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Date : 20131112

Dossier : T‑291‑13

Référence : 2013 CF 1142

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 12 novembre 2013

En présence de madame la juge Kane

 

ENTRE :

CHUCK SUN LAU

 

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

[1]               En mars 2008, le demandeur, M. Lau, qui a la citoyenneté canadienne, a été déclaré coupable en Australie de deux infractions : possession d’une quantité commerciale d’héroïne et avoir sciemment participé à l’importation d’une quantité commerciale d’héroïne. Il purge présentement deux peines concurrentes de 25 ans d’emprisonnement.

 

[2]               Le 14 décembre 2012, le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile (le ministre) a rejeté la demande présentée par M. Lau en vue de purger le reste de sa peine au Canada en vertu de la Loi sur le transfèrement international des délinquants (LTID).

 

[3]               Le demandeur sollicite maintenant le contrôle judiciaire de la décision du ministre.

 

[4]               Pour les motifs exposés ci‑après, la demande est rejetée.

 

Contexte

[5]               En mars 1994, M. Lau s’est rendu en Chine, a rencontré M. Ho et a pris des dispositions pour livrer de l’héroïne en Australie en provenance de la Chine. En avril 1994, il s’est de nouveau rendu en Chine et a pris possession de 47 kilogrammes d’héroïne dont la valeur de revente était de 100 millions de dollars; accompagné de deux complices, il a confié l’héroïne à trois marins à qui il a versé de l’argent et donné la consigne de transporter la drogue en Australie. M. Lau s’est à nouveau rendu en Chine en juillet 1994 pour rencontrer M. Ho, qui lui a dit de se rendre en Australie pour aller chercher l’héroïne. Il est allé et a pris possession de l’héroïne le 10 septembre 1994. Le 12 septembre 1994, M. Lau a remis environ 27,5 kilogrammes d’héroïne à un informateur de police qui avait avisé les autorités australiennes de la transaction. Le 16 septembre 1994, les autorités ont arrêté un complice de M. Lau, trouvé en possession d’environ 9,4 kilogrammes d’héroïne. Le 17 septembre 1994, les autorités ont arrêté et détenu M. Lau en Australie.

 

[6]               Le 27 mars 1995, avec l’aide de son beau‑frère et d’un agent de police en Australie, M. Lau s’est évadé avant la tenue de son audience préliminaire et s’est enfui au Canada, où il est demeuré en liberté jusqu’à son arrestation par la GRC en juin 1997.

 

[7]               M. Lau a été détenu au Canada en attendant son extradition en Australie. Il a contesté son extradition pendant 10 ans et s’est finalement rendu aux autorités australiennes en mai 2007.

 

[8]               M. Lau a plaidé coupable; en mars 2008, le tribunal l’a déclaré coupable de deux infractions et l’a condamné à deux peines concurrentes de 25 ans d’emprisonnement. La date de début de la peine a été fixée de manière rétroactive, soit au 31 décembre 2001.

 

[9]               En octobre 2009, M. Lau a demandé un transfèrement au Canada pour y purger le reste de sa peine, conformément à la LTID.

 

[10]           D’après l’enquête communautaire du Service correctionnel du Canada (SCC), si le demandeur n’est pas transféré, il sera expulsé de l’Australie vers le Canada le 30 décembre 2017. Cette expulsion découlerait de l’administration de la peine australienne. À son retour, il ne serait assujetti à aucune supervision et il n’y aurait aucune trace au Canada de ses déclarations de culpabilité à l’étranger.

 

[11]           Toutefois, si M. Lau était transféré dans le cadre de la LTID, le SCC réaliserait des évaluations (y compris une évaluation des risques), élaborerait un plan correctionnel et déciderait s’il y a lieu de le maintenir en détention. Sa date de transfèrement deviendrait sa date d’admissibilité à la semi‑liberté et à la libération conditionnelle totale, et sa date de libération d’office serait le 25 octobre 2021.

 

La décision contestée

[12]           Le ministre a examiné la demande de transfèrement en vertu de la Loi, selon la version qui était en vigueur au moment où M. Lau a présenté sa demande. (Des modifications ont été apportées à la LTID depuis.)

 

[13]           Le ministre a refusé la demande parce que le transfèrement ne faciliterait pas l’administration de la justice, notamment pour ce qui est de la sécurité publique au Canada.

 

[14]           Le ministre a renvoyé à l’objet de la Loi; il a affirmé avoir examiné les faits et circonstances dans ce contexte et examiné les facteurs exposés à l’article 10. Le ministre a déclaré qu’il a examiné tout le dossier, y compris les observations du demandeur et la lettre de la sœur de ce dernier.

 

[15]           La décision reprend les faits exposés dans la décision du tribunal australien, qui ont été résumés ci‑dessus.

 

[16]           Pour ce qui est des facteurs défavorables, le ministre a renvoyé à la transcription du prononcé de la peine par le tribunal australien, dans laquelle on voit que le juge a signalé que M. Lau avait joué un rôle de premier plan dans un complot bien organisé d’importation et de distribution d’héroïne, que M. Lau était un important trafiquant de drogue à des fins de gain personnel et que [traduction] « quelqu’un tenait à votre liberté au point de prendre ces mesures », soit celles mises en place pour assurer l’évasion de M. Lau.

 

[17]           Le ministre a également signalé l’évasion du demandeur en 1995, son arrestation au Canada en 1997, la contestation de son extradition pendant 10 ans, l’évaluation du SCC dans laquelle il était écrit que M. Lau avait 10 complices et a fait état de la gravité de l’infraction, de la lourdeur de la peine imposée et du fait que M. Lau avait purgé 11 ans de la peine de 25 ans.

 

[18]           En ce qui a trait aux facteurs favorables, le ministre a renvoyé à la transcription du prononcé de la peine, qui indique que M. Lau avait collaboré avec les autorités à son retour en Australie, si bien que les trois marins avaient été identifiés et que M. Lau avait bénéficié d’une peine réduite pour sa coopération et son plaidoyer de culpabilité. Le ministre a également mentionné le rapport australien de transfèrement international, qui signale que M. Lau avait fait preuve d’une bonne conduite et s’était inscrit à des programmes.

 

[19]           De plus, le ministre a fait état de la documentation préparée par le SCC, y compris le résumé, qui indique que M. Lau n’a pas de casier judiciaire au Canada ou d’accusations en instance en Australie ainsi que de l’enquête communautaire, dans laquelle le SCC examine le soutien familial au retour de M. Lau et l’impact sur la famille de ce dernier, particulièrement sur ses parents âgés qui prennent soin de ses enfants, dont l’un est autiste. Toutefois, le ministre a fait observer que la famille de M. Lau savait peu de choses concernant son infraction.

 

[20]           Le ministre a reconnu que, d’après l’évaluation du SCC, les renseignements ne portent pas à croire que M. Lau commettrait de nouveau une infraction d’organisation criminelle; toutefois, le ministre a clairement affirmé qu’il était arrivé à une conclusion différente à la lumière des faits :

[traduction] M. Lau était impliqué dans une opération organisée et sophistiquée; d’après le juge qui a prononcé la peine, il a joué un « rôle de gestion crucial » dans la commission de graves infractions de trafic, « à des fins de gain personnel »; d’importantes quantités de drogues et d’importantes sommes d’argent étaient en jeu; et une dizaine d’autres personnes ont participé à l’infraction. J’ai également tenu compte de certains renseignements, exposés ci‑dessous, qui m’amènent à croire qu’il y a un risque important que M. Lau commette une infraction d’organisation criminelle après le transfèrement.

 

[21]           Les renseignements auxquels fait renvoi le ministre englobent les voyages de M. Lau en Chine, les directives qu’ils acceptaient de M. Ho, le rôle qu’il a joué en donnant des consignes aux complices ainsi que son rôle dans la livraison et la distribution de l’héroïne en Australie. Selon le ministre, ces faits l’ont mené à la conclusion que les activités de M. Lau s’inscrivaient dans une entreprise criminelle plus étendue à l’intérieur de laquelle des activités illégales étaient planifiées et exécutées pour en tirer un profit. Le ministre a également conclu, à la lumière des faits signalés ci‑dessus, que M. Lau avait joué un rôle de direction important et occupait un poste de confiance au sein de l’organisation.

 

[22]           Le ministre a ensuite écrit :

[traduction] À mon avis, le caractère organisé et sophistiqué de l’infraction, de même que le rôle de M. Lau dans la commission de l’infraction, jumelés au fait que ce dernier a été impliqué pendant plusieurs mois dans l’expédition de cette drogue ajoutent à la gravité du crime et créent un risque important que M. Lau s’adonne à des activités similaires s’il retourne au Canada. Ce facteur a trait à la sécurité publique de la population canadienne, dont je me soucie avant tout.

 

[23]           De l’avis du ministre, l’évasion de M. Lau et sa fuite au Canada en 1995 indiquaient que ce dernier ne respecte pas les lois de la société et a tenté de se soustraire à la justice, ce qui n’est pas propice à une réadaptation ou à une réintégration dans la communauté. Cela a également donné à penser au ministre que M. Lau demeurait lié aux éléments criminels qui avaient organisé son évasion. Le ministre s’est appuyé sur ces circonstances pour confirmer sa conclusion selon laquelle il y a un risque important que M. Lau commette une infraction d’organisation criminelle du même genre après son transfèrement.

 

[24]           Le ministre a résumé les facteurs favorables à un transfèrement, y compris la coopération au bout du compte de M. Lau avec les autorités australiennes, le résumé du SCC, ainsi que le rapport australien faisant état de sa bonne conduite en prison.

 

[25]           Le ministre a pris acte de la situation familiale de M. Lau et la séparation d’avec ses enfants qui a eu une incidence négative sur ces derniers; toutefois, il a fait observer, comme l’avait signalé le juge australien qui a prononcé la peine, que cette séparation était le résultat de ses propres actes. Le ministre a conclu que le risque pour la sécurité publique au Canada l’emportait sur les avantages du transfèrement pour M. Lau et sa famille.

 

[26]           Enfin, ayant soupesé les facteurs favorables à la lumière de la nature grave et organisée de l’infraction commise, de la lourdeur de la peine imposée et de sa conclusion qu’il y avait un risque important que M. Lau commette une infraction d’organisation criminelle s’il est transféré au Canada, le ministre a conclu que le transfèrement [traduction] « ne faciliterait pas l’administration de la justice, notamment la sécurité publique, au Canada ».

 

Questions en litige

[27]           Le demandeur soutient que la décision est déraisonnable parce que : le ministre ne fournit pas suffisamment de renseignements pour justifier son avis et a manqué à son devoir d’agir de manière équitable conformément à l’article 7 de la Charte; le ministre n’a pris en considération qu’une partie de la LTID; la preuve est insuffisante pour permettre au ministre de conclure que le demandeur « commettra » une nouvelle infraction; et la preuve démontrait que le demandeur n’était pas susceptible de récidiver.

 

[28]           De plus, selon le demandeur, la Cour devrait rendre une ordonnance contraignant le ministre à consentir à la demande de transfèrement étant donné que rien dans le dossier ne donne à croire qu’il existe un risque important que M. Lau commette une infraction d’organisation criminelle après son transfèrement et qu’il est peu probable que de nouveaux éléments de preuve de ce genre soient invoqués si le ministre réexaminait la demande. Autrement dit, le dossier demeurera le même et, si la décision est déraisonnable, la réparation appropriée est d’enjoindre au ministre de consentir au transfèrement.

 

Norme de contrôle

[29]           Dans l’arrêt LeBon c Canada (Procureur général), 2012 CAF 132, 433 NR 310 (LeBon), la Cour d’appel fédérale a confirmé que le contrôle judiciaire de la décision du ministre sur une demande de transfèrement en vertu de la LTID se fait selon la norme de la décision raisonnable, car cette décision « était tributaire des faits et était de nature discrétionnaire » (paragraphe 15).

 

[30]           Au paragraphe 18, la Cour a conclu que le caractère raisonnable d’une décision, dans ce contexte, a trait à la question de « savoir si les raisons avancées par le ministre pour justifier sa décision permettent à la juridiction de contrôle de comprendre pourquoi le ministre a pris cette décision et ensuite de déterminer si la conclusion du ministre appartient aux issues acceptables ».

 

[31]           Lorsqu’une décision est contrôlée selon la norme de la décision raisonnable, le rôle de la Cour est de se pencher sur l’existence d’une justification, la transparence et l’intelligibilité du processus décisionnel ainsi que sur l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit (Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, paragraphe 47, [2008] 1 RCS 190).

 

Dispositions pertinentes de la LTID

[32]           L’objet de la Loi est exposé à l’article 3 (il s’agit de la version en vigueur au moment de la présentation de la demande) :

3. La présente loi a pour objet de faciliter l’administration de la justice et la réadaptation et la réinsertion sociale des délinquants en permettant à ceux‑ci de purger leur peine dans le pays dont ils sont citoyens ou nationaux.

3. The purpose of this Act is to contribute to the administration of justice and the rehabilitation of offenders and their reintegration into the community by enabling offenders to serve their sentences in the country of which they are citizens or nationals.

 

 

[33]           L’article 10 présente les facteurs que le ministre doit prendre en considération pour décider s’il y a lieu d’approuver une demande de transfèrement. Voici la version en vigueur au moment de la présentation de la demande :

10. (1) Le ministre tient compte des facteurs ci‑après pour décider s’il consent au transfèrement du délinquant canadien :

 

a) le retour au Canada du délinquant peut constituer une menace pour la sécurité du Canada;

 

b) le délinquant a quitté le Canada ou est demeuré à l’étranger avec l’intention de ne plus considérer le Canada comme le lieu de sa résidence permanente;

 

c) le délinquant a des liens sociaux ou familiaux au Canada;

 

d) l’entité étrangère ou son système carcéral constitue une menace sérieuse pour la sécurité du délinquant ou ses droits de la personne.

 

(2) Il tient compte des facteurs ci‑après pour décider s’il consent au transfèrement du délinquant canadien ou étranger :

 

a) à son avis, le délinquant commettra, après son transfèrement, une infraction de terrorisme ou une infraction d’organisation criminelle, au sens de l’article 2 du Code criminel;

 

b) le délinquant a déjà été transféré en vertu de la présente loi ou de la Loi sur le transfèrement des délinquants, chapitre T‑15 des Lois révisées du Canada (1985).

[Je souligne.]

 

10. (1) In determining whether to consent to the transfer of a Canadian offender, the Minister shall consider the following factors:

 

(a)  whether the offender’s return to Canada would constitute a threat to the security of Canada;

 

(b)  whether the offender left or remained outside Canada with the intention of abandoning Canada as their place of permanent residence;

 

 

(c)  whether the offender has social or family ties in Canada; and

 

(d)  whether the foreign entity or its prison system presents a serious threat to the offender’s security or human rights.

 

 

(2)  In determining whether to consent to the transfer of a Canadian or foreign offender, the Minister shall consider the following factors:

 

(a)  whether, in the Minister’s opinion, the offender will, after the transfer, commit a terrorism offence or criminal organization offence within the meaning of section 2 of the Criminal Code; and

 

(b)  whether the offender was previously transferred under this Act or the Transfer of Offenders Act, chapter T‑15 of the Revised Statutes of Canada, 1985.

[Emphasis added]

 

 

La décision du ministre était‑elle raisonnable?

[34]           Le demandeur, M. Lau, soutient de manière générale que la décision n’est pas raisonnable et que les motifs ne révèlent pas si la décision est conforme aux obligations du ministre en vertu de la loi, car ce dernier a axé sa décision sur l’alinéa 10(2)a) de la LTID et les circonstances de l’infraction.

 

[35]           Dans ses observations écrites, le demandeur a aussi soutenu que l’omission de fournir suffisamment de renseignements pour justifier l’avis du ministre constituait un manquement au devoir d’agir équitablement prévu à l’article 7 de la Charte. Cet argument n’a pas été repris durant la plaidoirie.

 

[36]           En particulier, le demandeur soutient que la décision du ministre : était rétrospective et conjecturale, axée uniquement sur l’infraction à l’origine de la peine qui a été commise il y a 19 ans; ne tenait pas compte de sa bonne conduite en prison, des évaluations du risque favorables, ainsi que des programmes et de la surveillance du SCC et de la Commission des libérations conditionnelles s’il est transféré au Canada; n’explique ni pourquoi l’avis du SCC a été rejeté, ni de quelle façon la sécurité publique serait renforcée en refusant le transfèrement au lieu de permettre ce transfèrement pour que le SCC puisse surveiller sa mise en liberté en collaboration avec la Commission des libérations conditionnelles.

 

[37]           Le demandeur signale que s’il n’est pas transféré en vertu de la LTID, il sera expulsé et renvoyé au Canada en décembre 2017, sans conditions, restrictions ou supervision et sans casier judiciaire canadien.

 

[38]           Le demandeur soutient également que la preuve ne permet pas de conclure qu’il « commettra » une nouvelle infraction. Il soutient que l’utilisation du futur de l’indicatif à l’alinéa 10(2)a) de la LTID (« commettra ») exige une certaine certitude ou, à tout le moins, des motifs raisonnables et probables de croire qu’un délinquant commettra une infraction d’organisation criminelle.

 

[39]           Le demandeur fait valoir que l’évaluation du SCC, le rapport des autorités australiennes et d’autres éléments de preuve appuient une conclusion contraire à celle du ministre : le transfèrement permettrait d’atteindre les objectifs de la LTID. Par conséquent, la décision n’est pas raisonnable.

 

Les principes applicables

[40]           Il existe une jurisprudence importante portant sur le caractère raisonnable des décisions du ministre de refuser le transfèrement de délinquants en vertu de la LTID. Le demandeur et le défendeur ont tous les deux cité de nombreuses décisions de la Cour à l’appui de leurs positions respectives, dont bon nombre peuvent être écartées puisqu’elles reposent sur des faits différents; toutefois, les principes qui ont été établis ne sont pas contestés.

 

[41]           Tout d’abord, au paragraphe 19 de l’arrêt LeBon, la Cour d’appel fédérale a confirmé que les transfèrements en vertu de la Loi constituent un privilège pour les délinquants canadiens qui sont incarcérés à l’extérieur du Canada et qu’il n’existe pas de droit de revenir au Canada pour purger une peine.

 

[42]           Dans la décision Tangorra c Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2011 CF 1433, 401 FTR 246, le juge O’Reilly passe en revue les principes applicables, qui sont tirés de bon nombre des décisions et arrêts sur lesquels se fondent le demandeur et le défendeur dans la présente affaire. Voici certains des principes qui s’appliquent en l’espèce :

         le ministre doit tenir compte des facteurs énumérés aux paragraphes 10(1) et (2) et peut aussi tenir compte d’autres facteurs qui sont pertinents au regard des objets de la Loi (paragraphe 7);

         la loi oblige le ministre à donner des motifs écrits et la jurisprudence a établi que les motifs doivent exposer le fond de la décision et sa justification (paragraphe 20);

         le ministre peut ne pas souscrire à l’analyse du SCC, mais il doit expliquer pourquoi (paragraphe 22);

         lorsque le ministre s’appuie sur la preuve de prétendus liens avec le crime organisé, il doit conclure, aux termes de l’alinéa 10(2)a), que le demandeur commettra une infraction d’organisation criminelle (paragraphe 23);

         l’alinéa 10(2)a) et l’emploi du futur de l’indicatif (« commettra, après son transfèrement, […] une infraction d’organisation criminelle ») ne signifient pas qu’il faut qu’il soit certain que le demandeur sera impliqué dans une infraction d’organisation criminelle; toutefois, il doit y avoir une preuve qui amène le ministre à conclure raisonnablement que le demandeur, après son transfèrement, commettra une infraction d’organisation criminelle (paragraphe 25);

         la Cour doit faire preuve d’une grande retenue à l’égard de la décision du ministre, mais celle‑ci doit être raisonnable (paragraphe 21).

 

[43]           À ces principes, j’ajouterais la mise en garde de la juge Mactavish dans la décision Del Vecchio c Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2011 CF 1135, 398 FTR 75, à savoir que pour évaluer si le délinquant commettra une infraction d’organisation criminelle, il faut procéder à un examen véritable tant de l’appartenance antérieure du délinquant au crime organisé que de la persistance des liens de l’intéressé avec des organisations criminelles. Autrement dit, le ministre ne peut s’attarder exclusivement à la conduite passée du délinquant ou à l’infraction qui a mené à son incarcération à l’étranger.

 

[44]           Les plus récents éclaircissements proviennent de la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt LeBon. Dans cette affaire, le ministre a écarté l’avis du SCC et estimait que la probabilité que M. LeBon commette à nouveau une infraction d’organisation criminelle l’emportait sur les facteurs favorables au transfèrement. La Cour a conclu que les motifs du ministre étaient insuffisants et a signalé ce qui suit aux paragraphes 21 et 22 :

[21]      Les motifs invoqués par le ministre laissent toutefois sans réponse les deux questions suivantes :

 

i.          Sur quoi le ministre s’est‑il fondé pour écarter l’avis du SCC?

 

ii.         Comment le ministre s’y est‑il pris pour évaluer les facteurs pertinents de manière à conclure que les facteurs en question qui ne favorisaient pas le rapatriement de M. LeBon l’emportaient sur ceux qui militaient en faveur de son rapatriement au Canada?

 

[22]      Pour ce qui est de la première question, j’estime qu’il n’existe pas de critère absolu quant à la mesure dans laquelle le ministre doit expliquer son désaccord, le cas échéant, avec l’avis qu’il a reçu. Chaque cas est un cas d’espèce et est tributaire du dossier soumis au ministre. Dans certains cas, le dossier permet de comprendre facilement les raisons pour lesquelles le ministre était en désaccord avec l’avis qu’il avait reçu. En pareil cas, peu ou point d’explications sont requises. Ce n’est toutefois pas le cas en l’espèce.

 

[45]           Ensuite, la Cour affirme ce qui suit au paragraphe 25 :

Lorsque, comme en l’espèce, il existe des facteurs favorables à un transfèrement, le ministre doit démontrer qu’il a apprécié les divers facteurs qui s’opposent pour expliquer les raisons l’ayant amené à refuser de consentir au transfèrement. Sans cette appréciation, la décision du ministre n’est ni transparente ni intelligible. Elle ne satisfait pas non plus à l’obligation légale que l’article 11(2) impose au ministre de motiver sa décision.

 

La décision du ministre répond au critère de la décision raisonnable

[46]           Après avoir examiné les observations du demandeur et les principes tirés de la jurisprudence, la question à trancher est la suivante : la décision du ministre de refuser le transfèrement au motif qu’il est d’avis qu’il existe un risque important que M. Lau commette une infraction d’organisation criminelle s’il retourne au Canada est‑elle raisonnable, compte tenu de l’avis du SCC et d’autres éléments de preuve versés au dossier indiquant que M. Lau a une bonne conduite en prison et ne pose pas de risque de récidive.

 

[47]           Gardant à l’esprit qu’il n’y a pas de « critère absolu », j’ai cherché à savoir si les motifs expliquent pourquoi le ministre a écarté l’avis du SCC et comment le ministre a mené son évaluation ayant abouti à la conclusion que les facteurs favorables au rapatriement de M. Lau ont été supplantés par les facteurs défavorables. De plus, je me suis demandé si les motifs révèlent que, pour se faire une opinion sur la question de savoir si M. Lau commettra une infraction d’organisation criminelle après son transfèrement au Canada, le ministre a pris en considération l’appartenance antérieure de M. Lau au crime organisé et la persistance de tels liens avec des organisations criminelles, au lieu de tenir compte uniquement de l’infraction à l’origine de la peine.  

 

[48]           À mon avis, la décision du ministre démontre que ce dernier a fait un effort pour se conformer aux directives exposées dans la jurisprudence. La décision est soigneusement rédigée pour répondre aux critères de la Loi, démontrer une certaine appréciation des facteurs rivaux, expliquer pourquoi le ministre a écarté l’avis du SCC et lier l’infraction antérieure à la conduite subséquente de manière à justifier l’opinion du ministre selon laquelle M. Lau commettra une infraction d’organisation criminelle après le transfèrement. Toutefois, il ne suffit pas de se servir des bons mots et des bons renvois, il faut aussi que la décision ait une certaine substance.

 

[49]           Ainsi que l’a noté le juge Barnes dans la décision Goulet c Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2012 CF 65, 403 FTR 234, au paragraphe 12,

[u]ne décision qui ne contient rien de plus qu’une énumération de quelques faits pertinents et une simple conclusion n’est pas légalement défendable sous le régime de la Loi. […] En fait, il est impossible de dire à partir de ces motifs quels sont les facteurs qui ont amené le ministre à rejeter la demande […].

 

[50]           Dans la décision Goulet, le ministre n’a pas souscrit à l’évaluation du SCC et a énuméré les facteurs favorables et défavorables à la demande de transfèrement. Le ministre a signalé : les objets de la LTID; le crime, le nombre de complices, les grandes quantités de marijuana en cause (environ 45 kilogrammes) et le caractère complexe de l’opération; ainsi que le rôle du demandeur, qui était un « élément important de l’opération » ayant coordonné et organisé des voyages de drogues dans le passé. Le ministre a également reconnu les liens sociaux et familiaux du demandeur au Canada ainsi que ses problèmes de santé.

 

[51]           Au paragraphe 15, le juge Barnes a ajouté ce qui suit :

Il ne suffit pas de dire qu’on a pris en considération les facteurs prévus par la loi. Il faut évaluer d’une certaine façon les éléments de preuve afin que la Cour puisse décider si la conclusion ultime est raisonnable, c’est‑à‑dire si elle repose réellement sur les considérations légales applicables. Le fait d’accepter qu’une simple conclusion suffit mettrait la moindre décision à l’abri d’un véritable contrôle judiciaire et autoriserait à rendre des décisions administratives arbitraires ou abusives.

 

[52]           Dans la présente affaire, les motifs du ministre ne se limitent pas à énumérer les facteurs et à formuler une simple conclusion.

 

[53]           Le ministre a renvoyé aux facteurs de l’article 10 et à d’autres facteurs pertinents, et a fourni une certaine explication des motifs pour lesquels il pense que M. Lau commettra une infraction d’organisation criminelle s’il retourne au Canada et que les facteurs négatifs l’emportent sur les facteurs positifs, ce qui appuie son avis que la sécurité publique constitue la préoccupation première.

 

[54]           Le ministre a reconnu être arrivé à une conclusion différente de celle avancée dans l’enquête communautaire et le résumé du SCC, et il a exposé les motifs pour lesquels il a écarté cet avis. Les motifs du ministre me permettent de comprendre pourquoi le ministre a pris cette décision.

 

[55]           Étant donné la retenue dont il faut faire preuve à l’égard des décisions du ministre, dans la mesure où elles répondent au critère de la décision raisonnable, et le fait que le rôle de la Cour n’est pas de soupeser à nouveau les facteurs et de rendre la décision qu’elle préférerait rendre, j’arrive à la conclusion que la décision du ministre appartient aux issues possibles acceptables.

 

[56]           La LTID confère au ministre le pouvoir discrétionnaire de consentir à un transfèrement et guide l’exercice de ce pouvoir discrétionnaire en exposant des facteurs dont il faut tenir compte. Ainsi qu’il a été signalé, le ministre n’est pas tenu de se limiter à ces facteurs – il peut prendre en considération d’autres facteurs pertinents quant à l’objet de la Loi.

 

[57]           Le ministre a reconnu que l’objet de la LTID est de faciliter l’administration de la justice et a affirmé que cela incluait la sécurité publique ainsi que la réadaptation et la réintégration des délinquants.

 

[58]           Le ministre a examiné tous les facteurs pertinents exposés à l’article 10 de la LTID. En particulier, il a examiné les renseignements obtenus par le SCC selon lesquels : le retour du demandeur au Canada ne constituerait pas une menace pour la sécurité du Canada; le SCC a confirmé que le demandeur a des liens familiaux sur lesquels il peut compter; et, selon l’enquête du SCC, rien ne permet de conclure que le demandeur commettrait, après son transfèrement, une infraction de terrorisme ou une infraction d’organisation criminelle (alinéa 10(2)a) de la LTID). Toutefois, le ministre a signalé que le juge australien avait conclu que le demandeur avait joué un rôle de gestion crucial dans la commission du crime.

 

[59]           Le ministre a expliqué pourquoi il ne souscrivait pas à la conclusion du SCC selon laquelle le demandeur ne commettrait pas d’infraction d’organisation criminelle après son transfèrement. Il a signalé sur quelles bases reposait son opinion : premièrement, la gravité du crime et le rôle du demandeur dans sa commission; et, deuxièmement, la conduite subséquente du demandeur, notamment son évasion en Australie.

 

[60]           Les motifs du ministre indiquent qu’il se souciait avant tout de la sécurité publique. Selon les motifs, la nature et les circonstances de l’infraction à l’origine de la peine de M. Lau engendrent le risque important qu’il s’adonne à nouveau à de telles activités s’il revient au pays, ce qui à son tour met en jeu la sécurité publique. Je fais remarquer qu’avant les modifications apportées en 2012, la sécurité publique ne figurait pas parmi les facteurs exposés à l’article 10 ou dans l’objet de la LTID exposé à l’article 3. Toutefois, la sécurité publique est un facteur additionnel pertinent dont le ministre est en droit de tenir compte, et il semble y avoir accordé beaucoup d’importance.

 

[61]           Le ministre a également tenu compte d’autres facteurs, notamment : l’implication du demandeur dans une opération criminelle d’envergure qui était complexe et bien planifiée, qui couvrait trois continents et qui avait trait à une quantité importante de drogue; le [traduction] « rôle de gestion crucial » du demandeur et le poste de confiance qu’il occupait dans le cadre de l’opération; la lourdeur de la peine imposée; et son évasion au Canada avec l’aide d’un policier australien.

 

[62]           L’opinion du ministre a grandement été influencée par le caractère organisé et sophistiqué de l’infraction ainsi que le rôle du demandeur dans l’opération. Le ministre a tout particulièrement souligné l’observation faite par le juge australien lors du prononcé de la peine de M. Lau à propos de son évasion en 1994 : [traduction] « quelqu’un tenait à votre liberté au point de prendre ces mesures ».

 

[63]           Pour en venir à penser que M. Lau commettra une infraction d’organisation criminelle, le ministre s’est fondé sur le fait que M. Lau s’est évadé, soulignant qu’il n’avait pas respecté les lois, ce qui n’est pas propice à une réadaptation ou une réintégration dans la communauté.

 

[64]           Ainsi qu’il est souligné dans la décision Del Vecchio, il est impossible de prédire l’avenir avec certitude. Toutefois, il faut que les motifs du ministre démontrent qu’il a procédé à une analyse prospective et à un « examen véritable » de l’appartenance antérieure du délinquant au crime organisé et de la persistance de ses liens avec des organisations criminelles (au paragraphe 53).

 

[65]           Si l’on tenait uniquement compte de l’infraction à l’origine de la peine, il serait pratiquement impossible pour quiconque de réussir à revenir au Canada. Par contre, si un délinquant est incarcéré, les chances qu’il continue à avoir des contacts avec d’anciens acolytes sont minces et, espérons‑le, il n’a aucune chance de s’engager dans des activités liées au crime organisé à l’extérieur de la prison. Par conséquent, les circonstances de l’infraction à l’origine de la peine, et d’autres considérations, pourraient étayer l’opinion du ministre, comme c’est le cas ici.

 

[66]           Les renseignements fournis par le SCC et l’Australie n’ont pas révélé que M. Lau a maintenu quelque contact qui soit avec d’anciens acolytes.

 

[67]           Pour former son opinion, le ministre ne s’est pas appuyé uniquement sur l’infraction à l’origine de la peine, survenue en 1994. Il a établi des liens entre le comportement de M. Lau à la suite de l’infraction, notamment son évasion, avec l’aide d’autres personnes, et sa fuite au Canada ainsi que les circonstances de l’infraction très grave à l’origine de la peine, impliquant une importante quantité de drogue et énormément de planification dans trois pays, de même que le rôle important qu’a joué M. Lau.

 

[68]           Bien que l’évasion soit survenue en 1995, M. Lau est demeuré en liberté au Canada jusqu’en 1997 et il n’a commencé à collaborer avec les autorités australiennes qu’après s’être rendu en 2007. La décision du ministre renvoie à la conduite antérieure comme en étant une qui « amplifie » la conclusion selon laquelle il y a un risque important que M. Lau commette une infraction d’organisation criminelle dans l’avenir. Bien que le lien puisse sembler plutôt faible, il s’agit néanmoins d’une explication de la façon dont le ministre est parvenu à son opinion qui est fondée sur les éléments de preuve dont il disposait.

 

[69]           Le ministre a aussi pris en considération les facteurs suivants favorables à un transfèrement : la collaboration de M. Lau avec les autorités après son extradition en Australie, sa participation à un programme correctionnel en Australie et sa bonne conduite en prison; les défis face auxquels la famille de M. Lau s’est retrouvée en raison de la santé chancelante de ses parents âgés; l’incidence néfaste de sa séparation d’avec ses enfants, plus particulièrement à l’égard de son fils aîné qui est autiste.

 

[70]           Pour arriver à sa décision, le ministre a soupesé les facteurs favorables à un transfèrement par rapport au caractère grave de l’infraction, à la peine et à son opinion selon laquelle il y a un risque important que M. Lau commette une infraction d’organisation criminelle; il a conclu qu’un transfèrement ne faciliterait pas l’administration de la justice, notamment la sécurité publique au Canada.

 

[71]           Ainsi que l’a souligné le demandeur, le ministre n’a pas expressément pris acte du fait que si M. Lau n’est pas transféré aux termes de la LTID, il sera expulsé vers le Canada en 2017 et ne sera assujetti à aucune supervision. S’il était toutefois transféré, il continuerait de purger sa peine jusqu’en 2021 et s’il obtenait une libération conditionnelle, il demeurerait sous surveillance jusqu’à cette date.

 

[72]           Le ministre est présumé être au courant de ce fait, étant donné qu’il était précisé dans les documents qui lui ont été fournis par le SCC.

 

[73]           Bien qu’un transfèrement pourrait à long terme mieux servir les intérêts de M. Lau et de la sécurité publique au Canada, vu qu’il continuerait de purger sa peine jusqu’en 2021 et demeurerait incarcéré ou sous la surveillance du SCC, la Cour doit se demander si la décision du ministre refusant actuellement le transfèrement de M. Lau appartient aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit (Dunsmuir). Le rôle de la Cour n’est pas de substituer une décision par celle qu’elle préférerait.

 

Aucune ordonnance mandatoire

[74]           Comme j’ai conclu que la décision du ministre est raisonnable, il n’est pas nécessaire d’examiner l’observation du demandeur, fondée sur l’arrêt LeBon c Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2013 CAF 55, 444 NR 93, selon laquelle la Cour devrait ordonner au ministre d’approuver la demande de transfèrement du demandeur.

 

[75]           Ainsi que l’a confirmé la Cour d’appel fédérale, la Cour a la compétence voulue pour rendre une telle ordonnance, mais il s’agit d’une réparation exceptionnelle.

 

[76]           Voici en outre ce que la juge Mactavish a fait remarquer au paragraphe 78 de la décision Freeman c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2013 CF 1065, [2013] ACF no 1148 :

Selon l’alinéa 18.1(3)b) de la Loi sur les Cours fédérales, la Cour peut renvoyer une affaire à un décideur pour qu’il rende une décision conforme aux instructions qu’elle estime appropriées. Bien que les instructions données peuvent comprendre des instructions de la nature d’un verdict imposé, « il s’agit d’un pouvoir exceptionnel ne devant être exercé que dans les cas les plus clairs » : Rafuse c. Canada (Commission d’appel des pensions), [2002] A.C.F. no 91, au paragraphe 14, citant Xie c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), (1994), 75 F.T.R. 125, [1994] A.C.F. no 286, au paragraphe 18.

 

Conclusion

[77]           Comme on l’a vu, si on l’évalue selon les normes énoncées dans les arrêts Dunsmuir et LeBon, la décision du ministre est raisonnable. Les raisons données par le ministre pour justifier sa décision permettent à la Cour de comprendre pourquoi il a pris cette décision et de voir si la décision appartenait aux issues acceptables.

 

[78]           En consentant aux transfèrements ou en refusant des transfèrements, le ministre exerce un pouvoir discrétionnaire conformément à la LTID. Le ministre n’était pas lié par l’évaluation du SCC; il avait le droit de parvenir à une conclusion différente qui, suivant ses explications, reposait sur son évaluation et son appréciation des facteurs prévus par la loi et d’autres facteurs pertinents. Bien qu’il existait des éléments de preuve favorables au transfèrement de M. Lau au Canada, le ministre a exposé les éléments de preuve sur lesquels il s’est fondé pour arriver à une conclusion différente. Répétons que le rôle de la Cour ne consiste pas à soupeser à nouveau la preuve ou à rendre une nouvelle décision qu’elle pourrait préférer et qui serait aussi conforme à l’objet de la Loi. Je conclus que le ministre n’a commis aucune erreur lorsqu’il a examiné les facteurs pour former son opinion ni lorsqu’il a examiné les facteurs opposés ayant mené à sa conclusion que le transfèrement ne faciliterait pas l’administration de la justice au Canada.


JUGEMENT

 

LA COUR STATUE que :

 

1.      la demande de contrôle judiciaire est rejetée;

 

2.      aucuns dépens ne sont adjugés.

 

 

« Catherine M. Kane »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Sandra de Azevedo, LL.B.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                    T‑291‑13

 

INTITULÉ :                                                  CHUCK SUN LAU c
LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE
ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                          Vancouver (Colombie‑Britannique)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :                         Le 24 octobre 2013

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                        LA JUGE KANE

 

 

DATE DES MOTIFS :                                 Le 12 novembre 2013

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

John W. Conroy, c.r.

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Rod Holloway, c.r.

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Paul Singh

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Conroy & Company

Avocats

Abbotsford (Colombie‑Britannique)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Legal Services Society

Avocats

Vancouver (Colombie‑Britannique)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

Vancouver (Colombie‑Britannique)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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