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Date : 20130910

Dossier : IMM‑11329‑12

Référence : 2013 CF 942

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 10 septembre 2013

En présence de monsieur le juge Simon Noël

 

 

ENTRE :

 

MUKHAILO DUCHKO

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

           MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               La Cour est saisie d’une demande présentée en application du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, ch. 27 [LIPR], sollicitant le contrôle judiciaire d’une décision de la Section de la protection des réfugiés [SPR], datée du 13 août 2012, qui refuse au demandeur le statut de réfugié.

 

I.          Les faits

[2]               Le demandeur est un homme de 52 ans originaire de Sambor, en Ukraine. Il est venu au Canada une fois, en 1998, pour acheter de l’équipement de dentisterie et y a séjourné pendant une semaine.

 

[3]               Il craint les nationalistes ukrainiens qui l’ont battu en mai 2007 alors qu’il se rendait chez lui après le travail. À la suite de cet incident, il a été hospitalisé à Sambor pendant six jours.

 

[4]               De plus, la porte d’entrée de sa résidence a été vandalisée à la mi‑novembre et sa voiture a été volée en décembre 2007.

 

[5]               Il a quitté l’Ukraine le 19 novembre 2008, il est ensuite allé à Moscou acheter un faux passeport israélien, puis il s’est rendu au Canada.

 

II.        La décision faisant l’objet du contrôle

[6]               La SPR n’a pas cru au bien‑fondé de la crainte du demandeur et elle a relevé des problèmes de crédibilité dans son récit.

 

[7]               Premièrement, à l’audience, lorsque le commissaire a demandé au demandeur si les nationalistes ukrainiens qu’il craint ont un nom, il a répondu qu’il ne les connaissait pas. Comme, dans son récit, il fait référence à ce groupe comme étant [traduction] « l’Armée nationaliste ukrainienne », le commissaire a tiré de cette contradiction une conclusion défavorable quant à la crédibilité.

 

[8]               Deuxièmement, la SPR note que le demandeur s’est lui‑même contredit puisqu’il a expliqué lors de l’audience qu’il était venu auparavant au Canada, en 2000, alors qu’il a indiqué dans son formulaire des renseignements personnels [FRP] qu’il y était venu en août 1998 pour rendre visite à un cousin et acheter de l’équipement de dentisterie.

 

[9]               Le demandeur allègue qu’il est la cible des nationalistes parce qu’il est Juif. Il a de plus expliqué que son père était Ukrainien et que sa mère était Juive, qu’ils n’étaient pas très religieux, et que son ancienne épouse était Arménienne. La SPR a déterminé que le demandeur et sa famille n’étaient pas des Juifs pratiquants ou du moins susceptibles d’être perçus comme Juifs et que, par conséquent, ils n’étaient pas ciblés en raison de leur ethnicité juive.

 

[10]           La SPR a aussi constaté que le demandeur n’avait pas présenté d’éléments de preuve corroborant le fait qu’il avait été hospitalisé, absent du travail et interrogé par la police à l’hôpital, et qu’il n’avait pas de photographies des blessures qu’il affirme avoir subies lorsqu’il a été agressé par des nationalistes en mai 2007 à Turka après sa journée de travail. Qui plus est, le demandeur n’a fourni aucun élément de preuve que des graffitis antisémites avaient été faits sur la porte de sa maison en novembre 2007. Bien qu’elle ait reconnu que le témoignage d’un demandeur est présumé vrai selon l’enseignement de la décision Maldonado c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), (1979), 31 NR 34, 1 ACWS (2d) 167, la SPR a néanmoins déterminé que l’absence totale d’éléments de preuve documentaires jetait un doute suffisant sur la crédibilité du demandeur. La SPR a de plus estimé que, même s’il avait été démontré que le demandeur avait été attaqué, rien ne prouvait qu’il s’agissait d’une agression motivée par le racisme plutôt que d’une agression commise dans le but de perpétrer un vol, étant donné qu’il sortait d’une clinique dentaire où il travaillait. La SPR a aussi examiné la preuve documentaire indiquant qu’en 2011 les crimes haineux dirigés contre les minorités religieuses et ethniques non slaves, y compris la communauté juive, étaient en diminution constante. La SPR a donc conclu que les craintes du demandeur étaient mal fondées.

 

[11]           En ce qui a trait au véhicule volé au demandeur en décembre 2007, la SPR a conclu qu’il ne pouvait être établi, selon la prépondérance des probabilités, que l’incident était lié à son ethnicité juive, et qu’il pouvait tout aussi bien être attribuable à la criminalité, comme dans le cas susmentionné.

 

[12]           De plus, le demandeur a précisé qu’il n’y avait pas beaucoup de personnes juives qui travaillaient à Turka et que sa présence y était donc remarquée. Lorsqu’on lui a demandé pourquoi il ne travaillait pas à Sambor, où il résidait et où beaucoup de Juifs travaillaient, il a simplement indiqué que tel n’était pas le cas. Le demandeur a décidé de déménager dans les Carpates, ce qui aux yeux de la SPR était illogique puisqu’il lui était loisible de travailler à Sambor, où il résidait. Le demandeur a indiqué qu’il lui aurait été difficile, en tant que Juif, de s’enregistrer pour travailler à Sambor, ce qui a semblé non crédible à la SPR puisque le demandeur avait indiqué qu’un certain nombre de personnes juives y travaillaient. La SPR a donc conclu que le demandeur aurait pu travailler à Sambor, même si ce n’était pas dans son domaine de spécialité, et qu’il avait allégué avoir déménagé dans les Carpates uniquement pour embellir son récit.

 

[13]           Enfin, la SPR a constaté que les deux fils adultes du demandeur résidaient encore dans sa région natale de Sambor et n’éprouvaient aucun problème avec les nationalistes.

 

[14]           La SPR a relevé que le demandeur avait fourni une lettre émanant du centre communautaire juif, mais elle n’a pas estimé que cette lettre corroborait le risque auquel il disait être exposé s’il retournait en Ukraine.

 

III.       Les arguments du demandeur

[15]           Premièrement, le demandeur soutient qu’en tirant la conclusion selon laquelle il n’était pas vu comme un Juif en Ukraine, la SPR a ignoré les faits suivants : son accent et sa prononciation lorsqu’il s’exprimait en russe le rendaient facilement identifiable; les agresseurs étaient membres d’un groupe nationaliste paramilitaire antisémite; d’autres Juifs ont été harcelés et ont fait l’objet d’insultes racistes de la part de ce même groupe; le demandeur a été victime de vandalisme antisémite; le demandeur a commencé à pratiquer sa foi au Canada parce qu’il se sentait enfin libre de le faire pour la première fois de sa vie. Il était donc déraisonnable de conclure que le demandeur n’était pas ciblé en raison de son identité juive.

 

[16]           De plus, la SPR se devait de tenir compte du fait qu’il avait fourni des éléments de preuve démontrant qu’il pratiquait sa religion au Canada afin de bien évaluer son risque potentiel de persécution.

 

[17]           Le demandeur soutient qu’il était déraisonnable pour la SPR d’examiner les circonstances de l’agression qu’il a subie en 2007 à la lumière de la preuve documentaire portant sur l’année 2010, laquelle établit que le nombre de crimes haineux contre des personnes non slaves a diminué. Une régression des crimes motivés par la haine signifie que les taux étaient plus élevés dans les années précédentes, lorsque l’agression s’est effectivement produite. De plus, il est précisé dans le même rapport que le nombre de crimes haineux contre les minorités a augmenté au cours de 2008, et d’autres rapports que la SPR a consultés indiquent que les crimes haineux dirigés contre les Juifs étaient à des niveaux records au moment de l’agression et que le gouvernement ukrainien était incapable de protéger ses citoyens.

 

[18]           Le demandeur ajoute que la SPR a commis une erreur en indiquant qu’il avait été attaqué à sa sortie d’une clinique dentaire professionnelle puisqu’il était à Sambor, la ville où il réside, lorsque l’agression s’est produite. De plus, rien ne prouve qu’il a été victime d’un vol. Le demandeur soutient également qu’à l’audience la SPR a commis un manquement à l’équité procédurale en n’indiquant pas au demandeur qu’elle avait des raisons de croire qu’il ne s’agissait pas d’une agression à caractère haineux.

 

[19]           Deuxièmement, le commissaire a ignoré le fait que l’agression subie par le demandeur s’est produite à Sambor et il semble, d’après sa décision, qu’il ait cru qu’elle avait eu lieu à Turka. D’ailleurs, la SPR affirme dans sa décision que le demandeur aurait pu se trouver un emploi à Sambor alors qu’elle ne l’a jamais interrogé sur cette possibilité. Du reste, il serait illogique pour le demandeur de chercher un emploi dans la ville où il a été agressé. La SPR n’a pas non plus tenu compte du fait que c’est la porte de l’appartement du demandeur à Sambor qui a été vandalisée.

 

[20]           Le demandeur soutient en outre que, contrairement à ce qui est affirmé dans la décision, le commissaire ne lui a jamais demandé s’il avait cherché du travail à Sambor, mais plutôt s’il avait déménagé à Sambor, ce à quoi il a répondu par la négative, expliquant qu’il ne pouvait pas déménager à Sambor puisqu’il y résidait déjà. De plus, contrairement à ce qu’indique la SPR dans sa décision, le demandeur n’a jamais déclaré qu’il lui serait impossible de travailler à Sambor.

 

[21]           Troisièmement, le demandeur soutient que la SPR a tiré une conclusion déraisonnable lorsqu’elle a conclu qu’il ressortait de la réponse à une question qui lui a été posée pendant l’audience qu’il ne connaissait pas le nom du groupe d’hommes qui l’avait attaqué, ce qui ne concorde pas avec son FRP, dans lequel il a déclaré que le groupe d’hommes était l’Armée nationaliste ukrainienne. En fait, le commissaire ne lui a pas demandé s’il connaissait le nom du groupe; il voulait plutôt savoir les noms des agresseurs. Le commissaire était tenu de faire part au demandeur durant l’audience des préoccupations suscitées par les lacunes de son témoignage qui, à ses yeux, jetaient un doute sur sa crédibilité, ce qu’il n’a pas fait.

 

[22]           Quatrièmement, le demandeur fait valoir que la conclusion de la SPR, selon laquelle le demandeur manque de crédibilité parce qu’il a affirmé être venu au Canada auparavant en 2000 alors que, dans son FRP, il déclare être venu en 1998, est déraisonnable, puisque le demandeur a clairement expliqué à l’audience qu’il est venu au Canada dix ans avant son second voyage en 1998. D’ailleurs, le moment de la première visite du demandeur au Canada n’a aucun rapport avec la persécution qu’il a fuie en 2007‑2008.

 

[23]           Le demandeur soutient également que la conclusion de la SPR selon laquelle il n’a présenté aucune preuve à l’appui de l’agression subie en 2007 a été tirée sans égard à la preuve selon laquelle il avait été absent du travail en mai 2007. Qui plus est, la SPR n’a rien dit quant aux explications du demandeur sur les raisons pour lesquelles aucun dossier d’hôpital, aucune photographie des blessures et aucun rapport de police n’ont été déposés.

 

[24]           Le demandeur fait observer que la conclusion de la SPR selon laquelle ses fils n’étaient pas en danger à Sambor est erronée, parce qu’elle ne lui a pas demandé s’ils pouvaient être vus comme des Juifs.

 

[25]           Enfin, le demandeur soutient qu’il était inéquitable sur le plan de la procédure que la SPR tire une conclusion portant qu’il n’était pas perçu comme étant un Juif, et des conclusions sur la question de savoir si l’attaque de mai 2007 était motivée par sa religion ainsi que sur celle de l’identité des agresseurs, sans soulever ces questions en sa présence de manière à lui donner la possibilité d’y répondre.

 

IV.       Les arguments du défendeur

[26]           Le défendeur fait observer qu’il revient à la SPR de déterminer si un demandeur est crédible. Celle‑ci possède une expertise reconnue dans la détermination des questions de fait, en particulier dans l’évaluation de la crédibilité et de la crainte subjective de persécution d’un demandeur.

 

[27]           Le demandeur n’était pas en mesure de transmettre de l’information sur les personnes qui l’auraient persécuté, non plus que de démontrer que ses fils étaient en danger dans la région où il était persécuté.

 

[28]           D’ailleurs, le demandeur n’a fourni aucun élément de preuve confirmant l’unique attaque sur laquelle se fonde sa demande. Il n’existe ni dossier d’hôpital, ni document indiquant qu’il s’est absenté du travail, ni photographies des blessures qu’il aurait subies, ni preuve d’un interrogatoire par la police. Il est bien établi que la Cour peut tirer d’une absence d’éléments de preuve corroborants une conclusion défavorable quant à la crédibilité s’il existe une raison de douter d’une affirmation du demandeur, comme c’est le cas en l’espèce. De tels éléments de preuve étaient sans doute disponibles. Il n’y avait pas non plus d’éléments de preuve confirmant que des graffitis ont été faits sur la porte d’entrée de sa maison et que son véhicule avait été volé.

 

[29]           En ce qui a trait à l’affirmation selon laquelle le demandeur n’était pas identifiable en tant que Juif, le défendeur soutient qu’elle est bien étayée par le fait qu’un seul de ses parents était Juif, qu’ils n’étaient pas très religieux, et qu’ils ne fréquentaient pas une synagogue en Ukraine.

 

[30]           Sur la question de savoir si des motivations économiques ou religieuses étaient à l’origine de l’agression de mai 2007, il est permis de soutenir qu’il n’était pas déraisonnable de conclure en l’absence de preuve corroborante que l’agression pouvait ne pas avoir été perpétrée pour des raisons religieuses.

 

[31]           En ce qui concerne la preuve documentaire de 2010 et l’argument relatif à la diminution des crimes haineux, le défendeur fait observer que le rapport fait mention d’une baisse du nombre de crimes haineux, et que ce fait est pertinent dans l’évaluation du risque de persécution auquel le demandeur serait exposé à l’avenir.

 

[32]           En ce qui a trait au lieu de l’agression de 2007, le défendeur fait valoir que c’est le demandeur qui a fourni une preuve équivoque à ce sujet et que l’interprétation de la SPR est par conséquent raisonnable. Cela dit, l’avocat admet toutefois que la SPR a [traduction] « cru à tort » que le demandeur avait été agressé à Turka, son lieu d’emploi, alors qu’en réalité, cela s’était produit à Sambor. Pour le défendeur, il s’agit d’une erreur accidentelle commise en raison du témoignage imprécis du demandeur.

[33]           En réplique à l’argument du demandeur, fondé sur le fait que la SPR aurait posé des questions ambigües au demandeur (en cherchant à savoir quels étaient les noms des agresseurs plutôt que le nom du groupe), le défendeur fait valoir que bien que le demandeur ait eu le loisir de préciser le nom du groupe en question, en fin de compte, le témoignage livré à l’audience ne concorde pas avec sa déclaration écrite.

 

[34]           Le défendeur fait également observer qu’il était raisonnable pour la SPR de tirer une conclusion défavorable du témoignage du demandeur sur sa visite de 1998 au Canada (il a d’abord dit que c’était en 2000 avant de rectifier ses propos).

 

[35]           Enfin, sur la question de l’équité procédurale, le défendeur estime que les préoccupations de la SPR ont été communiquées comme il se devait au demandeur et que la SPR n’était pas tenue de faire part de toutes ses préoccupations au demandeur en vue d’obtenir ses commentaires.

 

V.        Les questions en litige

1.    La SPR a‑t‑elle commis une erreur en déterminant que la crainte du demandeur est mal fondée et qu’il n’est pas crédible?

 

2.         La SPR a‑t‑elle respecté l’équité procédurale en tirant certaines questions sans en informer le demandeur?

 

VI.       La norme de contrôle applicable

[36]           La conclusion de la SPR quant à la crédibilité du demandeur et la question de savoir si celui‑ci a démontré qu’il était persécuté en Ukraine doivent être appréciées selon la norme de la décision raisonnable (Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 RCS 190, au paragraphe 47). La Cour entend recourir à la norme de la décision correcte pour évaluer les arguments du demandeur mettant en cause l’équité procédurale (Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, [2009] 1 RCS 339, au paragraphe 43).

 

VII.     L’analyse

[37]           Étant donné que le présent contrôle judiciaire révèle que certaines conclusions tirées par la SPR sont fondées non seulement sur des faits erronés, mais aussi sur de fausses hypothèses, ces conclusions rendent la décision déraisonnable. Par conséquent, il n’y a pas lieu de se prononcer sur la question de l’équité procédurale.

 

[38]           La SPR est parvenue à la conclusion que, selon la prépondérance des probabilités, le demandeur n’était pas perçu comme étant un Juif. Cette conclusion est déterminante. C’est là le fondement même de la décision. Sans elle, toutes les conclusions qui ont été tirées auraient pu être différentes. La SPR a déterminé, sur la base de cette conclusion, que le demandeur n’avait pas été ciblé à cause de son ascendance juive.

 

[39]           Cette conclusion repose sur les raisons suivantes : seule la mère du demandeur est juive, la famille n’est pas [traduction] « très religieuse », comme l’a admis le demandeur, et il est marié à une femme arménienne. La SPR n’a ni mentionné ni commenté les renseignements donnés par le demandeur dans son FRP, à savoir qu’il était identifiable en tant que Juif en raison de son accent ou de sa prononciation quand il parlait russe.

 

[40]           Étant donné que la conclusion à ce sujet est un élément déterminant de la décision, la Cour considère qu’à tout le moins, la SPR aurait dû tenir compte du fait susmentionné avant de conclure. Son omission rend cette conclusion vitale déraisonnable.

 

[41]           De plus, le fait que la SPR a manifestement mal compris des faits importants et qu’elle ait en conséquence tiré une conclusion erronée est tout aussi important.

 

[42]           Bien que l’avocat du demandeur ait affirmé à l’audience que l’agression de mai 2007 s’était produite à Sambor alors qu’il revenait de Turka, son lieu de travail, la SPR a rédigé sa décision comme si l’incident avait eu lieu près du lieu de travail du demandeur dans un cabinet dentaire. Du fait de cette mauvaise compréhension, deux conclusions importantes ont été tirées sans aucun élément de preuve à l’appui.

 

[43]           Étant donné que la SPR a à tort situé le lieu de l’agression à proximité du lieu de travail du demandeur à Turka, une clinique dentaire professionnelle – ce qui offrait un « scénario sans doute attrayant pour des éléments criminels » –, elle a conclu que l’agression avait été motivée par des considérations économiques plutôt que religieuses. Cette conclusion erronée est d’une importance déterminante dans le processus décisionnel.

 

[44]           La SPR a tiré de cette même méprise concernant le lieu de l’agression de mai 2007 une autre inférence défavorable consistant à reprocher au demandeur de ne pas avoir cherché un emploi à Sambor. Si la SPR avait compris que Sambor était le lieu de l’agression, cette inférence défavorable n’aurait pu être tirée, ou elle aurait été traitée différemment.

 

[45]           Compte tenu des importantes lacunes que comporte la décision rendue par la SPR, il est tout simplement impossible de la qualifier de raisonnable.

 

[46]           Il est dans l’intérêt des parties que cette décision soit annulée afin qu’un nouveau commissaire se prononce sur toutes les questions pertinentes découlant de la demande.

 

[47]           Les parties se sont vu offrir la possibilité de présenter une question à certifier, mais aucune n’a été soumise.


JUGEMENT

 

PAR CONSÉQUENT, LA COUR ORDONNE ce qui suit :

1.                  La demande de contrôle judiciaire est accueillie.

2.                  La décision de la SPR datée du 17 octobre 2012 est annulée.

3.                  Un autre commissaire réexaminera les questions soulevées.

 

 

« Simon Noël »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Chantal DesRochers, LL.B., D.E.S.S. en trad.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                    IMM‑11329‑12

 

INTITULÉ :                                                  DUCHKO c
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                          Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                         Le 28 août 2013

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                        LE JUGE NOËL

 

DATE DU JUGEMENT :                           Le 10 septembre 2013

 

 

COMPARUTIONS :

 

Jared Will

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Nicole Rahaman

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Jared Will

Barrister & Solicitor

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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