Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20130527

Dossier : IMM‑12568‑12

Référence : 2013 CF 554

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 27 mai 2013

En présence de Monsieur le juge Boivin

 

 

ENTRE :

 

DMITRI ALEXANDROVICH SMIRNOV

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

           MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande fondée sur le paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la Loi), visant le contrôle judiciaire de la décision en date du 29 novembre 2012 par laquelle l’agente de Citoyenneté et Immigration Canada chargée du dossier (l’agente) a rejeté la demande de visa de résidence permanente présentée par le demandeur au titre de la catégorie de l’expérience canadienne, estimant qu’il ne satisfaisait pas aux exigences du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002‑227 (le Règlement), en matière de compétence dans les langues officielles. Pour les motifs suivants, la demande de contrôle judiciaire sera rejetée.

 

Les faits

[2]               M. Dmitri Smirnov (le demandeur), citoyen russe, est sourd de naissance. Il communique principalement au moyen du langage gestuel (dossier de la demande, affidavit du demandeur, p 8). Selon lui, l’éducation primaire et secondaire dispensée aux personnes sourdes en Russie n’était pas suffisamment adaptée à leurs besoins, et il a quitté l’école à ce qu’il estime correspondre à la dixième année au Canada, mais il pense que les matières apprises correspondent à ce qui est enseigné en huitième année au Canada (dossier de la demande, affidavit du demandeur, p 9‑10). Il maîtrise à présent l’American Sign Language (ASL), qu’il a appris à son arrivée aux États‑Unis (dossier de la demande, affidavit du demandeur, p 10). Il a vécu aux États‑Unis en qualité de résident permanent jusqu’à son déménagement au Canada en février 2006 (dossier du défendeur, affidavit de Jennifer Carlile, onglet 2, para 6; dossier du Tribunal, p 95). Depuis son arrivée au Canada, le demandeur a travaillé comme peintre (dossier du Tribunal, p 81‑83). Son permis de travail actuel au Canada est valide jusqu’au mois de juin 2014 (dossier du défendeur, affidavit de Jennifer Carlile, onglet 2, para 5).

 

[3]               Le demandeur a soumis le formulaire de demande générique (IMM 0008) de résidence permanente le 3 décembre 2011 (dossier du Tribunal, p 81‑92), indiquant qu’il présentait sa demande en tant que « travailleur qualifié » (dossier du Tribunal, p 81); la section du Règlement relative aux travailleurs qualifiés vise notamment la catégorie des travailleurs qualifiés (fédéral) et celle de l’expérience canadienne. Il a également soumis l’annexe 8 relative à la catégorie de l’expérience canadienne, dans laquelle il a indiqué que, depuis février 2006, il avait accumulé plus de deux ans d’expérience de travail à temps plein au Canada en tant que « peintre » au sens de la Classification nationale des professions (CNP), code 7294 (dossier du Tribunal, p 99‑101). Il n’a pas soumis l’annexe 3 relative aux travailleurs qualifiés – fédéral. Sa demande a été évaluée en fonction de l’appartenance à la catégorie de l’expérience canadienne.

 

[4]               Le demandeur a joint à sa demande un rapport de l’International English Language Testing System (IELTS) indiquant un même résultat de 3,5 pour les aptitudes à la lecture et à l’écriture (dossier du Tribunal, p 107). Un résultat de 3,5 pour la lecture équivaut à un niveau inférieur à 4 selon les Niveaux de compétence linguistique canadiens (NCLC), et un résultat de 3,5 pour l’écriture correspond au niveau 4 des NCLC (recueil des sources du défendeur, onglet 4, p 14, Guide opérationnel 25 : catégorie de l’expérience canadienne). Le rapport de l’IELTS indiquait que le demandeur avait été dispensé des tests d’expression et de compréhension orales en raison des grandes difficultés qu’il éprouvait à parler et à entendre, mais que la note [traduction] « théorique » de 3,5 lui avait néanmoins été attribuée pour l’expression et la compréhension [traduction] « sur le fondement de la moyenne des deux autres résultats » (dossier du Tribunal, p 107).

 

[5]               Le demandeur a également fourni ses résultats au test d’aptitude en American Sign Language (ASL) de la Société canadienne de l’ouïe; il a obtenu une note de 9,2 sur 10 pour les habiletés expressives (équivalant à l’aptitude à parler) et de 9 sur 10 pour les habiletés réceptives (équivalant à l’aptitude à écouter) (dossier du Tribunal, p 116‑117). Il a aussi joint une lettre de son représentant expliquant qu’il était sourd de naissance et faisant état de sa capacité à communiquer de façon extrêmement précise au moyen de l’ASL (dossier du Tribunal, p 109‑110).

 

La décision contestée

[6]               Le 29 novembre 2012, l’agente a rejeté la demande de visa de résidence permanente présentée à titre de membre de la catégorie de l’expérience canadienne, indiquant que, conformément au paragraphe 87.1(2) du Règlement, l’évaluation des demandes relevant de cette catégorie se fait en fonction de l’atteinte d’une note de passage. L’agente a évalué le demandeur sur la base de son expérience professionnelle comme peintre (CNP 7294).

 

[7]               Il appert des notes de l’agente que les documents présentés par le demandeur étaient suffisants pour établir son expérience dans la catégorie professionnelle CNP 7294‑peintre qu’il avait indiquée. Il ressort aussi de ces notes que l’agente savait que le demandeur était sourd et que ses résultats aux tests d’ASL pour les habiletés expressives et réceptives étaient respectivement de 9,2 et 9,0 (dossier du Tribunal, p 2).

 

[8]               Toutefois, le demandeur ayant obtenu une note de 3,5 aux tests d’aptitudes à la lecture et à l’écriture de l’IELTS, ce qui équivaut au niveau 4 ou moins des NCLC, l’agente a estimé qu’il ne satisfaisait pas aux exigences en matière de compétence linguistique dans les langues officielles. Elle a expliqué que, compte tenu de la profession déclarée et de la demande soumise dans la catégorie de l’expérience canadienne, le demandeur devait atteindre le niveau 5 des NCLC pour chaque aptitude (parler, écouter, lire et écrire) ou obtenir la combinaison suivante : 4 pour l’une des aptitudes, 5 ou plus pour deux aptitudes et 6 ou plus pour l’aptitude restante. Le demandeur étant au niveau 4 ou moins pour deux aptitudes, il ne satisfaisait pas aux exigences linguistiques, et sa demande a été refusée.

 

Les questions en litige

[9]               La Cour estime que la demande de contrôle judiciaire soulève les questions suivantes :

a.       L’agente a‑t‑elle omis à tort de tenir compte des résultats du demandeur aux tests d’ASL?

 

b.      L’agente a‑t‑elle commis une erreur en évaluant la demande uniquement en fonction de la catégorie de l’expérience canadienne et non de celle des travailleurs qualifiés (fédéral)?

 

c.       Le refus de la demande de résidence permanente et le Règlement portent‑ils atteinte au droit à l’égalité garanti par le paragraphe 15(1) de la Charte?

 

 

Les dispositions législatives applicables

[10]           Les dispositions applicables de la Loi et du Règlement sont reproduites en annexe. Le Règlement a été modifié depuis la décision de l’agente, rendue le 29 novembre 2012. Le Règlement alors en vigueur énonçait expressément qu’un étranger qui, comme l’appelant, avait acquis une expérience dans une profession appartenant au niveau de compétence B de la matrice de la Classification nationale des professions devait faire évaluer ses aptitudes à parler, écouter, lire et écrire par une institution ou organisation désignée et satisfaire aux exigences suivantes : (i) obtenir le niveau 5 ou plus des NCLC pour chacune des quatre aptitudes ou (ii) obtenir le niveau 4 pour l’une des aptitudes, 5 ou plus pour deux aptitudes et 6 ou plus pour l’aptitude restante. Ce sont les exigences auxquelles l’agente s’est reportée pour évaluer le demandeur.

 

[11]           À présent, l’article 74 du Règlement, qui n’était pas en vigueur à la date de la décision contestée, prévoit que le ministre établit les niveaux de compétence linguistique minimaux par catégorie réglementaire ou par profession, en se fondant sur le nombre de demandes en cours de traitement au titre de toutes les catégories, le nombre d’immigrants qui devraient devenir résidents permanents et les perspectives d’établissement au Canada des demandeurs au titre de la catégorie des travailleurs qualifiés (fédéral), de la catégorie de l’expérience canadienne et de la catégorie des travailleurs de métiers spécialisés (fédéral), compte tenu de leur profil linguistique, des facteurs économiques et d’autres facteurs pertinents.

 

La norme de contrôle

[12]           Selon le demandeur, la norme de contrôle à appliquer en l’espèce est celle de la décision correcte. À l’opposé, le défendeur soutient que, les décisions des agents rendues relativement à la catégorie de l’expérience canadienne supposant la formulation de conclusions de fait et de droit, elles se contrôlent selon la norme de la décision raisonnable (Anabtawi c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 856, au para 28, 11 Imm LR (4th) 302; Arachchige c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 1068, au para 8, [2012] ACF no 1150 (QL)).

 

[13]           La Cour convient avec le défendeur que le contrôle de la décision de l’agente concernant la demande de résidence permanente du demandeur doit s’effectuer selon la norme déférente de la décision raisonnable, en sorte que la Cour ne doit intervenir que si la décision de l’agente n’est pas transparente, justifiable et intelligible et qu’elle n’appartient pas aux issues acceptables compte tenu de la preuve (Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, au para 47, [2008] 1 RCS 190 [Dunsmuir]).

 

[14]           Les questions d’équité procédurale afférentes à la démarche suivie par l’agente, par contre, n’appellent pas la déférence (Dunsmuir, précité, au para 50; Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, au para 43, [2009] 1 RCS 339).

 

[15]           La Cour suprême du Canada a établi, dans Doré c Barreau du Québec, 2012 CSC 12, [2012] 1 RCS 395 [Doré], que les questions relevant de la Charte canadienne des droits et libertés, partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R.U.), 1982, c 11 [la Charte], n’appellent pas automatiquement l’application de la norme de la décision correcte. Un tel automatisme aboutirait à l’application de la norme de la décision correcte et, en fait, à une nouvelle instruction, chaque fois que des valeurs de la Charte seraient en cause. La Cour suprême a indiqué ce qui suit dans Doré, précité, aux paragraphes 36 et 43 :

[36]      Comme la juge en chef McLachlin l’a expliqué dans Alberta c. Hutterian Brethren of Wilson Colony, 2009 CSC 37, [2009] 2 R.C.S. 567, l’examen de la constitutionnalité d’une loi doit être différent de la révision d’une décision administrative qui est contestée parce qu’elle porterait atteinte aux droits d’un individu en particulier (voir également Bernatchez). Lorsque les valeurs consacrées par la Charte sont appliquées à une décision administrative particulière, elles sont appliquées relativement à un ensemble précis de faits. Dunsmuir nous dit que la retenue s’impose dans un tel cas (par. 53; voir aussi Suresh c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CSC 1, [2002] 1 R.C.S. 3, par. 39). Par contre, lorsqu’on vérifie si une « loi » particulière respecte la Charte, il est question de principes d’application générale.

 

[…]

 

[43]      Quel est l’effet de cette approche sur la norme de révision applicable à l’appréciation de la conformité d’une décision administrative aux valeurs consacrées par la Charte? Il ne fait aucun doute que la décision d’un tribunal administratif au sujet de la constitutionnalité d’une loi s’examine suivant la norme de la décision correcte (Dunsmuir, par. 58). Cela étant dit, compte tenu de la jurisprudence de la Cour, il n’est pas du tout clair, selon moi, que c’est cette norme qu’il faut appliquer pour déterminer si un décideur administratif a suffisamment tenu compte des valeurs consacrées par la Charte en rendant une décision à la suite de l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire.

 

                                                                                                [Non souligné dans l’original]

 

[16]           L’agente n’était pas saisie de la question de savoir si le Règlement porte atteinte au droit à l’égalité garanti au paragraphe 15(1) de la Charte. Cette question ne peut donc être soumise au « contrôle » de la Cour; elle relève en outre de l’application générale de la loi, analyse que la Cour peut entreprendre sans faire preuve de déférence.

 

Arguments

Arguments du demandeur

[17]           Le demandeur fait valoir que l’agente n’a pas tenu compte d’un élément de preuve important accompagnant la demande, à savoir les résultats obtenus aux tests d’ASL. L’agente aurait omis de prendre cet important élément en compte, et elle n’aurait pas expliqué non plus, dans sa décision, comment elle a évalué les aptitudes à parler et écouter. Selon le demandeur, ces omissions sont problématiques pour l’application du sous‑alinéa 87.1(2)b)(ii) du Règlement en vigueur à l’époque, lequel exige le niveau 5 pour chacune des quatre aptitudes ou le niveau 4 pour l’une des aptitudes, 5 ou plus pour deux aptitudes et 6 ou plus pour l’aptitude restante.

 

[18]           Le demandeur soutient aussi que l’agente a commis une erreur en n’examinant pas sa demande en fonction de la catégorie des travailleurs qualifiés (fédéral). Il reconnaît n’avoir soumis que l’annexe 8 relative à la catégorie de l’expérience canadienne, mais fait valoir que l’agente aurait dû effectuer un suivi et vérifier avec lui la catégorie pour laquelle il voulait être évalué, d’autant plus que son formulaire de demande générique IMM 0008 était ambigu puisqu’il avait simplement indiqué « travailleur qualifié » (renvoyant à une section du Règlement englobant notamment la catégorie des travailleurs qualifiés (fédéral) et celle de l’expérience canadienne). Il affirme qu’il aurait pu bénéficier de l’évaluation plus nuancée dont jouit la catégorie des travailleurs qualifiées (fédéral) dans le cadre législatif ainsi que de l’appréciation de substitution que prévoit le paragraphe 76(3) du Règlement lorsque le nombre de points n’est pas un indicateur suffisant de l’aptitude à réussir son établissement économique.

 

[19]           S’agissant de la question relative à la Charte, le demandeur soutient que la décision rendue par l’agente en application du Règlement et le Règlement lui‑même portent tous deux atteinte à la garantie d’égalité énoncée au paragraphe 15(1) de la Charte, dont voici le texte :

Droits à l’égalité

 

Égalité devant la loi, égalité de bénéfice et protection égale de la loi

 

15. (1) La loi ne fait acception de personne et s’applique également à tous, et tous ont droit à la même protection et au même bénéfice de la loi, indépendamment de toute discrimination, notamment des discriminations fondées sur la race, l’origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l’âge ou les déficiences mentales ou physiques.

 

Equality Rights

 

Equality before and under law and equal protection and benefit of law

 

15. (1) Every individual is equal before and under the law and has the right to the equal protection and equal benefit of the law without discrimination and, in particular, without discrimination based on race, national or ethnic origin, colour, religion, sex, age or mental or physical disability.

 

[20]           Selon le demandeur, l’agente a violé son droit à l’égalité garanti à l’article 15 en n’incluant pas les résultats obtenus aux tests d’ASL dans les compétences linguistiques exigées par le Règlement, et les exigences en matière d’aptitudes à parler, écouter, lire et écrire prévues par le Règlement en vigueur au moment de la décision étaient également contraires à la garantie d’égalité de la Charte.

 

[21]           Le demandeur affirme que les tribunaux ont reconnu à maintes reprises que les personnes atteintes de surdité constituaient une minorité défavorisée au Canada (citant Eldridge c Colombie‑Britannique (Procureur général), [1997] 3 RCS 624, 151 DLR (4th) 577). Il soutient que les exigences relatives aux aptitudes à parler et à écouter énoncées à l’ancien alinéa 87.1(2)b) du Règlement établissent une distinction fondée sur la déficience, et que, compte tenu du libellé du Règlement, aucune personne sourde ne pourrait obtenir de visa de résidence permanente dans la catégorie de l’expérience canadienne. Il ajoute que dans une société principalement organisée en fonction des personnes entendantes, l’inaptitude à parler et à écouter altère nécessairement les deux autres aptitudes évaluées, les aptitudes à « lire » et à « écrire », en particulier dans l’apprentissage d’une langue seconde. Il indique aussi qu’aucun organisme comme la Société canadienne de l’ouïe, capable d’évaluer les compétences en matière d’expression et de réception en ASL de personnes sourdes n’a été désigné par le défendeur comme institution ou organisation désignée. Selon le demandeur, le défendeur a porté atteinte à la garantie d’égalité énoncée à la Charte en n’adoptant pas de disposition ou d’interprétation législatives assimilant la maîtrise de l’ASL à la maîtrise de l’anglais.

 

[22]           Enfin, le demandeur soulève des questions relevant de la Charte au sujet des dispositions législatives relatives à la catégorie des travailleurs qualifiés (fédéral), catégorie pour laquelle il n’a pas été évalué parce qu’il ne l’a pas indiquée dans sa demande (articles 75 à 83 du Règlement).

 

Arguments du défendeur

[23]           Le défendeur affirme que la seule question soulevée par la présente espèce est celle du caractère raisonnable de la décision de l’agente. Il soutient que le demandeur a clairement indiqué pour quelle catégorie il voulait que la demande soit examinée en déposant l’annexe 8, qui doit être soumise à l’égard de la catégorie de l’expérience canadienne, et non l’annexe 3, à soumettre pour la catégorie des travailleurs qualifiés (fédéral). Selon lui, CIC a pour politique d’accepter les demandes malgré la présence d’erreurs mineures, et l’agente était donc tenue de considérer la demande comme un document complet au titre de la catégorie de l’expérience canadienne.

 

[24]           Le défendeur explique que l’agente n’a pas tenu compte des résultats aux tests d’ASL parce que, le demandeur n’ayant pas satisfait aux exigences linguistiques mesurées par les tests de lecture et d’écriture, ils étaient dénués de pertinence. Comme le Règlement n’établissait pas de système de points aux termes duquel une demande pouvait être acceptée avec un résultat inférieur de deux points au niveau 5 des NCLC, il n’était pas nécessaire de tenir compte des résultats des tests d’ASL. Le demandeur ne satisfaisant pas aux normes exigées en matière de lecture et d’écriture, sa demande ne pouvait être acceptée, et il était raisonnable que l’agente la rejette pour cette raison.

 

[25]           Invoquant la décision rendue par notre Cour dans Worthington c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 1546, 258 FTR 102, conf. par 2006 CAF 30, 346 NR 312 [Worthington], le défendeur affirme que la présente affaire ne soulève pas de question relevant de la Charte parce que l’agente ne disposait d’aucun élément de preuve établissant que la surdité du demandeur avait altéré ses aptitudes à la lecture et à l’écriture. Le défendeur soutient en effet que l’argumentation du demandeur a pour prémisse qu’il a été défavorisé en raison de sa surdité, mais que ce traitement défavorable n’a pas été établi en preuve. Selon le défendeur, l’agente n’avait pas à examiner les mesures d’accommodement à prendre puisqu’on ne lui avait présenté aucune preuve que l’incapacité du demandeur à satisfaire aux exigences de lecture et d’écriture était attribuable à sa surdité, et la Cour n’a pas à évaluer si cette absence d’examen constitue une erreur.

 

[26]           Le défendeur affirme que l’agente n’avait pas le pouvoir discrétionnaire de faire abstraction des exigences réglementaires et que le demandeur n’avait pas sollicité d’examen de motifs d’ordre humanitaire. Le demandeur n’ayant fourni de renseignements concernant l’instruction en Russie que dans l’affidavit déposé devant la Cour et non à l’agente, cette dernière n’avait pas à considérer de motifs d’ordre humanitaire, et elle ne disposait d’aucun élément de preuve indiquant que le demandeur éprouverait des difficultés inhabituelles et injustifiées ou excessives s’il devait retourner en Russie. Selon le défendeur, il n’est pas loisible au demandeur d’invoquer cet argument à présent, dans la demande de contrôle judiciaire.

 

Analyse

Les questions relatives au droit administratif

[27]           La Cour abordera premièrement les questions de droit administratif soulevées par le demandeur. L’argument de ce dernier voulant que l’agente ait omis d’examiner un élément de preuve important – à savoir, ses résultats aux tests d’ASL – doit être écarté. En effet, il appert clairement des notes de l’agente qu’elle était au courant de sa surdité et des résultats qu’il avait obtenus en ASL (dossier du Tribunal, p 2), et les notes d’un agent font partie des motifs de sa décision (Baker c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 RCS 817, 174 DLR (4th) 193). L’agente a tenu compte des résultats des tests d’ASL ainsi que des résultats mesurant les aptitudes à lire et à écrire, lesquels étaient égaux et inférieurs, respectivement, au NCLC 4 exigé par le Règlement. Ces deux résultats à eux seuls permettaient raisonnablement à l’agente de conclure que le demandeur ne satisfaisait pas aux exigences linguistiques. En effet, compte tenu du système de pointage qu’établissait alors le Règlement et du fait qu’aucun pouvoir discrétionnaire ne pouvait être exercé relativement à la catégorie de l’expérience canadienne, les notes obtenues pour les tests de lecture et d’écriture ne permettaient pas à l’agente d’accepter la demande, peu importe les résultats relatifs aux aptitudes à parler (expressives) ou à écouter (réceptives). Il ressort également du dossier que la lettre du représentant du demandeur jointe à la demande reconnaissait que les résultats des tests d’ASL correspondaient à l’évaluation de l’anglais parlé et compris (dossier du Tribunal, p 109).

 

[28]           La Cour constate que le demandeur a soumis uniquement l’annexe 8, relative à la catégorie de l’expérience canadienne, et n’a pas soumis l’annexe 3, relative à la catégorie des travailleurs qualifiés (fédéral). Elle ne saurait donc conclure que l’agente a fait erreur en évaluant la demande par rapport à la catégorie de l’expérience canadienne – seule catégorie pour laquelle le demandeur avait soumis une demande complète. On imposerait un lourd fardeau aux agents d’immigration en les obligeant à évaluer les demandes non seulement en fonction de la catégorie indiquée, mais également en fonction d’autres catégories possibles pour voir si le résultat serait plus favorable. Contrairement à ce qu’affirme le demandeur, l’évaluation de la demande ne s’est pas faite en fonction d’une catégorie [traduction] « arbitrairement choisie » par l’agente, mais en fonction de l’unique catégorie pour laquelle la demande était complète.

 

[29]           La Cour est d’avis que l’agente n’a pas commis d’erreur en évaluant la demande en fonction de la catégorie de l’expérience canadienne uniquement, puisque le demandeur n’avait soumis que ce formulaire (dossier du Tribunal, annexe 8, p 99‑101). La présence de ce formulaire et l’absence de l’annexe 3 – travailleurs qualifiés (fédéral) – dont la présentation était requise ont dissipé toute ambigüité ayant pu résulter de l’emploi de termes imprécis par le demandeur dans le formulaire de demande générique. Le demandeur n’a pas convaincu la Cour que l’agente avait l’obligation de communiquer avec lui pour parfaire sa demande. Il n’y a pas eu de manquement à l’équité procédurale.

 

La violation du paragraphe 15(1) de la Charte

[30]           Lorsque le paragraphe 15(1) est invoqué, le critère jurisprudentiel suivant, à deux volets, s’applique : i) La loi crée‑t‑elle une distinction fondée sur un motif énuméré ou analogue? ii) La distinction crée‑t‑elle un désavantage par la perpétuation d’un préjugé ou l’application de stéréotypes? (Withler c Canada (Procureur général), 2011 CSC 12, au para 30, [2011] 1 RCS 396 [Withler]; R c Kapp, 2008 CSC 41, au para 17, [2008] 2 RCS 483). Au paragraphe 2 de Withler, précité, la Cour suprême du Canada a aussi indiqué qu’« [e]n définitive, une seule question se pose : la mesure contestée transgresse‑t‑elle la norme d’égalité réelle consacrée par le par. 15(1) de la Charte?

 

[31]           Il convient de rappeler d’abord l’importance d’un fondement factuel solide pour les allégations de violation de la Charte, dont témoigne le commentaire suivant de la juge Layden‑Stevenson dans Worthington, précité, aux paragraphes 24‑25 :

[24]      Ce n’est pas parce qu’une question constitutionnelle est soulevée que la Cour doit nécessairement la trancher. En fait, en droit canadien, l’usage veut que le juge qui peut trancher une affaire sans aborder une question constitutionnelle doit le faire (R.J. Sharpe, K.E. Swinton et K. Roach, The Charter of Rights and Freedoms, 2nd ed. (Toronto, Irwin Law, 2002), à la page 97). La Cour doit s’assurer qu’il existe un contexte factuel adéquat avant de pouvoir examiner une loi en fonction des dispositions de la Charte, surtout lorsque le litige porte sur les effets de la loi contestée (Danson c. Ontario (Procureur général), [1990] 2 R.C.S. 1086, à la page 1099). Les faits en litige sont ceux qui concernent les parties au litige. Ces faits sont précis et doivent être établis par des éléments de preuve recevables (idem). Les décisions relatives à la Charte ne doivent pas être rendues dans un vide factuel. Essayer de le faire banaliserait la Charte et produirait inévitablement des opinions mal motivées. Le fondement factuel n’est donc pas une simple formalité qui peut être ignorée et, bien au contraire, son absence est fatale (MacKay c. Manitoba, [1989] 2 R.C.S. 357, à la page 361).

 

[25]      La présente demande est truffée de difficultés. La nature du contrôle judiciaire est une de ces difficultés. Les instances en contrôle judiciaire ont une portée limitée. Elles visent essentiellement à réviser une décision en vue d’en vérifier la légalité. La Cour qui procède au contrôle judiciaire est liée [sauf dans des circonstances exceptionnelles qui ne s’appliquent pas en l’espèce] par le dossier dont le juge ou l’office qui a rendu la décision était saisi et elle est limitée par ce dossier. Par souci d’équité pour les parties et pour le tribunal dont la décision est révisée, cette restriction est nécessaire (Bekker c. Canada, (2004), 323 N.R. 195 (C.A.F.) (Bekker). Le tribunal saisi de la demande de contrôle judiciaire doit se fonder sur le dossier tel qu’il lui est présenté et s’en tenir aux critères applicables au contrôle judiciaire (McKenna, précité, au paragraphe 6).

                                                            [Non souligné dans l’original]

 

[32]           Au paragraphe 9 de MacKay c Manitoba, [1989] 2 RCS 357, [1989] ACS no 88 (QL), mentionné dans l’extrait qui précède, la Cour suprême du Canada s’est exprimée ainsi :

[9]        Les décisions relatives à la Charte ne doivent pas être rendues dans un vide factuel. Essayer de le faire banaliserait la Charte et produirait inévitablement des opinions mal motivées. La présentation des faits n’est pas, comme l’a dit l’intimé, une simple formalité; au contraire, elle est essentielle à un bon examen des questions relatives à la Charte. Un intimé ne peut pas, en consentant simplement à ce que l’on se passe de contexte factuel, attendre ni exiger d’un tribunal qu’il examine une question comme celle‑ci dans un vide factuel. Les décisions relatives à la Charte ne peuvent pas être fondées sur des hypothèses non étayées qui ont été formulées par des avocats enthousiastes.

 

 

[33]           En l’espèce, la Cour estime que la preuve soumise à l’appui des arguments du demandeur fondés sur la Charte est insuffisante. 

 

[34]           À titre d’exemple, le demandeur n’a pas présenté de preuve expliquant pourquoi les résultats aux tests d’ASL devraient remplacer l’évaluation des aptitudes à lire et à écrire ou avoir plus de poids qu’elle. Le demandeur soutient en outre que le Règlement ne tient pas compte des [traduction] « problèmes d’expression écrite que peuvent éprouver certaines personnes sourdes par suite des désavantages qu’elles ont subis en raison d’obstacles psychologiques posés par le système d’éducation » (dossier de la demande, exposé des faits et du droit, p 25, au para 23) mais, hormis l’expérience du système d’éducation primaire en Russie vécue personnellement par le demandeur, il n’existe aucun élément de preuve établissant que les personnes atteintes de surdité auraient plus de difficulté à lire et à écrire que les personnes non sourdes.

 

[35]           En conséquence, la Cour n’examinera pas l’argumentation du demandeur à cet égard, étant donné que l’agente n’a pas appliqué ces dispositions à sa demande. Il ne saurait y avoir d’examen d’allégations de violation de Charte dans un vide juridique et factuel (Worthington, précité).

 

[36]           Compte tenu des faits de l’espèce et de l’absence de preuve étayant l’allégation d’atteinte au droit à l’égalité garanti à l’article 15 de la Charte, la Cour doit refuser de se prononcer sur les questions relevant de la Charte soulevées par le demandeur.

 

[37]           Les parties n’ont soumis aucune question pour certification.

 

 


JUGEMENT

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est rejetée. Aucune question de portée générale n’est certifiée. 

 

 

« Richard Boivin »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Ghislaine Poitras, LL.L., Trad. a.

 


Annexe

 

Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 :

 

Sélection des résidents permanents

 

[…]

 

Immigration économique

 

12. (2) La sélection des étrangers de la catégorie « immigration économique » se fait en fonction de leur capacité à réussir leur établissement économique au Canada.

Selection of Permanent Residents

 

 

Economic immigration

 

12. (2) A foreign national may be selected as a member of the economic class on the basis of their ability to become economically established in Canada.

 

 

 

Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002‑227, en vigueur au moment de la décision de l’agente :

 

Catégorie de l’expérience canadienne

 

Catégorie

 

87.1 (1) Pour l’application du paragraphe 12(2) de la Loi, la catégorie de l’expérience canadienne est une catégorie réglementaire de personnes qui peuvent devenir résidents permanents du fait de leur expérience au Canada et qui cherchent à s’établir dans une province autre que le Québec.

 

Qualité

 

(2) Fait partie de la catégorie de l’expérience canadienne l’étranger qui satisfait aux exigences suivantes :

 

[…]

 

b) il a fait évaluer sa compétence en français ou en anglais par une institution ou organisation désignée aux termes du paragraphe (4) et obtenu, pour les aptitudes à parler, à écouter, à lire et à écrire, selon le document intitulé Niveaux de compétence linguistique canadiens 2006, pour le français, et le Canadian Language Benchmarks 2000, pour l’anglais, les niveaux de compétence suivants :

 

 

(i) s’il a une expérience de travail dans une ou plusieurs professions appartenant aux genre de compétence 0 Gestion ou niveaux de compétences A de la matrice de la Classification nationale des professions :

 

(A) 7 ou plus pour chacune des aptitudes,

 

(B) 6 pour l’une des aptitudes, 7 ou plus pour deux des aptitudes et 8 ou plus pour l’aptitude restante,

 

 

(ii) s’il a une expérience de travail dans une ou plusieurs professions appartenant au niveau de compétences B de la matrice de la Classification nationale des professions :

 

(A) 5 ou plus pour chacune des aptitudes,

 

(B) 4 pour l’une des aptitudes, 5 ou plus pour deux aptitudes et 6 ou plus pour l’aptitude restante.

 

[…]

 

 

Organisme désigné

 

(4) Le ministre peut désigner les institutions ou organisations chargées d’évaluer la compétence linguistique pour l’application du présent article et, en vue d’établir des équivalences entre les résultats de l’évaluation fournis par une institution ou organisation désignée et les niveaux de compétence mentionnés au paragraphe (2), il fixe le résultat de test minimal qui doit être attribué pour chaque aptitude et chaque niveau de compétence lors de l’évaluation de la compétence linguistique par cette institution ou organisation pour satisfaire aux niveaux mentionnés à ce paragraphe.

Canadian Experience Class

 

Class

 

87.1 (1) For the purposes of subsection 12(2) of the Act, the Canadian experience class is prescribed as a class of persons who may become permanent residents on the basis of their experience in Canada and who intend to reside in a province other than the Province of Quebec.

 

Member of the class

 

(2) A foreign national is a member of the Canadian experience class if

 

 

 

(b) they have had their proficiency in the English or French language assessed by an organization or institution designated under subsection (4) and have obtained proficiencies for their abilities to speak, listen, read and write that correspond to benchmarks, as referred to in Canadian Language Benchmarks 2000 for the English language and Niveaux de compétence linguistique canadiens 2006 for the French language, of

 

(i) in the case of a foreign national who has acquired work experience in one or more occupations that are listed in Skill Type 0 Management Occupations or Skill Level A of the National Occupational Classification matrix,

 

(A) 7 or higher for each of those abilities, or

 

(B) 6 for any one of those abilities, 7 or higher for any other two of those abilities and 8 or higher for the remaining ability, and

 

(ii) in the case of a foreign national who has acquired work experience in one or more occupations that are listed in Skill Level B of the National Occupational Classification matrix,

 

(A) 5 or higher for each of those abilities, or

 

(B) 4 for any one of those abilities, 5 or higher for any other two of those abilities and 6 or higher for the remaining ability.

 

 

Designated organization

 

(4) The Minister may designate organizations or institutions to assess language proficiency for the purposes of this section and shall, for the purpose of correlating the results of such an assessment by a particular designated organization or institution with the benchmarks referred to in subsection (2), establish the minimum test result required to be awarded for each ability and each level of proficiency in the course of an assessment of language proficiency by that organization or institution in order to meet those benchmarks.

 

 

Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002‑227, version actuellement en vigueur :

 

Dispositions générales

 

Critères

 

74. (1) Pour l’application des alinéas 75(2)d), 79(3)a), 87.1(2)d) et e) et 87.2(3)a), le ministre établit, par catégorie réglementaire ou par profession, les niveaux de compétence linguistique minimaux en se fondant sur les éléments ci‑après et en informe le public :

 

 

a) le nombre de demandes en cours de traitement au titre de toutes les catégories prévues à la présente partie;

 

b) le nombre d’immigrants qui devraient devenir résidents permanents selon le rapport présenté au Parlement conformément à l’article 94 de la Loi;

 

c) les perspectives d’établissement au Canada des demandeurs au titre de la catégorie des travailleurs qualifiés (fédéral), de la catégorie de l’expérience canadienne et de la catégorie des travailleurs de métiers spécialisés (fédéral), compte tenu de leur profil linguistique, des facteurs économiques et d’autres facteurs pertinents.

 

Niveaux de compétence linguistique minimaux

 

(2) Les niveaux de compétence linguistique minimaux établis par le ministre sont fixés d’après les normes prévues dans les Niveaux de compétence linguistique canadiens et dans le Canadian Language Benchmarks.

 

 

Désignation pour l’évaluation de la compétence linguistique

 

(3) Le ministre peut désigner, pour la durée qu’il précise, toute institution ou organisation chargée d’évaluer la compétence linguistique si l’institution ou l’organisation possède de l’expertise en la matière et si elle a fourni une équivalence des résultats de ses tests d’évaluation linguistique avec les normes prévues dans les Niveaux de compétence linguistique canadiens et dans le Canadian Language Benchmarks.

 

[…]

 

Catégorie de l’expérience canadienne

 

Catégorie

 

87.1 (1) Pour l’application du paragraphe 12(2) de la Loi, la catégorie de l’expérience canadienne est une catégorie réglementaire de personnes qui peuvent devenir résidents permanents du fait de leur capacité à réussir leur établissement économique au Canada et de leur expérience au Canada et qui cherchent à s’établir dans une province autre que le Québec.

 

Qualité

 

(2) Fait partie de la catégorie de l’expérience canadienne l’étranger qui satisfait aux exigences suivantes :

 

a) l’étranger a accumulé au Canada au moins une année d’expérience de travail à temps plein, ou l’équivalent temps plein pour un travail à temps partiel, dans au moins une des professions, autre qu’une profession d’accès limité, appartenant au genre de compétence 0 Gestion ou aux niveaux de compétence A ou B de la matrice de la Classification nationale des professions au cours des trois ans précédant la date de présentation de sa demande de résidence permanente;

 

b) pendant cette période d’emploi, il a accompli l’ensemble des tâches figurant dans l’énoncé principal établi pour la profession dans les descriptions des professions de la Classification nationale des professions;

 

c) pendant cette période d’emploi, il a exercé une partie appréciable des fonctions principales de la profession figurant dans les descriptions des professions de la Classification nationale des professions, notamment toutes les fonctions essentielles;

 

d) il a fait évaluer sa compétence en français ou en anglais par une institution ou organisation désignée en vertu du paragraphe 74(3) et obtenu, pour chacune des quatre habiletés langagières, le niveau de compétence applicable établi par le ministre en vertu du paragraphe 74(1);

 

e) s’il a acquis l’expérience de travail visée à l’alinéa a) dans le cadre de plus d’une profession, il a obtenu le niveau de compétence en anglais ou en français établi par le ministre en vertu du paragraphe 74(1) à l’égard de la profession pour laquelle il a acquis le plus d’expérience au cours des trois années visées à l’alinéa a).

General

 

Criteria

 

74. (1) For the purposes of paragraphs 75(2)(d), 79(3)(a), 87.1(2)(d) and (e) and 87.2(3)(a), the Minister shall fix, by class prescribed by these Regulations or by occupation, and make available to the public, minimum language proficiency thresholds on the basis of

 

 

(a) the number of applications in all classes under this Part that are being processed;

 

 

(b) the number of immigrants who are projected to become permanent residents according to the report to Parliament referred to in section 94 of the Act; and

 

(c) the potential, taking into account the applicants’ linguistic profiles and economic and other relevant factors, for the establishment in Canada of applicants under the federal skilled worker class, the Canadian experience class and the federal skilled trades class.

 

 

Minimum language proficiency thresholds

 

 

(2) The minimum language proficiency thresholds fixed by the Minister shall be established in reference to the benchmarks described in the Canadian Language Benchmarks and the Niveaux de compétence linguistique canadiens.

 

 

Designation for evaluating language proficiency

 

(3) The Minister may designate, for any period specified by the Minister, any organization or institution to be responsible for evaluating language proficiency if the organization or institution has expertise in evaluating language proficiency and if the organization or institution has provided a correlation of its evaluation results to the benchmarks set out in the Canadian Language Benchmarks and the Niveaux de compétence linguistique canadiens.

 

 

Canadian Experience Class

 

Class

 

87.1 (1) For the purposes of subsection 12(2) of the Act, the Canadian experience class is prescribed as a class of persons who may become permanent residents on the basis of their ability to become economically established in Canada, their experience in Canada, and their intention to reside in a province other than the Province of Quebec.

 

 

Member of the class

 

(2) A foreign national is a member of the Canadian experience class if

 

 

(a) they have acquired in Canada, within the three years before the date on which their application for permanent residence is made, at least one year of full‑time work experience, or the equivalent in part‑time work experience, in one or more occupations that are listed in Skill Type 0 Management Occupations or Skill Level A or B of the National Occupational Classification matrix, exclusive of restricted occupations; and

 

 

(b) during that period of employment they performed the actions described in the lead statement for the occupation as set out in the occupational descriptions of the National Occupational Classification;

 

 

(c) during that period of employment they performed a substantial number of the main duties of the occupation as set out in the occupational descriptions of the National Occupational Classification, including all of the essential duties;

 

(d) they have had their proficiency in the English or French language evaluated by an organization or institution designated under subsection 74(3) and have met the applicable threshold fixed by the Minister under subsection 74(1) for each of the four language skill areas; and

 

(e) in the case where they have acquired the work experience referred to in paragraph (a) in more than one occupation, they meet the threshold for proficiency in the English or French language, fixed by the Minister under subsection 74(1), for the occupation in which they have acquired the greater amount of work experience in the three years referred to in paragraph (a).


Charte canadienne des droits et libertés, partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R.U.), 1982, c 11.

 

Garantie des droits et libertés

 

Droits et libertés au Canada

 

1. La Charte canadienne des droits et libertés garantit les droits et libertés qui y sont énoncés. Ils ne peuvent être restreints que par une règle de droit, dans des limites qui soient raisonnables et dont la justification puisse se démontrer dans le cadre d’une société libre et démocratique.

 

[…]

 

Droits à l’égalité

 

Égalité devant la loi, égalité de bénéfice et protection égale de la loi

 

15. (1) La loi ne fait acception de personne et s’applique également à tous, et tous ont droit à la même protection et au même bénéfice de la loi, indépendamment de toute discrimination, notamment des discriminations fondées sur la race, l’origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l’âge ou les déficiences mentales ou physiques.

Guarantee of Rights and Freedoms

 

Rights and freedoms in Canada

 

1. The Canadian Charter of Rights and Freedoms guarantees the rights and freedoms set out in it subject only to such reasonable limits prescribed by law as can be demonstrably justified in a free and democratic society.

 

 

 

Equality Rights

 

Equality before and under law and equal protection and benefit of law

 

15. (1) Every individual is equal before and under the law and has the right to the equal protection and equal benefit of the law without discrimination and, in particular, without discrimination based on race, national or ethnic origin, colour, religion, sex, age or mental or physical disability.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                    IMM‑12568‑12

 

 

INTITULÉ :                                                  DMITRI ALEXANDROVICH SMIRNOV c
MCI

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                          Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                         Le 15 mai 2013

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                       LE JUGE BOIVIN

 

DATE DES MOTIFS :                                 Le 27 mai 2013

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Peter Stieda

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Max Binnie

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Yousuf & Associates

Ottawa (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.