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Date : 20130418

Dossier : T‑2164‑12

Référence : 2013 CF 399

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Calgary (Alberta), le 18 avril 2013

En présence de madame la juge Gleason

 

ENTRE :

 

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

DANIEL M. BOSNJAK

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

        MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               Le demandeur cherche à obtenir du défendeur des renseignements relatifs à une dette fiscale d’environ 47 000 $. Ainsi que le lui permet la Loi de l’impôt sur le revenu, LRC 1985, c 1 (5e suppl.), il lui a signifié une demande péremptoire de renseignements et de documents, et, n’y ayant pas reçu de réponse, il a sollicité l’aide de notre Cour.

 

[2]               Le 19 décembre 2012, notre Cour a ordonné au défendeur de fournir les renseignements et de produire les documents demandés. Le défendeur n’a pas tenu compte de cette ordonnance ni d’une autre rendue ensuite par notre Cour. Le 15 avril 2012, la Cour a instruit la requête du demandeur en déclaration d’outrage au tribunal et en prononciation d’une peine. Sommé de comparaître à cette audience, le défendeur en était toutefois absent.

 

[3]               Pour les motifs dont l’exposé suit, je conclus que le demandeur a prouvé hors de tout doute raisonnable que le défendeur est coupable de refus d’obéir à l’ordonnance de notre Cour en date du 19 décembre 2012 et je prononcerai la peine définie plus loin.

 

Les faits

[4]               Le 31 juillet 2012, Jennifer Rawleigh, agente de l’Agence du revenu du Canada, a signifié à personne au défendeur un exemplaire de la demande péremptoire considérée. Celle‑ci se présentait sous la forme d’une lettre où le demandeur énumérait tous les éléments d’information qu’il voulait obtenir, avisait le défendeur qu’il pourrait être poursuivi en cas d’inexécution, et précisait ce qui suit : [TRADUCTION] « Le paragraphe 231.7(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu autorise l’Agence du revenu du Canada à demander une ordonnance judiciaire explicite d’exécution en cas d’inexécution de la présente demande péremptoire. La désobéissance à cette ordonnance peut entraîner une déclaration d’outrage au tribunal. »

 

[5]               La demande péremptoire énumérait les renseignements et documents suivants à fournir par le défendeur :

a.         les noms de toutes les banques et coordonnées de toutes leurs succursales où le défendeur avait des comptes et/ou des coffres, et les montants y déposés au 26 juillet 2012;

 

b.         la liste complète des comptes de courtage détenus par le défendeur, qu’ils soient ou non enregistrés à son nom, avec les noms et adresses des courtiers, et les soldes dus au 26 juillet 2012;

 

c.         un état complet des actions, ordinaires ou privilégiées, et des obligations détenues par le défendeur, qu’elles soient ou non enregistrées à son nom, spécifiant le coût unitaire par action et le lieu de situation de chaque titre;

 

d.         un état complet des biens immobiliers appartenant au défendeur, qu’ils soient ou non enregistrés à son nom, y compris les descriptions officielles, les montants des charges, les noms et adresses des grevants, et les lieux de situation des bureaux d’enregistrement;

 

e.         un état complet des assurances détenues par le défendeur, spécifiant pour chaque police le nom de l’assureur, le capital assuré, le numéro, le lieu de situation, ainsi que, le cas échéant, la valeur de rachat et le montant des dividendes accumulés;

 

f.          un état complet des prêts hypothécaires et autres prêts en cours dans lesquels le défendeur avait un intérêt bénéficiaire, spécifiant les montants dus à ce dernier au 26 juillet 2012, les dates d’enregistrement, les bureaux d’enregistrement, les descriptions officielles des biens grevés et, le cas échéant, les modalités de remboursement, les dates d’échéance, ainsi que les noms et adresses de tous les débiteurs hypothécaires et autres;

 

g.         un état complet des emprunts hypothécaires et autres emprunts à payer par le défendeur au 26 juillet 2012, spécifiant la valeur au cours du marché de toutes les sûretés réelles et portant les descriptions officielles de tous les biens remis en nantissement;

 

h.         la liste complète des véhicules automobiles qui appartenaient au défendeur au 26 juillet 2012, spécifiant pour chacun l’année, le style, la marque, le numéro d’immatriculation, le prix, ainsi que les nom et adresse du titulaire de privilège ou de sûreté;

 

i.          un état complet et détaillé de tous autres actifs, non couverts par ce qui précède, que détient le défendeur, qu’ils soient ou non enregistrés à son nom;

 

j.          un état complet des rémunérations et autres sommes reçues par le défendeur du 1er janvier au 26 juillet 2012, spécifiant les noms et adresses des payeurs et la nature des paiements;

 

k.         un relevé complet des jugements non exécutés rendus contre le défendeur, spécifiant la nature des dettes, ainsi que les noms et adresses des créanciers judiciaires;

 

l.          un état complet des paiements faits par le défendeur (pendant une période que ne précise pas la demande péremptoire) à des fiducies de pension, caisses de retraite ou autres comptes de rente, spécifiant pour chacun de ces comptes son lieu exact de situation, ainsi que le montant accumulé au crédit du défendeur lui‑même et/ou du bénéficiaire.

 

[6]               Le défendeur ne s’est à aucun moment mis en rapport avec l’Agence du revenu du Canada [l’ARC] après la réception de cette demande péremptoire.

 

[7]               Le 16 novembre 2012, l’avocate du demandeur a envoyé au défendeur une lettre en recommandé l’avisant qu’elle demanderait une ordonnance d’exécution devant notre Cour à moins qu’il ne fournisse les renseignements et documents exigés au plus tard à cette même date. Elle y indiquait les coordonnées de l’agent de l’ARC à qui il devait s’adresser. Le défendeur n’a pas répondu à cette lettre.

 

[8]               Le demandeur a en conséquence sollicité devant notre Cour une ordonnance d’exécution, que le juge O’Reilly a rendue le 19 décembre 2012. Cette ordonnance énumérait tous les renseignements et documents dont la demande péremptoire avait exigé la production et portait en outre ce qui suit :

 

[traduction]

LA COUR ORDONNE au défendeur, en vertu de l’article 231.7 de la Loi de l’impôt sur le revenu, de se conformer à la demande péremptoire du ministre et de fournir sans délai, au plus tard dans les 30 jours suivant la signification de la présente ordonnance, les renseignements et documents exigés à l’agent de l’Agence du revenu du Canada délégataire des pouvoirs conférés par ladite Loi ou à une autre personne désignée à cette fin par ladite Agence.

 

[9]               Un huissier a signifié à personne l’ordonnance d’exécution au défendeur le 7 janvier 2013. Celui‑ci n’a communiqué aucun des documents ou renseignements exigés à l’ARC dans le délai de 30 jours fixé par cette ordonnance; qui plus est, il n’a pas encore produit à ce jour aucun des documents ou renseignements qu’il lui a été ordonné de produire.

 

[10]           L’avocate du demandeur a de nouveau écrit au défendeur le 4 février 2013, pour l’aviser que, comme il ne s’était pas conformé à l’ordonnance du juge O’Reilly en date du 19 décembre 2012, le demandeur engagerait une procédure pour le faire déclarer coupable d’outrage à la justice. L’avocate précisait dans cette lettre que [TRADUCTION] « l’inexécution d’une ordonnance de la Cour rend passible d’une amende et/ou d’une peine d’emprisonnement ». Elle concluait sa lettre en recommandant au défendeur de se mettre en rapport avec l’ARC dans les meilleurs délais. Elle lui donnait également son propre numéro de téléphone et le priait de l’appeler s’il avait des questions. Le défendeur n’a pas répondu non plus à cette lettre.

 

[11]           Le demandeur a en conséquence déposé devant notre Cour une requête complémentaire tendant à obtenir une ordonnance de justifier, qui sommerait le défendeur de comparaître devant un juge de notre Cour pour répondre à l’accusation d’outrage à la justice et présenter des observations sur la peine. L’ordonnance de justifier a été rendue par le juge Barnes le 7 mars 2013. Elle portait les dispositions suivantes :

 

[TRADUCTION]

Le défendeur est sommé de se présenter aux locaux de la Cour fédérale sis au 3e étage, Canadian Occidental Tower, 635 Eighth Avenue SW, Calgary (Alberta), pour y comparaître devant un juge de cette cour le 15 avril 2013 à 9 h 30, et de se préparer :

a)                  à entendre la preuve des actes d’outrage à la justice dont il est accusé;

b)                  à faire valoir ses moyens de défense;

c)                  à présenter ses observations en réponse à celles du demandeur concernant la peine adéquate pour le cas où il serait déclaré coupable d’outrage au tribunal.

 

[12]           L’ordonnance de justifier autorisait aussi le demandeur à produire le contenu du dossier de la Cour, y compris les lettres, directement et sans obligation de faire témoigner, ainsi qu’à prouver par voie d’affidavits la signification de tous les documents signifiés à personne. Elle enjoignait en outre au demandeur de signifier et déposer au plus tard deux semaines avant le 15 avril 2013 ses observations écrites sur la peine, où il devait préciser s’il sollicitait une peine d’emprisonnement pour le défendeur, et proposer des fourchettes de peines et de dépens.

 

La preuve produite à l’audience

[13]           Le demandeur a prouvé ce qui précède à l’audience du 15 avril 2013, au moyen du témoignage de Patricia Wright et des pièces déposées, notamment des copies de lettres et les originaux de plusieurs affidavits de signification. La preuve a aussi établi que le défendeur avait reçu signification à personne de l’ordonnance de justifier du juge Barnes en date du 7 mars 2013, et qu’on lui avait aussi signifié à personne, plus de deux semaines avant le 15 avril 2013, une copie du dossier de requête en déclaration d’outrage à la justice et des observations du demandeur sur la peine. Celles‑ci portent sans ambiguïté que le demandeur sollicite l’infliction d’une amende de 5 000,00 $, des dépens avocat‑client de 11 557,65 $, une nouvelle ordonnance enjoignant au défendeur de produire les documents et renseignements qu’il lui a été ordonné de produire, ainsi que, en cas de non‑paiement et de non‑production, l’incarcération du défendeur jusqu’à ce qu’il fournisse les documents et renseignements exigés.

 

[14]           La preuve établit en outre que le défendeur n’a rien fait pour exécuter l’ordonnance du juge O’Reilly en date du 19 décembre 2012 et n’a produit aucun des renseignements ou documents qu’il lui avait été ordonné de produire. Il ne s’est pas non plus mis en rapport avec l’ARC pour s’expliquer sur son défaut d’exécution, et qui plus est, il ne s’est même pas présenté à l’audience relative à l’accusation d’outrage au tribunal.

 

La déclaration d’outrage au tribunal

[15]           Le défendeur est donc coupable de refus d’obtempérer à l’ordonnance de notre Cour en date du 19 décembre 2012. J’ai ainsi statué à l’audience du 15 avril 2013, après avoir conclu que le demandeur avait établi l’outrage au tribunal du défendeur hors de tout doute raisonnable. Pour dire les choses simplement, le défendeur n’a pas du tout tenu compte de l’ordonnance d’exécution rendue par le juge O’Reilly le 19 décembre 2012. Il connaît l’existence de cette ordonnance, puisqu’il en a reçu signification à personne. Sa culpabilité a donc été établie hors de tout doute raisonnable.

 

La peine et les dépens

[16]           Comme j’estimais avéré que le défendeur avait reçu signification à personne de l’ordonnance de justifier prononcée par le juge Barnes le 7 mars 2013, ainsi que des observations du demandeur sur la peine, et qu’il était donc indubitablement averti qu’il risquait d’être condamné pour outrage au tribunal à l’audience du 15 avril 2013, j’ai décidé d’entendre lesdites observations à cette audience. Plusieurs de mes collègues ont suivi cette même procédure à propos de questions semblables. Voir par exemple : Canada (Revenu national) c Bjornstad, 2006 CF 818 [Bjornstad]; Canada (Revenu national) c Loy Yeung Kwan, dossier T‑554‑05 (13 décembre 2005); Canada (Revenu national) c Hrappstead, dossier T‑ 2275‑04 (26 mai 2005); et Canada (Revenu national) c Arthur C Dwer, dossier T‑1479‑02 (30 septembre 2003).

 

[17]           Les facteurs à prendre en considération dans la détermination de la peine à prononcer pour outrage au tribunal comprennent la gravité de l’outrage, la question de savoir si celui‑ci constitue une première infraction, la présence de facteurs atténuants tels que la bonne foi ou des excuses, et la nécessité de la dissuasion; voir Winnicki c Canada (Commission des droits de la personne), 2007 CAF 52, paragraphes 17 et 18; et Canada (Revenu national) c Marshall, 2006 CF 788, paragraphe 16.

 

[18]           Le demandeur soutient qu’une peine semblable à celle qu’a récemment prononcée le juge Zinn dans Canada (Revenu national) c The Money Stop Ltd, 2013 CF 133 [Money Stop], conviendrait en l’occurrence. Dans cette affaire, le juge Zinn a prononcé une amende de 5 000,00 $, à payer dans les 30 jours, il a condamné les parties défenderesses à des dépens de 19 905,74 $, aussi à payer dans les 30 jours, et il a ordonné que le défendeur fût incarcéré durant 30 jours à défaut du paiement de l’amende et des dépens, sauf preuve convaincante de l’incapacité des parties défenderesses à les payer ou de la nécessité d’une prorogation du délai de paiement. Le juge Zinn a en outre ordonné aux défendeurs de produire les documents et renseignements exigés dans les 30 jours, à défaut de quoi le défendeur serait emprisonné jusqu’à la réparation de l’outrage ou durant trois ans, en prenant la date la plus proche, sauf preuve convaincante de l’incapacité des parties défenderesses à obtempérer.

 

[19]           Dans l’affaire Money Stop, cependant, M. Sutherland (le défendeur) avait comparu à l’audience relative à l’outrage et s’était engagé à réparer celui‑ci dans les 30 jours. C’est après qu’il eut manqué à son engagement que l’ordonnance susmentionnée a été prononcée. C’est là à mon sens une distinction importante qui peut être faite entre cette affaire et la présente espèce, où le défendeur n’a pas rompu un engagement explicite envers la Cour. Par conséquent, j’estime préférable de prononcer une amende inférieure à 5 000,00 $, et il me semble qu’une longue peine d’emprisonnement ne devrait pas automatiquement être infligée à défaut du paiement de l’amende et des dépens, ou de la production des documents exigés. Cela dit, la peine doit aussi être proportionnée à la gravité de la faute du défendeur : il a, après tout, fait fi d’une ordonnance de notre Cour.

 

[20]           Il me paraît qu’une peine quelque peu apparentée à celle fixée dans Bjornstad serait adéquate. Dans cette affaire, la juge Dawson a prononcé une amende de 2 000,00 $ (tout en précisant que l’amende aurait été plus élevée si le demandeur avait requis qu’elle le fût), elle a condamné la défenderesse aux dépens sur une base avocat‑client, et elle a prévu dans son ordonnance la possibilité de porter de nouveau l’affaire devant la Cour en vue de l’incarcération de Mme Bjornstad dans le cas où elle persisterait à refuser de produire les documents exigés ou ne paierait pas les sommes qu’il lui était ordonné de payer. S’il est vrai que la juge Dawson a prévu que la requête en emprisonnement pourrait être fondée sur l’article 471 des Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106, qui prévoit que la Cour peut demander l’assistance du procureur général dans les instances pour outrage au tribunal, avance le demandeur, il n’est pas nécessaire d’invoquer cet article pour faire comparaître de nouveau le défendeur devant la Cour afin de prononcer contre lui une peine d’emprisonnement. Je souscris à cet argument : l’article 472 des Règles permet à la Cour d’ordonner l’incarcération du coupable d’outrage pour une période de moins de cinq ans ou jusqu’à ce qu’il se conforme à une ordonnance rendue par elle. De plus, il ne fait aucun doute que la Cour est investie de la compétence inhérente pour décerner un mandat d’amener devant elle ou un mandat d’arrêt et de détention. (Le juge Zinn a tout récemment décerné, dans l’affaire Money Stop, un tel mandat d’arrêt et de détention contre M. Sutherland, qui ne s’était pas conformé à son ordonnance de détermination de la peine.)

 

[21]           Pour ce qui concerne les dépens, le demandeur réclame un montant tout compris de 11 557,65 $ et il a joint un état abrégé de ses dépens à ses observations sur la peine. Il est apparu au cours de l’audience que ce montant comprenait les honoraires et débours afférents à l’ordonnance d’exécution et à l’ordonnance de justifier. Or ces deux ordonnances antérieures prévoyaient le paiement des dépens y afférents par le défendeur, de sorte que celui‑ci ne peut être de nouveau condamné à payer ces mêmes dépens, puisque le demandeur bénéficierait ainsi d’un double recouvrement auquel il n’a pas droit.

 

[22]           Les pièces produites par le demandeur ne font pas le partage entre le temps que l’avocat et le technicien juridique affectés au dossier ont consacré aux deux ordonnances antérieures et celui qu’a exigé d’eux la présente requête. J’ai donc décidé qu’il convient de prononcer ici des dépens équivalents aux dépens avocat‑client, étant donné la désobéissance persistante du défendeur à l’ordonnance de la Cour, et que les dépens relatifs aux articles 5, 6, 24 et 25 seront par conséquent calculés en fonction du maximum de la colonne V du tarif B des Règles des Cours fédérales, qui offre une approximation des dépens avocat‑client dans la présente affaire. Le demandeur sera aussi indemnisé des débours de la présente requête, qui peuvent être déterminés d’après les pièces qu’il a déposées, ainsi que du coût de la signification à personne de la présente ordonnance au défendeur. J’accorde donc au demandeur un total de 4 115,59 $ au titre des honoraires et débours.

 

[23]           Par conséquent, j’estime qu’il y a lieu d’ordonner dans la présente instance le paiement des dépens susmentionnés et d’une amende de 3 000,00 $, et la production des documents et renseignements exigés, le tout dans les 30 jours suivant la date de signification de mon ordonnance. S’il est vrai qu’elle avait d’abord requis une amende de 5 000,00 $, l’avocate du demandeur a reconnu au moment de la présentation de ses conclusions orales sur la peine qu’une somme de 3 000,00 $ serait peut‑être plus adaptée à la présente espèce, étant donné les différences entre celle‑ci et l’affaire Money Stop.

 

[24]           La peine que j’ai retenue me paraît faire une part équilibrée aux facteurs applicables : il s’agit ici du premier cas d’outrage au tribunal, mais le défendeur a témoigné d’un mépris flagrant de l’ordonnance et des autres actes de la Cour. J’estime également justifié de prévoir la possibilité que l’affaire soit de nouveau portée devant la Cour en vue de l’emprisonnement éventuel du défendeur, pour le cas où il ne paierait pas l’amende et les dépens prononcés, et ne produirait pas les documents et renseignements exigés. Le défendeur doit se rendre compte qu’il ne peut passer outre impunément à des ordonnances judiciaires. Une ordonnance judiciaire n’est pas une suggestion : elle doit être exécutée. Le défendeur, s’il décidait de ne pas obtempérer à la présente ordonnance, pourrait bien se retrouver en prison pour longtemps.

 

LA COUR ORDONNE :

1)                  que le demandeur signifie à personne sans délai au défendeur une copie de la présente ordonnance, de ses motifs et de l’annexe y jointe, et dépose devant elle une preuve de cette signification;

2)                  que le défendeur paie une amende de 3 000,00 $ dans les 30 jours suivant la signification de la présente ordonnance;

3)                  que le défendeur paie au demandeur les dépens afférents à la présente requête, fixés à la somme de 4 115,59 $, dans les 30 jours suivant la signification de la présente ordonnance;

4)                  que le défendeur communique au demandeur les renseignements et documents énumérés dans l’ordonnance de notre Cour en date du 19 décembre 2012, jointe à la présente ordonnance en annexe A, dans les 30 jours suivant la signification de la présente ordonnance.

5)                  Si le défendeur fait défaut de se conformer aux dispositions de la présente ordonnance, le demandeur pourra former une requête en délivrance d’un mandat ordonnant de l’arrêter et de l’amener devant tout juge de notre Cour, afin qu’il expose les raisons pour lesquelles il ne devrait pas être emprisonné pour une durée déterminée ou jusqu’à ce qu’il se conforme à l’ordonnance de la Cour en date du 19 décembre 2012.

 

 

« Mary J.L. Gleason »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Linda Brisebois, LL.B.

 


ANNEXE A

[traduction]

Date : 20121219

Dossier : T‑2164‑12

Calgary (Alberta), le 19 décembre 2012

En présence de monsieur le juge O’Reilly

 

ENTRE :

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL

demandeur

et

 

DANIEL M. BOSNJAK

défendeur

 

 

ORDONNANCE

 

VU la demande du ministre du Revenu national (le ministre) entendue en audience le mercredi 19 décembre 2012 dans les locaux de la Cour fédérale sis au 3e étage, Canadian Occidental Tower, 635 Eighth Avenue SW, Calgary (Alberta);

 

ET APRÈS avoir examiné des pièces déposées par le ministre, et entendu les observations de l’avocat de celui‑ci, le défendeur n’étant pas représenté;

 

SUR PREUVE :

1.                  que sont remplies les conditions auxquelles l’article 231.7 de la Loi de l’impôt sur le revenu subordonne la prononciation d’une ordonnance enjoignant au défendeur de produire les renseignements et documents exigés par le ministre, ces conditions étant :

a.                   que le paragraphe 231.2(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu obligeait le défendeur à fournir les renseignements et documents exigés par le ministre;

b.                  que le défendeur a fait défaut de fournir ces renseignements et documents;

c.                   que le privilège des communications entre client et avocat ne peut être invoqué à l’égard des renseignements et documents demandés par le ministre;

2.                  qu’il convient de rendre, en vertu de l’article 231.7 de la Loi de l’impôt sur le revenu, une ordonnance enjoignant au défendeur de fournir au ministre les renseignements et documents exigés par lui, notamment ceux dont la liste suit :

a.                   les noms de toutes les banques et coordonnées de toutes leurs succursales où le défendeur a des comptes et/ou des coffres, et les montants y déposés au 26 juillet 2012;

 

b.                  la liste complète des comptes de courtage détenus par le défendeur, qu’ils soient ou non enregistrés à son nom, avec les noms et adresses des courtiers, et les soldes dus au 26 juillet 2012;

 

c.                   un état complet des actions, ordinaires ou privilégiées, et des obligations détenues par le défendeur, qu’elles soient ou non enregistrées à son nom, spécifiant le coût unitaire par action et le lieu de situation de chaque titre;

 

d.                  un état complet des biens immobiliers appartenant au défendeur, qu’ils soient ou non enregistrés à son nom, y compris les descriptions officielles, les montants des charges, les noms et adresses des grevants, et les lieux de situation des bureaux d’enregistrement;

 

e.                   un état complet des assurances détenues par le défendeur, spécifiant pour chaque police le nom de l’assureur, le capital assuré, le numéro, le lieu de situation, ainsi que, le cas échéant, la valeur de rachat et le montant des dividendes accumulés;

 

f.                   un état complet des prêts hypothécaires et autres prêts en cours dans lesquels le défendeur a un intérêt bénéficiaire, spécifiant les montants qui lui étaient dus au 26 juillet 2012, les dates d’enregistrement, les bureaux d’enregistrement, les descriptions officielles des biens grevés et, le cas échéant, les modalités de remboursement, les dates d’échéance, ainsi que les noms et adresses de tous les débiteurs hypothécaires et autres;

 

g.                  un état complet des emprunts hypothécaires et autres emprunts à payer par le défendeur au 26 juillet 2012, spécifiant la valeur au cours du marché de toutes les sûretés réelles et portant les descriptions officielles de tous les biens remis en nantissement;

 

h.                  la liste complète des véhicules automobiles qui appartenaient au défendeur au 26 juillet 2012, spécifiant pour chacun l’année, le style, la marque, le numéro d’immatriculation, le prix, ainsi que les nom et adresse du titulaire de privilège ou de sûreté;

 

i.                    un état complet et détaillé de tous autres actifs, non couverts par ce qui précède, que détient le défendeur, qu’ils soient ou non enregistrés à son nom;

 

j.                    un état complet des rémunérations et autres sommes reçues par le défendeur du 1er janvier au 26 juillet 2012, spécifiant les noms et adresses des payeurs et la nature des paiements;

 

k.                  un relevé complet des jugements non exécutés rendus contre le défendeur, spécifiant la nature des dettes, ainsi que les noms et adresses des créanciers judiciaires;

 

l.                    un état complet, spécifiant pour chacun la date et le montant, des paiements faits à des fiducies de pension, caisses de retraite ou autres comptes de rente, et spécifiant en outre pour chacun de ces comptes son lieu exact de situation, ainsi que le montant accumulé au crédit du défendeur lui‑même et/ou des bénéficiaires.

3.         que le défendeur n’a pas fourni au ministre les renseignements et documents exigés;

4.         que le privilège des communications entre client et avocat, au sens du paragraphe 232(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu, ne peut être invoqué à l’égard des renseignements et documents exigés,

 

LA COUR ORDONNE au défendeur, en vertu de l’article 231.7 de la Loi de l’impôt sur le revenu, de se conformer à la demande péremptoire du ministre et de fournir sans délai, au plus tard dans les 30 jours suivant la signification de la présente ordonnance, les renseignements et documents exigés à un agent de l’Agence du revenu du Canada délégataire des pouvoirs conférés par la Loi ou à une autre personne désignée à cette fin par le commissaire de l’Agence;

 

LA COUR ORDONNE EN OUTRE que le ministre soit autorisé à signifier à personne la présente ordonnance au demandeur conformément aux articles 128 et 130 des Règles des Cours fédérales;

 


LA COUR ORDONNE ENFIN au défendeur de payer au ministre la somme de 1 000,00 $ au titre des dépens.

 

 

« James W. O’Reilly »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Linda Brisebois, LL.B.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                    T‑2164‑12

 

 

INTITULÉ :                                                  LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL c
DANIEL M. BOSNJAK

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                          Calgary (Alberta)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                         Le 15 avril 2013

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                                  LA JUGE GLEASON

 

DATE DES MOTIFS :                                 Le 18 avril 2013

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Margaret McCabe

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Sans objet

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

Calgary (Alberta)

 

POUR LE DEMANDEUR

Sans objet

(le défendeur se représentant lui‑même)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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