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Date : 20130930


Dossier :

T-1785-11

 

Référence : 2013 CF 1000

Ottawa (Ontario), le 30 septembre 2013

En présence de monsieur le juge Harrington

 

 

ENTRE :

GRACE SIMELIN MADINGOU KISSIDI

 

partie demanderesse

et

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

partie défenderesse

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]               Monsieur Grace Madingou Kissidi sollicite le contrôle judiciaire d’une décision de l’Agence canadienne de développement international (ACDI), rendue le 17 octobre 2011, qui refuse de lui émettre une attestation qu’il a respecté l’Entente relative à un programme de formation au Canada conclue avec le gouvernement du Canada dans le cadre du Programme canadien de bourses de la Francophonie (PCBF) ainsi que le refus de l’ACDI de lui émettre une dérogation à cette entente.

[2]               Bien que ce dernier demande à la Cour d’émette une ordonnance enjoignant l’ACDI de lui octroyer une telle attestation ou dérogation, il réalise que dans ce contrôle judiciaire cette Cour ne peut qu’au mieux renvoyer l’affaire à un autre agent d’ADCI.

 

[3]               L’Entente fait partie du PCBF. Grâce à ce programme, l’ACDI octroie des bourses pour des études au Canada à des ressortissants de pays en voie de développement membres de la Francophonie. Le but de ce programme est de contribuer au développement durable des pays bénéficiaires par le biais de la formation des individus originaires de ce pays. Il est géré par une agence d’exécution, dont l’Association des universités et collèges du Canada.

 

LES FAITS

 

[4]               En mai 2005, monsieur Madingou Kissidi, originaire de la République démocratique du Congo, a été sélectionné comme boursier de l’ACDI pour entreprendre des études universitaires de premier cycle en génie électrique à l’Université de Moncton au Nouveau-Brunswick. Il a signé l’Entente.

 

[5]               Entre autres, il s’est engagé à quitter le Canada à la fin du programme et :

De même, je comprends que si je reviens au Canada en tant que résident permanent avant la fin d’une période équivalant au moins au double du temps séjourné au Canada pendant la durée du soutien financier, le remboursement au Gouvernement du Canada de la totalité des sommes versées peut être exigé.

 

[6]               Il a complété avec succès son programme de formation et a obtenu son diplôme de Baccalauréat en génie pour ensuite retourner dans son pays d’origine, la République démocratique du Congo, en avril 2010 où un emploi l’attendait.

 

[7]               Cependant, son employeur a donné son assentiment moral afin qu’il puisse retourner au Canada après un mois. Monsieur Madingu Kissidi est revenu avec son visa temporaire – un permis d’études temporaire valide jusqu’à la fin du mois de mai. Il a été accepté au Collège communautaire du Nouveau-Brunswick dans le champ d’étude – technologie de l’informatique, programmation et analyse, pour la session d’automne 2010. Il a présenté une demande de renouvèlement de son permis d’études.  En fait, ces permis sont octroyés par Citoyenneté et immigration Canada (CIC) qui évidement, dans ces circonstances, consulte l’ACDI. L’ACDI a conclu que M. Madingou Kissidi avait complété son cours, donc le permis d’études en question ne peut être renouvelé. Cependant, il était libre d’appliquer pour un nouveau permis d’études auprès de CIC, sans l’implication de l’ACDI ni du programme PCBF.

 

[8]               Suite aux lettres échangées entre M. Madingou Kissidi, son avocat et l’ACDI, cette dernière envoie une lettre adressée à M. Madingou Kissidi datée le 17 octobre 2011, à son avocat ainsi qu’à CIC. Cette lettre confirme qu’il a complété son programme de formation au terme du PCBF, et a obtenu son diplôme de baccalauréat en génie en mai 2010. Le point litigieux est comme suit :

Selon les informations contenues à notre dossier, votre client est retourné dans son pays et est revenu au Canada avec le permis d’études obtenu dans le cadre du PCBF, pour continuer d’autres études que celles du PCBF. Compte tenu de ces faits, nous considérons que les conditions relatives à la bourse de l’ACDI et au permis d’études délivré à cet effet n’ont été respectées. Ce faisant et conformément aux objectifs du PCBF, aucune dérogation à cette règle ne sera accordée. Cette décision confirme la position finale que vous avez précédemment transmise à l’ACDI.

Bien qu’une inexécution de contrat a été prise en considération, aucune démarche n’a été entreprise à cet effet.

 

LES QUESTIONS EN LITIGE

 

[9]               Selon le demandeur, sans aucune attestation qu’il a respecté les termes de l’Entente, CIC ne va pas lui fournir un nouveau permis d’études, bien que les études proposées n’ont aucun rapport avec l’ACDI et le PCBF. Il allègue qu’un étudiant de la Côte d’Ivoire a obtenu une telle attestation alors qu’il était dans ces mêmes circonstances - il a réussit à retourner au Canada. Rien dans l’Entente n’empêchait M. Madingou Kissidi de retourner au Canada, sauf en tant que résident permanent. Il est retourné avec la bénédiction de son employeur. Il a l’intention de retourner en République démocratique du Congo une fois qu’il termine son deuxième diplôme. M. Madingou Kissidi allègue que la décision est incorrecte et discriminatoire.

 

[10]           Le Procureur général du Canada, au nom de l’ACDI, soumet que la lettre d’octobre 2011 n’est pas en soi une décision qui est sujette à un contrôle judiciaire. Il n’y a pas d’obligation d’émettre une attestation. Il n’y a rien qui empêche le demandeur de faire une demande auprès de CIC afin d’obtenir un nouveau visa temporaire, soit un permis d’études. C’est à CIC, et non à l’ACDI, de décider s’il faut tenir compte du fait qu’il a quitté le Canada à la fin de ses études, qu’il est retourné ici puisque son permis était encore valide et qu’il a seulement travaillé pour une semaine ou deux en République démocratique du Congo. Je ne suis pas saisi de cette question.

 

[11]           De plus, l’ACDI interprétait et appliquait ces propres programmes.  À ce titre, il s’agit simplement d’une question d’organe décisionnel qui applique sa propre loi de sorte que la norme de contrôle applicable est celle de la raisonnabilité. (Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 RCS 190, et Smith c. Alliance Pipeline Ltd., 2011 CSC 7, [2011] 1 RCS 160).

 

[12]           Dans cette optique, la décision était raisonnable. Le but principal de ce programme est de contribuer au développement durable des pays bénéficiaires. Un retour pour quelques semaines est peu contribuable.

 

[13]           Le dossier est loin d’être complet en ce qui concerne l’étudiant de la Côte d’Ivoire. Même si j’accepte qu’il a obtenu une attestation, ceci peut aussi être une interprétation raisonnable du programme. Selon la norme de la décision raisonnable, il peut y avoir plus qu’une réponse raisonnable. Il n’y avait certainement pas de discrimination.

 

[14]           Je suis en accord avec la décision prise par le défendeur. Les préoccupations de M. Madingou Kissidi sont spéculatives et prématurées. Quoi qu’il en soit, la norme de contrôle applicable est celle de la raisonnabilité, et la décision est raisonnable.

 


ORDONNANCE

POUR CES MOTIFS;

LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire est rejetée, le tout avec dépens.

 

 

 

« Sean Harrington »

Juge

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 


DOSSIER :

T-1785-11

 

INTITULÉ :

MADINGOU KISSIDI c PGC

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

                                                            Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

                                                            LE 25 septembre 2013

 

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE :

                                                            LE JUGE HARRINGTON

DATE DES MOTIFS :

                                                            LE 30 septembre 2013

COMPARUTIONS :

Me Salif Sangaré

Pour la partie demanderesse

 

Me Sarah Gauthier

Pour la partie défenderesse

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Salif Sangaré

Avocat

Montréal (Québec)

 

Pour la partie demanderesse

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

 

Pour la partie défenderesse

 

 

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