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Date : 20140306


Dossier :

IMM-11-13

 

Référence : 2014 CF 221

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Toronto (Ontario), le 6 mars 2014

En présence de madame la juge Simpson

 

 

ENTRE :

OLGA ROMANUSHKO

 

 

demanderesse

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]               Olga Romanushko (la demanderesse) sollicite, en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27, le contrôle judiciaire de la décision du 9 novembre 2012 par laquelle la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission) a rejeté sa demande d’asile au motif qu’elle est victime d’extorsion et qu’elle n’a pas la qualité de réfugiée au sens de la Convention ou celle de personne à protéger (la décision).


Faits

[2]               La demanderesse est une citoyenne de l’Ukraine âgée de 47 ans. Son époux exploitait une entreprise de transport de voitures depuis le port jusqu’aux concessionnaires. La demanderesse ne travaillait pas dans l’entreprise et n’était pas au courant des problèmes que son époux avait avec la police.

 

[3]               En avril 2010, deux policiers se sont présentés au domicile de la demanderesse et ont demandé à voir son époux, qui était alors au Bélarus. La demanderesse leur a répondu que son époux n’était pas là. Les policiers sont entrés et ont fouillé la maison. Ils ont dit à la demanderesse que son époux leur devait de l’argent et lui ont demandé combien d’argent elle avait à la maison. La demanderesse a répondu qu’elle avait 500 $. Les policiers sont repartis avec cet argent.

 

[4]               Après le départ des policiers, la demanderesse a téléphoné à son époux. Ce dernier lui a expliqué que ces policiers étaient corrompus et qu’ils l’obligeaient depuis des années à leur verser des pots-de-vin. Les policiers avaient récemment augmenté le montant exigé, et il ne voulait pas payer.

 

[5]               Le 26 avril 2010, la demanderesse a reçu la visite des mêmes policiers. Ces derniers l’ont poussée et giflée, et ils lui ont demandé à quel moment son époux serait de retour. Ils ont accusé la demanderesse de leur cacher de l’information, l’ont menacée et ont saccagé son appartement.

 

[6]               Les policiers corrompus sont retournés au domicile de la demanderesse trois fois par la suite, à la fin du mois d’avril, en juin et en juillet 2010. Ils l’ont agressée et menacée. À deux occasions, la police a refusé de l’aider lorsqu’elle a porté plainte.

 

[7]               La demanderesse s’est enfuie au Canada le 14 août 2010 et a demandé l’asile en juin 2011.

 

[8]               La Commission a reconnu que la preuve de la demanderesse était crédible et qu’elle avait été menacée et « prise pour cible parce que s’est aggravé le problème d’extorsion de son époux » par la police. La Commission a aussi retenu son témoignage suivant lequel elle craint d’être persécutée par la police si elle retourne en Ukraine.

 

[9]               La Commission a demandé à la demanderesse si l’extorsion était un problème répandu dans le milieu des affaires, ce à quoi elle a répondu que c’était très fréquent. De plus, la Commission a cité le cartable national de documentation sur l’Ukraine, selon lequel la criminalité policière est très présente dans ce pays.

 

Décision

[10]           La Commission a fondé sa décision défavorable sur les deux conclusions suivantes. Dans un premier temps, la demande d’asile de la demanderesse est fondée sur la criminalité et il n’y a pas de lien avec un motif prévu par la Convention. Dans un deuxième temps, le risque auquel la demanderesse est exposée est généralisé.

 

Questions en litige

[11]           La première question en litige est celle du caractère raisonnable de la conclusion de la Commission quant à l’absence de lien avec un motif prévu par la Convention. La demanderesse a fait valoir qu’elle était membre d’un groupe social (une famille constituée d’elle‑même et de son mari) et qu’elle était prise pour cible en raison de son appartenance à ce groupe. Même si cette allégation est vraie, elle ne permet pas, à mon avis, d’établir un lien avec un motif de la Convention parce que la demanderesse était prise pour cible à des fins d’extorsion et non pour un motif énoncé dans la Convention.

 

[12]           La deuxième question en litige est celle du caractère raisonnable de la conclusion de la Commission selon laquelle la demanderesse est exposée à un risque généralisé. Ainsi qu’il a été mentionné précédemment, la demanderesse a affirmé que l’extorsion des propriétaires d’entreprise par la police est un problème [traduction] « très fréquent ». À mon avis, la demanderesse n’a pas réussi à établir que les menaces et la violence auxquelles elle s’expose si elle retourne en Ukraine ne constituent pas un risque auquel les gens d’affaires et leur famille sont généralement exposés. Il s’agit d’un sous‑groupe suffisamment grand pour que l’on puisse qualifier le risque de risque généralisé.

 

[13]           Les extorqueurs ont l’habitude de menacer et de maltraiter les victimes et leurs proches afin d’obliger les victimes à payer et de les dissuader de ne pas coopérer. Autrement dit, le fait que la demanderesse ait été prise pour cible avant de quitter l’Ukraine et le risque que la situation se reproduise si elle y retourne font partie du risque généralisé auquel sont exposées les victimes d’extorsion.

 

[14]           La troisième question en litige a trait à des lacunes dans la décision. La demanderesse reproche à la Commission de ne pas avoir analysé le groupe social. Toutefois, à mon avis, il n’était pas nécessaire de réaliser une telle analyse puisqu’il est évident que seuls la demanderesse et son époux étaient concernés. La demanderesse conteste également le fait que la Commission n’a pas décrit les risques auxquels elle prétend qu’elle sera exposée si elle retourne en Ukraine. Cependant, étant donné que son témoignage a été retenu, il est évident que la Commission a analysé sa situation en tenant compte de sa crainte d’être victime de menaces et de violence persistantes de la part des policiers corrompus.

 

[15]           Aucune question à certifier n’a été proposée.  

 


ORDONNANCE

 

LA COUR ORDONNE que la demande soit rejetée.

 

 

 

 

« Sandra J. Simpson »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Stéphanie Champagne

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 


DoSSIER :

                                                            IMM-11-13

 

INTITULÉ :

 

OLGA ROMANUSHKO C LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

                                                            Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

                                                            LE 5 MARS 2014

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE :

                                                            LA JUGE SIMPSON

DATE DES MOTIFS :

                                                            LE 6 MARS 2014

COMPARUTIONS :

Jacqueline Swaisland

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

 

Rachel Hepburn Craig

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Waldman & Associates

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

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