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Date : 20131118

Dossier : IMM-2035-13

Intitulé : 2013 CF 1169

Traduction française certifiée, non révisée

Ottawa (Ontario), le 18 novembre 2013

En présence de monsieur le juge Zinn

ENTRE :

 

FAHMEEDA NOREEN

 

 

 

demanderesse

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE CITOYENNETÉ

ET IMMIGRATION CANADA

 

 

 

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Mme Fahmeeda Noreen est une citoyenne du Pakistan. Un agent des visas a rejeté la demande de résidence permanente qu’avait présentée Mme Noreen dans le cadre du Programme Candidats immigrants pour la Saskatchewan [PCIS] en dépit du fait qu’elle avait obtenu un certificat de désignation de la province. L’agent a exercé le pouvoir de discrétion que lui conférait le paragraphe 87(3) du Règlement sur l’Immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002‑227, et a rejeté la demande parce qu’il n’était pas convaincu que Mme Noreen avait la capacité de réussir son établissement économique au Canada.

 

[2]               Un agent des visas a examiné le dossier le 8 août 2012 et, bien que la candidature de Mme Noreen eût été retenue par la Saskatchewan, l’agent n’était pas convaincu que la demanderesse avait la capacité de réussir son établissement économique au Canada, comme le laissait supposer la désignation. Cette décision était fondée sur le fait que Mme Noreen n’avait pas obtenu les scores requis à l’examen de l’IELTS [Système international de tests de la langue anglaise] pour être en mesure de travailler comme enseignante, même si ses résultats à IELTS étaient supérieurs à la note minimale requise par Citoyenneté et Immigration Canada [CIC] et le PCIS.  Dans les notes versées au STIDI, l’agent a fait observer ceci :

[traduction]

Compte tenu du niveau de connaissance de l’anglais dont vous avez fait montre, je ne suis pas convaincu que vous serez capable d’exécuter les tâches de l’emploi que vous envisagez [enseignante à la maternelle ou à l’élémentaire] ni que vous serez capable d’obtenir un emploi au Canada ou, si vous trouvez un emploi, que ce niveau de connaissance suffira pour vous permettre de réussir à vous établir économiquement au Canada.

 

[3]               En octobre 2012, pour répondre aux préoccupations de l’agent, Mme Noreen lui a fait parvenir ses résultats à l’IELTS à jour et légèrement supérieurs et expliqué comment elle entendait réussir son établissement économique au Canada. Quant à la façon dont elle allait s’établir économiquement en Saskatchewan, sa réponse décrivait six étapes.

 

[4]               Premièrement, elle comptait immigrer avec son époux qui, selon elle, n’aurait aucune difficulté à trouver du travail comme gardien de sécurité. Deuxièmement, comme son époux allait travailler à temps plein et subvenir aux besoins de la famille, elle allait pouvoir [traduction] « travailler davantage » à améliorer ses connaissances de la langue anglaise en suivant des cours à l’Université de la Saskatchewan et [traduction] «  « en prenant un emploi à temps partiel pour contribuer au revenu familial en vue devenir financièrement indépendante ». Troisièmement, bien que sachant qu’elle devait acquérir de solides compétences en communication pour réaliser son objectif ultime de travailler dans le domaine de l’enseignement, elle était convaincue qu’en vivant au Canada et en suivant des cours à l’université, elle pourrait rapidement atteindre [traduction] « un bon niveau de compétence en anglais ».  Quatrièmement, elle était disposée, comme tous les immigrants à [traduction] « accepter divers petits boulots » et elle ne prévoyait pas avoir de la difficulté à communiquer étant donné son score global de 5 à l’IELTS.  Cinquièmement, même si elle entrevoyait des difficultés à obtenir son brevet d’enseignement de la Saskatchewan pendant qu’elle travaillait à temps partiel, elle a mentionné que ses réalisations à ce jour étaient un indicateur de son succès. Sixièmement, elle a signalé que la somme de 24 000 $ qu’elle avait mise de côté allait l’aider, ainsi que sa famille, à s’établir sur le plan économique.

 

[5]               Après examen de ces renseignements complémentaires, l’agent a inscrit ces notes dans le STIDI :

[traduction]

Bien que la demanderesse ait obtenu un meilleur score à son dernier examen de l’IELTS, sa compétence en anglais semble toujours inférieure à celle qu’il lui faudrait pour se qualifier comme enseignante en Saskatchewan. Bien que, d’après sa déclaration, la demanderesse semble sensibilisée aux difficultés qu’elle devra affronter dans son établissement, elle semble aussi croire qu’elle ne réussira pas à s’établir sur le plan économique tant que sa maîtrise de la langue anglaise ne se sera pas améliorée. Elle prétend que sa connaissance actuelle de l’anglais ne l’empêchera pas de faire de « petits boulots », mais elle ne mentionne pas avoir eu une quelconque offre d’emploi. Pour ces raisons, la demanderesse ne semble pas correspondre à la définition d’un candidat des provinces au sens de l’article 87 du Règlement. 

 

[6]               Dans ses observations écrites, Mme Noreen soulève trois questions : 1) La décision était‑elle déraisonnable du fait que l’agent a évalué sa demande sous l’angle d’un emploi particulier, 2) La conclusion que Mme Noreen ne serait pas capable de trouver un emploi était‑elle déraisonnable compte tenu de ce qu’elle avait obtenu des résultats supérieurs aux exigences linguistiques minimales établies par CIC et le PCIS, et 3) La décision était-elle déraisonnable du fait que l’agent n’a pas précisé le délai dans lequel elle devait s’établir sur le plan économique.

 

[7]               À mon avis, lorsqu’il doit déterminer si un demandeur réussira à s’établir sur le plan économique au Canada, un agent ne devrait pas au départ s’arrêter à la formation et au métier du demandeur. La réussite à s’établir économiquement est très probablement tributaire de la capacité du demandeur d’exercer ce métier au Canada ainsi que de la demande de ses compétences sur le marché du travail. Toutefois, je conviens avec la demanderesse que « la Cour n’a trouvé aucune disposition législative qui oblige quelqu’un à devenir autonome sur le plan économique dans la profession à laquelle il est admissible ou que cette personne entre sur le marché du travail et exerce une profession déterminée à son arrivée au Canada » (Rezaeiazar c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2013 CF 761, au paragraphe 82.  En conséquence, s’il ne peut conclure, après examen de la profession en question, que le demandeur réussira à s’établir économiquement, l’agent doit chercher des renseignements complémentaires.  Je suis convaincu à la lumière du passage précité, que c’est bien ce que l’agent a fait : il a pris en considération ce que la demanderesse a déclaré avoir l’intention de faire, à savoir de « petits boulots », et a conclu qu’elle ne réussirait quand même pas à s’établir sur le plan économique.

 

[8]               Selon moi, il n’était pas déraisonnable pour l’agent de conclure que l’intention de faire de petits boulots, probablement à temps partiel ou de manière occasionnelle puisque Mme Noreen comptait fréquenter l’université, ne peut constituer la preuve de sa capacité de s’établir sur le plan économique.  C’est d’ailleurs ce qui est énoncé de manière explicite dans le guide OP 7b, auquel se reportent les agents qui évaluent les demandes : « […] un emploi à temps partiel ou sur une base occasionnelle ne satisfera généralement pas à l’exigence de participation au marché du travail dans le sens prévu ici » (c’est nous qui soulignons). Le travail à temps partiel n’est pas considéré comme une participation au marché du travail parce que « la participation au marché du travail doit se faire d’une manière qui permet à la personne de subvenir pleinement à ses besoins, et pas seulement de contribuer à payer pour sa subsistance » (c’est nous qui soulignons). Il n’était pas déraisonnable de conclure que Mme Noreen n’aurait pas été capable de subvenir pleinement à ses besoins et à ceux de ses trois filles, même avec l’aide de son époux, si elle ne travaillait qu’à temps partiel ou de manière occasionnelle.

 

[9]               En outre, quoiqu’elle soit consciente des difficultés qu’elle devra surmonter pour obtenir son brevet d’enseignement en Saskatchewan, Mme Noreen ne donne aucune idée du temps que ce processus lui prendra. Elle voit la lumière au bout du tunnel, mais ne dit pas à l’agent combien de temps il lui faudra pour arriver à la fin du tunnel, si jamais elle y arrive!

 

[10]           Enfin, son score supérieur au score minimum à l’examen de l’IELTS est la seule raison, selon moi, pour laquelle sa candidature n’a pas immédiatement été éliminée; en soi, il n’est pas une  garantie qu’elle réussira à s’établir sur le plan économique, ni n’est un indicateur de la façon dont elle y réussira.

 

[11]           Pour ces motifs, je conclus que la décision de l’agent était transparente et qu’elle appartient aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit. La demande doit être rejetée.

 

[12]           Aucune question n’a été proposée aux fins de certification.


JUGEMENT

            LA COUR STATUE que la présente demande est rejetée et qu’aucune question n’est certifiée.

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Marie-Michèle Chidiac, trad. a.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-2035-13

 

 

INTITULÉ :                                      FAHMEEDA NOREEN c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              Saskatoon (Saskatchewan)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :             Le 7 novembre 2013

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                            Le juge ZINN

 

 

DATE :                                              Le 18 novembre 2013

 

 

COMPARUTIONS :

 

Christopher G. Veeman

 

 

              POUR LA DEMANDERESSE

Don Klaassen  

 

 

                  POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

CHRISTOPHER G. VEEMAN

Avocat

Saskatoon (Saskatchewan)

 

            POUR LA DEMANDERESSE

WILLIAM F. PENTNEY

Sous-procureur général du Canada

Saskatoon (Saskatchewan)

 

                 POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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