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Date : 20130409

Dossier : T‑1503‑12

Référence : 2013 CF 358

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Vancouver (Colombie‑Britannique), le 9 avril 2013

En présence de monsieur le juge Campbell

 

ENTRE :

 

TCHO VENTURES, INC.

 

 

 

demanderesse

 

et

 

 

 

MM MEYER MARKENVERWALTUNG & CO.

 

 

 

défenderesse

 

 

 

 

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               Dans la présente demande introduite conformément à l’article 56 de la Loi sur les marques de commerce (la Loi), la demanderesse, Tcho Ventures, Inc. (Tcho), fait appel de la décision par laquelle le registraire des marques de commerce (le registraire) a repoussé sa demande d’enregistrement de la marque TCHO, portant le numéro 1,382,666 (la marque).

 

[2]               Le registraire a repoussé la demande d’enregistrement au motif que la marque de commerce TCHO créait de la confusion avec la marque de commerce enregistrée TCHIBO de la défenderesse, MM Meyer Markenverwaltung & Co. (MM Meyer). Le registraire a également repoussé la demande au motif que la marque TCHO ne présentait pas de caractère distinctif.

 

[3]               Les faits, qui ont été exposés par l’avocat de MM Meyer, ne sont pas contestés.

 

[4]               Depuis 1981, MM Meyer emploie abondamment la marque de commerce TCHIBO au Canada en liaison avec du café. Le café de marque TCHIBO est vendu partout au Canada dans des épiceries et des magasins d’alimentation indépendants. Entre 1996 et 2009, les ventes en gros de café de marque TCHIBO ont dépassé 11 millions de dollars. MM Meyer a également beaucoup investi dans la publicité et la promotion de la marque TCHIBO au Canada. La marque de commerce TCHIBO est déposée sous l’enregistrement canadien portant le numéro LMC273,122.

 

[5]               Le 8 février 2008, Tcho a déposé la demande d’enregistrement de la marque de commerce TCHO sur le fondement d’un emploi projeté au Canada en liaison avec les marchandises et services suivants : produits de cacao, nommément chocolat à cuire, mélanges à cacao; cacao en poudre et tablettes de chocolat; chocolat et vanille en poudre; sirops aromatisants pour ajouter à des boissons alcoolisées et non alcoolisées; boissons alimentaires au chocolat n’étant pas à base de produits laitiers ni de légumes; chocolat chaud; boissons alcoolisées et non alcoolisées au chocolat au lait; cacao préparé et boissons alcoolisées et non alcoolisées à base de cacao; préparations pour boissons au chocolat ou boissons à base de cacao, nommément mélange à chocolat chaud liquide et en poudre et mélange à cacao chaud liquide et en poudre; chocolat et bonbons, nommément chocolats, tablettes de chocolat, grains de café enrobés de chocolat, fruits séchés enrobés de chocolat, craquelins enrobés de chocolat et nappages au chocolat; ganaches au chocolat; sauce au chocolat; garniture au chocolat; café; café moulu; grains de café; café préparé et boissons alcoolisées et non alcoolisées à base de café; expresso préparé et boissons alcoolisées et non alcoolisées à base d’expresso; liqueurs. Services de magasin de détail, de catalogue de vente par correspondance et de catalogue sur Internet, offrant tous des chocolats, des confiseries, des produits de boulangerie, du café, des ustensiles de table, des gadgets de cuisine, des appareils de cuisine, des ustensiles de cuisine, des couverts, des articles de verrerie, des articles pour le bar, des livres, de la musique préenregistrée et des vêtements; cafés.

 

[6]               Le registraire a estimé qu’il y avait un chevauchement direct entre certaines des marchandises visées par la demande d’enregistrement et les marchandises de MM Meyer liées au café. Il a aussi estimé que les marchandises et services de Tcho pour lesquels il n’y avait pas de chevauchement direct étaient liés au café de MM Meyer dans la mesure où il s’agissait en totalité d’aliments et de boissons, ou de marchandises et services se rapportant d’une façon quelconque à du café. Le registraire a estimé que les marques présentaient un niveau assez élevé de ressemblance, que rien ne prouvait que d’autres personnes emploient des marques similaires, ni même des marques commençant par TCH, et que la marque de MM Meyer était devenue plus connue que la marque de Tcho. Pour tous ces motifs, le registraire a repoussé la demande d’enregistrement au motif que la marque créait de la confusion avec la marque enregistrée TCHIBO de MM Meyer. Il a aussi conclu que la marque n’était pas distinctive.

 

[7]               Dans la présente demande, qui concerne la question clé de la confusion, l’avocat de Tcho a avancé l’argument principal suivant.

 

[8]               Tcho fait valoir que la décision du registraire est déraisonnable, en alléguant deux moyens. Le premier moyen concerne le paragraphe 20 de la décision, où le registraire tire la conclusion suivante :

[20] Un chevauchement direct existe entre les marchandises des parties en ce qui concerne le café et les boissons à base de café. De plus, les autres marchandises de la Requérante sont liées au café de l’Opposante, dans la mesure où toutes les marchandises de la Requérante sont des aliments ou des boissons. Les services de la Requérante sont également liés aux marchandises de l’Opposante, étant donné qu’ils se rapportent tous à du café d’une façon ou d’une autre.

 

 

L’avocat de Tcho soutient que le registraire a tiré une conclusion de fait erronée : les services énumérés dans l’état déclaratif des services de Tcho ne se rapportent pas tous à du café d’une façon ou d’une autre.

 

[9]               Comme indiqué plus haut, l’état déclaratif des services de la demanderesse renferme ce qui suit :

Services de magasin de détail, de catalogue de vente par correspondance et de catalogue sur Internet, offrant tous des chocolats, des confiseries, des produits de boulangerie, du café, des ustensiles de table, des gadgets de cuisine, des appareils de cuisine, des ustensiles de cuisine, des couverts, des articles de verrerie, des articles pour le bar, des livres, de la musique préenregistrée et des vêtements; cafés. [Non souligné dans l’original.]

 

Il est clair que le registraire était d’avis que les services se rapportaient tous à du café parce que le café est désigné comme l’un des éléments visés par l’ensemble des services. Dans ce contexte, je suis d’avis que le registraire était fondé à tirer cette conclusion et, selon moi, cette conclusion est raisonnable.

 

[10]           Tcho fait aussi valoir que le registraire n’a pas examiné séparément les marchandises et services ne présentant pas de chevauchement ou, subsidiairement, s’il les a considérés séparément, Tcho fait valoir que le registraire a eu tort de regrouper sous l’appellation « aliments et boissons » les marchandises se rapportant à du café et les marchandises ne se rapportant pas à du café. J’accepte l’argument de l’avocat de MM Meyer selon lequel le registraire n’a pas omis d’examiner séparément les marchandises et services ne présentant pas de chevauchement :

[TRADUCTION]

Il était raisonnable et correct de la part du registraire de dire que les marchandises visées par la demande font toutes partie de la catégorie générale des aliments et boissons. Il est clair, au vu de la demande, que ces articles sont tous validement considérés comme des « aliments et boissons », et la demanderesse n’a produit aucun élément susceptible d’autoriser une conclusion différente.

 

Le registraire était également conscient de la possibilité qu’il avait de rendre une « décision partagée », c’est‑à‑dire de faire droit à la demande pour une portion des marchandises et services considérés comme source de confusion et de n’autoriser l’enregistrement que des articles non susceptibles de créer de la confusion. Malgré la possibilité qu’il avait de faire droit à une partie de la demande, le registraire n’a pas retenu cette solution, estimant plutôt que la demande tout entière créait de la confusion. Le registraire a écrit :

Après avoir examiné l’ensemble des circonstances de l’espèce, je suis d’avis que la Requérante ne s’est pas acquittée du fardeau qui lui incombait. L’Opposante possède une marque originale qu’elle a employée et dont elle a fait la promotion de façon significative au Canada pendant plusieurs années. La Marque de la Requérante ressemble passablement à celle de l’Opposante. La Requérante n’a pas établi la moindre réputation en liaison avec sa Marque, mais projette d’employer celle‑ci dans des domaines qui recoupent le domaine dans lequel la marque de l’Opposante a acquis sa réputation ou qui sont liés à celui‑ci. La question qui se pose est de savoir si un consommateur qui a un souvenir général et imparfait de la marque de l’Opposante pourrait raisonnablement croire, en voyant la Marque de la Requérante, que les marchandises/ services ont la même origine. Je ne puis répondre à cette question par la négative. Étant donné que les marques des deux parties sont liées au domaine des produits alimentaires et des boissons et que rien ne prouve que quelqu’un d’autre utilise le préfixe TCH dans ce domaine, il est permis de conclure à l’existence d’une probabilité raisonnable de confusion quant à l’origine.

 

(Mémoire des faits et du droit de la défenderesse, paragraphes 45 et 46)

 

À mon avis, les conclusions du registraire reproduites ci‑dessus sont clairement raisonnables.

 

[11]           La demanderesse propose également une deuxième approche quant à la présente affaire. Son avocat soutient, en avançant un argument de la « preuve additionnelle », qu’il m’est possible de trancher de novo la question de la confusion. L’avocat de MM Meyer affirme quant à lui qu’un tel argument n’est pas recevable dans la présente affaire parce que Tcho n’a produit aucune preuve additionnelle. MM Meyer fait valoir qu’un argument qui n’a pas été soumis au registraire ne constitue pas une « preuve nouvelle » et ne donne pas à la demanderesse le droit à une nouvelle audience. Je suis d’accord. Le droit qui concerne la possibilité pour la Cour de substituer son pouvoir discrétionnaire à celui du registraire est clairement établi :

Compte tenu de l’expertise du registraire, et en l’absence de preuve supplémentaire devant la Section de première instance, je considère que les décisions du registraire qui relèvent de son champ d’expertise, qu’elles soient fondées sur les faits, sur le droit ou qu’elles résultent de l’exercice de son pouvoir discrétionnaire, devraient être révisées suivant la norme de la décision raisonnable simpliciter. Toutefois, lorsqu’une preuve additionnelle est déposée devant la Section de première instance et que cette preuve aurait pu avoir un effet sur les conclusions du registraire ou sur l’exercice de son pouvoir discrétionnaire, le juge doit en venir à ses propres conclusions en ce qui concerne l’exactitude de la décision du registraire. (Molson Breweries, A Partnership c. John Labatt Ltd. (2000), 5 CPR (4th) 180, au paragraphe 29 (CAF)).

 

(Mémoire des faits et du droit de la défenderesse, paragraphe 21)

[Non souligné dans l’original.]

 

Étant donné que l’avocat de Tcho n’a pas satisfait au critère de la production d’une preuve additionnelle qui aurait eu pour effet de modifier radicalement la décision du registraire, je rejette la deuxième approche proposée par Tcho quant à la présente affaire.

 

[12]           Le présent appel est donc rejeté.


ORDONNANCE

 

LA COUR ORDONNE :

1.         Le présent appel est rejeté.

2.         Les dépens sont adjugés à la défenderesse.

 

 

« Douglas R. Campbell »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Sandra de Azevedo, LL.B.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                    T‑1503‑12

 

 

INTITULÉ :                                                  TCHO VENTURES, INC. c
MM MEYER MARKENVERWALTUNG & CO.

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                          Vancouver (C.‑B.)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :                         Le 8 avril 2013

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                                  LE JUGE CAMPBELL

 

 

DATE DES MOTIFS :                                 Le 9 avril 2013

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Timothy P. Lo

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Michael O’Neill

 

POUR LA DÉFENDERESSE

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Smart & Biggar

Vancouver (C.‑B.)

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Gowling Lafleur Henderson S.E.N.C.R.L., s.r.l.

Ottawa (Ont.)

 

POUR LA DÉFENDERESSE

 

 

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