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Date : 20140120


Dossier : IMM‑3208‑12

 

Référence : 2014 CF 53

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

 

Ottawa (Ontario), le 20 janvier 2014

En présence de madame la juge Simpson

 

 

ENTRE :

HAIBIN WU

 

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET

DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision par laquelle un agent des visas a rejeté la demande de résidence permanente du demandeur à titre d’époux de Yan Qin Jiang (sa deuxième épouse). L’agent a rendu sa décision le 1er mars 2012 (la décision), et il a reçu le demandeur et sa deuxième épouse en entrevue en février 2012 (l’entrevue).

 

[2]               La première question en litige est celle du caractère raisonnable de la conclusion de l’agent selon laquelle le mariage du demandeur avec sa deuxième épouse a été contracté principalement à des fins d’immigration. L’affaire est inhabituelle, car l’agent a rendu une décision défavorable en dépit du fait que le demandeur avait eu un enfant avec sa deuxième épouse et que cette dernière était de nouveau enceinte au moment de l’entrevue.

 

[3]               Il est établi que :

i.          le demandeur et sa deuxième épouse exploitent ensemble une entreprise depuis 2009;

ii.         le mariage du demandeur et de sa deuxième épouse a été contracté au Canada en mai 2011;

iii.        le demandeur et sa deuxième épouse ont commencé à vivre ensemble en décembre 2009 et leur premier enfant est né en avril 2011.

 

[4]               Malgré ces éléments de preuve, l’agent a rejeté la demande. Le demandeur affirme que la décision de l’agent doit être annulée pour les raisons suivantes :

i.          les conclusions quant à la crédibilité étaient déraisonnables;

ii.         il y a eu un problème avec l’interprétation;

iii.        l’intérêt supérieur des enfants n’a pas été considéré.

 

Question 1 :   Crédibilité

[5]               Dans le cadre d’une entrevue antérieure, le demandeur – dont la demande d’asile a été refusée – a menti lorsque l’agent lui a demandé à quel moment sa relation avec sa première épouse avait pris fin. Lorsque le demandeur a été reçu en entrevue en mai 2010 au sujet de la demande de parrainage de sa première épouse, il a dit à l’agent que leur mariage était authentique alors qu’en réalité, au moment de l’entrevue, il avait demandé le divorce et habitait avec sa deuxième épouse depuis cinq mois. À l’audience, le conseil du demandeur a reconnu les faits, ci‑après désignés comme le « mensonge ».

 

[6]               La preuve comportait également des incohérences. Le demandeur a d’abord dit qu’il avait demandé sa deuxième épouse en mariage après la naissance de leur premier enfant, mais il a plus tard affirmé qu’il n’était pas certain. En revanche, la deuxième épouse a dit qu’il l’avait demandée en mariage à deux reprises, et ce, avant la naissance du bébé.

 

[7]               Il semble que la sœur aînée du demandeur habite avec le demandeur et sa deuxième épouse. Toutefois, selon le demandeur, même s’il a tenté de convaincre sa sœur de vivre au sous‑sol de leur maison, celle‑ci a insisté pour vivre avec eux à l’étage. En revanche, la deuxième épouse du demandeur a affirmé que sa belle‑sœur habitait le sous‑sol, et elle a fourni un dessin montrant que sa belle‑sœur dormait dans la chambre adjacente à celle qu’elle occupait avec le demandeur. Cette incohérence donne à penser que le demandeur et sa deuxième épouse n’habitent pas ensemble.

 

[8]               Vu ces incohérences inexpliquées, et vu que le demandeur n’hésite pas à mentir à propos d’éléments fondamentaux pour pouvoir demeurer au Canada, je ne peux pas conclure que la décision de l’agent était déraisonnable.

 

Question 2 : Interprète

[9]               Le demandeur a choisi un interprète qui parlait mandarin, et il a indiqué au dossier qu’il avait compris la traduction. À aucun moment le demandeur ne s’est plaint de l’interprétation. Il a simplement affirmé qu’il était confus et qu’on l’avait mal compris vers la fin de l’entrevue. À mon avis, la situation n’a rien à voir avec l’interprète; le demandeur ne voulait tout simplement pas répondre aux questions concernant sa première épouse en raison du mensonge dont il a été question précédemment.

 

Question 3 : Intérêt supérieur des enfants

[10]           Le demandeur n’a pas invoqué de considérations humanitaires dans la demande de parrainage même s’il est visé par une mesure de renvoi. Autrement dit, rien ne porte à croire que les enfants ou leur mère éprouvent des difficultés. Néanmoins, le demandeur soutient que l’agent avait le devoir de prendre en considération l’intérêt supérieur des enfants et de chercher à savoir comment les choses se passeraient pour eux si leur père était renvoyé du pays.

 

[11]           Le demandeur affirme que l’agent en avait le devoir en vertu de la section 5.27 du guide IP 5 et qu’il aurait dû traiter l’affaire comme si une dispense pour motif d’ordre humanitaire avait été demandée. La section 5.27 est ainsi rédigée :

 

5.27.    Interdictions de territoire pour lesquelles aucune dispense n’a été demandée

 

Voir également la section 5.25, Demandeurs interdits de territoire.

 

Pendant l’évaluation de l’étape 1 ou 2, une interdiction de territoire connue ou soupçonnée peut être mise au jour, c’est‑à‑dire une interdiction de territoire pour laquelle aucune dispense n’a été demandée.

Cela peut se produire durant l’examen de l’historique du client dans le SSOBL ou au vu des renseignements fournis par le demandeur (par exemple, sur l’IMM 5001) qui laissent supposer que le demandeur ou un membre de sa famille est interdit de territoire. Dans ce cas, l’agent peut :

 

                     refuser la demande parce qu’il existe une interdiction de territoire;

                     de sa propre initiative, décider s’il convient d’accorder une dispense pour motif d’ordre humanitaire.

 

Si l’étranger ne demande pas directement une dispense, mais que les faits dans la demande portent à croire qu’il demande la levée de l’interdiction de territoire, l’agent doit traiter la demande comme si une dispense avait été demandée.

 

Exemple :       il serait évident que le demandeur veut faire lever une interdiction de territoire bien qu’il ne le demande pas explicitement s’il a été déclaré coupable d’un crime et que, dans ses observations, il explique pourquoi cette interdiction de territoire devrait être levée (il a purgé sa peine, a été réadapté, a fait du travail communautaire, occupe un emploi à temps plein, etc.). Il incombe toujours au demandeur d’établir le bien‑fondé de la demande, et c’est le demandeur qui « a le fardeau de prouver toute allégation sur laquelle il fonde sa demande » (Owusu c. MCI, 2004 CAF 38).

 

 

 

[12]           À mon avis, cette section ne s’applique pas, car il n’y avait pas d’interdiction de territoire en cause et rien ne laissait donc croire que le demandeur pouvait demander une dispense pour motif d’ordre humanitaire. Par conséquent, en l’espèce, l’agent était uniquement tenu d’évaluer le mariage conformément au paragraphe 4(1) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002‑227.

 

Certification

[13]           Aucune question à certifier n’a été proposée.

 


ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit rejetée.

 

 

« Sandra J. Simpson »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Stéphanie Champagne


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 


DoSSIER :

                                                            IMM‑3208‑12

 

INTITULÉ :

HAIBIN WU c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

                                                            Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

                                                            LE 17 DÉCEMBRE 2013

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE :

                                                            LA JUGE SIMPSON

DATE DES MOTIFS :

                                                            LE 20 JANVIER 2014

COMPARUTIONS :

Raj Napal

 

POUR LE DEMANDEUR

 

lldiko Erdei

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Raj Napal

Avocat

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

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