Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

 


Date : 20130521

Dossier: T-1229-12

Référence : 2013 CF 527

Ottawa (Ontario), le 21 mai 2013

En présence de monsieur le juge Scott 

 

ENTRE :

 

ROCCO SEBASTIAO

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

         MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

I.          Introduction

 

[1]               La Cour est saisie d’une demande de révision judiciaire aux termes de l’article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales, LRC 1985, c F-7, d’une décision du délégué du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile (le délégué du ministre), du 17 mai 2012, confirmant la confiscation d’espèces saisies par l’Agence des services frontaliers du Canada (l’ASFC) aux termes de l’article 29 de la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, LC 2000, c 17 [la Loi].

 

[2]               Pour les raisons qui suivent, cette demande de révision judiciaire est rejetée.

 

II.        Les faits

 

[3]               M. Rocco Sebastiao (le demandeur) quitte le Canada le 22 août 2010 pour se rendre en République démocratique du Congo.

 

[4]               Le 15 octobre 2010, le demandeur se présente à l’aéroport Pierre-Elliot-Trudeau en provenance de la République démocratique du Congo.

 

[5]               Le demandeur remet alors sa carte de déclaration douanière à l’agent des douanes à la ligne d’inspection primaire. Il répond « non » à la question à savoir s’il rapportait une somme supérieure à 10 000 $ CAD.

 

[6]               L’agent des douanes pose la même question au demandeur et ce dernier répond toujours par la négative. L’agent lui demande alors quelle est la somme rapportée. Le demandeur indique alors« plus ou moins 9000 dollars ». L’agent des douanes note le chiffre « 9 000,00 $ » sur la carte de déclaration douanière, et encercle  « CAN$ 10,000 ».

 

[7]               Ayant des doutes sur la déclaration du demandeur portant sur la somme d’argent rapportée au Canada, l’agent à la ligne d’inspection primaire le réfère à la ligne d’inspection secondaire. Le même jour, l’agent de la ligne d’inspection primaire rédige son rapport. Il y reprend sa conversation avec le demandeur à la ligne d’inspection primaire.

 

[8]               Le demandeur se présente ensuite à la ligne d’inspection secondaire pour un examen plus poussé de sa déclaration douanière. L’agent des douanes à la ligne d’inspection secondaire lui demande à son tour quelle somme d’argent il rapporte au Canada. Le demandeur déclare avoir en sa possession 9 000 $ US et 200 $ CAD.

 

[9]               L’agent Sarette, assisté de l’agent Arby Gazarian, procède alors à l’examen des bagages du demandeur. Dans un petit sac ressemblant à du cuir noir, dissimulé dans un sac « Air Sickness bag » de la compagnie Kenya Airways, se trouvait un  autre sac de type zip lock contenant des billets de banque ainsi qu’une enveloppe scellée. Les agents des douanes y trouvent des devises pour une valeur équivalente à 12 945,72 $ CAD, soit une somme supérieure au seuil de 10 000 $ CAD dont la déclaration écrite est obligatoire aux termes de la Loi:

 

                     Dans le sac « zip lock » :                     2 billets de 100 dollars canadiens

8 billets de 50 dollars américains

93 billets de 100 dollars américains

           

                     Dans l’enveloppe scellée :                   30 billets de 100 dollars américains

 

[10]           L’agent à la ligne d’inspection secondaire demande au demandeur la raison pour laquelle il n’a pas déclaré la somme totale à l’agent à la ligne d’inspection primaire.

 

[11]           Le demandeur répond dans un premier temps avoir déclaré à l’agent à la ligne d’inspection primaire qu’il avait en sa possession la somme de 3 000 $ US, en plus de la somme de 9 000 $ US. Puis, le demandeur modifie sa version pour déclarer qu’il n’a pas mentionné à l’agent primaire la somme de 3 000 $ US puisque cette somme ne lui appartenait pas, et qu’il ignorait la procédure. L’agent rappelle alors au demandeur qu’il a voyagé à l’étranger 17 fois au cours des 6 années précédentes, dont 6 fois en 2009 et 4 fois en 2010.

 

[12]           L’agent à la ligne d’inspection secondaire questionne ensuite le demandeur sur la provenance de l’argent. Le demandeur affirme qu’il s’agit de ses revenus d’emploi et que l’argent qui se trouve dans l’enveloppe scellée est destiné à son épouse afin qu’elle achète une voiture pour un ami au Congo ou des ordinateurs s’il n’est pas possible de trouver une voiture.

 

[13]           Le demandeur affirme avoir déclaré des revenus de 18 000 $ CAD pour l’année d’imposition 2009. Étant bénéficiaire de l’aide sociale, il explique que ses voyages sont financés par l’association pour laquelle il travaille, soit le Festival international des musiques traditionnelles du Canada. En ce qui concerne ses déplacements en Chine, ils ont été payés par un ami pour lequel il travaille bénévolement. Le demandeur œuvre à titre de styliste et couturier, et confectionne des vêtements pour cet ami qui, en échange, lui donne en cadeaux des vêtements pour lui-même, sa femme et ses enfants.

 

[14]           L’agent des douanes décide de saisir, à titre de confiscation aux termes du paragraphe 18 (1) de la Loi, la somme équivalente à 12 945, 72 $ CAD en possession du demandeur, au motif que ces devises n’ont pas été déclarées conformément à l’article 12 de la Loi.

 

[15]           L’agent n’accorde pas au demandeur de  mainlevée en application du paragraphe 18(2) de la Loi, puisqu’il soupçonne que les espèces saisies proviennent de la criminalité. Le demandeur proteste et soutient  qu’il a reçu cet argent en avril 2010 au Congo en vendant ses droits sur des CD de musique pour la somme de 7000 $ US. Par la suite, il est revenu au Canada avec cette somme qu’il voulait réinvestir lors de son prochain voyage au Congo. Étant donné qu’il n’a pas trouvé d’occasion d’affaires, il est à nouveau retourné au Canada avec l’argent.

 

[16]           Les motifs pour la confiscation et le refus de la mainlevée se retrouvent aux pages 2 et 3 du rapport narratif de l’agent des douanes :

« - L’argent était dissimulé dans un sac « Air Sickness Bag » de la compagnie Kenya Airways;

 

- Le passager voyage avec 2 copies valides de son permis de conduire;

 

- Le passager ne peut prouver l’origine de l’argent;

 

- Le passager voyage régulièrement à l’étranger ce qui pas compatible avec les revenus déclarés par le sujet;

 

- Le passager voyage avec deux passeports dont un où la date d’expiration n’est pas échue mais cancellé. Le second passeport a été émis quelques jours avant son départ;

 

- Passager voyage avec des photos format passeport. Déclare qu’il s’agit de photos de son ex femme, mais le nom sur une des photos ne correspond pas au nom donné par le passager;

 

- Le passager voyage avec la carte d’assurance maladie de sa fille restée au Canada, tandis que ce dernier a quitté le Canada depuis le 22 aout 2010;

 

- Le passager a dans ses bagages un chéquier au nom d’une autre personne et déclare que cette personne avait oublié son chéquier à son domicile lors d’un voyage en juin 2010. Interrogé sur la raison pour laquelle il voyageait avec le chéquier, le passager n’a aucune explication;

 

- Le passager voyage avec des billets aller simple;

 

- Le passager a traversé à plus d’une reprise des frontières internationales avec une grande somme d’argent;

 

- Le passager […] a déclaré la somme de 9000 $ US afin d’éviter d’expliquer la provenance de l’argent;

 

- Selon l’information reçue de l’agent de renseignement de l’ASFC Mark Solomon, le passager aurait été intercepté en 2002 à Queenston Bridge avec en sa [possession] des cartes d’identité frauduleuses. En 2008, aurait acheté un billet d’avion avec une carte de crédit frauduleuse.

 

- Le passager a tenté d’inviter au Canada un groupe de musiciens dont le visa touristique a été refusé par l’ambassade à Nairobi le 13 octobre 2010. Pourtant, j’ai demandé au passager qu’elle était le motif de son voyage au Kenya. Il a déclaré avoir été au Kenya dans le but de faire soigner sa sœur » (dossier de défendeur Vol.1, pages 20-21). 

 

[17]           Le 29 octobre 2010, le demandeur présente au ministre une demande de révision aux termes de l’article 25 de la Loi. Dans cette demande de révision, il reconnaît  ne pas avoir déclaré la totalité des espèces saisies. Il réitère que la somme de 3000 $ US dans l’enveloppe scellée ne lui appartenait pas. Il précise que cette somme lui avait été donnée par un homme du Congo et qu’elle était destinée à une dame Makaya, résidente de Montréal. Le demandeur explique ensuite avoir besoin de cet argent et demande qu’on la lui remette. Il joint à sa demande plusieurs documents.

 

[18]           Le 5 novembre 2010, l’ASFC accuse réception de la demande de révision ministérielle.

 

[19]           Le demandeur affirme notamment ce qui suit :

                    « En 2003, il a ouvert en Ontario une maison de production de musique, Roma Productions, dont le but est la production de musique africaine au Canada. Les affaires de cette société « ne marchent pas bien ».

 

                    Le demandeur déménage au Québec en 2004. De 2005 à 2008, les affaires ne marchent pas bien non plus. Le demandeur aurait alors demandé à un ami avocat de Montréal de lui prêter 6 000,00 dollars pour l’achat d’une licence sur les droits de 3 albums de musique africaine. Le 15 août 2008, il aurait acheté au Congo cette licence d’un artiste africain, M. Defao Matumona, pour la somme de 15 000,00 dollars américains, dont 6 000,00 dollars américains « avant la signature du contrat d’achat », et la balance de 9 000,00 dollars américains payable au plus tard le 15 décembre 2010.

 

                    En avril 2010, le demandeur aurait vendu au Congo 3 licences de ces albums à un producteur de Kinshasa pour une somme de 7 000,00 dollars américains. Ce producteur, M. Baoby Mansiantima(sic) Fidele acquérait ainsi le droit de distribution desdits albums sur les territoires de la République démocratique du Congo, de l’Angola et du Congo Brazzaville.

 

                    Cette vente de licence pour un montant de 7 000,00 dollars américains survenue au mois d’avril 2010 visait à permettre au demandeur de payer sa dette de 9 000,00 dollars américains contractée en août 2008 aux mains de Defao Matumona et qui devait être payée au plus tard le 15 décembre 2010.

 

                    Le demandeur serait donc revenu au Canada en avril 2010 avec cette somme de 7 000,00 dollars américains qu’il aurait gardée chez lui en attente d’une bonne occasion d’affaire.

 

                    En août 2010, le demandeur aurait appris que sa sœur habitant en Afrique était gravement malade; il serait retourné en Afrique avec une somme de 9 000,00 dollars afin de payer la balance de sa dette contractée en août 2008 pour l’achat des licences à l’artiste Defao Matumona.

 

                    L’artiste en question n’étant pas en République démocratique du Congo pour une longue période, le demandeur est revenu au Canada avec cette somme de 9 000,00 dollars américains en petites coupures de 100 dollars, lesquels ont été saisis par un agent des douanes. Le demandeur devait ultimement rencontrer le réputé artiste aux États –Unis et lui remettre la somme de 9 000,00 dollars américains vers la fin de l’année 2010.

 

                    Avant de quitter le Congo pour le Canada, un dénommé Papy Makasi aurait confié au demandeur une somme de 3 000,00 dollars américains en petites coupures de 100 dollars à l’attention d’une dénommée Madame Makaya Nzau, résidente de Montréal, afin que cette dernière achète au Canada une voiture destinée au dénommé Makasi, résident en République démocratique du Congo. Le demandeur n’explique pas comment cette voiture achetée au Canada se serait rendue en République démocratique du Congo depuis le Canada, et avec quel argent.

 

                    Le demandeur demande grâce à l’arbitre chargée de sa demande de révision ministérielle, et il lui précise qu’il n’y a pas de banques au Congo qui fassent affaires avec des banques canadiennes, et que même l’artiste à qui il devait 9 000,00 dollars américains, qui se produit en Afrique de l’Est et aux États-Unis, n’a pas de compte bancaire. » (voir dossier du défendeur, Vol. 2, pages 393-394).

 

[20]           Dans les pièces déposées à l’appui de ses représentations du 12 novembre 2010, le demandeur précise que ses  revenus proviennent de la vente de CD et DVD de musique africaine à des commerçants canadiens et de la revente de vêtements achetés en Chine.

 

[21]           Le 16 novembre 2010, l’arbitre accuse réception de la demande de révision du demandeur déposée le 29 octobre 2010. L’arbitre transmet au demandeur l’avis exposant les circonstances de la saisie. L’arbitre précise d’abord qu’après une lecture initiale du dossier, il appert que la saisie est fondée puisqu’une somme supérieure à 10 000 $ CAD n’a pas été déclarée et ce, contrairement  au paragraphe 12(1) de la Loi.

 

[22]           L’arbitre ajoute qu’elle n’est pas en mesure de confirmer avec exactitude la provenance légale des devises saisies. Elle indique par ailleurs que le demandeur a fourni beaucoup de documentation à l’appui de sa demande, mais aucun élément de preuve pour établir l’origine légitime des devises. L’arbitre demande précisément au demandeur de déposer de la documentation ou des éléments de preuve démontrant clairement l’origine légitime des devises saisies. L’arbitre transmet également au demandeur les rapports narratifs rédigés par les agents des douanes au moment de la saisie.

 

[23]           Le 14 décembre 2010, l’arbitre accuse réception des représentations écrites du demandeur qui datent du 12 novembre 2010. L’arbitre demande à nouveau au demandeur des preuves de l’origine légitime des sommes saisies.

 

[24]           Les 12 et 25 janvier 2011, le demandeur transmet à l’arbitre des représentations écrites supplémentaires à l’appui de sa demande.

 

[25]           Le 17 février 2011, l’arbitre explique à nouveau au demandeur la nécessité de démontrer l’origine légitime des espèces saisies. À titre d’exemple, l’arbitre demande des preuves transactionnelles permettant de démonter comment le dénommé Makasi, propriétaire allégué de la somme de 3 000 $ US saisie, en possession du demandeur, s’y est pris pour se la procurer. L’arbitre demande des preuves transactionnelles permettant d’établir la légitimité des sommes saisies.

 

[26]           Le 18 mars 2011, le demandeur dépose des représentations supplémentaires et documents à l’arbitre.

 

[27]           Du 28 avril 2011 au 13 janvier 2012, l’arbitre et le demandeur ont des échanges écrits relativement au dossier : l’arbitre exige à nouveau du demandeur des preuves démontrant l’origine légitime des sommes saisies.

 

[28]           Le 12 avril 2012, l’arbitre Cayer rédige son « Résumé de l’ affaire et motifs de la décision » qui énumère les éléments de preuve recueillis durant le processus d’arbitrage. Ce document contient une recommandation destinée au délégué du ministre chargé de rendre les décisions prévues aux termes des articles 27 et 29 de la Loi. Ce document est ensuite remis au délégué du ministre, M. Jean-Marc Dupuis, pour la prise de décision.

 

[29]           Le 17 mai 2012, monsieur Dupuis rend ses décisions aux termes des articles 27 et 29 de la Loi : il décide qu’il y a eu infraction à la Loi eu égard aux espèces saisies, et que celles-ci devront être retenues à titre de confiscation.

 

[30]           Le 22 juin 2012, le demandeur dépose une demande de révision judiciaire à l’encontre des décisions rendues par le ministre le 17 mai 2012. Cet avis de demande est appuyé d’un affidavit signifié au défendeur, conformément à la règle 306 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106, le 23 juillet 2012.

 

[31]           Le demandeur n’a pas déposé d’action aux termes de l’article 30 de la Loi pour contester la décision ministérielle rendue en vertu de l’article 27 de la Loi.

 

III.             Législation

 

[32]           Les articles de loi applicables en l’instance sont reproduits en annexe au présent jugement.

 

IV.       Question en litige et norme de contrôle

 

A.        Question en litige

 

                     La décision du délégué du ministre de confirmer la confiscation des espèces saisies était-elle raisonnable?

 

B.        Norme de contrôle

 

[33]           La norme de contrôle qui s’applique à la décision du ministre prévue à l’article 29 de la Loi est celle de la décision raisonnable (voir Sellathurai c Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile (Solliciteur général du Canada), 2008 CAF 255 au para 25).

 

V.        Position des parties

 

A.        Position du demandeur

 

[34]           Le demandeur soutient que la décision de confirmer la confiscation est déraisonnable. 

 

[35]           Le demandeur prétend avoir établi la légitimité de la provenance des fonds en question. Sa version des faits n’a pas changé et est bien soutenue par la preuve documentaire.

 

[36]           Le demandeur souligne que les sommes en jeu sont importantes pour lui et ses nombreux efforts pour récupérer ces sommes ne supportent pas la thèse qu’il soit un criminel international.  

 

[37]           Le demandeur insiste qu’il n’a pas tenté de cacher le somme de 3 000 $ qu’il portait sur lui lorsqu’il remplissait la feuille de déclaration écrite des douanes. Le demandeur croyait seulement devoir déclarer les sommes qui lui appartenaient. Vu que la somme de 3 000 $ ne lui appartenait pas, il ne l’a pas déclarée.

 

B.        Position du défendeur

 

[38]           Le défendeur rappelle, dans un premier temps, que le demandeur reconnaît dans son Mémoire des faits et du droit avoir omis de déclarer qu’il était en possession d’une somme supérieure à 10 000 $ CAD à son arrivée à l’aéroport Pierre-Elliott-Trudeau le 15 octobre 2010. Il souligne que le demandeur prétend, néanmoins, avoir établi l’origine légitime des sommes saisies durant le processus d’arbitrage devant le ministre.

 

[39]           Le défendeur soutient que les éléments de preuve présentés par le demandeur aux arbitres de l’ASFC ne démontrent d’aucune façon l’origine légitime des sommes saisies. Le demandeur n’a déposé aucun élément de preuve crédible indépendant à l’appui de ses prétentions (e.g. copies de chèques, documents de conversion de devises en dollars américains pour la totalité des sommes saisies, preuve de dépôts bancaires sur une période de plusieurs années).  

 

[40]           Le défendeur prétend que les documents bancaires présentés par le demandeur n’établissent pas l’origine des sommes en question. Il rappelle que cette Cour a déjà déterminé que des documents bancaires n’établissent aucunement l’origine des espèces, mais plutôt leur possession (voir Tourki c Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2007 CF 746 au para 38; Sellathurai c Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2007 CF 208 au para 44). D’ailleurs, les certificats de bonne conduite de Messieurs Mansiatima et Makasi déposés par le demandeur ne permettent pas de conclure à la provenance légitime des fonds saisis.

 

[41]           En plus de l’incapacité du demandeur de démontrer la provenance légitime des espèces en question, le défendeur soulève plusieurs autres éléments factuels pour justifier la décision du délégué du ministre de soupçonner qu’il s’agit de produits de la criminalité, notamment : 1) les différentes versions données quant à la propriété et la provenance des sommes; 2) le fait que le demandeur voyage à l’étranger fréquemment tout en étant bénéficiaire de l’aide sociale et sans aucune preuve de revenus permettant de payer pour ses billets d’avion; et 3) l’absence d’explication pendant le processus d’arbitrage de sa relation entre le chauffeur de taxi du Congo qui lui aurait volontairement remis une somme de 3 000 $ US en petites coupures à l’attention d’une résidente de Montréal, au sujet de laquelle on n’a aucune information non plus.   

 

[42]           Le défendeur conclut ses arguments en faisant sienne la conclusion de la Cour dans Sidhu c Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2010 CF 911 au para 44 :

Vu l’ensemble de la preuve dont elle disposait, la déléguée du ministre a confirmé la confiscation. On ne saurait qualifier sa conclusion de déraisonnable. En effet, sa conclusion que la preuve n’établissait pas que les espèces provenaient d’une source légitime était certainement une des conclusions raisonnables qu’il lui était loisible de tirer.

 

VI.       Analyse

 

[43]           Il est utile à cette étape de rappeler les grands principes de la législation applicables en l’espèce afin de bien comprendre le fardeau de preuve qui incombe au demandeur. Dans Guillaume c Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2013 CF 143 [Guillaume], le juge Boivin énonce

[34]  […] La Loi vise à établir un régime de déclaration obligatoire des opérations financières douteuses et des mouvements transfrontaliers d’espèces et d’effets, tel qu’énoncé à l’alinéa 3a)(ii) de la Loi. La Partie 2 de la Loi prévoit donc un régime de déclaration des espèces en vertu duquel un importateur ou un exportateur doit déclarer par écrit à un agent des douanes toute importation ou exportation d’une quantité d’espèces d’une valeur égale ou supérieure au montant prescrit, soit      10 000 $ (paragraphes 12(1) et (3) de la Loi; articles 2 et 3 du Règlement). L’importation ou l’exportation d’espèces d’une valeur égale ou supérieure à 10 000 $ n’est pas pour autant illégale en soi – la Loi exige simplement une déclaration à cet effet.

 

[35]  L’omission de déclarer entraîne la saisie des espèces en vertu du paragraphe 18(1) de la Loi. En vertu du paragraphe 18(2), l’agent des douanes doit ensuite décider s’il y a des motifs raisonnables de soupçonner qu’il s’agit de produits de la criminalité au sens du paragraphe 462.3(1) du Code criminel, LRC 1985, c C-46. Si de tels motifs existent, les espèces ne peuvent être restituées. Si de tels soupçons n’existent pas, l’agent doit restituer les espèces, moyennant une pénalité monétaire. 

 

[36]  Selon les articles 23 et 24 de la Loi, une confiscation prend son plein effet aussitôt qu’il y a contravention au paragraphe 12(1), est définitive et n’est susceptible de révision qu’en fonction des articles 24.1 et 25 de la Loi. En vertu de l’article 25, l’individu peut demander au ministre de décider s’il y a eu contravention au paragraphe 12(1) dans les quatre-vingt-dix (90) jours qui suivent la saisie. Selon le paragraphe 26(1) de la Loi, l’ASFC doit signifier un avis exposant les circonstances de la saisie à la personne concernée, qui à son tour disposera de trente (30) jours pour produire tous moyens de preuve à l’appui de ses prétentions (paragraphe 26(2) de la Loi). Le ministre dispose ensuite de quatre-vingt-dix (90) jours pour décider s’il y a en effet eu contravention au paragraphe 12(1), c’est-à-dire, un défaut de déclarer (article 27 de la Loi). Si le ministre décide qu’il n’y a pas eu contravention au paragraphe 12(1), les espèces saisies sont restituées (article 28 de la Loi). Si le ministre décide qu’il y a eu contravention au paragraphe 12(1), l’article 29 de la Loi s’applique et le ministre peut restituer les espèces avec ou sans pénalité; restituer tout ou une partie de la pénalité; ou confirmer la confiscation des espèces.

 

[37]  En vertu de l’article 30 de la Loi, l’individu qui a contesté la saisie en demandant une décision en vertu de l’article 27 à l’effet de savoir s’il y a eu défaut de déclarer, peut en appeler par voie d’action à la Cour fédérale. Cette action se limite à déterminer la validité de la décision prise au terme du paragraphe 27(1), à savoir s’il y a bel et bien eu contravention au paragraphe 12(1) (défaut de déclarer). Il ne s’agit pas d’une telle action dans le cas présent. La présente est plutôt une demande de contrôle judiciaire, conformément à l’article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales, de la décision ministérielle discrétionnaire prise en vertu de l’article 29 de la Loi de confirmer la confiscation. Le contrôle judiciaire est le seul recours pour un individu qui désire contester une décision ministérielle prise à l’article 29 (Guillaume précitée, aux paras 34 à 37).

 

[44]           La Cour doit  donc déterminer si la décision prise par le délégué du ministre, aux termes de l’article 29 de la Loi, de confirmer la confiscation des espèces saisies par l’agent des douanes est raisonnable. Plus précisément, la Cour doit voir  « si la conclusion du [délégué du] ministre au sujet de la légitimité de la provenance des fonds [saisis], vu l’ensemble de la preuve dont il disposait » était raisonnable (Sellathurai c Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2008 CAF 255 au para 51).  

 

[45]           Après avoir confisqué l’argent (12 700 $ US et 200 $ CAD) aux termes du paragraphe 18(1) de la Loi, l’agent des douanes décide ensuite, en appliquant le paragraphe 18(2) de la Loi, de ne pas restituer l’argent au demandeur parce qu’il soupçonne qu’il s’agit de produits de la criminalité.

 

[46]           Le demandeur ne réussit pas à convaincre le délégué du ministre que les sommes en question ne proviennent pas de la criminalité. Autrement dit, il n’établit pas la provenance légitime de l’argent. Le délégué du ministre décide de ne pas exercer son pouvoir discrétionnaire, en vertu de l’article 29 de la Loi, pour annuler la confiscation.

 

[47]           Tel que nous le précisons ci-haut, les motifs l’agent des douanes, pour justifier la confiscation et le refus de consentir une mainlevée, le 15 octobre 2010, sont les suivants :

« 1.      L’argent était dissimulé dans un sac « Air Sickness Bag » de la compagnie Kenya Airways;

 

2.         Passager voyageait avec 2 copies valides de son permis de conduire;

 

3.         Passager ne pouvait prouver l’origine de l’argent;

 

4.         Passager voyage régulièrement à l’étranger, ce qui pas compatible avec les revenus déclarés par le sujet;

 

5.         Passager voyageait avec deux passeports dont l’un était annulé même si la date d’expiration n’était pas échue et le second passeport a été émis quelques jours avant son départ;

 

6.         Passager voyageait avec des photos format passeport. Lorsque questionné, il aurait dit qu’il s’agissait de photos de son ex femme, mais le nom sur une des photos ne correspondait pas au nom donné par le passager;

 

7.         /Passager voyageait avec la carte d’assurance maladie de sa fille restée au Canada, tandis que ce dernier avait quitté le Canada depuis le 22 août 2010;

 

8.         Passager avait dans ses bagages un chéquier au nom d’une autre personne et il a indiqué que cette personne avait oublié son chéquier à son domicile lors d’un voyage en juin 2010. Interrogé sur la raison pour laquelle il voyageait avec le chéquier, le passager n’a eu aucune explication;

 

9.         Passager voyageait avec des billets aller simple;

 

10.       Passager avait traversé à plus d’une reprise des frontières internationales avec une grande somme d’argent;

 

11.       Passager a déclaré la somme de 9000 $ US afin d’éviter d’expliquer la provenance de l’argent;

 

12.       Selon l’information reçu de l’agent de renseignement de l’ASFC, le passager aurait été intercepté en 2002 à Queenston Bridge avec en sa possession des cartes d’identité frauduleuses. En 2008, il aurait acheté un billet d’avion avec une carte de crédit frauduleuse.

 

13.       Passager avait tenté d’inviter au Canada un groupe de musiciens dont le visa touristique avait été refusé par l’ambassade à Nairobi le 13 octobre 2010 - pourtant, une fois questionné sur le motif de son voyage au Kenya, il a mentionné être allé au Kenya pour soigner sa sœur » (dossier du défendeur Vol.1, pages 14-15).

 

[48]           Dans le but de convaincre le délégué du ministre que les sommes saisies proviennent de source légitime, le demandeur dépose plusieurs documents, notamment : un contrat de vente conclu le 6 avril 2010 entre le demandeur et M. Baoby Mansiantima Fidele par lequel M. Fidele s’oblige à payer 7 000 $ US en retour d’une licence pour vendre 3 albums de musique au Congo et en Angola; une copie d’une transaction de conversion de devises, survenue en août 2010, d’un montant de 4 999.38 $ CAN pour 4 750.00 $ US; des relevés bancaires présentant le détail des transactions intervenues au compte 4256 6316697 de la Banque TD entre le 15 avril et le 31 août 2010; une attestation de décès pour Kenga Sebastiao; et des affidavits de M. Papy Makasi (chauffeur de taxi) et M. Baoby Mansiantima Fidele.

 

[49]           Ayant considéré la totalité des éléments de preuve, le délégué du ministre constate que le demandeur ne démontre pas que les espèces saisies proviennent d’une source légitime. Le délégué souligne par ailleurs que la copie de la conversion de 4 999.38 $ CAN en 4 750.00 $ US ne fait aucunement état de la source des sommes saisies ni de leur origine légitime.

 

[50]           Le délégué fait remarquer également que les relevés bancaires affichent des soldes de moins de 10 $ pour les mois de juin, juillet et août pour l’année 2010.Le demandeur n’explique pas pourquoi il a omis de déposer les sommes recueillies à l’étranger (i.e. les 7 000 $ US obtenus en avril 2010) dans son compte bancaire pour gagner des intérêts. Il note ensuite qu’une « personne qui tente de blanchir des produits de la criminalité cherche à éviter toute détection, souvent en ne laissant aucun relevé de leur activité » (dossier de défendeur, vol 1, p. 16).

 

 

[51]           Après avoir considéré l’ensemble des éléments de preuve, la Cour considère que la décision du délégué est raisonnable. Le défaut du demandeur d’établir la provenance légitime des sommes saisies (e.g. copies de chèques), considéré avec les autres faits dans ce dossier, nous amène inévitablement à la conclusion que la décision du délégué du ministre fait partie des issues possibles.

 

[52]           Cette Cour a déjà déclaré que des affidavits énonçant que des fonds sont de provenance légitime ne suffisent pas (voir Sellathurai c Canada (Ministre de la Sécurité publique et la Protection civile), 2007 CF 208 au para 44; Hamam c Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2007 CF 691 au para 30).

 

[53]           La quantité d’efforts déployés par le demandeur pour récupérer les sommes saisies n’établit aucunement la provenance légitime de ces fonds. Le fait que le demandeur attaque cette décision en justice démontre qu’il désire l’annulation de la confiscation et non que les fonds saisis proviennent de source légitime, même si la Cour ne remet pas en doute sa bonne foi.

 

[54]           Même si certains des motifs énoncés par l’agent des douanes pour maintenir la confiscation des fonds nous apparaissent fort tenus, en l’instance il n’en demeure pas moins que le fardeau d’établir la provenance légitime des sommes saisies, au moyen d’éléments de preuve probants, appartient au demandeur. Après une étude attentive des pièces déposées par ce dernier, la Cour constate qu’il ne s’est pas déchargé de son fardeau. Aucun des éléments de preuve déposés ne permet de conclure à la légitimité de la provenance des fonds en question, et ce, malgré de nombreux échanges avec le défendeur. La Cour est d’avis qu’il eut été possible pour le demandeur de déposer une copie du chèque de Me Adam Atlas, tiré sur la Banque de Nouvelle-Écosse, qu’il allègue avoir encaissé contre espèces. Ce faisant, il aurait établi la provenance légitime d’au moins 7 000 $ en espèces. Il a omis de ce faire. Dans les circonstances, la Cour n’a d’autres choix que de constater que la décision du ministre de maintenir la saisie des espèces fait partie des issues possibles et donc de rejeter cette demande de révision judiciaire.

 

 


JUGEMENT

LA COUR rejette cette demande de révision judiciaire, sans frais.

 

 

« André F.J. Scott »

Juge


 

ANNEXE

 

Les dispositions suivantes de la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, LC 2000, c 17 sont pertinentes à la présente demande de révision judiciaire:

 

PARTIE 2

 

DÉCLARATION DES ESPÈCES ET EFFETS

 

Déclaration

 

Déclaration

 

12. (1) Les personnes ou entités visées au paragraphe (3) sont tenues de déclarer à l'agent, conformément aux règlements, l'importation ou l'exportation des espèces ou effets d'une valeur égale ou supérieure au montant réglementaire.

 

 

Exception

 

(2) Une personne ou une entité n’est pas tenue de faire une déclaration en vertu du paragraphe (1) à l’égard d’une importation ou d’une exportation si les conditions réglementaires sont réunies à l’égard de la personne, de l’entité, de l’importation ou de l’exportation et si la personne ou l’entité convainc un agent de ce fait.

 

Déclarant

 

(3) Le déclarant est, selon le cas:

 

 

a) la personne ayant en sa possession effective ou parmi ses bagages les espèces ou effets se trouvant à bord du moyen de transport par lequel elle arrive au Canada ou quitte le pays ou la personne qui, dans les circonstances réglementaires, est responsable du moyen de transport;

 

 

 

b) s’agissant d’espèces ou d’effets importés par messager ou par courrier, l’exportateur étranger ou, sur notification aux termes du paragraphe 14(2), l’importateur;

 

 

 

c) l’exportateur des espèces ou effets exportés par messager ou par courrier;

 

 

 

 

d) le responsable du moyen de transport arrivé au Canada ou qui a quitté le pays et à bord duquel se trouvent des espèces ou effets autres que ceux visés à l’alinéa a) ou importés ou exportés par courrier;

 

 

 

e) dans les autres cas, la personne pour le compte de laquelle les espèces ou effets sont importés ou exportés.

 

 

Obligation du déclarant

 

 

(4) Une fois la déclaration faite, la personne qui entre au Canada ou quitte le pays avec les espèces ou effets doit :

 

 

 

a) répondre véridiquement aux questions que lui pose l’agent à l’égard des renseignements à déclarer en application du paragraphe (1);

 

b) à la demande de l’agent, lui présenter les espèces ou effets qu’elle transporte, décharger les moyens de transport et en ouvrir les parties et ouvrir ou défaire les colis et autres contenants que l’agent veut examiner.

 

 

Transmission au Centre

 

(5) L’agent fait parvenir au Centre les déclarations recueillies en application du paragraphe (1).

 

[…]

 

PART 2

 

REPORTING OF CURRENCY AND MONETARY INSTRUMENTS

 

Reporting

 

Currency and monetary instruments

 

 (1) Every person or entity referred to in subsection (3) shall report to an officer, in accordance with the regulations, the importation or exportation of currency or monetary instruments of a value equal to or greater than the prescribed amount.

 

Limitation

 

(2) A person or entity is not required to make a report under subsection (1) in respect of an activity if the prescribed conditions are met in respect of the person, entity or activity, and if the person or entity satisfies an officer that those conditions have been met.

 

 

Who must report

 

(3) Currency or monetary instruments shall be reported under subsection (1)

 

(a) in the case of currency or monetary instruments in the actual possession of a person arriving in or departing from Canada, or that form part of their baggage if they and their baggage are being carried on board the same conveyance, by that person or, in prescribed circumstances, by the person in charge of the conveyance;

 

(b) in the case of currency or monetary instruments imported into Canada by courier or as mail, by the exporter of the currency or monetary instruments or, on receiving notice under subsection 14(2), by the importer;

 

(c) in the case of currency or monetary instruments exported from Canada by courier or as mail, by the exporter of the currency or monetary instruments;

 

(d) in the case of currency or monetary instruments, other than those referred to in paragraph (a) or imported or exported as mail, that are on board a conveyance arriving in or departing from Canada, by the person in charge of the conveyance; and

 

(e) in any other case, by the person on whose behalf the currency or monetary instruments are imported or exported.

 

Duty to answer and comply with the request of an officer

 

(4) If a report is made in respect of currency or monetary instruments, the person arriving in or departing from Canada with the currency or monetary instruments shall

 

(a) answer truthfully any questions that the officer asks with respect to the information required to be contained in the report; and

 

(b) on request of an officer, present the currency or monetary instruments that they are carrying or transporting, unload any conveyance or part of a conveyance or baggage and open or unpack any package or container that the officer wishes to examine.

 

Sending reports to Centre

 

(5) Officers shall send the reports they receive under subsection (1) to the Centre.

 

. . .

 

Saisie

 

Saisie et confiscation

 

18. (1) S’il a des motifs raisonnables de croire qu’il y a eu contravention au paragraphe 12(1), l’agent peut saisir à titre de confiscation les espèces ou effets.

 

Mainlevée

 

 

(2) Sur réception du paiement de la pénalité réglementaire, l'agent restitue au saisi ou au propriétaire légitime les espèces ou effets saisis sauf s'il soupçonne, pour des motifs raisonnables, qu'il s'agit de produits de la criminalité au sens du paragraphe 462.3(1) du Code criminel ou de fonds destinés au financement des activités terroristes.

 

 

 

 

Avis de la saisie

 

(3) L’agent qui procède à la saisie-confiscation prévue au paragraphe (1) :

 

 

a)  donne au saisi, dans le cas où les espèces ou effets sont importés ou exportés autrement que par courrier, un avis écrit de la saisie et du droit de révision et d’appel établi aux articles 25 et 30;

 

b)  donne à l’exportateur, dans le cas où les espèces ou effets sont importés ou exportés par courrier et son adresse est connue, un avis écrit de la saisie et du droit de révision et d’appel établi aux articles 25 et 30;

 

c)  prend les mesures convenables, eu égard aux circonstances, pour aviser de la saisie toute personne dont il croit, pour des motifs raisonnables, qu’elle est recevable à présenter, à l’égard des espèces ou effets saisis, la requête visée à l’article 32.

 

Signification de l’avis

 

(4) Il suffit, pour que l’avis visé à l’alinéa (3) b) soit considéré comme signifié, qu’il soit envoyé en recommandé à l’exportateur.

 

[…]

 

Seizures

 

Seizure and forfeiture

 

18. (1) If an officer believes on reasonable grounds that subsection 12(1) has been contravened, the officer may seize as forfeit the currency or monetary instruments.

 

Return of seized currency or monetary instruments

 

(2) The officer shall, on payment of a penalty in the prescribed amount, return the seized currency or monetary instruments to the individual from whom they were seized or to the lawful owner unless the officer has reasonable grounds to suspect that the currency or monetary instruments are proceeds of crime within the meaning of subsection 462.3(1) of the Criminal Code or funds for use in the financing of terrorist activities.

 

Notice of seizure

 

(3) An officer who seizes currency or monetary instruments under subsection (1) shall

 

(a) if they were not imported or exported as mail, give the person from whom they were seized written notice of the seizure and of the right to review and appeal set out in sections 25 and 30;

 

 

(b) if they were imported or exported as mail and the address of the exporter is known, give the exporter written notice of the seizure and of the right to review and appeal set out in sections 25 and 30; and

 

(c) take the measures that are reasonable in the circumstances to give notice of the seizure to any person whom the officer believes on reasonable grounds is entitled to make an application under section 32 in respect of the currency or monetary instruments.

 

 

Service of notice

 

(4) The service of a notice under paragraph (3)(b) is sufficient if it is sent by registered mail addressed to the exporter.

 

. . .

Confiscation

 

Moment de la confiscation

 

23. Sous réserve du paragraphe 18(2) et des articles 25 à 31, les espèces ou effets saisis en application du paragraphe 18(1) sont confisqués au profit de Sa Majesté du chef du Canada à compter de la contravention au paragraphe 12(1) qui a motivé la saisie. La confiscation produit dès lors son plein effet et n’est assujettie à aucune autre formalité.

 

 

 

 

 

Forfeiture

 

Time of forfeiture

 

23. Subject to subsection 18(2) and sections 25 to 31, currency or monetary instruments seized as forfeit under subsection 18(1) are forfeited to Her Majesty in right of Canada from the time of the contravention of subsection 12(1) in respect of which they were seized, and no act or proceeding after the forfeiture is necessary to effect the forfeiture.

Révision et appel

 

Conditions de révision

 

24. La saisie-confiscation d’espèces ou d’effets effectuée en vertu de la présente partie est définitive et n’est susceptible de révision, de rejet ou de toute autre forme d’intervention que dans la mesure et selon les modalités prévues aux articles 24.1 et 25.

 

 

Review and Appeal

 

Review of forfeiture

 

24. The forfeiture of currency or monetary instruments seized under this Part is final and is not subject to review or to be set aside or otherwise dealt with except to the extent and in the manner provided by sections 24.1 and 25.

Demande de révision

 

25. La personne entre les mains de qui ont été saisis des espèces ou effets en vertu de l'article 18 ou leur propriétaire légitime peut, dans les quatre-vingt-dix jours suivant la saisie, demander au ministre de décider s'il y a eu contravention au paragraphe 12(1) en donnant un avis écrit à l'agent qui les a saisis ou à un agent du bureau de douane le plus proche du lieu de la saisie.

Request for Minister’s decision

 

25. A person from whom currency or monetary instruments were seized under section 18, or the lawful owner of the currency or monetary instruments, may within 90 days after the date of the seizure request a decision of the Minister as to whether subsection 12(1) was contravened, by giving notice in writing to the officer who seized the currency or monetary instruments or to an officer at the customs office closest to the place where the seizure took place.

 

 

Signification du président

 

26. (1) Le président signifie sans délai par écrit à la personne qui a présenté la demande visée à l’article 25 un avis exposant les circonstances de la saisie à l’origine de la demande.

 

 

Moyens de preuve

 

(2) Le demandeur dispose de trente jours à compter de la signification de l’avis pour produire tous moyens de preuve à l’appui de ses prétentions.

Notice of President

 

26. (1) If a decision of the Minister is requested under section 25, the President shall without delay serve on the person who requested it written notice of the circumstances of the seizure in respect of which the decision is requested.

 

Evidence

 

(2) The person on whom a notice is served under subsection (1) may, within 30 days after the notice is served, furnish any evidence in the matter that they desire to furnish.

 

 

Décision du ministre

 

27. (1) Dans les quatre-vingt-dix jours qui suivent l’expiration du délai mentionné au paragraphe 26(2), le ministre décide s’il y a eu contravention au paragraphe 12(1).

 

Report de la décision

 

(2) Dans le cas où des poursuites pour infraction de recyclage des produits de la criminalité ou pour infraction de financement des activités terroristes ont été intentées relativement aux espèces ou effets saisis, le ministre peut reporter la décision, mais celle-ci doit être prise dans les trente jours suivant l'issue des poursuites.

 

Avis de la décision

 

(3) Le ministre signifie sans délai par écrit à la personne qui a fait la demande un avis de la décision, motifs à l’appui.

 

 

[…]

 

Decision of the Minister

 

27. (1) Within 90 days after the expiry of the period referred to in subsection 26(2), the Minister shall decide whether subsection 12(1) was contravened.

 

Deferral of decision

 

(2) If charges are laid with respect to a money laundering offence or a terrorist activity financing offence in respect of the currency or monetary instruments seized, the Minister may defer making a decision but shall make it in any case no later than 30 days after the conclusion of all court proceedings in respect of those charges.

 

Notice of decision

 

(3) The Minister shall, without delay after making a decision, serve on the person who requested it a written notice of the decision together with the reasons for it.

 

. . .

Cas de contravention

 

29. (1) S’il décide qu’il y a eu contravention au paragraphe 12(1), le ministre peut, aux conditions qu’il fixe :

 

 

a) soit restituer les espèces ou effets ou, sous réserve du paragraphe (2), la valeur de ceux-ci à la date où le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux est informé de la décision, sur réception de la pénalité réglementaire ou sans pénalité;

 

 

b) soit restituer tout ou partie de la pénalité versée en application du paragraphe 18(2);

 

c) soit confirmer la confiscation des espèces ou effets au profit de Sa Majesté du chef du Canada, sous réserve de toute ordonnance rendue en application des articles 33 ou 34.

 

Le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, dès qu’il en est informé, prend les mesures nécessaires à l’application des alinéas a) ou b).

 

 

Limitation du montant versé

 

(2) En cas de vente ou autre forme d’aliénation des espèces ou effets en vertu de la Loi sur l’administration des biens saisis, le montant de la somme versée en vertu de l’alinéa (1)a) ne peut être supérieur au produit éventuel de la vente ou de l’aliénation, duquel sont soustraits les frais afférents exposés par Sa Majesté; à défaut de produit de l’aliénation, aucun paiement n’est effectué.

 

 

 

If there is a contravention

 

29. (1) If the Minister decides that subsection 12(1) was contravened, the Minister may, subject to the terms and conditions that the Minister may determine,

 

(a) decide that the currency or monetary instruments or, subject to subsection (2), an amount of money equal to their value on the day the Minister of Public Works and Government Services is informed of the decision, be returned, on payment of a penalty in the prescribed amount or without penalty;

 

(b) decide that any penalty or portion of any penalty that was paid under subsection 18(2) be remitted; or

 

(c) subject to any order made under section 33 or 34, confirm that the currency or monetary instruments are forfeited to Her Majesty in right of Canada.

 

The Minister of Public Works and Government Services shall give effect to a decision of the Minister under paragraph (a) or (b) on being informed of it.

 

 

Limit on amount paid

 

(2) The total amount paid under paragraph (1)(a) shall, if the currency or monetary instruments were sold or otherwise disposed of under the Seized Property Management Act, not exceed the proceeds of the sale or disposition, if any, less any costs incurred by Her Majesty in respect of the currency or monetary instruments.

Cour fédérale

 

30. (1) La personne qui a demandé que soit rendue une décision en vertu de l’article 27 peut, dans les quatre-vingt-dix jours suivant la communication de cette décision, en appeler par voie d’action à la Cour fédérale à titre de demandeur, le ministre étant le défendeur.

 

Action ordinaire

 

(2) La Loi sur les Cours fédérales et les règles prises aux termes de cette loi applicables aux actions ordinaires s'appliquent aux actions intentées en vertu du paragraphe (1), avec les adaptations nécessaires occasionnées par les règles propres à ces actions.

 

Restitution au requérant

 

(3) Le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, dès qu’il en a été informé, prend les mesures nécessaires pour donner effet à la décision de la Cour.

 

Limitation du montant versé

 

(4) En cas de vente ou autre forme d’aliénation des espèces ou effets en vertu de la Loi sur l’administration des biens saisis, le montant de la somme qui peut être versée en vertu du paragraphe (3) ne peut être supérieur au produit éventuel de la vente ou de l’aliénation, duquel sont soustraits les frais afférents exposés par Sa Majesté; à défaut de produit de l’aliénation, aucun paiement n’est effectué.

Appeal to Federal Court

 

30. (1) A person who requests a decision of the Minister under section 27 may, within 90 days after being notified of the decision, appeal the decision by way of an action in the Federal Court in which the person is the plaintiff and the Minister is the defendant.

 

 

Ordinary action

 

(2) The Federal Courts Act and the rules made under that Act that apply to ordinary actions apply to actions instituted under subsection (1) except as varied by special rules made in respect of such actions.

 

 

 

Delivery after final order

 

(3) The Minister of Public Works and Government Services shall give effect to the decision of the Court on being informed of it.

 

Limit on amount paid

 

(4) If the currency or monetary instruments were sold or otherwise disposed of under the Seized Property Management Act, the total amount that can be paid under subsection (3) shall not exceed the proceeds of the sale or disposition, if any, less any costs incurred by Her Majesty in respect of the currency or monetary instruments.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        T-1229-12

 

INTITULÉ :                                      ROCCO SEBASTIAO

                                                            c

                                                            LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE

                                                            ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :             8 mai 2013

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT:                             LE JUGE SCOTT

 

DATE DES MOTIFS :                     21 mai 2013

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Rocco Sebastiao

 

POUR LE DEMANDEUR

(POUR SON PROPRE COMPTE)

 

Maguy Hachem

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Rocco Sebastiao

Montréal (Québec)

POUR LE DEMANDEUR

(POUR SON PROPRE COMPTE)

 

 

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.