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Date : 20130521

Dossier : IMM-7032-12

Référence : 2013 CF 523

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Vancouver (Colombie-Britannique), le 21 mai 2013

En présence de madame la juge Simpson

 

ENTRE :

 

ZONG JIE CHEN

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

  MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               Le demandeur sollicite, en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la Loi), le contrôle judiciaire de la décision datée du 1er juin 2012 par laquelle la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission) a conclu que le demandeur n’a ni la qualité de réfugié au sens de la Convention ni celle de personne à protéger (la décision).

 

[2]               Pour les motifs exposés ci-dessous, la demande sera accueillie.

 

Le contexte

[3]               Le demandeur, âgé de 26 ans, est citoyen de la République populaire de Chine et originaire de la province du Fujian. Sa demande d’asile fondée sur les articles 96 et 97 repose sur son identité catholique.

 

[4]               Les parents du demandeur sont des catholiques qui fréquentaient une église catholique enregistrée. Ils ont élevé le demandeur au sein de cette église. Cependant, le demandeur a commencé à fréquenter une église catholique illégale non enregistrée le 31 janvier 2010, après qu’un ami lui eut fait découvrir cette église.

 

[5]               Le 25 avril 2010, le Bureau de la sécurité publique (BSP) a fait une descente dans l’église clandestine lors d’un service. Le demandeur ne se trouvait pas sur place à ce moment-là, mais son ami a communiqué avec lui plus tard et lui a dit qu’au moins quatre membres de l’église avaient été arrêtés. Le demandeur s’est caché immédiatement.

 

[6]               Le père du demandeur lui a appris que, le 26 avril 2010, des agents du BSP s’étaient rendus chez lui pour savoir où le demandeur se trouvait. Sa famille a été avisée qu’il était recherché à cause de sa participation dans une église illégale. Le BSP s’est de nouveau présenté chez le demandeur, le 30 avril 2010, et a demandé pourquoi le demandeur ne s’était pas encore rendu. Le BSP a averti la famille du demandeur que ce dernier allait être arrêté et accusé.

 

[7]               Craignant d’être arrêté et torturé, le demandeur s’est enfuit de Chine et est arrivé au Canada, avec l’aide d’un passeur, le 31 octobre 2010.

 

[8]               Le demandeur soutient que le BSP s’est de nouveau rendu chez lui, le 22 novembre 2010, mais cette fois avec un mandat d’arrestation. Les agents du BSP ont fouillé la maison du demandeur et saisi sont passeport. Ils ont remis à la famille une liste des articles saisis datée du 22 novembre 2010 (la liste). Selon cette liste, qui a été traduite, le passeport du demandeur a été saisi à cause de la participation de ce dernier à des services religieux illégaux.

 

La décision

[9]               La Commission a estimé que la question déterminante était la crédibilité du demandeur et elle a rejeté la demande d’asile.

 

Analyse

[10]           L’une des conclusions défavorables tirées par le Commission en matière de crédibilité est particulièrement problématique et, à mon avis, est déterminante quant à l’issue de la demande de contrôle judiciaire.

 

[11]           Le Commission a affirmé que le BSP avait prétendument saisi le passeport du demandeur en novembre 2011. La Commission a conclu qu’il invraisemblable que le BSP aurait attendu 19 mois avant de saisir le passeport si le demandeur était recherché depuis avril 2010. La Commission s’est fondée sur cet élément pour conclure que la liste était un faux.

 

[12]           Cependant, la Commission a mal décrit les faits. Le Formulaire de renseignements personnels du demandeur et son témoignage à l’audience démontrent clairement que son passeport avait été saisi en novembre 2010. La traduction anglaise de la liste indiquait erronément l’année « 2011 », mais c’est la forme numérale de « 2010 » qui se trouve sur le document chinois original. L’avocate du demandeur a porté cette erreur à l’attention de la Commission lors de l’audience, et la bonne date a été prise en note. Toutefois, il semble que la Commission a oublié cette correction lorsqu’elle a préparé sa décision.

 

[13]           L’avocate du demandeur soutient que l’erreur de la Commission l’a menée à ne pas tenir compte de la liste, qui constitue un document corroborant important. L’avocat du défendeur admet que la liste est datée de novembre 2010 et non de novembre 2011. Toutefois, le défendeur soutient que la conclusion défavorable de la Commission quant à la crédibilité est raisonnable, car même un délai de sept mois pour saisir le passeport serait invraisemblable, si le BSP recherchait effectivement le demandeur en avril 2010.

 

[14]           À mon avis, l’erreur de la Commission est importante et elle justifie d’annuler la décision de la Commission. Cette erreur a poussé la Commission à écarter la seule preuve corroborante déposée par le demandeur.

 

[15]           Je souscris aussi à l’argument du demandeur selon lequel, si la Commission n’avait pas fait abstraction de la liste, elle serait peut-être arrivée à une conclusion différente quant aux documents relatifs au risque de persécution que le demandeur courrait au Fujian. Plus précisément, la Commission aurait peut-être donné plus de poids à un document mentionné au paragraphe 17 de ses motifs et qui, selon la Commission, indiquait que les autorités locales du Fujian continuent d’arrêter des prêtres et des paroissiens catholiques [non souligné dans l’original].

 

[16]           Compte tenu des circonstances, les allégations du demandeur doivent être réexaminées.

 

[17]           Aucune question à certifier n’a été proposée suivant l’alinéa 74d) de la Loi.

 


ORDONNANCE

 

LA COUR ORDONNE :

La décision est annulée et l’affaire est renvoyée à la Commission pour être réexaminée par une formation constituée différemment.

 

 

« Sandra J. Simpson »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Jean-François Leclerc-Sirois, LL.B, M.A.Trad.Jur.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-7032-12

 

INTITULÉ :                                      ZONG JIE CHEN c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :             Le 1er mai 2013

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                      LA JUGE SIMPSON

 

DATE DE L’ORDONNANCE :     LE 21 MAI 2013

 

 

COMPARUTIONS :

 

Cheryl Robinson

 

POUR LE DEMANDEUR

Alex C. Kam

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Kranc Associates

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

 

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