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Cour fédérale

 

Federal Court

 

 


Date : 20130626

Dossier : IMM-7680-12

Référence : 2013 CF 713

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 26 juin 2013

En présence de monsieur le juge Rennie

 

 

ENTRE :

 

MAURICIO ANDRES URIBE MENESES

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Le demandeur sollicite le contrôle judiciaire de la décision d’une agente d’exécution de l’Agence des services frontaliers du Canada (l’agente). L’agente a refusé de reporter le renvoi du demandeur du Canada. Bien qu’il y ait des aspects troublants dans la décision, ils n’équivalent pas à une erreur. La demande de contrôle judiciaire sera donc rejetée.

 

[2]               Le demandeur est un citoyen du Chili. En 2009, il est arrivé au Canada muni d’un permis de travail, cependant, il en avait violé les modalités. En mars 2010, le demandeur a fait la rencontre de sa conjointe, une Canadienne. Ils ont commencé à vivre ensemble en octobre 2010. Le demandeur a présenté une demande de résidence permanente au titre de la catégorie des époux ou conjoints de fait au Canada. Le 3 juillet 2012, le demandeur a reçu une décision défavorable relative à l’examen des risques avant renvoi (l’ERAR) qu’il avait demandé, et il a reçu l’ordre de se présenter pour son renvoi le 6 août 2012. Il a demandé que l’agente reporte son renvoi jusqu’à ce que sa demande de parrainage présentée au Canada soit traitée, eu égard à l’intérêt supérieur des deux enfants de son épouse.

 

[3]               La norme de contrôle applicable est celle de la décision raisonnable : Baron c Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2009 CAF 81, au paragraphe 25. La Cour ne doit intervenir que si la décision n’appartient pas aux « […] issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » : Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 RCS 190, au paragraphe 47.

 

[4]               Selon le libellé antérieur du paragraphe 48(2) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27, une mesure de renvoi devait être appliquée « dès que les circonstances le permettent ».

 

[5]               Le pouvoir discrétionnaire d’un agent d’exécution de reporter le renvoi est très limité, et ne devrait être exercé qu’en ce qui a trait aux divers facteurs directement applicables au renvoi : Wang c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2001] 3 CF 682; Baron, au paragraphe 51. Les facteurs qui peuvent justifier un report sont notamment la maladie, d’autres raisons à l’encontre du voyage, des préoccupations relatives à la sécurité, le calendrier scolaire des enfants, et des naissances ou décès imminents : Baron, aux paragraphes 49 à 51.

 

[6]               Le demandeur n’a relevé aucune erreur dans la décision. L’agente a admis qu’elle avait un pouvoir discrétionnaire limité quant au report du renvoi, mais elle a décidé que les difficultés auxquelles seraient exposés le demandeur et sa famille ne s’élevaient pas au niveau qui justifiait l’octroi d’un report. En l’espèce, la plupart des facteurs soulevés comme justification pour l’octroi d’un report sont plus appropriés pour une demande fondée sur des circonstances d’ordre humanitaire (CH). Ils n’appartiennent pas aux critères énoncés dans l’arrêt Baron et la décision Wang.

 

[7]               Le demandeur a soulevé deux arguments principaux. Le premier a trait à la déclaration de l’agente selon laquelle il n’y avait pas de preuve que le demandeur serait séparé de sa conjointe de façon indéfinie, ou que sa conjointe et ses enfants ne seraient pas en mesure de lui rendre visite au Chili. Ce dernier facteur ne résiste pas à un examen poussé, vu la preuve des faibles revenus de sa conjointe. Il est évident en soi que, vu la situation de sa conjointe, l’achat de billets d’avion aller et retour pour le Chili pour une famille de trois personnes n’est pas réaliste. Cela dit, selon moi, cette question n’a pas eu une incidence importante sur la décision relative au report du renvoi, même si elle pourrait être importante dans le cadre d’une décision relative aux CH.

 

[8]               J’examine le deuxième élément de préoccupations, la déclaration de l’agente selon laquelle il n’y avait pas de preuve que la séparation serait indéfinie; il s’agit clairement d’une erreur dans l’exercice du pouvoir discrétionnaire. Il n’y a pas d’exigence que la séparation soit permanente. Toutefois, je suis convaincu, à la lecture de la décision dans son ensemble, que l’agente n’a pas entravé son pouvoir discrétionnaire; en fait, l’agente conclut plus loin que, bien que la séparation puisse causer des difficultés, cela ne sera que temporaire. Lorsque je lis la décision dans son ensemble, je ne crois pas que l’agente ait examiné la demande eu égard à une norme de séparation permanente.

 

[9]               L’agente n’a pas tenu compte du fait que le renvoi signifierait que les mois passés à attendre l’approbation à l’étape 1 s’évaporeraient, et que le demandeur serait obligé de recommencer sa demande de parrainage conjugal de l’extérieur du Canada. Ce facteur aussi renvoie à une cause touchant à des CH, plutôt qu’à l’exercice du pouvoir discrétionnaire par un agent chargé du renvoi.

 

[10]           L’agente a tenu compte de la demande de parrainage en cours, et a conclu qu’une décision n’était pas imminente. Le 10 janvier 2012, le demandeur a présenté une demande de parrainage, deux mois après avoir reçu l’avis de se présenter pour son renvoi et en dehors des délais dans lesquels il aurait obtenu un sursis automatique. Le temps de traitement attendu était d’environ 11 mois, pour la première étape du traitement.

 

[11]           Le fait qu’une demande de parrainage conjugal au Canada soit en cours ne peut justifier le report que si la décision relativement à la demande de parrainage est imminente : Ramirez c Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2010 CF 706, aux paragraphes 17 et 18. L’agente a tenu compte du temps de traitement attendu, et elle a décidé qu’il n’y avait pas suffisamment de preuves pour conclure qu’une décision était imminente.

 

[12]           L’agente a pris en compte la séparation du demandeur de son épouse, et les difficultés économiques auxquelles celle‑ci serait astreinte sans le soutien du demandeur. L’agente a conclu que l’épouse serait en mesure de rendre visite au demandeur au Chili et qu’elle pourrait le parrainer de l’extérieur du pays pour qu’il obtienne sa résidence permanente. En ce qui concerne les difficultés économiques, l’épouse du demandeur travaille et elle aurait droit à l’aide sociale au Canada si elle en avait besoin. L’agente a estimé que l’argument selon lequel l’épouse pourrait devenir sans‑abri était conjectural et qu’il n’était pas étayé par la preuve.

 

[13]           Enfin, l’agente a pris en compte l’intérêt supérieur des enfants touchés. Les enfants continueront de vivre avec leur mère qui les aidera à s’adapter à l’absence du demandeur. L’agente a tenu compte des difficultés scolaires du jeune garçon, mais elle a conclu qu’il n’y avait pas de preuve que le demandeur l’aidait à faire ses devoirs d’école. L’agente n’était pas obligée d’entreprendre un examen approfondi de l’intérêt supérieur des enfants touchés : Baron, aux paragraphes 49 à 51.

 

[14]           Dans ces circonstances, j’estime que l’analyse était suffisante.

 

[15]           L’agente a conclu de façon raisonnable que les circonstances du demandeur ne sont pas telles que son renvoi appartienne aux circonstances envisagées dans la décision Wang et l’arrêt Baron. La demande de contrôle judiciaire est donc rejetée.

 

 


JUGEMENT

LA COUR STATUE que : la demande de contrôle judiciaire est rejetée. Il n’y a pas de question à certifier.

 

 

« Donald J. Rennie »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Laurence Endale

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                              IMM-7680-12

 

INTITULÉ :                                            MAURICIO ANDRES URIBE MENESES

                                                                  c

LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                    Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                   Le 20 juin 2013

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                  Le juge Rennie

 

DATE DES MOTIFS

ET DU JUGEMENT :                           Le 26 juin 2013

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

D. Clifford Luyt

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Alex Kam

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

D. Clifford Luyt
Avocat

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

William F. Pentney,

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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