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Date : 20130709

Dossier : T-1227-12

Référence : 2013 CF 767

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 9 juillet 2013

En présence de madame la juge Tremblay-Lamer

 

 

ENTRE :

 

LA PREMIÈRE NATION DE TL’AZT’EN

 

 

 

demanderesse

 

et

 

 

 

VINCENT JOSEPH

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

           MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire de la décision, en date du 22 mai 2012, par laquelle un arbitre agissant en vertu du Code canadien du travail, LRC 1985, c L‑2 a jugé que le défendeur avait fait l’objet d’un congédiement injuste et lui a accordé des réparations pour des pertes liées à l’emploi ainsi que des dommages‑intérêts majorés et punitifs.

 

[2]               Dans son avis de demande, la demanderesse conteste seulement les dommages‑intérêts majorés et punitifs.

 

LES FAITS

[3]               Le défendeur a été au service de la demanderesse pendant plus de trente ans avant son congédiement. Au moment de son départ, il était directeur des services de santé de la demanderesse. Toutes ses activités faisaient l’objet d’une supervision soit par M. Gregg Drury, le directeur exécutif de la demanderesse, soit par le chef ou le conseil de la demanderesse.

 

[4]               Après que le défendeur ainsi que deux autres membres de la haute direction des services de santé eurent envoyé à M. Drury une lettre dans laquelle ils critiquaient son style de gestion, M. Drury a commencé à cibler le défendeur dans des accusations non étayées de fraude et de mauvaise gestion.

 

[5]               Les menaces et le harcèlement constants de M. Drury ont contribué à la dégradation de la santé du défendeur, qui s’est vu obligé de prendre un congé de maladie au cours duquel il a été soigné et suivi par son médecin. En tout temps, la demanderesse était au courant du fait que le défendeur était en congé de maladie.

 

[6]               Pendant que le défendeur était en congé de maladie, M. Drury a continué sa campagne malveillante d’intimidation. Par exemple, il a écrit des lettres au défendeur dans lesquelles il l’accusait d’insubordination, lui reprochant notamment ses visites chez le médecin et son calcul des congés de maladie, lequel reflétait son intention de tenter d’escroquer la demanderesse.

[7]               Lorsque le chef alors en fonction de la demanderesse a congédié M. Drury pour des irrégularités dans sa gestion et son administration des affaires de la demanderesse, M. Drury a fait une campagne politique contre le chef. Il a notamment présenté un mémoire au conseil de la demanderesse dans lequel il a fait des accusations mensongères à l’endroit du défendeur, qu’il a entre autres accusé :

i)                    d’avoir commis des actes répréhensibles de nature criminelle dans sa supervision des dépenses;

ii)                  d’insubordination envers [traduction] « l’autorité hiérarchique »;

iii)                d’avoir forcé un employé à enlever illégalement des dossiers de son bureau et à les brûler;

iv)                d’avoir fait chanter le chef;

v)                  d’avoir agressé sexuellement un autre membre du personnel.

 

[8]               Les accusations ont été largement diffusées dans la collectivité et dans toute la région. Elles ont détruit la réputation personnelle du défendeur dans la collectivité et sa réputation professionnelle au sein des organismes gouvernementaux.

 

[9]               Le défendeur a été congédié par la demanderesse, sans préavis et sans aucune indemnisation.

 

LA DÉCISION CONTESTÉE

[10]           Dans sa décision de quarante pages, l’arbitre a examiné les éléments de preuve dont il disposait et énoncé les conclusions suivantes :

-          les responsabilités du défendeur au sein des services de santé étaient de nature strictement opérationnelle; il n’avait pas de fonctions de gestion;

-          aucune des allégations faites par la demanderesse pour justifier le congédiement du défendeur, dont plusieurs étaient des [traduction] « allégations viles et graves de fraude, de tromperie et de mauvaise gestion », n’a été prouvée à l’audience, et le propre témoignage de la demanderesse confirme qu’elle savait depuis le début que toutes les allégations étaient complètement dénuées de fondement;

-          l’affirmation de la demanderesse selon laquelle le défendeur avait abandonné son emploi était complètement infondée;

-          il ressort clairement des faits réels que le directeur exécutif de la demanderesse a réservé au défendeur un traitement [traduction] « abusif et malveillant ».

 

[11]           L’arbitre a examiné la jurisprudence pertinente relative aux réparations, en particulier sur les dommages‑intérêts majorés, les dommages‑intérêts punitifs et les dépens avocat‑client, et a  évalué les dommages‑intérêts de la façon suivante :

[traduction]

95. Je suis d’avis qu’il convient, pour indemniser équitablement et raisonnablement M. Joseph pour son congédiement injuste et les conséquences directes que ce congédiement a eues pour lui, et pour sanctionner de façon exemplaire et appropriée l’intimée pour avoir délibérément traité M. Joseph de façon odieuse et malhonnête, d’évaluer équitablement les dommages‑intérêts comme suit :

 

a) pour les pertes liées à l’emploi, un montant d’indemnité de départ équivalant à 21 mois de rémunération, plus 20 % au titre des avantages sociaux (84 420 $ + 16 884 $), soit 101 304 $;

 

b) pour les préjudices indirects liés à ses perspectives d’emploi, à sa santé et son bien‑être physiques et mentaux, à son intégrité et à sa dignité, et à sa réputation personnelle et professionnelle, des dommages‑intérêts majorés d’un montant supplémentaire de 85 000 $;

 

c) pour la malhonnêteté et la mauvaise foi dont a fait preuve le responsable de la Première nation Tl’azt’en pour procéder à son congédiement, des dommages‑intérêts punitifs d’un montant supplémentaire de 100 000 $; plus

 

d) des intérêts sur le montant total des dommages‑intérêts, au taux ordonné par la Cour fédérale du Canada, pour la période comprise entre la date de son congédiement injuste et la date de la présente décision;

 

e) les frais juridiques de M. Joseph, sur la base avocat‑client.

 

LES QUESTIONS PRÉLIMINAIRES

i)          La demanderesse peutelle contester une conclusion de fait tirée par l’arbitre compte tenu des motifs limités qu’elle soulève dans son avis de demande?

 

[12]           Le défendeur s’oppose à la contestation de la conclusion de l’arbitre par la demanderesse, conclusion selon laquelle M. Drury agissait au nom de la demanderesse ou du chef et du Conseil, car elle n’a pas contesté les conclusions de fait dans son avis de demande. L’assertion de la demanderesse est par ailleurs en contradiction directe avec la preuve dont disposait l’arbitre.

 

[13]           Je suis d’accord avec le défendeur. L’alinéa 301e) des Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106, prévoit qu’un avis de demande doit contenir « un énoncé complet et concis des motifs invoqués, avec mention de toute disposition législative ou règle applicable ». Comme le juge Pinard l’a noté dans la décision Spidel c Canada (Procureur général), 2011 CF 601, au paragraphe 16, ce libellé est contraignant.

[14]           L’avis de demande de la demanderesse ne contient aucun motif en lien avec des erreurs de fait. Les seuls motifs soulevés dans l’avis de demande concernent l’octroi de dommages‑intérêts majorés et punitifs par l’arbitre. Par conséquent, les observations de la demanderesse concernant sa responsabilité à l’égard de la mauvaise foi dont avait fait preuve M. Drury n’ont pas été dûment présentées à la Cour.

 

ii)         La recevabilité des affidavits de Lorne Brown, Diana Martinson et Joshua Hallman

 

[15]           Le défendeur soutient que bien qu’elle ait reçu un avis préalable de plus d’un mois de son intention de demander des dommages‑intérêts punitifs complets, en sus de dommages‑intérêts pour diffamation, préjudice moral et perte de la réputation personnelle et professionnelle, la demanderesse n’a jamais présenté à l’arbitre des éléments de preuve sur sa capacité de payer des dommages‑intérêts punitifs. La demanderesse s’appuie maintenant sur les affidavits de Lorne Brown, Diana Martinson et Joshua Hallman pour présenter des éléments de preuve qui n’ont pas été soumis à l’arbitre et qui ne tombent pas sous le coup des exceptions restreintes que peut permettre la Cour pour la présentation d’éléments de preuve dont le tribunal n’était pas saisi. Le défendeur note que Lorne Brown et Diana Martinson n’étaient pas présents à l’audience et que, bien que Joshua Hallman ait été un témoin à l’audience initiale, son affidavit ne récapitule pas la preuve dont disposait l’arbitre.

 

[16]           Il est bien établi en droit qu’en règle générale, les affidavits présentés à la cour de révision dans le cadre d’une demande de contrôle judiciaire ne doivent pas dépasser le cadre du dossier dont disposait le tribunal (Bekker c Canada, 2004 CAF 186, au paragraphe 11; Société Canadian Tire Ltée c Canadian Bicycle Manufacturers Assn., 2006 CAF 56, au paragraphe 13 [Société Canadian Tire Ltée]). Autoriser, dans une procédure de contrôle judiciaire, le dépôt de pièces additionnelles dont ne disposait pas le décideur aurait pour effet de transformer cette procédure en un nouveau procès. Or, il ne s’agit pas de l’objet des contrôles judiciaires (Première nation d’Ochapowace (Bande indienne no 71) c Canada (Procureur général), 2007 CF 920, au paragraphe 10). Il y a quelques rares exceptions à la règle générale qui interdit à la Cour d’accueillir des éléments de preuve dont ne disposait pas le décideur : il peut s’agir d’éléments de preuve qui décrivent le contexte général de l’affaire, de vices de procédure qui ne figurent pas au dossier, ou alors d’une allégation d’absence complète de preuve devant le décideur à l’appui d’une conclusion particulière.

 

[17]           Je reconnais avec le défendeur que les trois affidavits sont irrecevables. Hormis les affirmations relatives aux titres de compétence de leur auteur, tous les renseignements contenus dans les affidavits de Lorne Brown, Diana Martinson et Joshua Hallman ont trait à la situation financière de la demanderesse, notamment ses ressources financières limitées, son obligation de fournir des services aux membres et sa capacité de payer des dommages‑intérêts au défendeur. L’arbitre ne disposait pas de ces éléments de preuve. Ceux‑ci ne relèvent pas non plus d’une quelconque exception à la règle générale selon laquelle on ne doit pas accepter de nouveaux éléments de preuve lors d’un contrôle judiciaire. Par conséquent, les affidavits de Lorne Brown, Diana Martinson et Joshua Hallman sont radiés du dossier.

 

iii)        La recevabilité du contreinterrogatoire du défendeur

[18]           Le défendeur s’est fermement opposé à ce que soit admis en preuve l’ensemble des questions posées lors de son contre‑interrogatoire et soutient maintenant que toute la transcription de 200 pages de son contre‑interrogatoire devrait être radiée du dossier. Le défendeur estime qu’une seule série de questions a été posée dans l’intention directe de reconstituer les faits de l’espèce présentés au tribunal initial, mais soutient que les questions continuent d’être irrecevables parce qu’elles sont non pertinentes et qu’elles ne permettent nullement à la Cour de trancher les questions dont elle est saisie. Voici cette série de questions :

[traduction]

Q         Vous avez informé M. Borowitz [l’arbitre] que vous aviez travaillé pendant 30 ans pour la bande, est‑ce exact?

 

R         Oui.

 

Q         Avez‑vous expliqué à M. Borowitz – puisque malheureusement il n’y a pas de transcription ou d’enregistrement de ce qui a été dit – avez‑vous expliqué à M. Borowitz à l’époque qu’il y avait une période de deux ans pendant laquelle vous n’étiez pas à l’emploi de la bande?

 

R         On ne me l’a pas demandé.

 

Q         Votre réponse est donc que vous n’avez pas –

 

R         On ne me l’a pas demandé.

 

Q         On vous a demandé pendant combien de temps vous aviez travaillé pour la bande. Est‑ce exact?

 

R         Il s’agissait encore d’un emploi à la bande parce que je recevais des fonds de la bande à titre de conseiller. Je gagnais des honoraires.

 

 

           

[19]           Je suis d’accord avec le défendeur. La durée de l’emploi du défendeur auprès de la demanderesse et la portion de ce temps que le défendeur a passée à titre d’entrepreneur ou de conseiller ne sont pas pertinentes quant aux questions dont la Cour est saisie, car la demanderesse n’a pas contesté l’octroi par l’arbitre des dommages‑intérêts liés à l’emploi. Seul l’octroi des dommages‑intérêts majorés et des dommages‑intérêts punitifs est contesté dans la présente instance. Puisque rien dans le contre‑interrogatoire ne portait sur le dossier dont disposait l’arbitre concernant les questions des dommages‑intérêts majorés et des dommages‑intérêts punitifs, la transcription du contre‑interrogatoire doit être radiée du dossier.

 

LES QUESTIONS EN LITIGE

[20]           La présente demande de contrôle judiciaire soulève les questions suivantes :

  1. La somme de 85 000 $ accordée par l’arbitre à titre de dommages‑intérêts majorés était‑elle raisonnable?
  2. La somme de 100 000 $ accordée par l’arbitre à titre de dommages‑intérêts punitifs était‑elle raisonnable?

 

[21]           Pour les raisons susmentionnées, les observations de la demanderesse concernant la responsabilité de celle‑ci pour la mauvaise foi dont avait fait preuve M. Drury n’ont pas été régulièrement présentées à la Cour. Par conséquent, cette question ne sera pas examinée. Les présents motifs reposent sur la conclusion factuelle de l’arbitre, à savoir que M. Drury agissait en tout temps au nom de la demanderesse à titre de directeur exécutif lorsqu’il a commis les actes qui ont porté préjudice au défendeur. De plus, rien dans le dossier n’indique que M. Drury n’agissait pas au nom de la bande et aucune question à ce sujet n’a été soulevée devant l’arbitre.

 

LA NORME DE CONTRÔLE

[22]           La demanderesse conteste le choix de l’arbitre d’accorder des dommages‑intérêts majorés et punitifs. Dans la décision Nation des Cris de Opaskwayak c Booth, 2009 CF 225, aux paragraphes 23 et 24, la juge Dawson a statué que la norme de la décision raisonnable s’applique à la réparation choisie par un arbitre nommé en vertu de l’article 242 du Code canadien du travail, LRC 1985, c L‑2 :

[23] La première erreur alléguée vise la décision de l’arbitre selon laquelle le congédiement était injuste ainsi que le redressement choisi par ce dernier. Il s’agit de questions mixtes de droit et de fait.  Je dois examiner la question de savoir si la jurisprudence a déjà déterminé de manière satisfaisante le degré de déférence applicable à de telles décisions (voir Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, [2008] 1 R.C.S. 190, aux paragraphes 57 et 62).

 

[24] Selon moi, la jurisprudence a réglé cette question. Les questions mixtes de fait et de droit tranchées par des arbitres nommés en vertu de l’article 242 du Code sont contrôlables selon la norme de la décision raisonnable (voir Colistro c. La BMO Banque de Montréal (2008), 378 N.R. 288, au paragraphe 6 (C.A.F.).

 

[23]           Pareillement, la norme de la décision raisonnable s’applique aux deux questions en litige soulevées dans la présente demande.

 

LES ARGUMENTS ET L’ANALYSE

1.         La somme de 85 000 $ accordée par l’arbitre à titre de dommagesintérêts majorés étaitelle raisonnable?

[24]           La demanderesse soutient que l’arbitre a commis une erreur en n’évaluant pas les préjudices réels subis par le défendeur attribuables à la façon dont il a été congédié (Honda Canada Inc. c Keays, 2008 CSC 39, au paragraphe 59 [Keays]). En fait, dans chacune des décisions sur lesquelles elle s’appuie, les dommages‑intérêts accordés étaient nettement inférieurs à ceux accordés dans la présente affaire (Waldman c Conseil de Bande d’Eskasoni, [2001] ACF no 1228, au paragraphe 33 [Waldman]; Downham c Lennox and Addington (County), [2005] OJ 5227 [Downham]; Piresferreira c Ayotte, 2010 ONCA 384, au paragraphe 95 [Piresferreira]).

 

[25]           La demanderesse fait valoir que la seule justification fournie dans les motifs de l’arbitre pour l’octroi de la somme de 85 000 $ est un argument présenté par le défendeur à cet égard, reproduit au paragraphe 74 de la décision.

 

[26]           De plus, les plaignants dans les affaires de congédiement injuste impliquant des bandes des Premières Nations se sont vu accorder soit des dommages‑intérêts majorés beaucoup moins importants, soit aucuns dommages‑intérêts (Gullstrom c TlowitsisMumtagila First Nations, [1997] BCJ 367, au paragraphe 67; Dignean c White Bear First Nation No. 70, 1999 SKQB 3, au paragraphe 19 [Dignean]; Solomon c Alexis Creek Indian Band, [2007] BCJ 680, aux paragraphes 55 et 56 [Solomon]).

 

[27]           La demanderesse estime donc que les dommages‑intérêts majorés accordés devraient être annulés ou, à tout le moins, réduits à 10 000 $.

 

[28]           Pour sa part, le défendeur soutient que l’octroi par l’arbitre d’une somme de 85 000 $ à titre de dommages‑intérêts majorés est conforme à la jurisprudence. Lorsque l’insensibilité est générale et que l’employé peut prouver le préjudice moral qui en découle, les dommages‑intérêts accordés s’élèvent généralement à environ 20 000 $ (Trask c Terra Nova Motors Ltd., [1991] NJ 112; Simmons c Webb, [2008] OJ 5249, confirmé en 2011 ONCA 7). Si le comportement devient plus grave, outrageant ou clairement abusif, il y a normalement une conclusion correspondante de condamnation à des dommages‑intérêts supérieurs à 40 000 $ (décision Downham, précitée; Zesta Engineering Ltd. c Cloutier, 2010 ONSC 5810; arrêt Piresferreira, précité; Harbour Air Ltd. c Maloney, [2012] CLAD No 105). En l’espèce, l’arbitre a indiqué qu’il était clairement nécessaire d’accorder des dommages‑intérêts majorés et estimé qu’il y avait un lien de causalité clair entre, d’une part, le comportement de la demanderesse et, d’autre part, la santé mentale et physique du défendeur et le tort causé à sa réputation. À ce titre, le défendeur soutient que l’octroi de dommages‑intérêts majorés était clairement motivé et entièrement justifié.

 

[29]           Pour les motifs qui suivent, je suis d’accord avec le défendeur.

 

[30]           À mon sens, l’arbitre a très bien compris les principes régissant l’octroi de dommages‑intérêts majorés. Il a cité la décision Kelowna Flightcraft Air Charter Ltd. c Buchanan, 2010 BCSC 1650, aux paragraphes 13 à 18 [Kelowna], qui a fait jurisprudence en la matière. Cette décision résume les directives de la Cour suprême sur les dommages‑intérêts majorés énoncées dans l’arrêt Keays et dans l’arrêt Wallace c United Grain Growers Ltd., [1997] 3 RCS 701 [Wallace]. Voici quelques‑uns des principes résumés dans Kelowna aux paragraphes 13 à 18 :

-          Le terme « dommages‑intérêts majorés » renvoie à des dommages‑intérêts de nature compensatoire accordés eu égard aux circonstances du congédiement (Keays, au paragraphe 62).

-          Il n’y a octroi de dommages‑intérêts pour les circonstances du congédiement que : i) lorsqu’est remplie la condition énoncée dans Wallace, à savoir que l’employeur s’est comporté, lors du congédiement, « de façon inéquitable ou [en faisant preuve] de mauvaise foi en étant, par exemple, menteu[r], trompeu[r] ou trop implacabl[e] » (Keays, au paragraphe 57); ii) lorsque les circonstances du congédiement ont infligé à l’employé un préjudice moral que les parties avaient envisagé (Keays, au paragraphe 59).

-          Aux fins de l’octroi de dommages‑intérêts, il convient de donner une définition large au terme « mauvaise foi »; ce terme ne vise pas le genre de comportement délibéré et malicieux qui donne lieu à l’octroi de dommages‑intérêts punitifs (Kelowna, au paragraphe 16, citant Keays aux paragraphes 57 et 58).

-          Constituent des exemples de comportement donnant lieu à un préjudice indemnisable l’atteinte à la réputation de l’employé découlant des déclarations faites lors du congédiement et l’inexactitude du motif invoqué (Keays, au paragraphe 59).

-          Le comportement de l’employeur avant et après le congédiement peut être pertinent pour décider s’il y a eu mauvaise foi lors du congédiement, car ce congédiement peut dans les faits être symptomatique d’un comportement généralisé. L’arbitre a renvoyé au paragraphe 18 de la décision Kelowna, où la Cour cite l’arrêt Gismondi c Toronto (City), [2003] OJ 1490 (Ont CA), au paragraphe 23, dans lequel la Cour d’appel a déclaré ce qui suit :

[traduction]

23     […] Je ne suis pas en désaccord avec l’opinion du juge de première instance selon laquelle les préjudices dans l’affaire Wallace ne sont pas limités aux actes de l’employeur au moment même du congédiement et peuvent, si les circonstances s’y prêtent, comprendre « le comportement avant et après le congédiement […] et le comportement de l’employeur par la suite », mais ils ne forment, à mon sens, qu’une composante des circonstances du congédiement.

 

[31]           En l’espèce, la jurisprudence penche en faveur de la décision de l’arbitre d’accorder des dommages‑intérêts majorés pour indemniser le défendeur pour les [traduction] « préjudices indirects liés à ses perspectives d’emploi, à sa santé et son bien‑être physiques et mentaux, à son intégrité et à sa dignité, et à sa réputation personnelle et professionnelle ».

 

[32]           Comme l’a fait observer l’arbitre, la Cour supérieure de justice de l’Ontario, dans la décision Downham, précitée, aux paragraphes 253 à 256, a accordé des dommages‑intérêts majorés pour des pertes découlant de l’atteinte à la réputation :

[traduction]

253     Il a été statué dans la décision Wallace que lorsque la « mauvaise foi » ou le comportement inéquitable de l’employeur cause des préjudices intangibles comme l’humiliation, de l’embarras, la perte de l’estime de soi, ils devraient être indemnisables même s’il n’y a pas de perte tangible qui découle de ce comportement.

 

254     Les préjudices intangibles qui découlent d’actes répréhensibles de l’employeur dans la présente affaire ont causé de l’humiliation, de l’embarras, une perte de l’estime de soi et une perte de la jouissance d’activités sociales. Contrairement à une affaire ordinaire, ces préjudices n’étaient pas temporaires. Le plaignant les subit depuis près de quatre ans. J’estime que ces préjudices seront atténués par le présent jugement, mais il subsistera un préjudice. Comme le demandeur l’a déjà éprouvé, des « ombres » sur la réputation d’une personne sont difficiles à dissiper.

 

255     J’évalue ces préjudices à 50 000 $.

 

 

[33]           Dans la décision Downham, la Cour a tenu compte de facteurs aggravants avant et après le congédiement lorsqu’elle a évalué les préjudices subis par le plaignant (voir Downham, aux paragraphes 231 et 233). Les facteurs aggravants comprenaient :

-          la lettre remise au plaignant pour l’informer de sa suspension contenait des conclusions extrêmement graves, lesquelles étaient [traduction] « pour l’essentiel sans fondement »;

-          cette lettre avait pour but de perturber le plaignant et de détruire sa carrière professionnelle;

-          un rapport subséquent sur le plaignant contenait de nombreux exposés de faits et de nombreuses conclusions infondées, et le rapport a été porté à la connaissance de politiciens, ce qui ne manquerait pas de créer des problèmes dans la petite collectivité;

-          le plaignant a dû vivre pendant plus de trois ans avec les conséquences des allégations infondées de l’employeur, ce qui a eu une incidence sur tous les aspects de sa vie, notamment sur sa vie sociale et son emploi;

-          l’employeur a maintenu sa position au procès et a soutenu que les erreurs contenues dans le rapport étaient sans conséquence.

 

[34]           De même, en l’espèce, la demanderesse a formulé de nombreuses allégations à l’égard du défendeur, allégations qu’elle avait maintenues à l’audience tenue devant l’arbitre. L’arbitre a jugé que ces allégations étaient sans fondement et que la réputation du défendeur dans sa collectivité et sa réputation professionnelle au sein des organismes gouvernementaux avaient été détruites d’une façon prévisible lorsqu’un certain nombre d’allégations avaient été largement ébruitées.

 

[35]           En conséquence, la santé du plaignant a été compromise en raison de la manière dont il a été congédié. L’arbitre a tiré les conclusions suivantes dans sa décision :

 

[traduction]

28. La malveillance du directeur exécutif semble avoir pour origine une lettre que le plaignant et deux autres membres de la haute direction lui ont envoyée, lettre dans laquelle ils expriment leurs préoccupations quant à son style de gestion. Le directeur exécutif a considéré cette lettre comme un affront et a affirmé dans son témoignage que cela constituait une violation du « Code de conduite » par le plaignant. À partir de ce moment‑là, il a ciblé le plaignant dans des accusations non fondées de fraude et de mauvaise gestion. C’était une chasse aux sorcières incessante.


[…]

 

31. Les menaces constantes et le harcèlement constants du directeur ont contribué à la dégradation de la santé du plaignant, qui s’est vu obligé de prendre un congé de maladie sous les soins et la supervision de son médecin.

 

[…]

 

33. Pendant que le défendeur était en congé de maladie, le directeur exécutif a continué sa campagne malveillante d’intimidation. Il a écrit des lettres au plaignant dans lesquelles il l’accusait d’insubordination, lui reprochant notamment ses visites chez le médecin et son calcul des congés de maladie, lequel reflétait son intention de tenter d’escroquer l’intimée.

 

[Non souligné dans l’original.]

 

 

[36]           Ainsi donc, l’arbitre n’a pas commis d’erreur en accordant des dommages‑intérêts majorés entre autres pour les préjudices que le défendeur a subis au regard de sa santé physique et mentale.

 

[37]           Enfin, la jurisprudence appuie aussi la décision de l’arbitre d’accorder des dommages‑intérêts majorés sur la base des atteintes à l’intégrité et à la dignité du défendeur. Dans la décision Waldman, précitée, au paragraphe 33, la présente Cour a confirmé les dommages‑intérêts majorés accordés à un plaignant pour [traduction] « la façon dont il a été congédié et […] l’humiliation qu’il a subie lorsqu’il a été raccompagné jusqu’à l’extérieur des lieux ». Le montant des dommages‑intérêts majorés accordé dans les circonstances de cette affaire s’élevait à 23 750 $.

 

[38]           De même, en l’espèce, le défendeur a été humilié à son lieu de travail lorsque le directeur exécutif a voulu faire une règle interne qui interdisait aux employés de la demanderesse de parler au plaignant pendant que celui‑ci était en congé de maladie, même pendant leurs temps libres en dehors du travail. Encore là, il était raisonnable de la part de l’arbitre de tenir compte de ce facteur.

 

[39]           Je suis également convaincue que le montant des dommages‑intérêts que l’arbitre a accordé est raisonnable, étant donné que dans Downham le plaignant s’est vu accorder la somme de 50 000 $ à titre de dommages‑intérêts majorés pour le préjudice touchant seulement l’humiliation, l’embarras et la perte de l’estime de soi.

 

[40]           Par conséquent, étant donné que l’arbitre a accordé des dommages‑intérêts majorés découlant de la façon dont le défendeur a été congédié, afin de le compenser pour les nombreux préjudices liés à sa santé, son intégrité, sa dignité, sa réputation et ses perspectives d’emploi, l’octroi de 85 000 $ en l’espèce est parfaitement justifiable. Ce montant n’est pas incompatible avec la jurisprudence dans les cas de conduite extrême et clairement abusive qui ont eu des conséquences graves sur la personne indemnisée.

 

[41]           Pour toutes ces raisons, j’estime que la décision de l’arbitre quant aux dommages‑intérêts majorés est raisonnable. La décision est justifiée, transparente et intelligible, et les motifs permettent à la Cour de comprendre pourquoi l’arbitre a pris sa décision (Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, au paragraphe 47; Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c Terre-Neuve-et-Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62, au paragraphe 16).

 

2.         La somme de 100 000 $ accordée par l’arbitre à titre de dommagesintérêts punitifs étaitelle raisonnable?

[42]           La demanderesse fait observer que l’octroi de 100 000 $ à titre de dommages punitifs n’est pas approprié en l’espèce. L’arbitre a commis une erreur en ne tirant pas de conclusions sur les dommages‑intérêts punitifs ni de conclusion quant à une faute donnant elle‑même ouverture à un droit d’action pour l’obtention de dommages‑intérêts punitifs (Greater Toronto Airports Authority c Public Service Alliance Canada, Local 0004, [2011] OJ 358, aux paragraphes 121 à 128).

 

[43]           Subsidiairement, la demanderesse estime que si des dommages‑intérêts punitifs devaient être accordés, leur montant devrait être réduit. L’arbitre devait évaluer les dommages‑intérêts punitifs par rapport à la totalité des dommages‑intérêts qu’il avait déjà accordés. Or, il n’a pas effectué des analyses de la rationalité et de la proportionnalité. L’octroi des 100 000 $ est loin d’atteindre l’objet des dommages‑intérêts punitifs et le montant est si excessif qu’il a pour ainsi dire ruiné la demanderesse.

 

[44]           Par conséquent, la demanderesse soutient que les dommages‑intérêts punitifs accordés devraient être annulés, ou alors réduits.

 

[45]           Le défendeur soutient quant à lui que l’ordonnance de l’arbitre relative aux dommages‑intérêts punitifs était raisonnable et que le montant accordé se situe tout à fait dans la fourchette des dommages‑intérêts punitifs attribués dans d’autres affaires pour un comportement similaire à celui de la demanderesse (décision Downham, précitée, aux paragraphes 272 à 278; Elgert c Home Hardware Stores Ltd., 2011 ABCA 112, au paragraphe 104). Fait à noter, l’arbitre a clairement séparé l’analyse des dommages‑intérêts punitifs de celle des dommages‑intérêts majorés. Il a décrit les décisions de principe qui, d’une part, établissent clairement la différence entre les deux types de dommages‑intérêts et, d’autre part, définissent le critère applicable. De plus, à la fin de sa décision, il a réparti les montants accordés dans les catégories appropriées.

 

[46]           Le défendeur soutient que les principes de la proportionnalité sont variés et exigent une pondération et une mise en balance des éléments de preuve ainsi que de l’opinion de l’arbitre quant à la sanction requise. Le sentiment que le comportement de la demanderesse laisse à l’arbitre ressort tout au long de sa décision; il est clair qu’il estimait qu’il était nécessaire d’imposer une peine.

 

[47]           Pour les raisons suivantes, je suis d’accord avec le défendeur.

 

[48]           Dans l’arrêt Whiten c Pilot Insurance Co., 2002 CSC 18 [Whiten], la Cour suprême a formulé de nombreuses conclusions au sujet des dommages‑intérêts punitifs et s’est dite d’avis que la détermination de la somme appropriée au titre des dommages‑intérêts punitifs exige que l’on aborde la proportionnalité sous plusieurs aspects, dont le caractère répréhensible de la conduite du défendeur, le degré de vulnérabilité du demandeur, le préjudice réel ou potentiel infligé au demandeur en particulier et le besoin de dissuasion (Whiten, aux paragraphes 111 à 126). Il faut recourir aux dommages‑intérêts punitifs uniquement dans les cas exceptionnels et faire alors preuve de modération (Whiten, au paragraphe 69). L’aspect auquel il faut s’attacher n’est pas la perte du demandeur, mais la conduite répréhensible du défendeur (Whiten, au paragraphe 73). De plus, la réparation globale accordée doit avoir un lien rationnel avec les objectifs poursuivis de châtiment, de dissuasion et de dénonciation, pour lesquels des dommages‑intérêts punitifs sont accordés (Whiten, aux paragraphes 74 et 111).

 

[49]           La jurisprudence récente a changé la perception voulant que des dommages‑intérêts punitifs soient contre‑indiqués. Par exemple, dans l’arrêt Pate c GalwayCavendish (Township), 2011 ONCA 329, aux paragraphes 58 à 62 [Pate], la Cour d’appel a ordonné un nouveau procès sur la question des dommages punitifs au motif que le juge de première instance avait exprimé l’opinion qu’il aurait accordé des dommages‑intérêts punitifs supérieurs à 25 000 $, mais qu’il était [traduction] « lié par les principes de la proportionnalité ». Dans cette affaire, le juge de première instance avait estimé que [traduction] « le comportement flagrant du défendeur en formulant des allégations non fondées sur la conduite de l’employé tant dans l’action criminelle que dans sa défense équivaut à une intention d’infliger une souffrance psychologique et des dommages économiques et sociaux ». Comme cette conclusion n’a pas été contestée en appel (Pate, au paragraphe 61), la Cour d’appel a déclaré ce qui suit : 

[traduction]

62      Vu les conclusions du juge de première instance quant au grave comportement répréhensible du défendeur pendant une longue période et a eu des conséquences dévastatrices sur la vie du demandeur, et vu les montants accordés pour les autres types de dommages‑intérêts, on ne voit pas très bien pourquoi les montants plus élevés envisagés par le juge au titre des dommages‑intérêts punitifs n’auraient pas été appropriés.

 

[50]            Après avoir réentendu l’affaire, le juge Gunsolus a accordé des dommages‑intérêts punitifs de 550 000 $ (Pate c GalwayCavendish (Township), 2011 ONSC 6620, au paragraphe 20). Un montant similaire de dommages‑intérêts punitifs a aussi été accordé par la Cour d’appel de l’Ontario dans l’arrêt McNeil c Brewers Retail Inc., 2008 ONCA 405, aux paragraphes 63 à 65 [McNeil].

 

[51]           En l’espèce, l’arbitre a accordé des dommages‑intérêts punitifs de 100 000 $  [traduction] « pour la façon malhonnête, répréhensible et entachée de mauvaise foi » dont la demanderesse a congédié le défendeur.

 

[52]           Les conclusions factuelles de l’arbitre et l’examen de la jurisprudence pertinente quant aux dommages‑intérêts punitifs assurent un solide fondement à sa décision d’accorder une somme de 100 000 $ à titre de dommages‑intérêts punitifs.

 

[53]           Je ne souscris pas à l’opinion de la demanderesse selon laquelle l’arbitre a commis une erreur en renvoyant à la décision Downham, précitée, qui portait elle aussi sur le congédiement injustifié d’un employé. L’arbitre a noté simplement que dans Downham, la Cour supérieure de justice de l’Ontario avait accordé 50 000 $ en dommages‑intérêts majorés et 100 000 $ en dommages‑intérêts punitifs pour [traduction] « de nombreux actes d’inconduite, lesquels ont eu lieu jusqu’au moment du procès » (Downham, au paragraphe 278). La demanderesse affirme que cette affaire n’est pas semblable à celle dont la Cour est saisie en l’espèce, mais je ne vois pas comment l’arbitre a commis une erreur en y renvoyant, puisque la Cour a conclu dans cette affaire que l’employeur avait été malveillant et outrancier et qu’il méritait d’être condamné pour sa conduite (Downham, aux paragraphes 272 à 277).

 

[54]           De façon analogue, en l’espèce, l’arbitre a estimé que le comportement de la demanderesse était répréhensible, malhonnête, malveillant, délibéré, odieux, trompeur et faisait preuve de mauvaise foi. L’arbitre a dûment examiné les nombreux aspects de l’affaire, le comportement condamnable de la demanderesse, la vulnérabilité du défendeur – par exemple, le fait qu’il ait été en congé de maladie pendant que le directeur exécutif continuait sa  « campagne haineuse d’intimidation » – et le préjudice délibéré infligé au défendeur en particulier.

 

[55]           Je note que l’arbitre a invoqué un jugement qui a été annulé par la Cour d’appel de la Colombie‑Britannique dans l’arrêt Marchen c Dams Ford Lincoln Sales Ltd., 2010 BCCA 29. Toutefois, j’estime que les directives de la Cour d’appel dans cette affaire avalisent l’approche adoptée par l’arbitre :

[traduction]

66     Des dommages‑intérêts punitifs sont accordés pour exprimer l’approbation et pour sanctionner lorsque le montant global des dommages‑intérêts accordés, y compris les dommages‑intérêts majorés dans les circonstances appropriées, est insuffisant (Whiten c. Pilot Insurance Co., 2002 CSC 18, [2002] 1 R.C.S. 595, au paragraphe 94; B.P.B. c. M.M.B., 2009 BCCA 365, au paragraphe 59). Le juge de première instance était bien au courant de cela mais, à mon sens, il a commis une erreur en accordant ce genre de réparation en l’espèce.

 

67     Dans les affaires de rupture de contrat, les dommages‑intérêts punitifs découlent d’un comportement inacceptable d’un défendeur au moment des faits. En l’espèce, lorsqu’il a rejeté une réclamation pour dommages moraux, le juge a déclaré que « la conduite [de l’appelant] au moment du congédiement n’était pas inéquitable, trompeuse ou indument insensible ». De plus, le juge a estimé que M. Marchen n’avait pas subi une détresse excessive. Vu ces conclusions de fait, des dommages‑intérêts punitifs ne peuvent être accordés.

 

 

 

[56]           En revanche, en l’espèce, étant donné que l’arbitre a tiré de nombreuses conclusions factuelles sur la conduite répréhensible et la mauvaise foi de la demanderesse, la somme de 100 000 $ accordée à titre de dommages‑intérêts punitifs est raisonnable. Le montant des dommages‑intérêts punitifs accordé par l’arbitre est entièrement justifiable et appartient aux issues acceptables.

 

[57]           Bien que la demanderesse ait fait valoir que les dommages‑intérêts imposés à une Première Nation pour le congédiement injuste d’un employé étaient différents de ceux imposés à des employeurs en général, rien dans la jurisprudence ne vient étayer cette assertion.

 

[58]           Pour ces motifs, je suis d’avis de rejeter la demande de contrôle judiciaire avec dépens en faveur du défendeur.

 

JUGEMENT

 

LA COUR STATUE ce qui suit :

La présente demande de contrôle judiciaire est rejetée, avec dépens en faveur du défendeur.

 

 

« Danièle Tremblay-Lamer »

Juge

 

 

 

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        T-1227-12

 

INTITULÉ :                                      PREMIÈRE NATION DE TL’AZT’EN c VINCENT JOSEPH

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              Vancouver (Colombie-Britannique)

 

DATE DE L’AUDIENCE :             Le 26 juin 2013

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                            LA JUGE TREMBLAY-LAMER

 

DATE DES MOTIFS :                     Le 9 juillet 2013

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Peter Grant

Karenna Williams

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Colin Gusikowski

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Peter Grant & Associates

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

POUR LA DEMANDERESSE

Victory Square Law Office LLP

Vancouver (Colombie-Britannique)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

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