin a présenté la preuve par ouï-dire de l’agente Médée comme des données probantes de deuxième niveau. Il n’y a tout simplement aucune preuve fiable permettant de réfuter le témoignage du demandeur selon lequel l’agente Médée avait accueilli sa demande, et que ces renseignements avaient donc été consignés dans le SSOBL.

 

[41]           De plus, comme les défendeurs en ont convenu, l’agente Médée a omis d’envoyer sous forme de lettre une confirmation écrite de l’octroi de la demande du demandeur à la première étape, pratique courante de CIC. Ce défaut n’a pu s’expliquer de quelque manière que ce soit.

 

[42]           En outre, on ne peut expliquer le retard important entre l’entrevue et le refus définitif par CIC de la demande du demandeur, lequel est entièrement attribuable à la conduite de CIC étant donné que les mesures prises pendant l’année et demie suivant l’entrevue du 26 octobre 2011 n’ont pas été consignées. La seule allusion dans la preuve à cette période est la note envoyée le 8 novembre 2012 par Mme Nakadidjata à CIC faisant état de son changement d’adresse.

 

[43]           Les défendeurs ont essayé de justifier le retard par l’admission du demandeur d’avoir participé au MASSOB et par les accusations criminelles portées contre lui le 20 avril 2012. Cette explication n’est pas satisfaisante. Le dossier certifié du tribunal montre que le demandeur a révélé aux défendeurs ses liens avec le MASSOB lorsqu’il a rempli le formulaire de Demande de résidence permanente au Canada le 3 mars 2009 et, comme il a déjà été indiqué, l’analyse des notes versées dans le SSOBL montre qu’un contrôle de sécurité a été effectué en août 2010 en vertu duquel on a déterminé qu’il n’y avait pas suffisamment de preuve contre le demandeur. On ne sait trop pourquoi un autre contrôle de sécurité aurait été effectué un an et demi après l’entrevue du 26 octobre 2011, sachant qu’on en avait déjà effectué un.

 

[44]           En ce qui a trait aux accusations criminelles, même si elles sont sans pertinence à la présente étape, elles ne justifient pas le retard, étant donné qu’elles ont été déposées contre la demande le 20 avril 2012, mais le CIC n’en a eu connaissance que lorsque l’agente St-Martin a procédé au traitement de la demande le 26 avril 2013.

 

[45]           Par conséquent, compte tenu du témoignage du demandeur selon lequel une décision avait été prise au terme de laquelle sa demande était accueillie le 26 octobre 2011, ainsi que de l’omission des défendeurs de fournir les notes du SSOBL, de celle de l’agente Médée de produire une affidavit et d’envoyer une lettre faisant état de l’approbation à la première étape, et des conclusions défavorables qui en découlent de sorte que la preuve par affidavit de l’agente St-Martin contenant des ouï-dire est dépourvue de toute force probante, la Cour conclut, selon la prépondérance des probabilités, que la demande du demandeur avait été accueillie le jour de l’entrevue, soit le 26 octobre 2011.

 

[46]           La seule preuve produite indique que l’intention de l’agente Médée lors de l’entrevue était de terminer le traitement de la demande, et étant donné que cet élément de preuve n’est pas contredit, il faut reconnaître qu’on a convenablement consigné ces renseignements dans les notes du SSOBL, ce qui constitue par conséquent la décision sur la demande de résidence permanente du demandeur.

 

 

 

 

 

JUGEMENT

 

            LA COUR ORDONNE que la demande soit accueillie.

 

 

 

                                                                                                               « Peter Annis »

                                                                                               ___________________________

                                                                                                                      Juge

Traduction certifiée conforme

Caroline Tardif, LL.B., B.A.

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 


DOSSIER :

IMM-3567-13

 

INTITULÉ :

ELENDU GEOFFREY c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION ET AL

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

 

 

MONTRÉAL (QUÉBEC)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 26 FÉVRIER 2014

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT :

 

LE JUGE ANNIS

DATE DES MOTIFS :

LE 7 MARS 2014

 

 

COMPARUTIONS :

M. Dan M. Bohbot

POUR LE DEMANDEUR

 

Maître Emilie Tremblay

pOUR LES DÉFENDEURS

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

M. Dan M. Bohbot

avocat

Montréal (Québec)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

 

pour les défendeurs

 

 

 

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