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Cour fédérale

 

Federal Court

Date : 20140206


Dossier :

T-1807-12

 

Référence : 2014 CF 130

Ottawa (Ontario), ce 6e jour de février 2014

En présence de monsieur le juge Roy

 

ENTRE :

GESTION J.F.-HOULE INC.

 

Demanderesse

Et

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

Défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

 

[1]               La demanderesse, Gestion J.F.-Houle Inc., se plaint de deux cotisations établies en vertu du Tarif des douanes, LC 1997, ch 36. Ces deux cotisations sont l’objet d’une demande de contrôle judiciaire faite en vertu de l’alinéa 18.1(4)d) de la Loi sur les Cours fédérales, LRC (1985), ch F-7. Cet alinéa se lit de la façon suivante :

  18.1 (4) Les mesures prévues au paragraphe (3) sont prises si la Cour fédérale est convaincue que l’office fédéral, selon le cas :

 

d) a rendu une décision ou une ordonnance fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont il dispose;

 

  18.1 (4) The Federal Court may grant relief under subsection (3) if it is satisfied that the federal board, commission or other tribunal

 

(d) based its decision or order on an erroneous finding of fact that it made in a perverse or capricious manner or without regard for the material before it;

 

 

Faits

[2]               Étant donné que les trames factuelles des deux cotisations procèdent d’incidents différents mais sont essentiellement semblables pour ce qui est des éléments constitutifs, et que les questions qui en découlent sont identiques, jugement est rendu par la présente au sujet des deux demandes de contrôle judiciaire. J’exposerai brièvement les faits dans les deux affaires et je traiterai par la suite des questions qui se posent ensemble.

 

[3]               Dans les deux cas, la décision contestée a été rendue le 18 juin 2012 par un agent de l’Agence des services frontaliers du Canada (l’ASFC). Dans les deux cas, des droits de douane substantiels étaient demandés.

 

[4]               Le 16 septembre 2011, la demanderesse a cherché à obtenir une exonération des droits de douane qui seraient par ailleurs exigibles pour l’importation de poulet. Le 22 septembre 2011, lesdites exonérations étaient accordées et un certificat était délivré en vertu de l’article 90 du Tarif des douanes.

 

[5]               La première importation (dossier T-1807-12) a eu lieu relativement à l’achat de 40 000 livres de poulet au prix de 52 800 $ de la compagnie River Valley Trading, une entreprise de l’Arizona. Cette marchandise devait être minimalement transformée avant d’être exportée. Il appert que l’exportation devait avoir lieu vers la Colombie, la Jamaïque, la Barbade, Aruba et St-Kitts. Le transporteur Reliance Transport avait la charge de transporter la marchandise des États-Unis au Canada. Il n’est pas contesté que la marchandise a traversé la frontière canadienne. Il semble que cette marchandise ne se soit jamais rendue à destination et qu’elle ait été volée en cours de transport, mais sur le sol canadien.

 

[6]               La demanderesse a rapporté le vol de poulet le 1er décembre 2011 auprès de la Régie inter-municipale de police Richelieu-Saint-Laurent.

 

[7]               Cependant, ledit vol n’a jamais été l’objet d’une divulgation auprès de l’ASFC. Ce n’est qu’en mai 2012 qu’un représentant de l’ASFC, visitant les bureaux de la demanderesse, a pu constater que l’autorisation de report des droits de douane était maintenant défectueuse puisque le poulet importé ne pouvait pas être exporté.

 

[8]               C’est le 18 juin 2012 que la cotisation a été émise et elle était pour un montant total de 145 877,23 $, composé de la façon suivante : des droits de douane pour 135 771,13 $, des taxes de TPS de 9 514,88 $ et des intérêts de 591,22 $.

 

[9]               Dans le dossier T-1808-12, la demanderesse procédait en vertu de la même demande d’exonération des droits de douane mais, cette fois, l’achat de 34 000 livres de poulet a eu lieu le 26 avril 2012. Ces poulets provenaient de Marshville, en Caroline du Nord et auraient été achetés de la compagnie Service alimentaire Desco Inc. Le transport devait être assuré par une entreprise différente, Deisel Transport. Encore ici, il n’est pas contesté que les poulets aient franchi la frontière mais, comble de malheur, cette cargaison a aussi été volée. Le vol aurait eu lieu le 27 avril 2012 et il ne semble pas qu’il ait fait l’objet d’une déclaration auprès des forces policières. Plutôt, la demanderesse a fait une réclamation auprès de ses assureurs.

 

[10]           Dans ce cas comme dans le précédent, les constatations que les marchandises ne pouvaient pas être exportées ont eu lieu en mai 2012 et l’avis de cotisation a été complété le 18 juin 2012. Cette fois, la cotisation est pour un montant de 116 117,05 $, composé de la façon suivante : des droits de douane de 108 512,46 $ et la TPS de 7 604,59 $.

 

[11]           Le dossier démontre qu’une indemnité de 56 901,30 $ a été payée par ses assureurs à la demanderesse le 3 février 2012; quant au vol d’avril 2012, un montant de 150 000 $ a été payé par l’assureur le 1er août 2012.

 

[12]           À partir de ces trames factuelles finalement assez semblables, la demanderesse a soulevé les mêmes questions.

 

Questions en litige

[13]           La demanderesse a suggéré que deux questions sont en litige. Les vols de marchandises les 1er décembre 2011 et 27 avril 2012 sont-ils des situations visées par l’article 118 du Tarif des douanes et l’ASFC a-t-elle erré en émettant des cotisations le 18 juin 2012? À proprement parler, ces deux questions n’en font qu’une. Si l’article 118 du Tarif des douanes s’applique, les cotisations émises sont non avenues. Donc, la question qui se pose est de déterminer si cet article 118 peut trouver application en l’espèce.

Norme de contrôle

[14]           Étonnamment, le défendeur se refuse à discuter de la norme de contrôle qui serait applicable en l’espèce. Il se contente de dire que quelle que soit cette norme, la décision prise par l’ASFC était bien fondée tant en fait qu’en droit.

 

[15]           La demanderesse, comme on pouvait s’y attendre, argue que la norme applicable en l’espèce est celle de la décision correcte. Pour ce faire, elle se repose sur de la jurisprudence antérieure à l’arrêt Dunsmuir.

 

[16]           Depuis Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 RCS 190, [Dunsmuir] la jurisprudence en matière de contrôle judiciaire a pris un tournant décidément favorable à la norme de la décision raisonnable. Ainsi, on peut lire au paragraphe 51 de la décision :

[51]     . . . Nous verrons qu’en présence d’une question touchant aux faits, au pouvoir discrétionnaire ou à la politique, et lorsque le droit et les faits ne peuvent être aisément dissociés, la norme de la raisonnabilité s’applique généralement. De nombreuses questions de droit commandent l’application de la norme de la décision correcte, mais certaines d’entre elles sont assujetties à la norme plus déférente de la raisonnabilité.

 

 

Un peu plus loin, au paragraphe 54, la Cour déclare :

 

[54]     . . . Lorsqu’un tribunal administratif interprète sa propre loi constitutive ou une loi étroitement liée à son mandat et dont il a une connaissance approfondie, la déférence est habituellement de mise : [citations omises]. Elle peut également s’imposer lorsque le tribunal administratif a acquis une expertise dans l’application d’une règle générale de common law ou de droit civil dans son domaine spécialisé : . . .

 

 

 

[17]           Très récemment, dans McLean c British Columbia (Securities Commission), 2013 CSC 67, la Cour suprême du Canada a de toute évidence maintenu le cap. Aux paragraphes 21 et 22, il est dit :

[21]     Depuis l’arrêt Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 RCS 190, notre Cour a maintes fois rappelé que « lorsqu’un tribunal administratif interprète sa propre loi constitutive ou une loi étroitement liée à son mandat et dont il a une connaissance approfondie, la déférence est habituellement de mise » (paragraphe 54). Récemment, dans un souci de simplicité accrue, notre Cour a statué qu’« il convient de résumer que l’interprétation par un tribunal administratif de « sa propre loi constitutive ou [d’]une loi étroitement liée » [. . .] est une question d’interprétation législative commandant la déférence en cas de contrôle judiciaire » (Alberta (Information and Privacy Commissioner) c Alberta Teachers’ Association, 2011 CSC 61, [2011] 3 RCS 654, paragraphe 34).

 

[22]     Or, la présomption adoptée dans Alberta Teachers’ n’est pas immuable. D’abord, notre Cour reconnaît depuis longtemps que certaines catégories de questions, même lorsqu’elles emportent interprétation d’une loi constitutive, sont susceptibles de contrôle selon la norme de la décision correcte (Dunsmuir, paragraphes 58-61). Ensuite, elle affirme également qu’une analyse contextuelle peut « écarter la présomption d’assujettissement à la norme de la raisonnabilité de la décision qui résulte d’une interprétation de la loi constitutive » (Rogers Communications Inc. c La Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique, 2012 CSC 35, [2012] 2 RCS 283, paragraphe 16). Laplante emprunte les deux avenues pour nous presser d’appliquer la norme de la décision correcte. Je propose d’examiner d’abord sa deuxième prétention puisqu’elle peut être écartée rapidement.

 

La Cour s’applique ensuite à démontrer que l’interprétation de la loi appliquée quotidiennement par la B.C. Securities Commission devait faire l’objet d’un contrôle en vertu de la norme de la décision raisonnable.

 

[18]           En fait, la Cour suprême a établi dès Dunsmuir quatre grandes catégories de lois qui doivent faire l’objet d’un contrôle sur la base de la décision correcte. D’abord, ce sera le cas quant aux questions touchant au partage des compétences entre le Parlement et les provinces. Ensuite, l’organisme administratif doit statuer correctement sur une question touchant véritablement à la compétence ou à la constitutionnalité. Troisièmement, la Cour déclare qu’une question de droit générale « à la fois, d’une importance capitale pour le système juridique dans son ensemble et étrangère au domaine d’expertise de l’arbitre » requiert la norme de la décision correcte. Enfin, il faut avoir une décision correcte lorsque le tribunal administratif délimite des compétences respectives des tribunaux spécialisés concurrents.

 

[19]           Comme on le verra, l’interprétation à donner à l’article 118 ne tombe sous aucune des quatre rubriques répertoriées dans Dunsmuir aux paragraphes 58 à 61. Depuis Dunsmuir, la Cour a dégagé une cinquième catégorie dans Rogers Communications Inc. c Société canadienne des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique, 2012 CSC 35, [2012] 2 RCS 283. Il n’est pas nécessaire d’élaborer puisqu’elle ne correspond pas aux faits de notre affaire. Je serais donc porté à y voir la nécessité de contrôler la décision en l’espèce sur la base de la norme raisonnable.

 

[20]           Malheureusement, l’affaire n’a pas été plaidée sur cette base devant cette Cour qui n’a pu bénéficier des vues des parties. Le défendeur se contente de concéder, pour ainsi dire, que la norme en serait une de la décision correcte étant donné qu’à son avis la décision prise était correcte. C’est peut-être à courte vue, mais c’est la décision du défendeur. Puisque j’ai conclu que le texte de l’article 118 ne souffre pas d’ambiguïté et que la position adoptée par le défendeur ne peut qu’être correcte, il n’est donc pas nécessaire de décider formellement de la norme de contrôle dans le cas d’espèce. Dans les circonstances, je préfère faire preuve de prudence et ne pas aller plus loin que ce que les parties ont présenté. Une affaire où la question doit être tranchée et où les parties auront présenté des arguments étoffés serait plus appropriée.

 

Analyse

[21]           La Loi sur les douanes, LRC (1985), ch 1 (2e suppl.), établit le principe général que « les marchandises importées sont passibles de droit à compter de leur importation jusqu’à paiement ou suppression des droits » (paragraphe 17(1)).

 

[22]           C’est le Tarif des douanes qui fournit la possibilité que des marchandises importées puissent être exonérées de droits. En l’espèce, la demanderesse s’est prévalue de l’alinéa 89(1)b) du Tarif des douanes pour bénéficier d’une exonération :

  89. (1) Sous réserve  du paragraphe (2), de l’article 95 et des règlements visés à l’article 99 et sur demande présentée dans le délai réglementaire en conformité avec le paragraphe (4) par une personne appartenant à une catégorie réglementaire, des marchandises importées peuvent, dans les cas suivants, être exonérées, une fois dédouanées, des droits qui, sans le présent article, seraient exigibles :

 

[. . .]

b) elles sont transformées au Canada et ultérieurement exportées;

 

  89. (1) Subject to subsection (2), section 95 and any regulations made under section 99, if an application for relief is made within the prescribed time, in accordance with subsection (4), by a person of a prescribed class, relief may be granted from the payment of duties that would but for this section be payable in respect of imported goods that are

 

[. . .]

(b) released, processed in Canada and subsequently exported;

 

 

 

Un certificat sera émis par le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile à la personne qui aura bénéficié de l’exonération (article 90, Tarif des douanes).

 

[23]           Il est acquis que la demanderesse ne pouvait dans l’un et l’autre cas sous étude satisfaire à la condition de l’alinéa 89(1)b). Quoique les poulets aient été importés, ils n’ont pas été transformés au Canada et ils ne peuvent être exportés ultérieurement. La loi prévoit ce qui se produit lorsqu’une condition d’exonération n’est pas observée. C’est l’article 118 du Tarif des douanes qui trouve alors application. Je reproduis le paragraphe 1 de cet article :

  118. (1) Si, en cas d’exonération ou de remise accordée en application de la présente loi, sauf l’article 92, ou de remise accordée en application de l’article 23 de la Loi sur la gestion des finances publiques, une condition de l’exonération ou de la remise n’est pas observée, la personne défaillante est tenue, dans les quatre-vingt-dix jours ou dans le délai réglementaire suivant le moment de l’inobservation, de :

 

a) déclarer celle-ci à un agent d’un bureau de douane;

 

b) payer à Sa Majesté du chef du Canada les droits faisant l’objet de l’exonération ou de la remise, sauf si elle peut produire avec sa déclaration les justificatifs, que le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile juge convaincants, pour établir un des faits suivants :

 

(i) au moment de l’inobservation de la condition, un drawback ou un remboursement aurait été accordé si les droits avaient été payés,

(ii) les marchandises sont admissibles à un autre titre à l’exonération ou à la remise prévue par la présente loi ou à la remise prévue par la Loi sur la gestion des finances publiques.

 

  118. (1) If relief from, or remission of, duties is granted under this Act, other than under section 92, or if remission of duties is granted under section 23 of the Financial Administration Act and a condition to which the relief or remission is subject is not complied with, the person who did not comply with the condition shall, within 90 days or such other period as may be prescribed after the day of the failure to comply,

 

(a) report the failure to comply to an officer at a customs office; and

 

(b) pay to Her Majesty in right of Canada an amount equal to the amount of the duties in respect of which the relief or remission was granted, unless that person can provide evidence satisfactory to the Minister of Public Safety and Emergency Preparedness that

 

(i) at the time of the failure to comply with the condition, a refund or drawback would otherwise have been granted if duties had been paid, or

(ii) the goods in respect of which the relief or remission was granted qualify in some other manner for relief or remission under this Act or the Financial Administration Act.

 

 

[24]           La demanderesse a tenté d’établir que l’article 118 confère une discrétion qui aurait été mal exercée. S’il est vrai qu’une certaine discrétion existe à l’article 118, elle ne se situe pas où la demanderesse voudrait la voir. Ainsi, la demanderesse collait les bouts de phrase « le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile juge convaincants » et « les marchandises sont admissibles à un autre titre à l’exonération . . . ou à la remise prévue par la Loi sur la gestion des finances publiques » pour argumenter que le ministre avait un large pouvoir discrétionnaire. Or, ce pouvoir discrétionnaire aurait dû être exercé en faveur de la demanderesse parce que le sens commun doit présider dans ce genre de décision et la demanderesse, quoique propriétaire du poulet, n’en a jamais eu le contrôle physique. Comment peut-on avoir à payer des taxes sur des marchandises qui ont disparu?

 

[25]           Cet argument procède à mon avis d’une mauvaise lecture de l’article 118. Cet article prévoit tout simplement que s’il y a exonération de taxes, ou remise de taxes ou pénalités selon l’article 23 de la Loi sur la gestion des finances publiques, mais qu’une condition de cette exonération/remise n’est pas remplie, il en découle que les droits sont dus. C’est la situation dans laquelle la demanderesse s’est retrouvée.

 

[26]           Ce même article 118 prévoit que la somme n’aura pas à être payée si les marchandises peuvent être exonérées par ailleurs ou profiter de la remise prévue par la Loi sur la gestion des finances publiques. Pour bénéficier de ces exceptions, c’est le fardeau de la demanderesse de « produire avec sa déclaration les justificatifs que le ministre . . . juge convaincants ». Or, rien de tel n’a été fait. La demanderesse n’a pas soumis que les marchandises sont admissibles à un autre titre à l’exonération sous le Tarif des douanes ou à la remise sous la Loi sur la gestion des finances publiques. Elle se réclame plutôt d’un argument selon lequel la loi ne saurait s’interpréter pour avoir un effet aussi draconien.

[27]           À mon avis, il s’agit peut-être d’un effet draconien, mais c’est bien l’objet de la loi. Essentiellement, la loi fait porter le risque à l’importateur. Ainsi, s’il n’y a aucun programme d’exonération, les droits sont dus dès l’importation. Celui qui importerait sans un tel programme d’exonération paierait les droits et si la cargaison était détruite, il n’aurait aucun recours contre la Couronne. Cette règle est consacrée au paragraphe 23(7) de la Loi sur la gestion des finances publiques, LRC (1985), ch F-11, dont le texte se lit :

  23. (7) Il n’est pas fait remise des taxes payées sur des marchandises du seul fait de leur perte ou de leur destruction après le paiement et après leur enlèvement sur dédouanement ou congé.

 

 

  23. (7) No tax paid to Her Majesty on any goods shall be remitted by reasons only that, after the payment of the tax and after release from the control of customs or excise officers, the goods were lost or destroyed.

 

 

[28]           Il me semble qu’il faut tirer du paragraphe 23(7) deux conclusions : les taxes sur les marchandises sont dues et elles ne peuvent pas faire l’objet d’une remise s’il y a subséquemment perte ou destruction de la marchandise.

 

[29]           Il n’est pas surprenant que la situation soit symétrique lorsqu’il y a exonération. L’article 118 du Tarif des douanes prévoit que la taxe est due lorsqu’une condition n’est pas rencontrée. Ici, la condition d’exportation ne peut être remplie. Il en découle que la demanderesse aurait dû déclarer dans les 90 jours que la condition ne pouvait être remplie à cause du vol et faire le paiement à Sa Majesté du chef du Canada.

 

[30]           La demanderesse ne pouvait se prévaloir que de deux exceptions dont elle aurait dû faire une preuve convaincante au ministre. Dans le cas d’une admissibilité à un autre titre (en anglais « in some other manner ») à une exonération, aucune telle allégation n’a été faite, encore moins un justificatif convaincant a-t-il été soumis. Dans le cas d’une remise prévue par la Loi sur la gestion des finances publiques, le paragraphe 23(7) de cette loi est un obstacle formidable. Non seulement aucune demande de remise n’a été faite en vertu du paragraphe 23(2), mais la remise semble interdite par le paragraphe 23(7).

 

[31]            À mon avis, la tentative sous l’article 118 est vouée à l’échec. Le ministre ne peut trouver un justificatif convaincant là où aucun n’est offert. Ce fut le cas en l’espèce et la mesure de discrétion qui peut être trouvée dans les mots « justificatifs convaincants » ne pouvait être exercée puisque aucun justificatif n’a été offert. Qui plus est, la remise sous la Loi sur la gestion des finances publiques n’était pas une avenue carrossable à cause de l’obstacle dirimant que constitue le paragraphe 23(7) en notre espèce.

 

[32]           Il en résulte que les demandes de contrôle judiciaire dans les dossiers T-1807-12 et T-1808-12 doivent être rejetées avec dépens. Les parties ont convenu que des dépens à hauteur de 1 750 $ seraient appropriés. Je ne vois aucune raison dans l’exercice de la discrétion conférée par la Règle 400 des Règles des Cours fédérales de me dissocier de cette recommandation qui valait quelle que soit l’issue de la cause. Donc, des dépens au montant total pour les deux dossiers de 1 750 $ sont ordonnés contre la demanderesse.

 

 


 

JUGEMENT

 

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire de la décision de l’Agence des services frontaliers du Canada rendue le 18 juin 2012 est rejetée. Des dépens pour un seul montant total de mille sept cent cinquante dollars (1 750 $), tous débours inclus, dans les dossiers T-1807-12 et T-1808-12 sont ordonnés contre la demanderesse.

 

 

 

« Yvan Roy »

Juge

 

 

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 


 

DOSSIER :

T-1807-12

 

INTITULÉ :

GESTION J.F.-HOULE INC. et PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

                                                            Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

                                                            LE 15 JANVIER 2014

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT :

                                                            LE JUGE ROY

DATE DES MOTIFS :

                                                            LE 6 FÉVRIER 2014

COMPARUTIONS :

Me Pascal A. Pelletier

 

Me Jacques Mimar

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Pour le défendeur

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Me Pascal A. Pelletier

Candiac (Québec)

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

 

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

 

Pour le défendeur

 

 

 

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