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Date : 20130618

Dossier : IMM-8541-12

Référence : 2013 CF 673

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Toronto (Ontario), le 18 juin 2013

En présence de monsieur le juge O’Reilly

 

 

ENTRE :

 

MING XUAN

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

I.          Aperçu

 

[1]               Monsieur Ming Xuan a demandé l’asile au Canada au motif qu’il craint la persécution religieuse en Chine à titre de chrétien. Il affirme que le Bureau de la sécurité publique (le BSP) a effectué en Chine une descente à la maison‑église qu’il fréquentait et veut désormais l’arrêter.

 

[2]               Avant son audience devant la Commission de l’immigration et du statut de réfugié, M. Xuan a demandé au commissaire de se récuser parce que son taux d’acceptation de demandes d’asile en 2011 s’établissait à zéro. M. Xuan a soutenu que cet élément de preuve établissait une crainte raisonnable de partialité de la part du commissaire.

 

[3]               Le commissaire a rejeté la demande de M. Xuan en affirmant qu’on ne peut pas établir seulement au moyen de statistiques une crainte raisonnable de partialité. Il a ensuite examiné le bien-fondé de la demande d’asile de M. Xuan et a rejeté celle‑ci, concluant que M. Xuan n’avait pas établi son identité ni fourni d’éléments de preuve crédibles à l’appui de sa demande d’asile.

 

[4]               M. Xuan soutient que le commissaire l’a traité de façon injuste en rejetant sa requête en récusation. De plus, il soutient que les conclusions de la Commission concernant ses pièces d’identité et autres éléments de preuve sont déraisonnables. Il me demande d’annuler la décision de la Commission et d’ordonner une nouvelle audience devant un autre commissaire.

 

[5]               Je ne vois aucune raison pour infirmer la décision de la Commission et je dois, par conséquent, rejeter la présente demande de contrôle judiciaire. J’estime que la Commission n’a pas traité M. Xuan de manière injuste en rejetant sa requête en récusation; la Cour a confirmé qu’on ne peut pas établir au moyen de simples statistiques une crainte raisonnable de partialité. De plus, la conclusion de la Commission, selon laquelle M. Xuan n’a pas étayé sa demande d’asile au moyen d’éléments de preuve crédibles, n’était pas déraisonnable.

 

[6]               Il y a deux questions en litige :

 

1.         La Commission a‑t‑elle traité M. Xuan de manière injuste en rejetant sa requête en récusation?

2.         La Commission a‑t‑elle conclu de façon déraisonnable que la demande d’asile de M. Xuan n’était pas étayée par des éléments de preuve crédibles?

 

II.        La décision de la Commission

 

(1)        Requête en récusation

 

[7]               La Commission a cité la norme reconnue relativement à la crainte raisonnable de partialité énoncée dans Committee for Justice and Liberty c l’Office national de l’Énergie, [1978] 1 RCS 369. Elle a également renvoyé à des décisions de la Cour fédérale dans lesquelles les juges avaient conclu que les statistiques se rapportant aux taux d’acceptation des commissaires, en soi, n’établissent pas une crainte raisonnable de partialité : Hernandez Victoria c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 388; Zupko c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 1319.

 

[8]               Pour ces motifs, la Commission a conclu que M. Xuan avait invoqué des motifs insuffisants concernant sa requête. Elle a jugé qu’une personne raisonnable, bien renseignée, qui étudierait la question de façon réaliste et pratique ne croirait pas que la Commission ne rendrait pas une décision juste quant à la demande de M. Xuan.

 

(2)        Bien-fondé de la demande d’asile

 

[9]               La Commission a accepté que M. Xuan était un citoyen de la Chine. Cependant, les éléments de preuve relatifs à son identité personnelle n’étaient pas satisfaisants. La Commission a renvoyé aux problèmes suivants se rapportant aux éléments de preuve:

•           M. Xuan a affirmé qu’il n’avait jamais voyagé à l’extérieur de la Chine jusqu’à son arrivée au Canada. Il a plus tard affirmé qu’il avait déjà voyagé. Les autres voyages étaient inscrits dans son passeport et corroborés par divers visas.

 

•           Dans sa demande de visa au Canada, M. Xuan a affirmé qu’il était directeur général de l’hôpital Shenyang Huatai et qu’il avait été invité au Canada par un responsable d’un hôpital de Hamilton (Ontario). La Commission a constaté qu’une invitation avait bien été envoyée à un dénommé « Xuan Ming », mais le responsable à Hamilton ne connaissait pas personnellement M. Xuan.

 

•           Les autres documents d’identité fournis par M. Xuan lui auraient été remis par un ami, mais aucun élément de preuve n’a été produit quant à leur origine.

 

•           Un document soulignant les états de service de M. Xuan dans une usine comportait une erreur de quatre ans relativement à son âge. M. Xuan n’a pas pu expliquer l’erreur. Les états de service contredisaient aussi le témoignage de M. Xuan concernant ses lieux de travail à diverses époques.

 

•           Le hukou de M. Xuan contenait une page différente des autres. M. Xuan n’a pas pu fournir d’explications à cet égard. De plus, il n’a pas pu expliquer comment le BSP avait pu modifier son hukou à un moment où celui-ci était prétendument à sa recherche.

 

[10]           La Commission a conclu que la crédibilité de M. Xuan était minée au point où elle ne pouvait pas croire son affirmation selon laquelle il était en Chine un chrétien recherché par le BSP. Cette conclusion était renforcée par le témoignage incohérent de M. Xuan au sujet du moment où il s’est joint à une église clandestine.

 

[11]           La Commission a également pris en compte les éléments de preuve selon lesquels M. Xuan était un chrétien pratiquant au Canada. Cependant, elle a conclu que les éléments de preuve avaient été obtenus dans le but d’étayer une demande d’asile non fondée.

 

[12]           La Commission a conclu que M. Xuan n’avait pas qualité de réfugié au sens de la Convention ni celle de personne à protéger.

 

III.       Première question en litige – La Commission a‑t‑elle traité M. Xuan de façon injuste en rejetant sa requête en récusation?

 

[13]           M. Xuan a présenté à la Commission copie d’un rapport de la CBC décrivant une étude menée par le professeur Sean Rehaag de la faculté de droit Osgoode Hall au sujet des taux d’acceptation de commissaires de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié. Selon le rapport, le commissaire n’avait approuvé aucune des 127 demandes d’asile qu’il avait examinées en 2011. M. Xuan soutient que cet élément de preuve, en soi, établissait une crainte raisonnable de partialité de la part du commissaire.

 

[14]           Devant la cour, M. Xuan a cherché à produire d’autres éléments de preuve au sujet du taux d’acceptation du commissaire. Je n’ai pas à prendre en compte ces éléments de preuve parce qu’ils ajoutent peu à l’information dont disposait déjà la Commission au moment de l’audience.

 

[15]           À mon avis, la Commission a correctement conclu que, normalement, on ne peut pas établir uniquement avec des statistiques une crainte raisonnable de partialité. Cette affirmation a été récemment confirmée dans une décision du juge Russel Zinn, dans laquelle celui-ci cite de nombreux autres facteurs se rapportant à la question : Turoczi c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 1423, au paragraphe 15.

 

[16]           Par conséquent, je ne peux pas conclure que la Commission a commis une erreur en rejetant la requête en récusation de M. Xuan.

 

IV.       Deuxième question en litige – La Commission a‑t‑elle conclu de façon déraisonnable que la demande d’asile de M. Xuan n’était pas étayée par des éléments de preuve crédibles?

 

[17]           M. Xuan soutient que l’appréciation par la Commission de ses pièces d’identité et autres éléments de preuve était déraisonnable. Il soutient que la Commission a examiné ses éléments de preuve à la loupe et tiré des conclusions déraisonnables à leur égard. De plus, il affirme que la Commission n’a pris en compte le risque auquel il s’expose à titre de chrétien pratiquant s’il est renvoyé en Chine. À l’appui de cette affirmation, M. Xuan a produit une lettre de son pasteur au Canada ainsi qu’un certificat de baptême.

 

[18]           J’estime que la Commission a donné des motifs clairs pour refuser de croire le récit des événements vécus en Chine par M. Xuan et mettre en doute son identité personnelle. La seule question résiduelle consiste à savoir si la Commission a pris en compte, comme il se devait, la question de savoir s’il existait une possibilité raisonnable, malgré les problèmes associés à la demande d’asile de M. Xuan, que le demandeur risque la persécution religieuse en Chine.

 

[19]           D’après mon interprétation de la décision de la Commission, celle-ci doutait de toutes les affirmations de M. Xuan, y compris son assertion selon laquelle il est un chrétien authentique, en raison des problèmes associés aux autres éléments de preuve produits à l’appui de sa demande d’asile. La Commission a conclu que le demandeur a participé à des activités religieuses pour soutenir une demande d’asile sans fondement.

 

[20]           J’estime qu’il était loisible à la Commission de tirer cette conclusion à la lumière des éléments de preuve et, par conséquent, je ne peux pas conclure que la conclusion était déraisonnable. Rien n’empêchait la Commission de laisser ses conclusions exhaustives sur la crédibilité liées à l’identité de M. Xuan et aux événements qu’il a vécus en Chine influencer son appréciation de l’authenticité des convictions religieuses de M. Xuan au Canada : Jiang c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 1067, aux paragraphes 27 et 28.

V.        Conclusion et décision

 

[21]           La Commission a donné un motif valable pour rejeter la requête en récusation de M. Xuan. De plus, sa conclusion selon laquelle la demande d’asile de M. Xuan n’était pas étayée par des éléments de preuve dignes de foi n’était pas déraisonnable. Par conséquent, je dois rejeter la présente demande de contrôle judiciaire. Aucune partie n’a proposé de question de portée générale à certifier, et je n’en certifie aucune.


JUGEMENT

LA COUR STATUE que :

1.                  La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

2.                  Aucune question de portée générale n’est certifiée.

 

 

« James W. O’Reilly »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Line Niquet

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-8541-12

 

INTITULÉ :                                      MING XUAN            c MCI

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              TORONTO (ONTARIO)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :             LE 11 JUIN 2013

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                            LE JUGE O’REILLY

 

 

DATE DES MOTIFS

ET DU JUGEMENT :                     LE 18 JUIN 2013

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Lindsey Weppler

 

POUR LE DEMANDEUR

Angelina Marinos

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Blanshay & Lewis

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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