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Date : 20140317


Dossier :

IMM-3446-13

 

Référence : 2014 CF 259

 

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

 

Ottawa (Ontario), le 17 mars 2014

En présence de monsieur le juge Russell

 

ENTRE :

SONIA DEL CARMEN PEREZ DE SALAMANCA

 

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

INTRODUCTION

[1]               La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire, présentée en application du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la Loi], de la décision du 4 avril 2013 [la décision] par laquelle un agent principal [l’agent], qui a exposé des motifs supplémentaires dans un addenda daté du 12 avril 2013 [l’addenda], a refusé la demande présentée par la demanderesse en vertu du paragraphe 25(1) de la Loi en vue de l’obtention d’une dispense pour motifs d’ordre humanitaire de l’obligation de présenter une demande de visa de résident permanent de l’extérieur du Canada [demande CH].

 

FAITS

[2]               La demanderesse est une citoyenne du Salvador âgée de 42 ans. En novembre 2007, elle est venue au Canada munie d’un permis de travail de deux ans et d’un visa de résident temporaire, afin de travailler à la production chez Maple Leaf Foods, à Lethbridge (Alberta). Elle a laissé derrière elle son conjoint de fait et trois enfants, maintenant âgés de 22, 16 et 11 ans, qui sont allés vivre avec sa mère et sa sœur. En mai 2008, son conjoint de fait, Jose Antonio, a été tué par un membre des Maras – gang criminel présent au Salvador – qui tentait apparemment de lui extorquer de l’argent. La demanderesse affirme qu’après la mort de Jose Antonio, les Maras ont demandé à sa famille où elle se trouvait et ont approché ses enfants afin de les recruter. Elle a fondé sa demande CH sur la crainte de ce gang, sur l’intérêt supérieur de ses enfants, et sur son établissement au Canada.

 

[3]               La demanderesse a continué à travailler chez Maple Leaf Foods, mais elle a été mise à pied pour la période allant de septembre 2009 à septembre 2010. Au cours de cette période, en avril 2010, la demanderesse a présenté une demande d’asile, invoquant le meurtre de Jose Antonio et les questions et menaces subséquentes subies par sa famille. Cette demande a été rejetée en juillet 2011 par la Section de la protection des réfugiés [la SPR] de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié. La SPR a conclu que la demanderesse avait présenté des éléments de preuve fiables et digne de foi et qu’elle était crédible, mais qu’elle n’avait ni la qualité de réfugié ni celle de personne à protéger au sens des articles 96 et 97 de la Loi. Elle a conclu que la famille de la demanderesse avait été prise pour cible en raison de la perception selon laquelle elle avait les moyens de payer, et que sa crainte découlait donc de la criminalité, et de non la persécution pour l’un des motifs énoncés dans la Convention. En ce qui a trait à l’article 97 de la Loi, la SPR a conclu que la situation de la demanderesse, bien que malheureuse, n’était pas différente de celle que vivent des millions d’autres Salvadoriens ayant été ciblés et tyrannisés par les gangs. La SPR a conclu qu’aucun élément de preuve n’établissait que la demanderesse avait été ou serait ciblée en raison du lien l’unissant à son défunt conjoint de fait, mais qu’elle s’exposait plutôt au même risque d’extorsion que les autres Salvadoriens. Ainsi, le risque n’était pas individualisé au point où seraient respectées les exigences de l’article 97, même si la SPR a dit ne pas exclure l’existence d’éventuels motifs d’ordre humanitaire.

 

[4]               La demanderesse a présenté sa demande CH en juin 2012, et celle‑ci a été rejetée dans la décision faisant l’objet du présent contrôle. Une lettre de décision a été envoyée par la poste le 8 avril 2013, sauf que l’agent a reçu des observations supplémentaires de la part de la demanderesse le 9 avril 2013. Le 12 avril 2013, après examen de ces observations, l’agent a produit un addenda dans lequel il fournit des motifs supplémentaires et confirme le refus de la demande CH.

 

DÉCISION FAISANT L’OBJET DU PRÉSENT CONTRÔLE

[5]               Dans sa décision initiale, l’agent a conclu que la demanderesse avait atteint un niveau d’établissement « de base », en ce sens qu’elle avait eu le même employeur pour la majeure partie de son séjour au Canada. Malgré cela, peu d’éléments lui donnaient à penser que la demanderesse s’était intégrée à la collectivité au point où son départ lui causerait des difficultés inhabituelles ou excessives. Elle n’avait pas affirmé avoir de liens étroits avec des amis ou des membres de la famille au Canada, ni fourni de lettres d’appui. Les observations supplémentaires de la demanderesse incluaient des photos et des lettres de collègues de travail et amis. L’agent a souligné dans l’addenda que ces éléments portaient à croire que la demanderesse avait noué et nourri des relations avec plusieurs personnes et que les liens amicaux qu’elle avait tissés la liaient à sa collectivité. Bien que ces observations aient contribué favorablement à la détermination du niveau d’établissement de la demanderesse au Canada, cette dernière n’a pas affirmé qu’elle subirait des difficultés en raison de la rupture de ses liens amicaux, ou qu’elle avait noué des relations d’interdépendance. Tout en convenant qu'il serait triste pour elle d'avoir a rompre les liens avec ses amis et collègues, l’agent a conclu que cela ne justifiait en rien l’octroi d’une dispense en vue de l’obtention d’un visa.

 

[6]               En ce qui a trait aux difficultés attribuables à la situation dans le pays d’origine et au fait que la demanderesse craignait les gangs criminels, l’agent a reconnu que le Salvador était aux prises avec un taux de criminalité élevé, que les gangs y étaient particulièrement actifs et que les efforts déployés par le gouvernement pour réduire la criminalité avaient, globalement, donné peu de résultats. L’agent a ainsi accordé un poids favorable au fait que la demanderesse aurait à vivre dans un pays où le taux de criminalité est élevé et où il reste beaucoup à faire pour accroître la protection offerte par l’État. Tout en reconnaissant que les Maras avaient communiqué avec la famille de la demanderesse en 2010 pour connaître ses allées et venues, apparemment parce qu’ils soupçonnaient que la demanderesse travaillait à l’étranger et y voyaient une occasion de lui extorquer ses revenus, l’agent a affirmé que rien ne permettait de croire qu’il y avait eu d’autres tentatives de contact ou répercussions depuis 2010, et que peu d’éléments permettaient de conclure à une éventuelle incidence des activités du gang sur la famille de la demanderesse au quotidien. L’agent a admis que la demanderesse souffrirait de la criminalité et de la présence des gangs au Salvador, mais il a conclu que peu d’éléments permettaient de dire dans quelle mesure la nature ou le degré du facteur de difficulté pouvait être attribué à la situation personnelle de la demanderesse. Ainsi, bien qu’ayant accordé un poids favorable à ce facteur, l’agent n’a pas été en mesure de l’invoquer pour conclure que la demanderesse subirait des difficultés inhabituelles, injustifiées ou excessives si elle rentrait au Salvador.

 

[7]               Les observations supplémentaires de la demanderesse fournissaient de nouveaux éléments de preuve concernant le meurtre de son conjoint de fait. Or, l’agent a souligné dans l’addenda qu’il ou elle avait déjà admis le fait que Jose Antonio avait été tué par les Maras en mai 2008. Les documents supplémentaires l’ont confirmé.

 

[8]               Les observations supplémentaires comprenaient également une lettre traduite signée par un ami enquêteur de police, Marvin Antonio Ventura, datée du 19 août 2011 [la lettre de M. Ventura]. Dans cette lettre, M. Ventura affirme connaître la demanderesse depuis 15 ans et fournit des renseignements sur les faits qui se sont déroulés après la mort de Jose Antonio, notamment :

  • la demanderesse l’a appelé du Canada le 11 mai 2008 pour l’informer que son conjoint avait été tué, ce qu’il a confirmé auprès des autorités policières;
  • la demanderesse a trois enfants qui vivent avec sa mère et sa sœur, et ce ménage a reçu des menaces de sources inconnues;
  • la fille de la demanderesse (l’aînée) a cessé d’aller l’école en raison de ces menaces;
  • les enfants de la demanderesse ont eu peur d’aller à l’école en raison de la présence de gangs;
  • la demanderesse craint de rentrer en raison de la mort de son conjoint et de la présence des gangs;
  • des inconnus se sont enquis des allées et venues de la demanderesse auprès de la famille de cette dernière.

 

[9]               L’agent a accordé peu de poids à cette lettre, parce qu’elle a été écrite par un ami de la demanderesse, à la demande de celle‑ci. Cependant, il a souligné avoir déjà admis la plupart des renseignements qui y figurent. La dernière partie de l’addenda contient les observations suivantes concernant la lettre et d’autres éléments de preuve liés à la même question :

[traduction]

Comme il a été souligné, cet élément de preuve porte principalement sur la mort du conjoint de fait de la demanderesse, en 2008. Dans ma décision du 4 avril 2013, j’ai déjà accepté que le conjoint de la demanderesse a été tué par les Maras. J’ai également retenu qu’en 2010, des inconnus ont approché la famille de la demanderesse pour demander de l’argent et s’enquérir des allées et venues de la demanderesse. Je souligne que peu d’éléments de preuve me permettent de conclure que la famille de la demanderesse a subi ou continue de subir des répercussions des faits qui se sont déroulés en 2010. Globalement, à la lumière de la preuve présentée au sujet de la situation dans le pays d’origine et de la situation personnelle de la demanderesse, je ne suis pas d’avis que les observations supplémentaires étayent la conclusion selon laquelle la demanderesse serait aux prises avec des difficultés inhabituelles, injustifiées ou excessives si elle rentrait au Salvador.

 

[10]           En ce qui concerne l’intérêt supérieur des enfants, l’agent a convenu que les enfants de la demanderesse étaient toujours affectés par le meurtre de leur père (un enfant) ou beau‑père (deux enfants). L’agent a conclu que toute la famille était traumatisée par cet événement tragique, et qu’il ne faisait nul doute qu’un impact émotionnel se faisait toujours sentir. L’agent a souligné que les enfants vivaient avec leur grand‑mère et des membres de la famille élargie, et qu’il était raisonnable de conclure que la demanderesse irait vivre avec sa famille à son retour et qu’elle pourrait continuer de compter sur son soutien pour prendre soin de ses enfants.

 

[11]           L’agent a conclu que la demanderesse avait essentiellement dit dans sa demande que si elle obtenait une dispense de l’obligation de respecter les exigences relatives aux demandes de résidence permanente et obtenait la permission de rester au Canada, ses enfants pourraient la rejoindre au Canada et donc échapper au climat de crainte et aux risques auxquels ils étaient exposés. Tout en reconnaissant que les conditions de vie au Canada seraient plus favorables au bien‑être des enfants, l’agent était également d’avis que le tissu familial et le soutien sur lesquels pouvaient compter les enfants au Salvador jouaient également un rôle important dans leur bien‑être, comme le fait d’être avec leur mère. L’agent a souligné qu’il était raisonnable de conclure que, compte tenu de son expérience de travail au Canada et du fait qu’elle avait déjà travaillé au Salvador, la demanderesse serait en mesure d’obtenir un emploi à son retour et d’offrir soins et soutien à ses enfants. Les dernières observations de l’agent sur ce point vont comme suit :

[traduction]

En conclusion, bien qu’il ne soit peut‑être pas dans l’intérêt supérieur des enfants d’être exposés à la situation actuelle qui a cours au Salvador, la demanderesse a fait cette demande afin d’obtenir une dispense qui lui permettrait de rester au Canada, ce qui faciliterait le traitement de sa demande de résidence permanente. Si elle devait rentrer au Salvador pour présenter sa demande de résidence permanente, comme le veut la procédure habituelle, elle serait avec ses enfants et en mesure de leur fournir soins et soutien. Je conclus que, compte tenu de l’ensemble des facteurs présents, la mesure dans laquelle les intérêts des enfants sont compromis ne l’emporte pas sur tous les autres facteurs en l’espèce. À la lumière de l’analyse susmentionnée, j’ai conclu que ce facteur n’avait pas suffisamment de poids dans la pondération finale des facteurs positifs et négatifs propres à la demande pour qu’il soit justifié d’octroyer une dispense de l’obligation de respecter les exigences relatives aux demandes de visa.

 

[12]           Dans l’addenda, l’agent a souligné que les bulletins et correspondances scolaires donnaient à penser que les enfants de la demanderesse étaient des élèves doués et assidus. Sa fille, malgré des craintes qui l’avaient poussée à arrêter l’école après la mort de son beau‑père, avait maintenant repris les cours et avait de bons résultats.

 

[13]           L’agent a également tenu compte de quatre affidavits faisant partie des documents supplémentaires [l’affidavit de M. Ventura et les affidavits des enfants], qui semblaient tous avoir été rédigés à la demande de la demanderesse par une connaissance de celle‑ci, Marvin Antonio Ventura, le 25 janvier 2013. L’agent a décrit comme suit les affidavits et le poids qui leur a été accordé :

M. Ventura a signé les affidavits, un à son nom et un au nom de chacun des trois enfants de la demanderesse. Les affidavits fournissent en gros les mêmes renseignements concernant le fait que les enfants de la demanderesse vivent avec leur grand-mère, les activités des gangs, le fait que les enfants ont été approchés par des membres de gang souhaitant les recruter, et le fait que la demanderesse ne veut pas rentrer au Salvador parce qu’elle a peur des gangs et d’être tuée comme son conjoint. J’ai accordé peu de poids à ces éléments de preuve, étant donné qu’ils ont été produits par une connaissance de la demanderesse, à sa demande.

 

 

[14]           Les observations supplémentaires comprenaient également un article de journal publié le 22 janvier 2013, qui fait état du meurtre par balle d’un enseignant dont le nom figure aussi sur le bulletin scolaire du fils aîné de la demanderesse [article de journal]. Peu de poids a été accordé à cet article pour l’appréciation globale des motifs d’ordre humanitaire. L’agent a souligné le fait que la demanderesse n’avait pas mentionné dans ses observations que l’enseignant de son fils avait été tué, bien qu’il semble que cela ait été le cas, pour autant que les documents présentés soient authentiques. L’agent a mentionné que le meurtre n’avait pas eu lieu à l’école fréquentée par le fils de la demanderesse et que, selon l’article, les autorités avaient assuré au public que les mesures de sécurité dans les écoles seraient resserrées. Reconnaissant le côté tragique de la situation et affirmant ne pas vouloir minimiser l’impact que cela avait pu avoir sur les enfants de la demanderesse, l’agent a toutefois conclu que la traduction de l’article ayant été fournie n’était pas officielle, et que la demanderesse n’avait pas dit quelles avaient été les répercussions de cet événement sur elle‑même et ses enfants dans ses observations. Il a donc accordé peu de poids à cet élément de preuve.

 

[15]           Dans sa décision initiale, l’agent a conclu que les éléments présentés, qu’ils soient pris individuellement ou collectivement, n’étaient pas suffisants pour établir que la demanderesse subirait des difficultés inhabituelles, injustifiées ou excessives si elle devait présenter sa demande de résidence permanente de l’extérieur du Canada, et qu’une dispense en vertu de l’article 25 de la Loi n’était pas justifiée. L’addenda confirmait le refus de la demande après examen des observations supplémentaires.

 

QUESTIONS EN LITIGE

[16]           La demanderesse soulève les questions suivantes en l’espèce :

a.       L’agent a‑t‑il déraisonnablement accordé une faible valeur probante à la lettre de M. Ventura, à l’affidavit de M. Ventura et aux affidavits des enfants?

b.      L’agent a‑t‑il déraisonnablement accordé une faible valeur probante à l’article de journal, et omis de tenir compte d’un élément de preuve contredisant directement sa conclusion?

c.       L’agent a‑t‑il enfreint le droit de la demanderesse à l’équité procédurale en ne lui accordant pas le droit de répondre à la conclusion selon laquelle la traduction de l’article de journal n’était pas officielle?

 

NORME DE CONTRÔLE

[17]           Dans Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9 [Dunsmuir], la Cour suprême du Canada a affirmé qu’il n’était pas nécessaire de procéder dans chaque cas à une analyse exhaustive pour arrêter la norme de contrôle applicable. Ainsi, lorsque la norme de contrôle qui s’applique à une question en litige donnée a été établie de manière satisfaisante par la jurisprudence, il est loisible à la cour de révision de l’adopter. Ce n’est que dans les cas où cette recherche se révèle infructueuse, ou que la jurisprudence semble devenue incompatible avec l’évolution récente du droit en matière de contrôle judiciaire, que le tribunal chargé du contrôle doit entreprendre l’examen des quatre facteurs de l’analyse relative à la norme de contrôle : Agraira c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2013 CSC 36, au paragraphe 48.

 

[18]           Les parties conviennent que la norme de contrôle applicable aux deux premières questions en litige susmentionnées est celle de la décision raisonnable : Baker c Canada, [1999] 2 RCS 817; Kisana c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CAF 189; Lemus c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 1274, au paragraphe 14. Dans Lopez c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2013 CF 1172, au paragraphe 29, le juge, citant Mikhno c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 386, et Cuthbert c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 470, affirme que « [l]e demandeur doit s’acquitter d’un lourd fardeau pour convaincre la Cour qu’une décision en vertu de l’article 25 nécessite l’intervention de cette dernière ». Les parties ont également convenu que les questions d’équité procédurale sont susceptibles de contrôle selon la norme de la décision correcte (Syndicat canadien de la fonction publique (S.C.F.P.) c Ontario (Canadian Region), 2003 CSC 29, au paragraphe 100; Sketchley c Canada (Procureur général), 2005 CAF 404, au paragraphe 53), bien que le défendeur rejette l’idée selon laquelle de telles questions se posent en l’espèce.

 

[19]           Lorsque la révision d’une décision est soumise à la norme de la décision raisonnable, l’analyse a trait « à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenant de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se jusitifier au regard des faits et du droit ». Voir l’arrêt Dunsmuir, précité, au paragraphe 47, et Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, au paragraphe 59. Autrement dit, la Cour ne devrait intervenir que si la décision est déraisonnable en ce sens qu’elle n’appartient pas aux « issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit ».

 

DISPOSITIONS LÉGISLATIVES

[20]           Les dispositions suivantes de la Loi sont applicables à la présente instance :


Visa et documents

 

 

11. (1) L’étranger doit, préalablement à son entrée au Canada, demander à l’agent les visas et autres documents requis par règlement. L’agent peut les délivrer sur preuve, à la suite d’un contrôle, que l’étranger n’est pas interdit de territoire et se conforme à la présente loi.

 

[…]

Application before entering Canada

 

11. (1) A foreign national must, before entering Canada, apply to an officer for a visa or for any other document required by the regulations. The visa or document may be issued if, following an examination, the officer is satisfied that the foreign national is not inadmissible and meets the requirements of this Act.

[…]

 

Séjour pour motif d’ordre humanitaire à la demande de l’étranger

 

25. (1) Sous réserve du paragraphe (1.2), le ministre doit, sur demande d’un étranger se trouvant au Canada qui demande le statut de résident permanent et qui soit est interdit de territoire, soit ne se conforme pas à la présente loi, et peut, sur demande d’un étranger se trouvant hors du Canada qui demande un visa de résident permanent, étudier le cas de cet étranger; il peut lui octroyer le statut de résident permanent ou lever tout ou partie des critères et obligations applicables, s’il estime que des considérations d’ordre humanitaire relatives à l’étranger le justifient, compte tenu de l’intérêt supérieur de l’enfant directement touché.

Humanitarian and compassionate considerations — request of foreign national

 

25. (1) Subject to subsection (1.2), the Minister must, on request of a foreign national in Canada who applies for permanent resident status and who is inadmissible or does not meet the requirements of this Act, and may, on request of a foreign national outside Canada who applies for a permanent resident visa, examine the circumstances concerning the foreign national and may grant the foreign national permanent resident status or an exemption from any applicable criteria or obligations of this Act if the Minister is of the opinion that it is justified by humanitarian and compassionate considerations relating to the foreign national, taking into account the best interests of a child directly affected.

 

 

ARGUMENTATION

Demanderesse

[21]           La demanderesse invoque trois motifs pour faire casser la décision. Deux d’entre eux veulent que l’agent ait déraisonnablement accordé une faible valeur probante à des éléments de preuve pertinents et corroborants : premièrement, la lettre de M. Ventura ainsi que les affidavits de M. Ventura et des enfants et, deuxièmement, l’article de journal. Le troisième motif veut que l’agent ait manqué à l’équité procédurale en omettant d’informer la demanderesse de la préoccupation soulevée par le fait que la traduction de l’article de journal n’était pas officielle, et en omettant de donner à la demanderesse l’occasion de répondre à cette préoccupation.

 

[22]           La demanderesse fait valoir que les deux premières questions en litige sont liées : le faible poids accordé à la preuve dont il est question a incité l’agent à conclure que peu d’éléments de preuve donnaient à penser que la demanderesse et sa famille avaient subi ou continuaient de subir des répercussions des événements de 2010, et que la demanderesse ne connaîtrait donc pas de difficultés inhabituelles, injustifiées ou excessives si elle rentrait au Salvador.

 

Faible valeur probante accordée à la lettre de M. Ventura et aux affidavits

[23]           La demanderesse fait valoir que les motifs invoqués par l’agent pour accorder un faible poids à la lettre de M. Ventura, à l’affidavit de M. Ventura et aux affidavits des enfants reposent sur des erreurs de fait et ne sont pas étayés par le dossier. Premièrement, l’agent affirme que peu de poids a été accordé à la lettre de M. Ventura parce ce que celle‑ci avait été rédigée par un ami de la demanderesse, à la demande de celle‑ci. Or, jamais la demanderesse n’a affirmé avoir eu une relation autre que professionnelle avec M. Ventura. Selon la demanderesse, le dossier confirme qu’elle n’a pas de lien étroit avec M. Ventura, et que ce dernier n’a pas d’intérêt direct dans la situation de la demanderesse ou celle de sa famille. La demanderesse soutient avoir fait la connaissance de M. Ventura au moment où elle présentait une demande de vérification de dossier au poste de police local, en 1996. Il lui a alors remis sa carte professionnelle et l’a invitée à communiquer avec lui en cas de besoin. Il s’agissait de la première fois qu’un agent de police offrait de l’aide à la famille de la demanderesse, et cette dernière lui faisait confiance en dépit du fait que la corruption policière était répandue. Sa mère avait peur de communiquer avec la police directement, c’est pourquoi chaque fois qu’un incident survenait, la demanderesse faisait appel à M. Ventura, par téléphone ou par Facebook. Ainsi, selon la demanderesse, M. Ventura était celui qui était le mieux placé pour décrire les difficultés avec lesquelles ses enfants et elles sont aux prises. La demanderesse lui a donc demandé de fournir une lettre, puis un affidavit, ce pour quoi elle l’a payé.

 

[24]           En outre, la demanderesse fait valoir qu’il n’y a absolument aucun élément de preuve permettant de conclure que M. Ventura a produit les quatre affidavits. Selon elle, les affidavits des enfants ont été rédigés par son aînée. La conclusion selon laquelle les quatre affidavits ont été signés par M. Ventura est également erronée. M. Ventura a signé les affidavits des fils, comme l’exigent les lois salvadoriennes dans le cas de mineurs, mais sa fille, qui est majeure, a signé le sien.

 

[25]           Enfin, la demanderesse affirme qu’il est erroné et déraisonnable de ne pas tenir compte de certains éléments ou de leur accorder un faible poids simplement parce qu’ils sont « intéressés » ou parce qu’ils proviennent de personnes liées à la demanderesse : Ugalde c Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2011 CF 458, aux paragraphes 26 à 28 [Ugalde].

 

Faible valeur probante accordée à l’article de journal

[26]           La demanderesse soutient que l’agent a accordé une faible valeur probante à l’article de journal, et ce, pour deux raisons qui ne sont pas valables selon elle. Premièrement, l’agent a conclu que la demanderesse n’avait pas mentionné directement, dans ses observations écrites, l’incidence que l’événement avait eue sur ses enfants et sur elle‑même. Deuxièmement, il a conclu que la traduction n’était pas officielle et qu’elle avait été faite pour le compte de la demanderesse.

 

[27]           En ce qui concerne le premier point, la demanderesse fait mention d’une lettre traitant directement de l’incidence du meurtre de l’enseignant sur ses enfants, dans laquelle son aînée dit avoir eu une crise d’asthme grave à cause du meurtre.

 

[28]           En ce qui a trait au deuxième point, la demanderesse affirme que la décision n’est pas claire quant à l’importance accordée au caractère non officiel de la traduction. L’agent semblait mettre en doute l’authenticité de l’article, mais il n’a pas fourni d’explication claire quant aux lacunes de la traduction. Par exemple, on ne sait pas très bien si l’agent aurait voulu que la traduction soit certifiée et notariée. Le document a été traduit comme l’ont été tous les autres documents qu’elle a présentés à la SPR, selon la demanderesse, soit par un citoyen Canadien travaillant à Edmonton, qui a fourni des lettres signées attestant l’exactitude de chacune des traductions.

 

[29]           La demanderesse fait valoir que l’agent a commis une erreur en passant sous silence des éléments de preuve allant à l’encontre de sa conclusion (Cepeda-Gutierrez c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1998), 157 FTR 35 [Cepeda-Gutierrez]), et que plus la valeur probante d’une preuve est importante, plus la Cour sera susceptible de conclure que la Commission a commis une erreur en ne tenant pas compte de cette preuve : Karayel c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 1305, au paragraphe 16.

 

[30]           La demanderesse fait valoir qu’on ne peut accorder un faible poids à un meurtre : un tel acte doit se voir accorder soit un poids important, soit aucun poids. Si l’agent décide de n’y accorder aucun poids, c’est qu’il juge que l’article de journal et la lettre rédigée par l’aînée de la demanderesse, où le meurtre est abordé, sont des faux : Hamadi c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 317. L’agent se devait donc de demander des renseignements supplémentaires.

 

Équité procédurale

[31]           La demanderesse soutient que l’agent a enfreint son droit à l’équité procédurale en ne lui donnant pas l’occasion de répondre à la conclusion selon laquelle la traduction de l’article de journal n’était pas officielle. La préoccupation de l’agent ne découlait pas directement des exigences de la Loi et, par conséquent, il avait l’obligation de demander des précisions quant à l’exactitude ou à l’authenticité du document : Hassani c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 1283, au paragraphe 24 [Hassani].

 

Défendeur

[32]           Le défendeur souligne qu’une demande HC n’est pas une solution de rechange s’offrant aux demandeurs qui ne peuvent ou ne veulent pas respecter les critères énoncés par la Loi : Legault c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CAF 125, aux paragraphes 15 à 20 [Legault]; Serda c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 356, au paragraphe 20; Ramirez c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 1404, aux paragraphes 51 et 52 [Ramirez]. L’article 25 propose plutôt une mesure exceptionnelle et discrétionnaire, et la décision de ne pas recommander l’octroi d’une dispense n’enlève aucun droit à la personne concernée : Vidal c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1991), 41 FTR 118; Chieu c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2002] 1 RCS 84; décision Legault, précitée; Adams c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 1193, aux paragraphes 29 à 31 [Adams]. Le demandeur n’a pas droit à une issue particulière, et il doit satisfaire un critère élevé lorsqu’il demande une dispense. La procédure applicable aux demandes fondées sur des motifs d’ordre humanitaire n’est pas destinée à éliminer les difficultés; elle est destinée à accorder une réparation en cas de « difficultés inhabituelles, injustifiées ou excessives ».

 

Question préliminaire : affidavit non admissible

[33]           Le défendeur fait valoir que la demanderesse a présenté un affidavit contenant des éléments de preuve irrecevables qui devraient être retirés du dossier. En particulier, le défendeur soutient que les paragraphes 12, 29 et 30 de l’affidavit de la demanderesse fournissent des explications relatives à certaines des questions soulevées par l’agent et visent à réfuter la conclusion de l’agent sur le fond, ce qui est contraire à la directive de la Cour et de la Cour d’appel fédérale : Société Canadian Tire Ltée c. Canadian Bicycle Manufacturers Association, 2006 CAF 56, au paragraphe 9 [Canadian Tire]; Ly c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CF 1184, au paragraphe 10; Li c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 803. En l’espèce, le défendeur a demandé à ce qu’aucun poids ne soit accordé à l’affidavit dans la mesure où il va au-delà de la présentation des faits, et il a fait valoir que tout argument reposant sur ce document devrait être ignoré.

 

Équité procédurale

[34]           Le défendeur affirme que le traitement qu’a réservé l’agent à la traduction de l’article de journal n’a entraîné aucun manquement à l’équité procédurale.

 

[35]           Premièrement, dans la décision Hassani, précitée, qui a également été citée par la demanderesse, le juge affirme seulement qu’une obligation de demander des renseignements supplémentaires peut exister lorsque l’agent a des doutes sur la crédibilité, l’exactitude ou l’authenticité de la preuve.

 

[36]           Deuxièmement, l’agent n’a pas mis en doute la crédibilité de l’article. L’observation selon laquelle la traduction n’était pas officielle n’a pas incité l’agent à écarter le contenu de l’article. L’agent a de fait admis que l’enseignant d’un des fils a été tué par balle en janvier 2013. L’agent n’a pas accordé beaucoup de poids à l’article parce que la demanderesse, dans ses observations, n’a pas dit en quoi le meurtre avait eu une incidence sur ses enfants et sur elle‑même, et aussi parce que la traduction n’était pas officielle.

 

[37]           Le défendeur fait valoir qu’il était loisible à l’agent d’accorder peu de poids à l’article, voire de le rejeter sur‑le‑champ, comme l’a souligné la Cour au sujet des traductions non officielles de documents dans Naqvi c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CFPI 503, au paragraphe 24 (1re inst.) [Naqvi], et Wang c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] ACF no 1274, 173 FTR 266 (1re inst.). Il incombe au demandeur de présenter des renseignements suffisants pour que soit rendue une décision favorable, et l’agent des visas n’a ni l’obligation d’informer le demandeur des lacunes de sa demande ni de demander des précisions ou renseignements supplémentaires avant de rendre sa décision : Silva c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 733; Begum c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2013 CF 265, aux paragraphes 46 et 47; Ayyalasomayajula c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 248, au paragraphe 17.

 

Poids de la preuve

[38]           Le défendeur soutient que l’agent avait des raisons valables d’accorder peu de poids à l’article de journal ainsi qu’à la lettre de M. Ventura, à l’affidavit de M. Ventura et aux affidavits des enfants.

 

[39]           Comme il a été souligné, la traduction de l’article de journal n’était pas officielle et la demanderesse n’a pas mentionné l’incidence qu’avait eue la mort de l’enseignant sur ses enfants et sur elle‑même. Dans sa lettre, sa fille dit ni plus ni moins qu’elle a eu une crise d’asthme lorsque, regardant un journal télévisé, elle a appris la mort de l’enseignant. On ne sait pas exactement quel est le lien pouvant être établi entre cette mort et la demande CH de la demanderesse. L’agent avait le droit d’être dûment informé des arguments précis avancés; il ne lui appartenait pas de dénicher les arguments que la demanderesse avait omis de présenter et qui auraient pu l’aider : Ye c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 1072, au paragraphe 19.

 

[40]           En outre, le site Web de Citoyenneté et Immigration Canada fournit des directives claires concernant les documents traduits, notamment en ce qui a trait à la nécessité de présenter une déclaration sous serment du traducteur et une copie certifiée conforme du document original.

 

[41]           De même, selon le défendeur, l’agent n’a pas commis d’erreur en n’accordant pas plus de poids à la lettre de M. Ventura, à l’affidavit de M. Ventura et aux affidavits des enfants de la demanderesse. La demanderesse n’a pas démontré avoir présenté à l’agent quelque observation que ce soit au sujet de la nature de sa relation avec M. Ventura, et selon la preuve présentée à l’agent, M. Ventura connaissait la demanderesse depuis 15 ans et gardait contact avec elle et ses enfants. Il n’était donc pas déraisonnable de la part de l’agent de conclure que M. Ventura était un ami de la demanderesse.

 

[42]           Qui plus est, l’agent n’a pas omis de tenir compte de cet élément de preuve parce qu’il était intéressé; il lui a simplement accordé un poids minimal. Par ailleurs, l’agent a expressément mentionné que la plupart des renseignements figurant dans la lettre de M. Ventura avaient déjà été tenus pour véridiques dans la décision initiale.

 

[43]           Le fait que M. Ventura avait signé chacun des affidavits et que ces documents contenaient tous à peu près la même information offrait un motif valable d’accorder un poids minimal à ces documents, selon le défendeur. La demanderesse a fourni à la Cour une explication pour justifier le fait que M. Ventura a déposé les affidavits des enfants, mais cette explication n’a pas été présentée à l’agent. Vu ce qui précède et compte tenu du fait que les auteurs des affidavits avaient un intérêt dans l’issue de l’affaire, il était loisible à l’agent d’accorder un poids minimal à ces éléments de preuve : Tahiru c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 437, aux paragraphes 46 à 48.

 

[44]           Le défendeur souligne qu’il est de la responsabilité de l’agent d’immigration d’évaluer les facteurs pertinents et de déterminer le poids à accorder à chaque facteur pour toute demande CH : décision Adams, précitée, aux paragraphes 29 à 31. Il incombe au demandeur de présenter des motifs suffisants pour justifier une décision favorable : Owusu c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CFPI 94, aux paragraphes 11 et 12 (1re inst.) [Owusu]. En l’espèce, l’agent a raisonnablement conclu qu’il n’y avait pas suffisamment de motifs d’ordre humanitaire pour justifier l’octroi d’une dispense : Jeffrey c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 605, aux paragraphes 24 à 28. La demanderesse demande à la Cour de rechercher des erreurs dans les motifs plutôt que de se pencher sur le raisonnement dans son ensemble, comme le veut la recommandation de la Cour suprême du Canada et de la Cour d’appel fédérale : Newfoundland and Labrador Nurses' Union c Terre‑Neuve‑et‑Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62 [Newfoundland Nurses]; Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Ragupathy, 2006 CAF 151, au paragraphe 15.

 

Réponse de la demanderesse

[45]           En ce qui a trait à l’allégation du défendeur selon laquelle son affidavit est irrecevable en tout ou en partie, la demanderesse soutient que les paragraphes 12 et 29 du document se limitent aux éléments de preuve qu’elle aurait pu présenter si elle avait comparu comme témoin devant la Cour, conformément au paragraphe 12(1) des Règles des cours fédérales en matière d’immigration et de protection des réfugiés, DORS/93-22, et que sa connaissance de la préparation des affidavits de ses enfants, dont il est fait mention au paragraphe 30, est fondée sur une information qui lui a été fournie par sa fille et qu’elle n’a aucune raison de mettre en doute. En outre, la demanderesse fait valoir que si certains paragraphes sont jugés irrecevables, ceux‑ci peuvent aisément être dissociés du reste de l’affidavit. Qui plus est, lorsqu’un affidavit est irrecevable dans le cadre d’une demande, cette dernière peut tout de même être accueillie si une erreur est manifeste au vu du dossier : décision Canadian Tire, précitée.

 

[46]           La demanderesse fait valoir que les raisons pour lesquelles l’agent a accordé peu de poids à la lettre de M. Ventura et aux affidavits n’étaient pas valables et qu’elles reposaient sur des erreurs manifestes au vu du dossier. Premièrement, M. Ventura connaît la demanderesse depuis 15 ans et a gardé contact avec elle et ses enfants, mais il n’en demeure pas moins qu’il n’est pas un ami, mais plutôt un agent de police qui les aide à titre professionnel. Deuxièmement, la conclusion voulant que M. Ventura ait signé tous les affidavits est erronée, puisqu’il n’a pas signé celui de la fille de la demanderesse, comme il est mentionné précédemment.

 

[47]           En ce qui a trait à la question de l’équité procédurale, bien que la décision Hassani, précitée, souligne qu’une obligation de demander des précisions puisse exister, la demanderesse fait référence à Gharalia c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2013 CF 745, aux paragraphes 18 à 20, selon laquelle l’agent des visas « est tenu d’informer le demandeur de ses réserves concernant la véracité des documents » (citant Patel c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 571, au paragraphe 22; passage souligné par la demanderesse). En outre, contrairement à ce que soutient le défendeur, l’agent a bel et bien mis en doute la crédibilité de l’article de journal. Il n’a pas retenu que l’enseignant d’un des fils avait été tué, affirmant tout juste qu’il semblait que ce soit le cas, pour autant que les documents présentés étaient authentiques.

 

[48]           La demanderesse affirme que la présente instance se distingue de l’affaire Naqvi, précitée, dans laquelle le demandeur avait reçu une lettre lui demandant de fournir des traductions certifiées, alors que ce n’est pas le cas en l’espèce.

 

Observations supplémentaires du défendeur

[49]           Le défendeur fait valoir que la demanderesse a omis de mentionner une raison très importante présentée par l’agent pour justifier le peu de poids accordé à la lettre de M. Ventura : les renseignements qu’elle contenait avaient déjà été présentés et examinés aux fins de la décision initiale. L’agent a raisonnablement conclu que la lettre ne révélait pas que la demanderesse avait subi une incidence négative directe pouvant équivaloir à des difficultés inhabituelles, injustifiées ou excessives. Il était donc raisonnable d’y accorder peu de poids. Le défendeur souligne que l’article 25 est axé sur les difficultés qui pourraient avoir une incidence directe sur le demandeur, et non simplement sur les conditions généralement défavorables dans le pays : Caliskan c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 1190, aux paragraphes 22 et 26. La demanderesse n’a présenté aucun élément de preuve voulant que sa famille ait été approchée par les Maras ou qu’elle ait subi d’autres répercussions après 2010.

 

[50]           De façon similaire, l’affirmation de l’agent selon laquelle peu de poids a été accordé aux affidavits parce qu’ils ont été rédigés par une connaissance de la demanderesse, à la demande de celle‑ci, ne devrait pas être examinée isolément, en dehors du contexte général des motifs, selon le défendeur : arrêt Newfoundland Nurses, précité, aux paragraphes 12 et 15; Ayanru c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2013 CF 1017, aux paragraphes 6 à 8. En l’espèce, l’agent a entre autres mentionné que les affidavits fournissaient tous à peu près les mêmes renseignements et que l’essentiel de ces éléments de preuve avait déjà été pris en considération dans la décision initiale.

 

[51]           Selon le défendeur, l’agent a également expliqué pourquoi ces éléments de preuve n’élevaient pas l’importance de l’intérêt supérieur des enfants au même niveau que la présence de difficultés inhabituelles, injustifiées ou excessives, soulignant que la demande CH visait uniquement l’obtention d’une dispense qui permettrait à la demanderesse de demeurer au Canada pour faciliter le traitement de sa demande de résidence permanente. Une décision favorable ne signifierait pas que la demanderesse obtiendrait le statut de résidente permanente ni qu’elle obtiendrait automatiquement le droit de parrainer ses enfants pour qu’ils la rejoignent au Canada, car une demande distincte devrait être présentée à cette fin. Ainsi, toute difficulté que les enfants de la demanderesse pourraient subir au Salvador a peu de poids dans le contexte de la décision CH faisant l’objet du contrôle. En rejetant l’appel de la décision Owusu, précitée, la Cour d’appel fédérale s’abstient expressément d’endosser l’opinion du juge de première instance, selon laquelle l’obligation de tenir compte de l’intérêt supérieur des enfants du demandeur intervient lorsque ceux‑ci ne sont pas au Canada et qu’ils n’y sont jamais venus, soulignant la nécessité d’attendre que les faits exigent que cette question soit tranchée : Owusu c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CAF 38, aux paragraphes 13 et 14.

 

[52]           En ce qui a trait à l’article de journal, le défendeur fait valoir que la demanderesse s’attarde à des détails sémantiques : une lecture juste et simple de la décision révèle que, pour les besoins de l’analyse CH, l’agent a admis que l’enseignant du fils de la demanderesse avait été tué, comme le rapporte l’article.

 

[53]           En outre, le défendeur affirme qu’en ce qui a trait à cet élément de preuve, la demanderesse confond les questions de crédibilité et de poids ou valeur probante, qui sont juridiquement distinctes et qui ont des conséquences différentes pour le demandeur : Ferguson c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 1067, aux paragraphes 23 à 27, faisant référence à Carrillo c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CAF 94. En l’espèce, bien qu’il ait convenu du meurtre de l’enseignant, l’agent a tout de même accordé peu de poids à cet élément de preuve, étant donné qu’il n’avait pas suffisamment de valeur probante pour établir que la criminalité au Salvador et l’intérêt supérieur des enfants de la demanderesse permettaient de conclure à des difficultés inhabituelles, injustifiées et excessives. Outre les exigences en matière de traduction, l’agent a fourni des motifs convaincants pour justifier le fait que peu de poids a été accordé au contenu de l’article de journal.

 

ANALYSE

[54]           La demanderesse souhaite devenir résidente permanente du Canada. La présente décision ne l’en empêche pas. L’agent était seulement appelé à décider si la demande de résidence permanente devait être présentée depuis le Salvador, comme le veut la procédure habituelle, ou si, en raison de difficultés inhabituelles, injustifiées ou excessives qu’elle vivrait si elle rentrait au Salvador, la demanderesse avait le droit de rester au Canada et de présenter sa demande depuis le Canada. Il s’agit d’une dispense spéciale, et son refus n’enlève pas à la demanderesse le droit de demander la résidence permanente.

 

[55]           Comme le souligne l’agent, il incombait à la demanderesse de remplir les critères pour obtenir cette dispense spéciale. L’agent a examiné toutes les observations de la demanderesse, il a pondéré tous les facteurs, et il a conclu que la demanderesse n’avait pas satisfait aux critères qui lui permettraient de rester au Canada pour présenter sa demande de résidence permanente. Il s’agit d’une décision hautement discrétionnaire pour laquelle la pondération des facteurs revient à l’agent, comme le veut le législateur; il n’appartient pas à la Cour d’apprécier la preuve de nouveau et de substituer son opinion à celle de l’agent. Voir la décision Legault, précitée, aux paragraphes 11 et 15 à 19, la décision Ramirez, précitée, aux paragraphes 51 et 52, la décision Adams, précitée, au paragraphe 31, et Nagulathas c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 1159, au paragraphe 46. La Cour ne peut que demander que la décision soit renvoyée pour nouvel examen si le demandeur arrive à établir qu’il y a eu erreur susceptible de contrôle. En l’espèce, la demanderesse a soumis plusieurs questions à la Cour.

 

[56]           Premièrement, en ce qui a trait au traitement réservé par l’agent à l’article de journal, il apparaît évident à la Cour que l’agent a admis que l’enseignant d’un des fils avait été tué. L’agent a affirmé qu’il s’agissait d’un événement tragique et qu’il ne voulait pas minimiser l’impact que cela avait eu sur les enfants de la demanderesse. Si l’agent n’avait pas cru à la mort de l’enseignant, il n’y aurait pas eu d’impact à prendre en considération. L’agent était toutefois d’avis que la mort de l’enseignant avait peu d’incidence sur la demande CH de la demanderesse. Cette conclusion n’était pas déraisonnable. Les éléments de preuve présentés à l’agent établissaient déjà que les meurtres perpétrés par les gangs étaient monnaie courante au Salvador. En l’absence d’autres liens pouvant être établis, le fait qu’une personne tuée tragiquement dans ce climat de violence généralisée soit justement l’enseignant d’un des fils de la demanderesse ne donne pas plus de poids à la demande CH de cette dernière. À mon avis, il n’y a pas d’iniquité procédurale ou de caractère déraisonnable dans la façon dont l’agent a traité l’article de journal.

 

[57]           La seule véritable question est liée au traitement qu’a réservé l’agent à la lettre de M. Ventura et aux affidavits de M. Ventura et des enfants de la demanderesse, ainsi qu’au poids devant être accordé à ces éléments de preuve.

 

[58]           L’agent a accordé peu de poids à la lettre de M. Ventura, faisant valoir que la lettre avait été rédigée par un ami de la demanderesse, à la demande de celle‑ci, et qu’il avait déjà admis la plupart des renseignements qui s’y trouvaient.

 

[59]           Selon la demanderesse, la lettre de M. Ventura, datée du 19 août 2011, étaye ses craintes voulant que les Maras soient toujours une source de problèmes. Selon elle, la conclusion de l’agent selon laquelle rien ne donne à penser qu’il y a eu de nouveaux contacts depuis 2010 devrait donc être considérée comme déraisonnable. Or, bien que la lettre de M. Ventura confirme que les enfants ont reçu des menaces de sources inconnues en raison de la mort de leur père ou beau‑père, elle ne précise pas quand ces menaces ont eu lieu ni ne fournit de détails qui permettraient à l’agent de conclure que les difficultés existent toujours ou de se prononcer sur la nature et l’ampleur de ces difficultés. La lettre mentionne que les enfants ont dit craindre d’aller à l’école en raison des conséquences dont ils sont témoins, mais elle ne relate aucun événement précis. Elle reste vague, ne fournissant pas vraiment de détail sur les difficultés que les Maras pourraient faire subir à la demanderesse. De plus, la lettre ne fournit pas vraiment de renseignements en plus de ceux déjà examinés par l’agent, et ce dernier a par ailleurs affirmé avoir déjà admis la plupart des renseignements qui s’y trouvaient.

 

[60]           La Cour ne voit pas de conséquence importante au fait que l’agent a affirmé que M. Ventura était un ami de la demanderesse. Premièrement, l’agent a affirmé que la lettre avait été rédigée par un ami de la demanderesse, à la demande de celle‑ci. Or, la lettre a sans aucun doute été rédigée à la demande de la demanderesse. M. Ventura est désigné à plusieurs reprises comme une personne connaissant la demanderesse et sa famille depuis des années. La décision Ugalde, précitée, nous enseigne qu’il est déraisonnable d’écarter des éléments de preuve simplement parce qu’ils proviennent de membres de la famille ou de personnes ayant un lien avec le demandeur. Cela dit, l’important en l’espèce est que la lettre est trop vague quant à la persistance de l’effet des Maras pour que l’agent puisse tirer une conclusion concernant la situation de la demanderesse. Il n’était pas déraisonnable d’accorder peu de poids à cette lettre.

 

[61]           Des lacunes semblables émanent de l’affidavit de M. Ventura, dans lequel son auteur nous informe que les enfants vivent dans une zone contrôlée par les gangs et qu’il a été témoin à plusieurs reprises des tentatives déployées par ces groupes pour convaincre les enfants de se joindre à eux, car les enfants appartiennent à un groupe d’âge vulnérable. Cela dit, l’affidavit ne mentionne pas quand ces événements se sont produits. Les affidavits mentionnent en général que la demanderesse [traduction] « ne peut rentrer de crainte de subir le même sort que son mari », mais qu’il ne s’agit‑là que d’une opinion sur une question qui a déjà été examinée par le passé.

 

[62]           L’affidavit de la fille aînée, Yancy, est légèrement différent des autres. Il est rédigé au temps présent et on peut y lire que la situation a atteint un stade tel que ses frères et elle avaient reçu des menaces de mort dans l’éventualité d’un refus de se joindre au gang. Or, cela ne change pas vraiment les renseignements déjà examinés par l’agent.

 

[63]           L’agent a accordé peu de poids à l’affidavit parce qu’il a été rédigé par une connaissance de la demanderesse, à la demande de celle‑ci. Cela dit, la conclusion générale de l’agent est que peu d’éléments de preuve donnent à penser que la famille de la demanderesse avait subi ou continuait de subir des répercussions des événements de 2010. Les événements de 2010 se sont produits lorsque les Maras sont entrés en contact avec la famille de la demanderesse au Salvador pour s’enquérir de ses allées et venues. Il est allégué que les Maras voulaient s’en prendre à sa famille pour lui extorquer de l’argent, convaincus que la famille en aurait les moyens étant donné que la demanderesse se trouvait à l’étranger. De fait, aucun élément de preuve convaincant de donne à penser que les problèmes étaient persistants.

 

[64]           L’agent a aussi conclu ce qui suit :

[traduction]

Je dispose de peu d’éléments de preuve concernant l’incidence des activités du gang sur la famille de la demanderesse au quotidien, bien que je puisse raisonnable conclure que celle‑ci doit faire preuve de vigilance pour assurer sa sécurité, au même titre que les autres Salvadoriens.

 

 

[65]           La fille de la demanderesse, Yancy, affirme maintenant que ses frères et elle ont reçu des menaces de mort dans l’éventualité où ils refusaient de se joindre au gang, mais aucun détail n’a été présenté à cet égard.

 

[66]           Ainsi, il n’existe selon moi aucun élément de preuve convaincant permettant de conclure à des difficultés qui n’auraient pas été prises en considération par l’agent dans l’addenda à sa décision initiale. De plus, la situation des enfants – en ce qui a trait aux menaces reçues des Maras – a été prise en considération lors de l’analyse de leur intérêt supérieur :

[traduction]

[J]’accepte et j’ai pris en considération le fait qu’il existe des conditions défavorables dans le pays et que les enfants de la demanderesse, comme la population en général, sont exposés à un risque inhérent à ces conditions.

 

[B]ien qu’il ne soit peut‑être pas dans l’intérêt supérieur des enfants d’être exposés à la situation actuelle observée au Salvador, la demanderesse a fait cette demande afin d’obtenir une dispense qui lui permettrait de rester au Canada, ce qui faciliterait le traitement de sa demande de résidence permanente. Si elle devait rentrer au Salvador pour présenter sa demande de résidence permanente, comme le veut la procédure habituelle, elle serait avec ses enfants et en mesure de leur fournir soins et soutien.

 

 

[67]           Si la demanderesse reste au Canada et pour y présenter sa demande de résidence permanente, cela n’aidera en rien ses enfants à faire face aux menaces que les gangs pourraient leur faire subir. De plus, si la demanderesse souhaite un jour faire venir ses enfants au Canada, elle pourra le demander lorsqu’elle présentera sa demande de résidence permanente, même si elle le fait depuis le Salvador plutôt qu’au Canada.

 

[68]           Dans le cadre du présent contrôle, la Cour ne peut affirmer que le traitement qu’a réservé l’agent à la lettre de M. Ventura ou aux affidavits de M. Ventura et des enfants – vu leur contenu – n’appartient pas aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit. Voir l’arrêt Dunsmuir, précité, au paragraphe 47. Par conséquent, bien qu’éprouvant beaucoup de sympathie pour la demanderesse et ses enfants, la Cour ne peut intervenir pour annuler la décision.

 

[69]           La demanderesse affirme en outre que la décision est déraisonnable parce que l’agent a omis de tenir compte d’éléments de preuve faisant état de son incapacité de trouver du travail au Salvador. En particulier, elle réfère la Cour à une lettre de sa mère ainsi traduite :

[traduction]

Je prie Dieu pour que tu ne reviennes pas, à la simple pensée que tu chercherais du travail en vain parce que les gangs ne te permettent même pas de travailler. Ta sœur est moi ne savons plus quoi faire. Les gangs vont voir ceux qui travaillent pour les rançonner…

 

 

[70]           Cette lettre n’est pas datée et, fait plus important, elle est contradictoire. Il y est affirmé, d’une part, que les gangs ne « te » permettent pas de travailler – nous ne savons pas à qui « te » fait référence, mais cela semble désigner tout le monde en général – puis, d’autre part, que les gangs rançonnent ceux qui travaillent. Voilà qui ne constitue pas un élément de preuve convaincant dont l’agent devait expressément tenir compte conformément aux principaux énoncés dans la décision Cepeda-Gutierrez, précitée. L’élément de preuve fourni par la mère de la demanderesse en ce qui a trait à cette question contient surtout des généralisations et ne renseigne pas l’agent sur les circonstances particulières qui pourraient empêcher la demanderesse de travailler.

 

[71]           Les avocats conviennent qu’il n’y a aucune question à certifier et la Cour est du même avis.


JUGEMENT

LA COUR ORDONNE :

    1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.
    2. Aucune question n’est certifiée.

 

 

 

« James Russell »

Juge

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Geneviève Tremblay, trad. a.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 


DOSSIER :

IMM-3446-13

 

INTITULÉ :

SONIA DEL CARMEN PEREZ DE SALAMANCA c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

                                                                        Edmonton (Alberta)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

                                                                        LE 10 FÉVRIER 2014

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET

JUGEMENT :                                   LE JUGE RUSSELL

 

 

DATE DES MOTIFS :

                                                            LE 17 MARS 2014

COMPARUTIONS :

Ahlam J. Balazs

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

 

Anna Kuranicheva

 

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Balazs Law Office

Avocat

Edmonton (Alberta)

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Edmonton (Alberta)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

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