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Date :201306017

Dossier : T-583-09

Référence : 2013 CF 427

Ottawa (Ontario), le 17 juin 2013

En présence de monsieur le juge en chef

ENTRE :

 

PLANIFICATION-ORGANISATION-PUBLICATIONS SYSTÈMES (POPS) LTÉE

et ELIZABETH POSADA

 

 

 

demanderesses

 

et

 

 

 

9054-8181 QUÉBEC INC,

PHILIPPE CHAPUIS et

BENOIT BAZOGE

 

 

 

 

défendeurs

 

 

 

 

 

      MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT MODIFIÉS

 

 

[1]               La présente instance découle d’un malentendu apparent qui a eu un triste aboutissement pour les trois personnes mentionnées ci-dessus, qui étaient autrefois des amis très proches. La manière dont ils ont choisi de résoudre ce malentendu a aussi été très coûteuse. Il y a de fortes chances que les frais juridiques que chacun d’eux a engagés dans le cadre de cette procédure dépassent de loin le montant des intérêts qu’ils défendent.

 

[2]               Au fond, dans la présente affaire, il s’agit de décider si les défendeurs ont le droit d’utiliser un logiciel de simulation d’entreprise, et les adaptations de ce produit, à l’égard desquels les demanderesses ont enregistré et prétendent posséder les droits d’auteur.

 

[3]               Les demanderesses veulent notamment obtenir :

i)               une déclaration selon laquelle (a) il existe des droits d’auteur pour ces produits logiciels, (b) la demanderesse PLANIFICATION-ORGANISATION-PUBLICATIONS SYSTÈMES POPS LTÉE (ci-après POPS) est la titulaire des droits d’auteur de ces produits, et (c) les défendeurs ont violé ces droits d’auteur;

ii)             une injonction permanente interdisant aux défendeurs de violer les droits d’auteur de POPS visant ces produits;

iii)           la totalité des bénéfices découlant de telles prétendues violations que les défendeurs réalisent, la restitution des bénéfices ainsi obtenus, des dommages‑intérêts et les intérêts avant et après jugement.

 

[4]               Par voie de demande reconventionnelle, les défendeurs demandent :

i)               la radiation des certificats d’enregistrement de POPS du registre des droits d’auteur et une déclaration selon laquelle Mme Posada n’est pas l’auteure de l’une des adaptations du logiciel (connue sous le nom d’« Epsilon »);

ii)             le versement de dommages-intérêts punitifs et exemplaires d’un montant de 10 000 $;

iii)           le versement d’un montant de 100 000 $ pour les dépens avocat-client;

iv)          la confirmation qu’ils détiennent, à perpétuité, une licence d’utilisation du logiciel et de certaines de ses adaptations à toutes les fins liées aux activités professionnelles d’IDP inc.

 

[5]               Pour les motifs exposés ci-dessous, j’ai conclu que :
i)      les droits d’auteur existent pour les produits logiciels susmentionnés;
ii)     POPS est au moins un des titulaires légitimes des droits d’auteur de ces produits;
iii)    la défenderesse 9054-8181 QUÉBEC INC., qui fait aussi affaire sous le nom IDP inc. (ci‑après, collectivement désignées sous le nom IDP), est titulaire d’au moins une licence implicite d’utilisation de ces produits;
iv)    les demanderesses n’avaient pas le droit de révoquer cette licence;
v)     les défendeurs n’ont pas violé les droits d’auteur des demanderesses et ne sont donc pas tenus de payer des dommages‑intérêts ou de restituer des bénéfices aux demanderesses;
vi)    les défendeurs n’ont pas démontré que la conduite des demanderesses justifiait d’accorder des dommages-intérêts punitifs et exemplaires ou l’adjudication de dépens avocat-client;
vii)   les demanderesses, à l’exception de ce qui est mentionné aux points 3(i) et 3(ii) ci‑dessus, n’ont pas droit aux autres réparations qu’elles ont demandées en l’espèce;
viii)  les défendeurs ont droit à la totalité du montant forfaitaire de 20 000 $ dont les parties avaient convenu au titre des dépens dans la présente instance.

 

[6]               L’audience s’est déroulée en anglais et en français. Dans la version anglaise des motifs ci-dessous, les traductions des témoignages qui ont été présentés en français et des passages figurant dans les documents rédigés en français, sont les miennes.

 

I.          Les parties

 

[7]               La demanderesse POPS est une société constituée sous le régime des lois fédérales qui œuvre depuis 1985 dans le secteur du développement et de la commercialisation de logiciels, de la consultation et de la formation professionnelle.

 

[8]               La demanderesse Elizabeth Posada est l’unique actionnaire, administratrice et dirigeante de POPS. Elle est aussi employée de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) en tant que professeure au sein du Département de stratégie. Elle est titulaire d’un doctorat en administration des affaires et participe étroitement au développement des produits logiciels susmentionnés depuis 1984. En outre, elle a été actionnaire, administratrice, dirigeante et employée d’IDP du 1er février 2007, environ, jusqu’au 1er octobre 2008, au moins.

 

[9]               La défenderesse IDP est une société qui a été constituée en personne morale sous le régime des lois de la province de Québec en 1997. Ses principales activités consistent à organiser des séminaires au Canada et à l’étranger destinés aux étudiants universitaires et aux entreprises, en ayant parfois recours aux produits logiciels de simulation qui font l’objet de la présente instance.

 

[10]           Le défendeur Philippe Chapuis est un actionnaire, un administrateur, un dirigeant et un employé d’IDP. Il est titulaire d’un doctorat en administration des affaires et il est chargé de cours au Département de stratégie, responsabilité sociale et environnementale de l’UQAM depuis plus de 10 ans.

 

[11]           Le défendeur Benoît Bazoge est un actionnaire, un administrateur, un dirigeant et un employé d’IDP. Il est titulaire d’un doctorat en administration des affaires, est professeur au Département de stratégie, responsabilité sociale et environnementale de l’UQAM et est actuellement vice-doyen de l’École des sciences de la gestion.

 

II.        Contexte

 

[12]           Dans les années 1970, et peut-être auparavant, Andrew Szendrovits, professeur à l’Université McMaster (McMaster), a mis au point un logiciel connu sous les noms « Business Game » et « Business Simulation », qui a été programmé en Fortran et utilisé sur des ordinateurs centraux.

 

[13]           Aux dires de tous, le logiciel a été construit d’après des formules mathématiques complexes et des « routines de calcul » qui permettaient aux utilisateurs de simuler des résultats commerciaux qui reposaient sur des données qui étaient réduites à ce qui s’appelait à l’époque des cartes perforées, qui étaient « lues » par les ordinateurs centraux.

 

[14]           Au début des années 1980, alors que Mme Posada était étudiante à l’Université de Sherbrooke, elle a aidé un professeur là-bas qui utilisait un autre logiciel de simulation connu sous le nom de Compete. Il appert que ce logiciel était très peu convivial et difficile à utiliser en classe. Ainsi, dès son premier contact avec Business Game, vers 1984, elle s’est intéressée à la possibilité de se tourner vers ce produit.

 

[15]           À l’époque, Business Game circulait beaucoup dans les milieux universitaires en Ontario et au Québec, en quelque sorte, comme s’il s’agissait d’un logiciel libre. En même temps, les premiers micro-ordinateurs ont commencé à devenir accessibles et Mme Posada s’est mise à envisager la possibilité d’adapter Business Game à la micro-informatique. Après avoir constaté que le langage de programmation Fortran pouvait être utilisé pour les micro-ordinateurs, elle a commencé à développer une interface de micro-ordinateur pour Business Game.

 

[16]           Selon son témoignage non contredit, Mme Posada a réussi à développer, après plusieurs mois de travail intensif, une interface de micro-ordinateur pour le logiciel de simulation, qu’elle a commencé à appeler « Ceres ». Entre autres choses, une caractéristique importante et originale de Ceres était qu’il permettait aux utilisateurs d’apprendre les concepts d’entreprise de manière interactive.

 

[17]           Par exemple, le logiciel permettait notamment aux utilisateurs, généralement des étudiants universitaires ou des dirigeants d’entreprises, de modifier certains intrants pour produire des rapports ou « extrants » liés à l’inventaire, à la commercialisation, aux ventes, aux données financières et à la production.

 

[18]           En dépit du travail considérable que Mme Posada a accompli sur le logiciel, faisant ainsi en sorte qu’elle a rédigé un nombre de lignes de code du logiciel un peu plus élevé que M. Szendrovits, le « cœur » du logiciel, à savoir les formules mathématiques et les « routines de calcul », était demeuré pratiquement inchangé par rapport à ce qui avait été développé par M. Szendrovits (transcription, 8 janvier 2013, à la p 94).

 

[19]           Peu de temps après la création de Ceres, Mme Posada a communiqué avec M. Szendrovits afin de l’informer de ce qu’elle avait fait avec le logiciel. Il semble qu’il ait manifesté un vif intérêt pour le travail qu’elle avait accompli et qu’ils sont rapidement devenus de bons amis.

 

[20]           En 1985, M. Szendrovits, Mme Posada, Jérôme Doutriaux et Jean-Paul Sallenave ont conclu une entente (l’entente de 1985) visant à céder à POPS certains droits liés à Ceres.

 

[21]           Aux dires de Mme Posada, M. Doutriaux était partie à l’entente parce qu’il avait traduit certaines lignes de code pour permettre l’affichage en français de certains résultats (il a, par exemple, adapté le logiciel pour que le mot « bilan » s’affiche en français au lieu des mots « balance sheet »). Lors de son témoignage, Mme Posada a aussi déclaré que M. Sallenave était partie à l’entente parce qu’il avait rédigé le matériel pédagogique et didactique, entre autres, qui avait été distribué avec Ceres pendant les années au cours desquelles le logiciel était vendu, soit dans les années 1980 et 1990.

 

[22]           Étant donné que ni M. Doutriaux ni M. Sallenave n’ont participé à la présente instance, la décision ne portera pas sur l’ampleur de leur contribution à Ceres ou aux manuels de ce logiciel, ni sur la nature des droits, le cas échéant, qu’ils peuvent avoir sur Ceres ou ses adaptations. Par conséquent, toute conclusion quant à la propriété des droits d’auteur sur Ceres, ses adaptations ou des manuels qui peuvent continuer d’englober des documents rédigés par M. Sallenave sera formulée comme étant une propriété « partielle », à tout le moins.

 

[23]           Vers 1986, M. Bazoge a rencontré M. Chapuis, alors qu’ils étudiaient tous deux au doctorat. L’année suivante, ils ont rencontré Mme Posada, alors qu’elle était aussi étudiante au doctorat. Ils ont noué une amitié étroite avec le temps.

 

[24]           En 1989, M. Bazoge a acheté le logiciel Ceres auprès de POPS pour le compte de l’UQAM au montant de 2 000 $. L’année suivante, M. Chapuis a déboursé le même montant pour l’achat du logiciel au nom de l’École Supérieure de Commerce de Tours, en France.

 

[25]           Au cours des dernières années, différentes versions mises à jour de Ceres, connues sous les noms Epsilon 1, Epsilon 2 (collectivement désignées Epsilon), Comex et Omega (collectivement désignées le Logiciel), ont été développées par une ou plusieurs parties à la présente instance.

 

[26]           La relation de travail informelle qu’entretenaient les parties depuis longtemps a été officialisée vers le 1er février 2007, lorsque Mme Posada est devenue une actionnaire, une administratrice, une dirigeante et une employée d’IDP.

 

[27]           En octobre 2008, un différend a éclaté entre les parties. Au départ, il semble avoir eu trait principalement à la rémunération qu’IDP versait à Mme Posada, par rapport à celle que recevaient MM. Chapuis et Bazoge. Toutefois, ce différend a rapidement pris de l’ampleur pour ainsi englober les modalités du départ de Mme Posada d’IDP. Ce litige fait l’objet d’une autre instance, qui est actuellement devant la Cour supérieure du Québec.

 

[28]           Vers le 20 octobre 2008, après que Mme Posada est devenue convaincue que les défendeurs avaient commencé à revendiquer des droits de propriété sur les droits d’auteur du Logiciel, le différend a pris de l’ampleur de manière à inclure le droit des défendeurs d’utiliser le Logiciel et, du moins du point de vue de Mme Posada, les droits d’auteur de POPS sur le Logiciel. L’année suivante, après avoir tenté de régler leur différend pendant plusieurs mois, les demanderesses ont institué le présent recours.

 

III.             Questions à trancher

 

[29]           Les questions à trancher dans la présente instance se résument ainsi :

i)          Est-ce que POPS ou Mme Posada détiennent les droits d’auteurs relativement à Ceres ou à ses adaptations, notamment Comex, Epsilon 1, Epsilon 2 et Omega?

ii)        Mme Posada a-t-elle été embauchée par IDP pour développer Omega, Comex ou Epsilon?  

iii)      Si tel est le cas, quels sont les droits des demanderesses et d’IDP, le cas échéant, relativement aux versions du Logiciel et à Ceres?

iv)      Les demanderesses avaient-elles le droit de révoquer des droits d’utilisation du Logiciel qu’elles pouvaient avoir octroyés à IDP?

v)        Les défendeurs ont-ils enfreint des droits d’auteur que POPS pouvait détenir sur une ou des versions du Logiciel?

vi)      Dans l’affirmative, quels bénéfices les défendeurs ont-ils réalisés, ou quels sont les bénéfices qui peuvent leur être imputés, en ce qui concerne les prétendues violations de droits d’auteur et qui peuvent être accordés aux demanderesses?

vii)    Quels sont les réparations et les dépens, s’il en est, qui devraient être accordés aux demanderesses ou aux défendeurs?

 

[30]           Bien que la formulation ci-dessus des questions à trancher diffère quelque peu des questions soulevées par le protonotaire Morneau dans son ordonnance datée du 25 avril 2012, ainsi que par les parties elles-mêmes dans la liste conjointe des questions à trancher au procès, je suis convaincu, d’après les actes de procédure des parties et les questions abordées conjointement au cours de l’instance, que la liste qui précède reflète fidèlement et résume les questions en litige dans la présente instance.

 

IV.             La législation pertinente

 

[31]           Les parties ne contestent pas entre elles que le Logiciel répond à la définition de « toute œuvre littéraire, dramatique, musicale ou artistique originale » énoncée à l’article 2 de la Loi sur le droit d’auteur, LRC 1985, ch C-42 (la Loi) :

 

« toute œuvre littéraire, dramatique, musicale ou artistique originale »

“every original literary, dramatic, musical and artistic work”

« toute œuvre littéraire, dramatique, musicale ou artistique originale » S’entend de toute production originale du domaine littéraire, scientifique ou artistique quels qu’en soient le mode ou la forme d’expression, tels les compilations, livres, brochures et autres écrits, les conférences, les œuvres dramatiques ou dramatico‑musicales, les œuvres musicales, les traductions, les illustrations, les croquis et les ouvrages plastiques relatifs à la géographie, à la topographie, à l’architecture ou aux sciences.

 

“every original literary, dramatic, musical and artistic work”

« toute œuvre littéraire, dramatique, musicale ou artistique originale »

 

“every original literary, dramatic, musical and artistic work” includes every original production in the literary, scientific or artistic domain, whatever may be the mode or form of its expression, such as compilations, books, pamphlets and other writings, lectures, dramatic or dramatico-musical works, musical works, translations, illustrations, sketches and plastic works relative to geography, topography, architecture or science;

 

 

[32]           L’article 2 de la Loi définit aussi le terme « contrefaçon » comme suit : « À l’égard d’une œuvre sur laquelle existe un droit d’auteur, toute reproduction, y compris l’imitation déguisée, qui a été faite contrairement à la présente loi ou qui a fait l’objet d’un acte contraire à la présente loi[.] »

 

[33]           Selon l’article 3 de la Loi, « droit d’auteur sur l’œuvre » comporte le droit exclusif de produire ou reproduire la totalité ou une partie importante de l’œuvre, sous une forme matérielle quelconque, d’en exécuter ou d’en représenter la totalité ou une partie importante en public et, si l’œuvre n’est pas publiée, d’en publier la totalité ou une partie importante. Suivant l’alinéa 3(1)a), ce droit comporte, en outre, le droit exclusif de produire, reproduire, représenter ou publier une traduction de l’œuvre.

 

[34]           Selon le paragraphe 5(1), le droit d’auteur existe sur toute œuvre littéraire, dramatique, musicale ou artistique originale si certaines conditions sont réalisées. Les parties conviennent que les conditions requises à l’égard du Logiciel sont remplies en l’espèce. Par conséquent, ainsi que le réclament les demanderesses, une déclaration à cet effet sera faite dans le jugement ci-joint. Il n’est donc pas nécessaire d’aborder cette question dans les présents motifs.

 

[35]           Le paragraphe 13(1) de la Loi prévoit que l’auteur de l’œuvre est le premier titulaire du droit d’auteur de l’œuvre. Toutefois, le paragraphe 13(3) est ainsi libellé :

*       Œuvre exécutée dans l’exercice d’un emploi

(3) Lorsque l’auteur est employé par une autre personne en vertu d’un contrat de louage de service ou d’apprentissage, et que l’œuvre est exécutée dans l’exercice de cet emploi, l’employeur est, à moins de stipulation contraire, le premier titulaire du droit d’auteur; mais lorsque l’œuvre est un article ou une autre contribution, à un journal, à une revue ou à un périodique du même genre, l’auteur, en l’absence de convention contraire, est réputé posséder le droit d’interdire la publication de cette œuvre ailleurs que dans un journal, une revue ou un périodique semblable.

*         Work made in the course of employment

(3) Where the author of a work was in the employment of some other person under a contract of service or apprenticeship and the work was made in the course of his employment by that person, the person by whom the author was employed shall, in the absence of any agreement to the contrary, be the first owner of the copyright, but where the work is an article or other contribution to a newspaper, magazine or similar periodical, there shall, in the absence of any agreement to the contrary, be deemed to be reserved to the author a right to restrain the publication of the work, otherwise than as part of a newspaper, magazine or similar periodical.

 

 

[36]           Le paragraphe 13(4) de la Loi porte sur la cession et les licences. Il est ainsi libellé :

     Cession et licences

(4) Le titulaire du droit d’auteur sur une œuvre peut céder ce droit, en totalité ou en partie, d’une façon générale ou avec des restrictions relatives au territoire, au support matériel, au secteur du marché ou à la portée de la cession, pour la durée complète ou partielle de la protection; il peut également concéder, par une licence, un intérêt quelconque dans ce droit; mais la cession ou la concession n’est valable que si elle est rédigée par écrit et signée par le titulaire du droit qui en fait l’objet, ou par son agent dûment autorisé.

Assignments and licences

(4) The owner of the copyright in any work may assign the right, either wholly or partially, and either generally or subject to limitations relating to territory, medium or sector of the market or other limitations relating to the scope of the assignment, and either for the whole term of the copyright or for any other part thereof, and may grant any interest in the right by licence, but no assignment or grant is valid unless it is in writing signed by the owner of the right in respect of which the assignment or grant is made, or by the owner’s duly authorized agent.

 

 

[37]           Conformément au paragraphe 27(1), il y a violation du droit d’auteur lorsqu’une personne accomplit, sans le consentement du titulaire du droit d’auteur, quelque chose que seul ce dernier a la faculté de faire en vertu de la Loi. Le paragraphe 27(2) prévoit expressément que les actes suivants constituent une violation du droit d’auteur :

Violation à une étape ultérieure

(2) Constitue une violation du droit d’auteur l’accomplissement de tout acte ci-après en ce qui a trait à l’exemplaire d’une œuvre, d’une fixation d’une prestation, d’un enregistrement sonore ou d’une fixation d’un signal de communication alors que la personne qui accomplit l’acte sait ou devrait savoir que la production de l’exemplaire constitue une violation de ce droit, ou en constituerait une si l’exemplaire avait été produit au Canada par la personne qui l’a produit :

*       a) la vente ou la location;

*       b) la mise en circulation de façon à porter préjudice au titulaire du droit d’auteur;

*       c) la mise en circulation, la mise ou l’offre en vente ou en location, ou l’exposition en public, dans un but commercial;

*       d) la possession en vue de l’un ou l’autre des actes visés aux alinéas a) à c);

e) l’importation au Canada en vue de l’un ou l’autre des actes visés aux alinéas a) à c).

Secondary infringement

(2) It is an infringement of copyright for any person to

*       (a) sell or rent out,

*       (b) distribute to such an extent as to affect prejudicially the owner of the copyright,

*       (c) by way of trade distribute, expose or offer for sale or rental, or exhibit in public,

*       (d) possess for the purpose of doing anything referred to in paragraphs (a) to (c), or

*       (e) import into Canada for the purpose of doing anything referred to in paragraphs (a) to (c),

*          a copy of a work, sound recording or fixation of a performer’s performance or of a communication signal that the person knows or should have known infringes copyright or would infringe copyright if it had been made in Canada by the person who made it.

 

 

[38]            En application du paragraphe 34(1) de la Loi, en cas de violation d’un droit d’auteur, le titulaire du droit peut, sous réserve des autres dispositions de la Loi, exercer tous les recours – en vue notamment d’une injonction, de dommages-intérêts, d’une reddition de compte ou d’une remise – que la loi lui accorde ou peut accorder pour la violation d’un droit.

 

[39]           Il est aussi pertinent de signaler qu’en application de l’alinéa 34(1)b), dans toute procédure civile engagée en vertu de la Loi, l’auteur est présumé être le titulaire des droits d’auteur. En outre, suivant le paragraphe 53(2), le certificat d’enregistrement du droit d’auteur constitue la preuve de l’existence du droit d’auteur et du fait que la personne figurant à l’enregistrement en est le titulaire.

 

V.   Analyse

A.   Est-ce que POPS ou Mme Posada détiennent les droits d’auteurs relativement à Ceres?

 

[40]           Les demanderesses soutiennent que POPS détient les droits d’auteur relativement à Ceres en raison d’un des faits suivants :

i)          l’entente de 1985;

ii)        la lettre datée du 25 mars 1998 (la lettre de 1998 de M. Szendrovits) par laquelle Andrew Szendrovits voulait accorder certains droits à POPS;

iii)      un acte de cession au profit de POPS, daté du 28 octobre 2008, de M. Les Szendrovits (l’acte de cession de Les Szendrovits), agissant au nom de sa mère et de la succession d’Andrew Szendrovits;

iv)      un acte de cession au profit de POPS, daté du 29 octobre 2009, d’Elsie Quait‑Randall au nom de McMaster (l’acte de cession de McMaster).

 

[41]           De plus, les demanderesses affirment que l’enregistrement par POPS de son titre de propriété à l’égard de Ceres le 25 septembre 1991 entraîne la présomption qu’elle est la propriétaire légitime de ce logiciel.

 

[42]           À la lumière des attendus rattachés à l’acte de cession de Les Szendrovits et à l’acte de cession de McMaster, il est clair qu’ils visaient à dissiper tout doute concernant l’identité du détenteur des droits d’auteur sur Ceres. En ce qui concerne l’acte de cession de McMaster, le document confirmait également le droit de McMaster de continuer d’utiliser Ceres et les versions mises à jour de ce logiciel.

 

[43]            Les défendeurs soutiennent que, du début de leur relation avec Mme Posada jusqu’au commencement de leur différend avec elle en octobre 2008, ils avaient accepté de bonne foi les affirmations de Mme Posada selon lesquelles POPS détenait les droits d’auteur sur Ceres.

 

[44]           Pour diverses raisons, ils soutiennent qu’aucun des documents désignés ci-dessus n’a eu pour effet de transférer la propriété des droits d’auteur sur Ceres à POPS.

 

[45]           Pour les motifs exposés ci-après, je ne suis pas du même avis.

 

i.       L’entente de 1985

 

[46]             Les parties conviennent qu’Andrew Szendrovitz était l’auteur du code source de base du logiciel Ceres. Toutefois, les défendeurs soutiennent qu’il a créé Ceres en sa qualité d’employé de McMaster, si bien qu’en application du paragraphe 13(3) de la Loi, McMaster était le premier titulaire des droits d’auteur sur Ceres et n’a jamais dûment cédé ces droits à POPS ou à Mme Posada.

 

[47]           Par conséquent, les défendeurs soutiennent que l’entente de 1985 ne pouvait pas céder les droits d’auteur sur Ceres, car McMaster n’était pas partie à cette entente. J’aborderai cet argument ci‑dessous, à la section V.A(iv) des motifs.

 

[48]           Quoi qu’il en soit, les défendeurs affirment que l’entente de 1985 n’a pas eu pour effet de céder la propriété des droits d’auteur sur Ceres à POPS. Je suis d’accord.

 

[49]           L’entente de 1985 est intitulée « Contrat de promotion ». Ce document ne renferme aucune cession des droits d’auteur sur Ceres à POPS.

 

[50]           Le premier paragraphe de l’entente stipule plutôt ce qui suit : « Les sous-signés, co-auteurs de la simulation d’entreprise CERES, cèdent par la présente à la compagnie POPS Ltée, de Sherbrooke, Québec, les droits de promotion de CERES pour toutes langues et tous pays ». Conformément au statut conféré à POPS par l’entente, le terme utilisé pour la désigner tout au long de l’entente est « le promoteur ». De plus, en définissant la portée des droits accordés en vertu de l’entente, la clause II(1) affirme que « les auteurs cèdent expressément et à titre exclusif au promoteur les droits de traduction dans toutes langues et en tous pays, de représentation, d’adaption et de reproduction par tous les procédés visuels, auditifs, électroniques actuels et à venir, afférents à l’ouvrage, sans aucune exception ni réserve ». Il n’y a rien dans cette clause qui ait pour effet de céder les droits d’auteur sur Ceres à POPS.

 

[51]           De plus, aux termes de la clause II(3), POPS est tenue de communiquer aux auteurs les résultats de toute négociation engagée avec des tiers. À mon avis, dans le contexte de l’entente de 1985, cette disposition cadre mieux avec une entente de promotion ou de distribution qu’avec une entente de cession complète des droits d’auteur. L’intention qu’avaient les auteurs de rester titulaires des droits d’auteur sur Ceres se voit également dans la clause I(1), qui a trait à la durée de l’entente et qui stipule que l’entente « est faite pour avoir effet pour tout le temps que durera la propriété littéraire des auteurs, de ses ayants droit ou représentants ».

 

[52]           Les demanderesses se fondent sur l’utilisation du mot « cession » au deuxième paragraphe de l’entente, dans les titres des clauses I et II, ainsi que dans les passages introductifs de ces deux clauses pour étayer leur argument selon lequel le document était destiné à céder les droits d’auteur sur Ceres à POPS. Toutefois, le deuxième paragraphe servait simplement à clarifier que les droits accordés en vertu de l’entente étaient assujettis aux conditions exposées aux clauses I, II et III. De plus, les titres des clauses I et II n’ont aucun effet juridique et les passages initiaux de ces articles étaient simplement de nature introductive et n’avaient aucune autre fonction.

 

[53]           Les demanderesses et les défendeurs ont affirmé chacun de leur côté que leur interprétation de l’entente de 1985 était confirmée par les dispositions de la clause III, aux termes de laquelle POPS est tenue d’acheminer aux auteurs : (i) à parts égales, la totalité des sommes nettes reçues des ventes du manuel du propriétaire de Ceres et (ii) 10 % des recettes nettes provenant des ventes des disques d’ordinateur et du manuel de l’instructeur. À mon avis, la clause III n’est pas très utile pour décider si l’entente de 1985 a eu pour effet, ou était censée avoir pour effet de transférer les droits d’auteur sur Ceres à POPS. Toutefois, cette clause concorde avec l’avis des parties selon lequel elles souhaitaient inclure dans leur entente l’attribution à POPS du droit de distribuer Ceres. Cette opinion est confirmée par la clause 1(3) de l’entente, qui interdit aux auteurs de distribuer le Logiciel ou ses adaptations sans l’autorisation écrite préalable de POPS.

 

[54]           À la lumière de tout ce qui précède, je conviens avec les défendeurs que, même si M. Szendrovits détenait les droits d’auteur sur Ceres en 1985, l’entente de 1985 n’avait pas pour effet de transférer ces droits à POPS. Toutefois, elle a eu pour effet d’accorder à POPS une licence exclusive et de très grande portée touchant, entre autres, la distribution, l’adaptation et la commercialisation de Ceres.

 

[55]           Étant donné que Mme Posada a confirmé en contre-interrogatoire (transcription, 8 janvier 2013, aux pp 191 à 195) que l’enregistrement par POPS de son prétendu titre de propriété des droits d’auteur sur Ceres le 25 septembre 1991 reposait uniquement sur sa conviction que POPS avait acquis ce [traduction] « titre de propriété » au moyen de l’entente de 1985, je suis convaincu que toute présomption favorable à POPS découlant de cet enregistrement a été réfutée (voir Samsonite Canada Inc c Costco Wholesale Corporation, [1993] ACF no 302) (Samsonite), et Oakley Inc c Shoppers Drug Mart Inc, [2001] ACF no 415, au para 33 (Oakley)).

 

[56]           Une des conséquences de cette conclusion est que Mme Posada a continué à être propriétaire de Ceres, en sa qualité de coauteure.

 

ii.      La lettre de 1998 de M. Szendrovits

 

[57]           Les demanderesses ont affirmé dans leur plaidoirie que l’entente de 1985 [traduction] « a été, dans la mesure requise, confirmée ou complétée par [la lettre de 1998 de M. Szendrovits] ». Je ne suis pas d’accord.

 

[58]           Cette brève lettre, envoyée à POPS par Andrew Szendrovits, affirmait simplement ce qui suit :

[traduction]

Par la présente, le soussigné accorde à POPPS LTEE [sic] l’autorisation et le droit exclusif d’utiliser les sources originales de la simulation désignée ci-dessus, dans quelque langue que ce soit, ainsi que le droit exclusif de négocier toutes les questions connexes au nom d’Elizabeth Posada et d’Andrew Z. Szendrovits.

 

[59]           En contre-interrogatoire, le neveu d’Andrew Szendrovits, Les Szendrovits, a déclaré de manière franche et crédible que son oncle était certainement quelqu’un qui aurait compris le sens des mots qu’il utilisait dans sa correspondance. Plus précisément, d’après le neveu, il aurait compris la différence entre donner une chose à quelqu’un et donner à quelqu’un la permission d’utiliser cette chose (transcription, 8 janvier 2013, à la p 141).

 

[60]           Le texte cité ci-dessus ne transfère aucunement le titre de propriété sur le code source de base de Ceres ou quoi que ce soit d’autre à POPS. Aux fins de la présente affaire, les termes clés de la lettre sont plutôt [traduction] « le droit exclusif d’utiliser » et [traduction] « le droit exclusif de négocier toutes les questions connexes au nom d’Elizabeth Posada et d’Andrew Z. Szendrovits ».  

 

[61]           À la lumière de ces considérations et compte tenu du témoignage de Les Szendrovits décrit ci-dessus, je suis convaincu que la lettre de 1998 de M. Szendrovits n’a pas transféré à POPS le titre de propriété qu’Andrew Szendrovits détenait à l’égard du code source de base.

 

iii.      L’acte de cession de Les Szendrovits

 

[62]           Les demanderesses soutiennent que l’acte de cession de Les Szendrovits a eu pour effet de céder tous les droits résiduaires qu’Andrew Szendrovits détenait relativement au logiciel Ceres au moment de son décès. Je suis d’accord.

 

[63]           Dans son témoignage franc et incontesté, Les Szendrovits a dit qu’il était très proche d’Andrew Szendrovits et de l’épouse de ce dernier, Margaret Szendrovits. Se fondant sur sa perception de [traduction] « ce que sait la famille », ainsi que sur des conversations précises qu’il avait eues avec d’autres membres de la famille avant son témoignage à l’audience, il croyait qu’Andrew Szendrovits [traduction] « avait pratiquement confié la direction de [Ceres] à Mme Posada » et que l’entente de 1985 avait eu pour effet de transférer tous les droits sur Ceres à Mme Posada (transcription, 8 janvier 2013, aux pp 130, 131 et 137). À la lumière de ce qu’il savait, il avait [traduction] « signé sans hésitation » l’acte de cession de Les Szendrovits afin d’aider Mme Posada à prouver le titre de propriété sur Ceres qu’il croyait que son oncle lui avait précédemment transféré (transcription, 8 janvier 2013, aux pp 147 et 148).

 

[64]           Le testament d’Andrew Szendrovits ne renfermait aucun renvoi à Business Game, à Ceres ou à d’autres logiciels. Néanmoins, conformément à la clause 3(e1) du testament, le reliquat de la succession d’Andrew Szendrovits a été transféré à Margaret Szendrovits, pour qu’elle en ait l’usage absolu.

 

[65]           Le 2 novembre 1994, Margaret Szendrovits a signé une procuration perpétuelle relative aux biens, laquelle a été déposée en preuve par les demanderesses. Au paragraphe 1 de ce document, elle a désigné son époux, Andrew Szendrovits, à titre de procureur pour ses biens. Si jamais ce dernier n’était pas en mesure d’assumer ce rôle en raison de son décès, d’une incapacité ou de sa démission, elle a désigné son fils, William Szendrovits, à titre de procureur pour ses biens, en remplacement de son époux. Si jamais William était à son tour incapable d’assumer ce rôle pour les mêmes motifs, elle a désigné sa propre sœur Hayna Szendrovits à titre de substitut. Si jamais Hayna était à son tour incapable d’assumer ce rôle pour les mêmes motifs, le fils d’Hayna, Les Szendrovits, était désigné comme procureur pour les biens de Margaret.

 

[66]           Les Szendrovits a témoigné que depuis que sa tante Margaret est devenue inapte, il a le mandat d’agir en son nom, car William [traduction] « n’est plus en mesure de s’occuper de lui‑même » (comme l’atteste le fait que la fille de William gère présentement ses affaires) et Hayna a 89 ans et [traduction] « lui ([Les]) a confié les pouvoirs de procureur ». Les Szendrovits a également affirmé que William est atteint de schizophrénie depuis les années 1970.

 

[67]           Dans leurs conclusions finales, les défendeurs ont invité le tribunal à mettre en doute la validité du testament et de la procuration mentionnés ci-dessus, car les parents de William lui avaient attribué des responsabilités importantes dans ces documents, qui avaient été signés en 1995 et en 1994 respectivement, malgré le fait que William était atteint de schizophrénie depuis les années 1970. Toutefois, à la lumière du témoignage de Les Szendrovits selon lequel l’état de William [traduction] « s’est détérioré peu à peu », je ne suis pas convaincu qu’il serait approprié de mettre en doute la validité de ces documents en se fondant uniquement sur les éléments avancés par les défendeurs.

 

[68]           Entre autres, les attendus dans l’acte de cession de Les Szendrovits précisent que [traduction] « dans un document simple », Andrew Szendrovits « avait l’intention de céder tous ses droits » sur le logiciel appelé Ceres à POPS et qu’« il y a peut-être des doutes au sujet de l’exhaustivité et de l’efficacité » de ce document simple. Il ne sait pas exactement si le document en question est l’entente de 1985 ou la lettre de 1998 de M. Szendrovits. Toutefois, puisque l’entente de 1985 est mentionnée au troisième paragraphe de l’acte de cession de Les Szendrovits, je suis porté à conclure qu’il s’agit du [traduction] « document simple » en question.

 

[69]           En raison du doute signalé ci-dessus, les attendus affirment ensuite que [traduction] « il est précisé, pour plus de certitude, que le cédant souhaite céder et transférer à POPS Ltée (la cessionnaire) ses pleins droits, titres et intérêts afférents aux droits d’auteur sur l’œuvre, et souhaite également renoncer au profit de la cessionnaire à tous les droits moraux du cédant se rapportant à l’œuvre ». L’acte de cession précisait que le [traduction] « cédant » était [traduction] « Margaret Szendrovits et la succession d’Andrew Szendrovits », et que [traduction] « l’œuvre » était Ceres.

 

[70]           Le deuxième paragraphe du document précise ensuite que :

[traduction]

En échange de la redevance, définie ci-après, et moyennant d’autres contreparties valables, dont la réception et le caractère suffisant sont reconnus par les présentes, le cédant cède et transfère à perpétuité à la cessionnaire ses pleins droits, titres et intérêts, à l’échelle mondiale, afférents à la propriété, à la propriété intellectuelle et à tous les autres droits de propriété y compris, sans limitation, les droits d’auteur sur l’œuvre élaborée en tout ou en partie par [Andrew Szendrovits], y compris tous les droits d’action, pouvoirs et avantages s’y rattachant.

 

 

[71]           À mon avis, le deuxième paragraphe a eu pour effet de transférer de manière évidente et sans équivoque tout droit résiduel qu’Andrew Szendrovits continuait d’avoir sur Ceres, y compris ses droits d’auteur, après la signature de l’entente de 1985 et la lettre de 1998 de M. Szendrovits. En passant, j’ajouterais simplement que, au quatrième paragraphe, le document a également pour effet de céder expressément tous les droits moraux du cédant sur Ceres à POPS.

 

iv.     L’acte de cession de McMaster

 

[72]           Les défendeurs soutiennent que l’acte de cession de Les Szendrovits ne pouvait pas avoir cédé légalement à POPS les droits d’auteur sur le code source de base de Ceres, élaboré par Andrew Szendrovits, car ce dernier était employé de McMaster au moment où il a rédigé ce code source. À l’appui de leur position, les défendeurs invoquent le paragraphe 13(3) de la Loi, qui prévoit que l’employeur est le premier titulaire du droit d’auteur sur une œuvre créée par un employé dans l’exercice de son emploi. Je suis en désaccord avec les défendeurs sur ce point.

 

[73]           Dans les mois qui ont suivi le différend ayant mené à la présente procédure, Mme Posada a communiqué avec un ou plusieurs représentants de McMaster pour confirmer que cette dernière ne revendiquait aucun droit d’auteur sur Ceres. À la suite d’une enquête interne, Mme Elsie Quaite‑Randall, directrice administrative du Bureau de liaison industrielle (BLI) à McMaster, a signé un acte de cession à POPS, daté du 29 octobre 2008, cédant [traduction] « les pleins droits, titres et intérêts, à l’échelle mondiale, afférents à la propriété, à la propriété intellectuelle et à tous les autres droits de propriété y compris, sans limitation, les droits d’auteur sur l’œuvre élaborée en tout ou en partie par M. Szendrovits, y compris tous les droits d’action, pouvoirs et avantages s’y rattachant ». 

 

[74]           Entre autres, les attendus de l’acte de cession de McMaster précisent qu’Andrew Szendrovits était employé de McMaster durant la période où il a élaboré sa contribution à Ceres, qu’il s’est servi de ce logiciel à titre de matériel didactique, que POPS souhaitait confirmer qu’il n’y avait pas de revendications concurrentes à la propriété de Ceres, que POPS était disposée à accorder à McMaster une licence l’autorisant à continuer d’utiliser Ceres et de nouvelles versions de Ceres, et que l’université [traduction] « n’a ni revendiqué aucun droit de propriété, ni aucun autre droit, relativement à [Ceres] ». Les attendus se terminent par la déclaration que l’université (définie comme la « cédante ») souhaitait [traduction] « céder et transférer à POPS Ltée (la « cessionnaire ») les pleins droits, titres et intérêts de la cédante afférents aux droits d’auteur et aux autres droits sur [Ceres] ».

 

[75]           En l’absence de Mme Quaite-Randall, qui était en congé sabbatique aux Philippines au moment du procès, sa collègue, Mme Gay Yuyitung, a témoigné pour le compte de McMaster. Mme Yuyitung est gestionnaire du développement commercial au BLI de l’université. Elle relève de Mme Quaite-Randall.

 

[76]           Mme Yuyitung a témoigné de manière franche et crédible. Elle a notamment affirmé que le BLI est responsable du brevetage, de la concession de licences et de la commercialisation de l’ensemble de la propriété intellectuelle qui est élaborée à McMaster. De plus, elle a indiqué que c’était elle qui avait fait enquête et conclu qu’Andrew Szendrovits avait élaboré le Logiciel [traduction] « qui faisait partie de son matériel didactique à l’université ». Elle a signalé que, normalement, Mme Quaite-Randall n’effectue pas d’examen approfondi des documents qu’elle signe, mais qu’elle se fie à son personnel – dans ce cas-ci, Mme Yuyitung et une autre personne – pour procéder à l’examen requis. Elle a également affirmé qu’elle avait contribué à l’examen de l’acte de cession de McMaster avant sa signature, qu’elle reconnaissait la signature sur l’acte de cession de McMaster comme étant celle de Mme Quaite-Randall et que cette dernière lui avait indiqué dans un courriel qu’elle avait signé l’acte de cession.

 

[77]           Selon le témoignage de Mme Yuyitung, elle estimait que le principe en vigueur [traduction] « a toujours été que le matériel pédagogique – le matériel didactique – est la propriété du professeur ». Elle a indiqué que, dans ce domaine, la politique applicable était un document intitulé Distribution of Income from the Sale of Instructional Materials (Répartition des recettes tirées de la vente de matériel didactique, ci-après appelé « politique DISIM »). Elle a indiqué qu’elle était convaincue que la politique DISIM s’applique au logiciel créé par Andrew Szendrovits. Elle a ajouté que cette politique était entrée en vigueur le 16 mars 1981 et que [traduction] « [l]a politique prévoit que les droits d’auteurs sont la propriété du professeur ». Elle a ajouté que, avant l’adoption de la politique DISIM, la position de l’Université était que les droits d’auteur sur tout matériel didactique élaboré par un professeur appartenaient au professeur. Cette affirmation est appuyée par la section D.1.1 de la politique DISIM : [traduction] « L’Université confirme la pratique traditionnelle selon laquelle les droits d’auteur sur le matériel didactique produit par le personnel enseignant appartiennent à ce personnel enseignant, sauf dans les situations exceptionnelles énumérées ci-dessous ». Aucune de ces situations exceptionnelles ne correspond aux faits de l’espèce. Fait significatif, la section B.3 de cette politique prévoit également que la politique DISIM [traduction] « est destinée à servir de “stipulation contraire” au nom de l’Université McMaster et de son personnel enseignant et non enseignant », au sens de ce qui est aujourd’hui le paragraphe 13(3) de la Loi.

 

[78]           En contre-interrogatoire, on a présenté à Mme Yuyitung une autre politique, intitulée Intellectual Property Policy (Politique sur la propriété intellectuelle), datée du 27 mai 1998, ainsi qu’une politique intitulée Joint Intellectual Property Policy (Politique sur la propriété intellectuelle conjointe ou JIPP), qui [traduction] « remplace et modifie » la politique de 1998 et régit toutes les questions relatives à la propriété intellectuelle des institutions visées par cette politique, à compter de son entrée en vigueur le 1er janvier 2005.

 

[79]           Mme Yuyitung a reconnu être au fait que, aux termes de la clause 9.1 de la JIIP, [traduction] « l’Université est la titulaire nominale de toute propriété intellectuelle nouvellement créée ou découverte au sein de ses institutions ». Elle a également reconnu que la clause 2.7 de la JIIP inclut expressément [traduction] « les logiciels enregistrés dans quelque format que ce soit » dans la définition de la propriété intellectuelle, et qu’il n’y a aucun renvoi au [traduction] « logiciel » dans la politique DISIM.

 

[80]           En l’absence de tout autre témoignage pour le compte de McMaster ou de tout autre témoignage sur les effets réciproques entre la politique DISIM et la JIIP, j’accepte le point de vue de Mme Yuyitung selon lequel la politique DISIM s’applique au logiciel qu’Andrew Szendrovits a créé et qui fait maintenant partie du Logiciel. Il semble que sa position sur ce point soit étayée par le fait que la politique DISIM affirme explicitement que les droits d’auteurs sur le matériel didactique produit par le personnel enseignant appartiennent à ce personnel enseignant, sauf dans des situations qui ne correspondent pas aux faits de l’espèce, mais la JIIP n’aborde pas les droits d’auteurs et établit des droits de propriété uniquement à l’égard de [traduction] « toute propriété intellectuelle nouvellement créée ou découverte » (clauses 1.3(d), 9.1 et 9.2). De plus, la JIPP et la Politique sur la propriété intellectuelle de 1998 excluent de leurs champs d’application toute question visée par la politique DISIM (clause 4.3(c)), ainsi que [traduction] « les logiciels qui sont de nature auxiliaire ou qui sont l’équivalent fonctionnel d’un des articles décrits à la section [4.3](a), lorsqu’il s’agit de matériel créé par un membre du personnel enseignant ». Entre autres, la clause 4.3(a) exclut du champ d’application de cette politique les droits d’auteur et de propriété sur les notes de cours, les manuels de laboratoire, les articles, les manuels, les artefacts, les œuvres d’art visuel, les cartes, les diagrammes et autres matériels [traduction] « sans égard au format dans lequel ils ont été enregistrés ou créés, y compris, sans limitation, dans un format assimilable par un ordinateur, lorsqu’il s’agit de matériel créé par un membre du personnel enseignant ». J’admets la position de Mme Yuyitung selon lequel cette exception s’applique au Logiciel élaboré par Andrew Szendrovits.

 

[81]           À la lumière de ce qui précède, je suis convaincu qu’Andrew Szendrovits était l’auteur original du Logiciel qu’il a contribué à Ceres et le titulaire des droits d’auteur afférents qui, à mon avis, ont été transférés à POPS aux termes de l’acte de cession de Les Szendrovits.

 

[82]           De toute manière, je suis convaincu que les modalités de l’entente de McMaster sont suffisamment claires et sans équivoque pour céder tout droit d’auteur dont McMaster pouvait encore être la titulaire en date de la signature de cette entente, soit le 29 octobre 2008.

 

v.      Sommaire

 

[83]           Andrew Szendrovits était le premier auteur du logiciel qu’il a contribué à Ceres ainsi que le titulaire des droits d’auteur afférents. L’entente de 1985 n’a pas eu pour effet de transférer à POPS ses droits de propriété ou d’auteur afférents à ce logiciel. Toutefois, elle a transféré à POPS une licence exclusive et de portée très étendue visant, entre autres, la distribution, la commercialisation, la vente et l’adaptation de Ceres. La lettre de 1998 de M. Szendrovits n’a pas modifié cette situation.

 

[84]           Néanmoins, l’acte de cession de Les Szendrovits a eu pour effet de céder à POPS les droits d’auteur sur ce logiciel, ainsi que l’exige le paragraphe 34(1) de la Loi. Par conséquent, POPS est la titulaire de ces droits d’auteur, sous réserve des droits que M. Sallenave et M. Doutriaux pourraient avoir, et ce, depuis la date de cette cession, soit le 28 octobre 2008. De toute manière, même si McMaster était le premier titulaire de ces droits d’auteur, en vertu du paragraphe 13(3) de la Loi et de la politique applicable de McMaster, ces droits d’auteur ont été cédés à POPS conformément à l’entente de McMaster en date du 29 octobre 2009. À la lumière de ma conclusion sur ce point, il n’est pas nécessaire d’examiner les observations orales des demanderesses, présentées sur une base subsidiaire, concernant les droits d’auteur de POPS dans une [traduction] « compilation » qui était constituée des logiciels élaborés par M. Szendrovits et Mme Posada.

 

B.    Mme Posada a-t-elle été embauchée par IDP pour élaborer Omega, Comex ou Epsilon?

 

[85]           Les défendeurs affirment que Mme Posada a été embauchée par IDP pour élaborer Comex et Epsilon, ainsi que pour achever l’élaboration d’Omega – IDP collaborait avec elle à l’élaboration d’Omega depuis de nombreuses années avant qu’elle ne devienne une employée d’IDP. Toutefois, les demanderesses soutiennent que, dans les discussions entre les parties, il n’avait jamais été question d’inclure l’élaboration de logiciels parmi les fonctions de Mme Posada à titre d’employée d’IDP. Elles soutiennent également que les parties n’avaient jamais parlé d’assigner à Mme Posada la responsabilité de la traduction, de l’adaptation ou de la programmation requises pour élaborer le Logiciel.

 

[86]           À mon avis, la preuve confirme la version des faits exposée par les défendeurs en ce qui a trait à cette question et aux autres questions examinées ci-après, à moins d’indication contraire. Lorsqu’il y a des divergences entre le témoignage de Mme Posada, d’une part, et les témoignages de M. Chapuis et de M. Bazoge, d’autre part, j’ai préféré en général les témoignages de ces derniers, car j’ai trouvé que M. Chapuis et M. Bazoge étaient beaucoup plus francs, plus coopératifs et de manière générale plus fiables que Mme Posada, qui répondait parfois de façon évasive, qui n’était pas en mesure par moments de se rappeler des faits précis et qui adoptait parfois des positions peu crédibles.

 

[87]           D’après M. Bazoge, l’enregistrement de la dénomination commerciale IDP a eu lieu en 1992 et la constitution en société, en 1997. Pendant cette période, M. Chapuis et lui ont collaboré étroitement avec Mme Posada dans le cadre de nombreux séminaires. De façon générale, ils contribuaient à la majorité du contenu pédagogique et Mme Posada contribuait, entre autres, à Ceres. En 1998, les trois ont convenu qu’il fallait élaborer une version de Ceres compatible avec Windows, en raison de la popularité croissante des versions successives du logiciel Windows de Microsoft (transcription, 9 janvier 2013, aux pp 77 et 78).

 

[88]           Ainsi, ils ont conclu une entente avec un jeune étudiant, Vlady Ravelomanana, que M. Bazoge et M. Chapuis avaient rencontré en France. Selon les premières modalités de cette entente d’une page (incluse à l’onglet 14 du recueil conjoint de documents (RCD)), le but de l’entente est d’établir « une relation contractuelle concernant le développement d’un nouveau logiciel de simulation d’entreprise ». Les parties ont convenu: (i) que le programme source du Logiciel resterait la propriété de POPS, représentée par Mme Posada, (ii) que ni M. Ravelomanana ni IDP ne pouvaient utiliser le programme source pour développer une version subséquente de cette simulation sans l’accord explicite de POPS Ltée, (iii) qu’IDP était invitée à participer au développement de la simulation, et, à ce titre, détenait l’autorisation de l’utiliser à titre gracieux et (iv) qu’aucune copie de ce logiciel ne serait utilisée sans que celui-ci soit explicitement étiqueté sur les écrans de démarrage du logiciel au nom de la compagnie qui en aura acquis les droits d’utilisation. Malheureusement pour les parties, M. Ravelomanana n’a pas rempli ses engagements. Néanmoins, j’admets le témoignage de M. Bazoge selon lequel cette entente, qui fut signée par Mme Posada (au nom de POPS), M. Bazoge (au nom d’IDP) et M. Ravelomanana, marquait le début d’une collaboration plus officielle entre les parties en vue d’élaborer une version Windows de Ceres (transcription, 9 janvier 2013, à la p 79).

 

[89]           En 2000, MM. Bazoge et Chapuis ont convenu entre eux d’offrir à Mme Posada un incitatif pour qu’elle accélère ses efforts en vue d’élaborer une version Windows de Ceres. À cette fin, ils ont conclu une entente avec POPS en vertu de laquelle, entre autres, POPS toucherait 1 000 $ pour chaque séminaire dans lequel IDP se servirait de Ceres (transcription, 9 janvier 2013, à la p 83; 10 janvier 2013, à la p 104). En retour, POPS verserait à IDP 1 000 $ chaque fois que Mme Posada se servirait du matériel pédagogique d’IDP dans un de ses séminaires. Une version non signée de cette entente (l’entente de 2000), datée du 16 mars 2000, est incluse à l’onglet 15 du RCD. Sous la rubrique « Contribution », il est énoncé que « IDP (Philippe et Benoît) continuent de participer à l’amélioration du produit (stratégie, marketing, finance) et qu’Elizabeth prenne en charge l’écriture des nouvelles version du logiciel ». Sous la rubrique « Planning », il est énoncé :

Compte tenu de la disparition prochaine de DOS, le logiciel Ceres (ou un autre nom) doit impérativement être réécrit pour un environnement Windows. Elizabeth s’engage à finaliser une nouvelle version sur Windows (avec Input convivial et impression gérée par Windows) pour décembre 2000. Une rencontre POPS-IDP est prévue dans les prochaines semaines (avant fin mai?) pour travailler sur des modifications et/ou des ajouts à la simulation.

 

 

[90]           M. Chapuis a reconnu franchement qu’il ne se souvenait pas avec certitude si l’entente de 2000 avait été signée. Toutefois, il a affirmé qu’il croyait qu’elle avait été signée (transcription, 10 janvier 2013, à la p 105). De toute manière, selon le témoignage de M. Bazoge, IDP s’est conformée à l’entente pendant environ 5 ou 6 ans : ils ont versé à Mme Posada 1 000 $ par année, à la suite de l’unique contrat qu’ils ont eu durant cette période (qui était renouvelé tous les ans). Cette affirmation n’a pas été contestée par Mme Posada, qui a reconnu avoir conclu une entente verbale aux termes de laquelle elle a reçu les versements annuels de 1 000 $. Toutefois, elle a soutenu que l’entente de 2000 n’avait jamais été signée, si bien qu’aucun contrat au sens de la loi n’avait été conclu (transcription, 10 janvier 2013, aux pp 164 à 166). Étant donné que les parties ont respecté l’entente et qu’elles ont reconnu que cette entente était à tout le moins de nature verbale, je suis convaincu que, même si l’entente n’a pas été signée en fin de compte, il s’agissait d’une entente verbale qui liait les parties.

 

[91]           Au début de décembre 2000, Mme Posada n’avait pas encore mis au point une version Windows de Ceres, bien qu’elle ait convenu, verbalement à tout le moins, de le faire. À mon avis, cela explique pourquoi elle a conclu une entente, datée du 10 décembre 2000, avec M. Fernando Romero, un programmeur informatique. Aux termes de cette entente (l’entente Romero), imprimée sur le papier à correspondance officielle de POPS et signée par M. Romero et Mme Posada, M. Romero acceptait de réaliser une interface Windows pour Ceres qui serait commercialisée sous le nom d’Omega ou un autre nom. Entre autres, cette entente prévoyait également que la nouvelle interface demeurerait la propriété exclusive de POPS. Selon le témoignage de Mme Posada, elle avait conclu l’entente Romero parce qu’elle connaissait peu un programme appelé Crystal Reports, qu’il fallait utiliser [traduction] « pour programmer le volet entrée/sortie de la simulation qui porterait le nom d’Omega » (transcription, 8 janvier 2013, aux pp 112 et 113). M. Bazoge a émis l’hypothèse que M. Romero avait peut-être été embauché pour corriger un certain nombre de « bogues » qui se trouvaient dans la version Windows de Ceres que les parties avaient convenu d’élaborer.

 

[92]            Lors de son témoignage, M. Bazoge a déclaré que M. Chapuis et lui avaient été convoqués à plusieurs réunions, de décembre 2000 à l’automne de 2006, en vue de donner leurs avis sur certaines caractéristiques du Logiciel en cours d’élaboration (transcription, 9 janvier 2013, à la p 87). Mme Posada n’a pas contesté cette affirmation.

 

[93]           D’après M. Bazoge, à l’automne de 2006, l’élaboration de la version Windows de Ceres n’était toujours pas achevée et les parties ont commencé à discuter d’une association plus officielle (transcription, 9 janvier 2013, à la p 88). En même temps, comme l’attestent divers échanges de courriels entre novembre 2006 et le début de février 2007 (inclus à l’onglet 30 du RCD), les parties ont continué de travailler ensemble.

 

[94]           Par exemple, dans un courriel daté du 16 novembre 2006 (reproduit à la page 203 du RCD), M. Chapuis a rappelé à M. Bazoge, à Mme Posada et à d’autres le plan de travail qui avait été établi le 13 novembre 2006. Entre autres, il a signalé que « chacun » avait la responsabilité de proposer des capsules qui pourraient s’ajouter à Ceres, et que M. Bazoge était chargé de tester Ceres avec seulement « marché consommateur » pour proposer une stratégie visant à élargir le Logiciel si les essais s’avéraient encourageants. Dans un autre échange en date du 6 janvier 2007, M. Bazoge a envoyé à Mme Posada et à M. Chapuis un correctif mis au point pour la nouvelle adaptation du Logiciel par M. Trépanier, un programmeur qui avait été payé par IDP. Dans un autre courriel, daté du 9 janvier 2007 (reproduit à la page 212 du RCD), Mme Posada a envoyé une liste de ses clients à M. Bazoge. Dans un courriel daté du 16 janvier 2007 (reproduit à la page 214 du RCD), M. Bazoge a signalé à M. Chapuis et à Mme Posada qu’il avait rencontré quelqu’un qui pourrait les aider à régler un problème de logiciel auquel ils avaient été confrontés.

 

[95]           Le 23 novembre 2006, M. Chapuis a envoyé un courriel à Mme Posada, avec copie conforme à M. Bazoge, intitulé « Projet ID-POP revisité ». Sous la rubrique  « Projet ID-POP », il a écrit :

Création d’une JV pour le DVLP d’Omega et de l’exploitation de Ceres, avec :

 

Option I – 2 actionnaires IDP et POP [sic]

ou

Option II – 3 personnes.

 

Entre autres, il est suggéré dans ce courriel qu’il faudrait confirmer auprès d’un comptable quelle option serait la plus avantageuse. Sous la rubrique suivante, intitulée « Objectif », il était écrit : « Développer et licencier une simulation d’entreprise qui se déclinerait en fonction de la clientèle (segmentation). » Sous la rubrique « Organisation (grosso modo) », il était notamment écrit que « POP [sic] apporte Ceres et Omega et ses déclinaisons futurs [sic] ». Dans son témoignage, Mme Posada a fait renvoi à cette phrase à l’appui de son affirmation selon laquelle Omega était dans une large mesure achevée avant qu’elle ne devienne une employée d’IDP. Bien qu’elle ait par la suite reconnu que les travaux relatifs à Omega se sont poursuivis après cette date, elle a maintenu que ces travaux, tout comme ses travaux consacrés à Comex et à Epsilon, étaient pour le compte de POPS, et non pour celui d’IDP (transcription, 8 janvier 2013, aux pp 195, 205 et 206).

 

[96]           Peu après l’envoi de ce dernier courriel, M. Chapuis a préparé un autre document pour une réunion devant avoir lieu le 3 janvier 2007, quelques semaines avant que Mme Posada ne devienne une employée d’IDP, soit le 1er février 2007 (Exposé conjoint des faits et éléments admis, paragraphe 3). Ce document, intitulé « IDP + POP = IDP », indiquait notamment que Mme Posada obtiendrait une participation de 25 pour cent dans IDP en échange de POPS, y compris les droits commerciaux afférents à Ceres. De plus, IDP obtiendrait le droit d’utiliser la dénomination commerciale de POPS. Le document prévoyait également que M. Bazoge serait responsable de la gestion générale et de la facturation au sein de la coentreprise, M. Chapuis serait chargé du « développement et de l’opérationnalisation de la R&D », et Mme Posada, de « la R&D technique ».

 

[97]           J’admets le témoignage de M. Bazoge selon lequel cela signifiait qu’il serait responsable de la gestion de la coentreprise et du contenu théorique de la simulation d’entreprise, M. Chapuis serait responsable de commercialiser les adaptations du Logiciel et de veiller à ce que ces adaptations répondent aux exigences pédagogiques d’IDP et la principale contribution de Mme Posada serait de se charger du volet technique de l’adaptation du Logiciel de simulation aux besoins d’IDP (transcription, 9 janvier 2013, aux pp 90 et 91). Selon le témoignage de Mme Posada, elle avait [traduction] « la responsabilité de s’assurer que la simulation fonctionne bien » (transcription, 8 janvier 2013, à la p 150). Cela concorde avec les modalités expresses de l’entente de 2000, examinée aux paragraphes 89 et 90 ci-dessus.

 

[98]           J’admets également le témoignage de M. Bazoge selon lequel ce partage des rôles concorde avec ce qui s’est en fait produit lorsque Mme Posada s’est jointe à IDP, et selon lequel elle avait été principalement embauchée pour son expérience au chapitre de la conceptualisation (par opposition à la programmation elle-même) des logiciels de simulation d’entreprise (transcription, 9 janvier 2013, aux pp 186 et 187). Cela étant dit, je reconnais que Mme Posada avait d’autres responsabilités chez IDP, y compris de veiller à ce que le Logiciel fonctionne bien durant les séminaires, de participer à l’élaboration et à l’enseignement des séminaires que les trois protagonistes offraient par le truchement d’IDP, de participer à la préparation des acétates et autres aides didactiques, et de superviser le travail des programmeurs engagés pour travailler sur le Logiciel.

 

[99]           Une partie importante de l’audience a été consacrée à un différend entre les parties concernant la question de savoir si elles avaient convenu, au moment où Mme Posada est devenue une employée, actionnaire et administratrice d’IDP, que POPS « fermerait », ce que j’ai interprété comme voulant dire « mettrait fin à ses activités ». Il s’agit d’une question importante parce que, si les parties avaient convenu que POPS mettrait fin à ses activités une fois que Mme Posada se joindrait à IDP, les droits de propriété sur les adaptations du Logiciel mises au point après l’arrivée de Mme Posada chez IDP seraient moins clairs que dans le cadre des deux options esquissées dans le courriel daté du 23 novembre 2006, signalé précédemment; ni l’une ni l’autre de ces options ne semblaient prévoir la fermeture de POPS.

 

[100]       J’admets la position des défendeurs selon laquelle, au moment où Mme Posada est devenue une employée d’IDP, il était généralement convenu entre les parties que POPS mettrait fin à ses activités ou deviendrait à tout le moins inactive et cesserait ses activités liées à Ceres et à ses adaptations. À mon avis, le témoignage de M. Bazoge à cet égard était franc, honnête et convaincant (voir, par exemple, la transcription du 9 janvier 2013, aux pp 92, 93 et 122 à 126). Son témoignage concorde également avec le fait que la dénomination commerciale de POPS a été transférée à IDP, ainsi qu’avec l’évolution de la situation pour ce qui est de la fermeture de POPS.

 

[101]       Plus précisément, en février 2007, peu après son entrée en fonction chez IDP, Mme Posada a rencontré son comptable, M. Hotte, pour discuter, entre autres, de la fermeture de POPS. Selon le témoignage de M. Hotte, après avoir relevé les avantages fiscaux pour Mme Posada de retirer son capital de POPS sur une période de quelques années, au lieu de le retirer d’un seul coup, Mme Posada et lui ont décidé de maintenir POPS dans un état d’inactivité pour quelques années, à cette fin. Il a également affirmé que POPS n’avait repris ses activités que vers la fin de 2008, après que les parties eurent décidé de mettre fin à leur collaboration.

 

[102]       Plus d’un an plus tard, dans un courriel envoyé à M. Chapuis et à M. Bazoge le 14 avril 2008 (reproduit à l’onglet C10 des Suivis donnés aux engagements des parties), Mme Posada a relevé « deux choses à jasser [sic] ». La première avait trait à son souhait de transférer de nouveau la dénomination commerciale de POPS à POPS. Elle a expliqué qu’elle voulait être en mesure d’utiliser POPS avec son époux, aux fins de ses activités de recherche à elle et dans le cadre de certaines transactions avec l’État, pour lesquelles elle était tenue de faire affaire par le truchement d’une société. Elle a signalé que M. Hotte, qu’elle avait consulté « pour fermer la comptabilité de POPS et faire sa comptabilité personnelle », lui avait conseillé qu’il serait plus logique de mener ces activités par l’intermédiaire de POPS, plutôt que de créer une autre compagnie. Cela étant dit, elle a affirmé qu’IDP pourrait continuer d’utiliser la dénomination commerciale de POPS aux fins de la facturation. Elle a conclu cette partie de son courriel en demandant à M. Chapuis et à M. Bazoge ce qu’ils en pensaient. À mon avis, cela reflète bien l’existence d’un arrangement préalable visant la fermeture de POPS. Cette intention se reflète également dans la réponse de M. Chapuis à ce courriel, dans laquelle il a affirmé qu’il ne s’opposait pas à ce qu’elle proposait de faire, dans la mesure où POPS ne poursuivrait pas IDP par la suite (vraisemblablement pour avoir utilisé la dénomination de POPS) et dans la mesure où POPS ne se lançait pas dans les mêmes activités qu’IDP.

 

[103]       Compte tenu de tout ce qui précède, je n’hésite pas à conclure qu’IDP a embauché Mme Posada au début de 2007 pour élaborer les adaptations de Ceres souhaitées par IDP. Ses responsabilités incluaient l’achèvement des travaux concernant Omega que les parties menaient ensemble depuis au moins 1998, ainsi que l’élaboration des adaptations qui seraient connues sous les noms de Comex et d’Epsilon.

 

C.   Quels droits les demanderesses et IDP ont-elles, le cas échéant, relativement à Ceres, à Comex, à Epsilon et à Omega?

 

[104]       Les demanderesses affirment qu’elles détiennent les droits d’auteur sur Ceres, Comex, Epsilon et Omega.

 

[105]       Dans leur déclaration modifiée, les demanderesses soutiennent également que MM. Chapuis et Bazoge ont proposé à Mme Posada, à la fin de 2006, qu’elle devienne actionnaire d’IDP, afin qu’IDP et eux-mêmes puissent avoir accès au Logiciel. Toutefois, pendant l’audience et ainsi qu’il est expliqué ci-dessous, Mme Posada a admis avoir octroyé auparavant à MM. Chapuis et Bazoge une licence leur permettant d’utiliser le Logiciel dans leurs séminaires commerciaux. Elle a soutenu que cette licence avait été octroyée sans contrepartie (« à titre gracieux »).

 

[106]       Les défendeurs soutiennent que Comex et Epsilon ont été entièrement élaborés à l’époque où Mme Posada travaillait pour IDP et qu’ils collaboraient à l’élaboration d’Omega, avant que Mme Posada n’ait été embauchée par IDP, et après son embauche. Ils ne revendiquent pas les droits d’auteur sur Ceres, Comex, Epsilon ou Omega (transcription, 8 janvier 2013, aux pp 45 et 46), mais ils prétendent être titulaires d’une licence qui leur permet d’utiliser chacune de ces versions du Logiciel aux termes soit d’une entente verbale ou d’une licence implicite reçue de Mme Posada ou de POPS. Dans le cas d’Omega, ils affirment que leur licence avait été octroyée bien avant que Mme Posada ne devienne une employée d’IDP.

 

[107]       Compte tenu des éléments de preuve examinés ci-dessous et dans la section précédente ci‑dessus, je souscris à la position des défendeurs sur ces points. Entre autres choses, les éléments de preuve en question démontrent :

i)                    qu’il a toujours été entendu entre les parties que les défendeurs avaient et continueraient d’avoir le droit d’utiliser le Logiciel;

ii)                 que les défendeurs ont donné des contreparties importantes, sur plusieurs années, en échange du droit d’utilisation du Logiciel.

 

[108]        M. Bazoge a témoigné qu’il avait commencé à utiliser Ceres en 1990, en sa qualité de professeur à l’UQAM, peu après avoir acheté ce logiciel de POPS en septembre 1989, au nom de l’UQAM. M. Chapuis a commencé à utiliser Ceres l’année suivante, après avoir acheté une licence en vue d’utiliser Ceres au nom de l’École Supérieure de Commerce de Tours (l’ESCT). Au cours des années qui ont suivi, ils ont également commencé à utiliser Ceres ailleurs qu’à l’UQAM et à l’ESCT, dans le cadre d’une entente amicale conclue avec Mme Posada, en vertu de laquelle MM. Bazoge et Chapuis étaient autorisés à utiliser Ceres en contrepartie de l’octroi à Mme Posada d’un accès à leurs séminaires et aux documents d’appui utilisés lors de ces séminaires (Interrogatoire après défense de M. Phillipe Chapuis, 20 octobre 2010, à la p 51). Comme l’a confirmé Mme Posada, vers 1996, IDP s’est vu remettre une version de Ceres où le logo d’IDP apparaissait sur certains extrants (transcription, 10 janvier 2013, à la p 163). Un exemple de cela est un rapport de commercialisation daté de 2001 qui figure à l’onglet 16 du RCD.

 

[109]       À l’étape de l’interrogatoire préalable de la présente instance, Mme Posada a aussi admis qu’elle avait octroyé de vive voix à IDP le droit d’utiliser Ceres (voir par exemple, Interrogatoire avant défense (IAD) de Mme Elizabeth Posada par Me Simon Grégoire, 16 juillet 2009, aux pp 49 à 52). À un certain moment, elle a expliqué que ce droit avait été octroyé en guise d’« espèce de commission, ou whatever, par la vente d’un grand nombre de simulations en France » (IAD, à la p 65). Cet octroi verbal d’un droit d’utiliser Ceres et ses adaptations, accordé durant la période de collaboration des parties dans les années 1990, a aussi été confirmé par Mme Posada durant l’audience de la présente instance (voir par exemple la transcription, 10 janvier 2013, aux pp 165 et 167 à 169).

 

[110]       Ainsi qu’il est mentionné au paragraphe 88 ci-dessus, l’entente qu’IDP et POPS ont conclue avec M. Ravelomanana en 1998 prévoyait ce qui suit : « la compagnie IDP Inc. est invitée à participer au développement de la simulation et, à ce titre, détient l’autorisation de l’utiliser à titre gracieux ». Bien que M. Ravelomanana n’ait pas vraiment contribué par la suite à l’élaboration du Logiciel, cela n’empêche pas que Mme Posada, au nom de POPS, a confirmé dans ce document qu’elle avait précédemment accordé de vive voix à IDP le droit d’utiliser le Logiciel. À mon avis, il était implicite, dans ce contrat, que cet octroi incluait le droit d’utiliser toutes améliorations futures apportées au Logiciel à la suite de la collaboration entre IDP et Mme Posada.

 

[111]       L’entente de 2000, qui n’a peut-être pas été signée, mais que les parties ont respectée, témoigne également de cet arrangement entre les parties. Ainsi qu’il est expliqué aux paragraphes 89 et 90 ci-dessus, cette entente prévoyait que « IDP (Philippe et Benoît) continuent de participer à l’amélioration du produit (stratégie, marketing, finance) ». L’entente prévoyait en outre que « toute nouvelle version de la simulation (Ceres ou un autre nom) et toute nouvelle version des supports de cours sera mis à la disposition des 2 entreprises (POPS et IDP) ».

 

[112]       Le document intitulé « IDP + POP = IDP », susmentionné au paragraphe 96, témoigne en outre qu’IDP détient au moins le droit d’utiliser Ceres et ses adaptations, car il était indiqué dans ce document que Mme Posada obtiendrait une participation financière de 25 pour cent dans IDP, « pour racheter POPS et droits commerciaux de Ceres ». Il en va de même pour le courriel en date du 23 novembre 2006, mentionné au paragraphe 95 ci-dessus, lequel prévoyait que « IDP apporte son réseau et ses clients actuels qui consomme la simul. [sic] » alors que  « POP [sic] apporte Ceres et Omega et ses déclinaisons futurs [sic] ». Bien qu’à la fin, les parties n’aient pas poursuivi de collaboration sous une forme qui aurait impliqué la fusion d’IDP avec POPS ou l’acquisition de POPS par IDP, je suis convaincu que les parties s’étaient entendues entre elles, en février 2007, qu’IDP aurait le droit de continuer à utiliser Ceres et d’utiliser Omega et d’autres adaptations à venir du Logiciel, notamment Epsilon et Comex, en contrepartie d’un accès continu au matériel pédagogique d’IDP et aux diverses contributions à l’élaboration du Logiciel.

 

[113]       Ainsi qu’il est mentionné plus haut, Omega est la version Windows de Ceres que les parties élaborent conjointement depuis au moins 1998. Omega permet aux utilisateurs de réaliser des simulations dans quatre marchés (c’est‑à‑dire industriel ouest, industriel est, consommateur ouest et consommateur est). Epsilon (également appelée Epsilon 2) est une version simplifiée d’Omega, permettant aux utilisateurs de réaliser des simulations uniquement dans deux marchés, alors que Comex (également appelée Epsilon 1) est une version encore plus simplifiée se limitant à un seul marché. Comex et Epsilon ont été élaborées aux fins d’une utilisation liée aux petites et aux moyennes entreprises, ce qui est devenu un point de mire de plus en plus important dans les séminaires d’IDP (transcription, 9 janvier 2013, aux pp 117 et 118). Selon M. Bazoge, dont j’accepte le témoignage, chacune de ces versions du Logiciel a été élaborée conformément à l’approche pédagogique d’IDP (Interrogatoire après défense, 1er décembre 2010 (BB IAD), à la p 31).

 

[114]       Les parties s’accordent pour reconnaître que tout le travail d’élaboration concernant Ceres, Omega, Epsilon et Comex qui a été fait au fil des ans a été limité aux fichiers d’entrée et de sortie, qu’il n’a pas modifié le code source « de base » ou le « moteur » (y compris les bibliothèques de calcul) élaborés par Andrew Szendrovits.

 

[115]       Mme Posada soutient que la version Omega avait entièrement été élaborée avant qu’elle ne devienne une employée d’IDP. Les défendeurs contestent cette affirmation; ils maintiennent que de nombreux bogues subsistaient dans Omega et qu’elle n’a toujours pas été terminée à ce jour. Ils reconnaissent qu’il est possible d’utiliser Omega dans des séminaires de simulation, mais seulement si l’un des trois, à savoir M. Bazoge, M. Chapuis ou Mme Posada, se sert du Logiciel (transcription, 9 janvier 2013, à la p 130).

 

[116]       J’accepte le témoignage de Mme Posada selon lequel elle a passé des centaines d’heures à concevoir et à élaborer Omega (transcription, 8 janvier 2013, aux pp 85 et 86) et qu’elle a payé des tiers pour lui prêter main-forte à cet égard. Cependant, les éléments de preuve établissent également, à mon avis, (i) qu’IDP a participé de très près à l’élaboration d’Omega, et ce, depuis 1998 au moins, (ii) qu’après que Mme Posada est devenue une employée d’IDP, des travaux importants au chapitre de l’élaboration étaient toujours nécessaires afin de permettre aux parties de travailler de façon productive avec Omega (voir, par exemple, la transcription, 9 janvier 2013, aux pp 99 à 102, 111, 112, 129 et 205, et la transcription du 10 janvier 2013, aux pp 111 et 116) et (iii) que Mme Posada était rémunérée par IDP afin de superviser, entre autres, l’achèvement d’Omega, qui constituait l’objet principal de la collaboration des parties depuis au moins 1998.

 

[117]       En ce qui concerne Epsilon et Comex, les parties s’accordent pour reconnaître que ces versions du Logiciel ont été élaborées jusqu’à leur état actuel pendant que Mme Posada était à l’emploi d’IDP. Il semble que Comex n’a jamais été opérationnelle tandis qu’Epsilon comporte toujours de nombreux « bogues », mais qu’elle peut être utilisée, du moins par MM. Bazoge et Chapuis de même que par Mme Posada (Interrogatoire avant la défense de Philippe Chapuis, à la p 39 à 41; BB IAD, à la p 29 et 30).

 

[118]       Je suis convaincu que le document intitulé  « BB-E1 Contributions d’IDP depuis 1998 liées à la simulation », abordé lors du témoignage de M. Bazoge (transcription, 9 janvier 2013, aux pp 96 à 100), témoigne de l’apport important d’IDP en échange d’au moins une licence non exclusive afin d’utiliser Ceres, Omega, Epsilon et Comex. Cet apport peut se résumer comme suit :

i)       participation conceptuelle continue à l’élaboration du Logiciel, depuis le début des années 1990, notamment durant des centaines d’heures de réunions auxquelles ont assisté MM. Chapuis ou Bazoge ou les deux (voir aussi la transcription, 9 janvier 2013, aux pp 113 à 116);

ii)      participation exhaustive dans la réalisation de tests et la formulation de commentaires relativement aux différentes versions de Ceres, et à ses adaptations, notamment Omega, Epsilon et Comex, qui ont été élaborées pour être utilisées dans les séminaires de simulation d’entreprise d’IDP;

iii)     verser environ la moitié de la rémunération à M. Ravelomanana (transcription, 10 janvier 2013, à la p 161);

iv)     assister à diverses réunions organisées afin d’aider M. Romero dans le cadre de ses travaux;

v)            élaborer divers fichiers d’entrée Excel pour le Logiciel (transcription, 9 janvier 2013, aux pp 97 et 102);

vi)          élaboration de macroinstructions liées à certains fichiers de sortie de Ceres;

vii)         payer environ 59 000 $ à Mme Posada pour, entre autres, la supervision de l’élaboration du Logiciel*, pendant qu’elle était une employée d’IDP;

viii)       payer environ 6 500 $ à Anersys Inc (M. Davy Fraser) pour aider à l’élaboration d’Epsilon.

*    Bien que le document BB-E1 indique que ce salaire était versé relativement à Epsilon, je suis convaincu qu’il l’était également à l’égard des autres tâches que Mme Posada a effectuées pour le compte d’IDP, notamment pour supervirser l’achèvement d’Omega (« faire avancer les choses ») et réaliser les tâches résumées au paragraphe 116 ci-dessus.

 

 

 

[119]       En plus de ce qui précède, les contributions d’IDP à l’élaboration continue du Logiciel ont inclus l’élaboration d’un programme correctif pour imprimante, appelé laser PTR, afin d’être en mesure d’imprimer des extrants de Ceres sur une imprimante au laser, et les arrangements nécessaires pour que les différents programmeurs, y compris MM. Kogovsek, Mayer, Amado et Trepanier, puissent effectuer des tests et fournir une rétroaction à Mme Posada au sujet du Logiciel (transcription, 9 janvier 2013, aux pp 97 à 99 et 10 janvier 2012, à la p 14).

 

[120]       Compte tenu de tout ce qui précède, je suis convaincu que Mme Posada a au moins implicitement octroyé à IDP, au nom de POPS, une licence non exclusive afin d’utiliser Ceres et les différentes versions modifiées et adaptations de Ceres qui ont été élaborées ou élaborées en partie par IDP, au nom d’IDP ou en collaboration avec IDP (Tremblay c Orio Canada Inc, 2013 CF 109, au para 53); Robertson c Thompson Corp (2001), 15 CPR (4th) 147, au para 161; Cselko Associates Inc c Zellers Inc (1992), 44 CPR (3d) 56, à 59). À vrai dire, on pourrait soutenir que l’entente écrite de 1998 que les parties ont conclue avec M. Ravelomanana, ainsi que l’entente de 2000 sur laquelle les parties se sont entendues au moins sous forme verbale et qui a ensuite été mise en œuvre, ont conféré une licence explicite à IDP pour utiliser les adaptations de Ceres que sont devenues Omega, Epsilon et Comex. Compte tenu de ma conclusion en ce qui a trait à la licence implicite qui a été octroyée à IDP, il n’est pas nécessaire de rendre une conclusion définitive quant à l’existence d’une licence explicite à cet égard.

 

[121]       Vu ma conclusion selon laquelle POPS n’était pas titulaire du droit d’auteur du code source de base de Ceres qui a été élaboré par Andrew Szendrovits avant de recevoir de Les Szendrovits, en octobre 2008, un acte de cession de ce droit d’auteur, POPS a octroyé la licence implicite susmentionnée à IDP en sa qualité de distributeur exclusif du Logiciel, conformément à l’entente de 1985.

 

[122]       Puisque les défendeurs n’ont pas revendiqué de droits de pleine propriété ou de propriété conjointe sur l’une ou l’autre des adaptations de Ceres qui ont été élaborées par IDP ou en son nom, par Mme Posada ou par POPS en collaboration avec IDP, il ne m’est pas nécessaire d’établir si IDP ou les défendeurs individuels détiennent quelque droit de propriété sur ces adaptations. À vrai dire, puisque ces questions n’ont pas été contestées dans le cadre de la présente instance, il serait inapproprié pour moi de le faire. Je suis toutefois convaincu que les défendeurs ont réfuté toute présomption relative à un droit de propriété de POPS sur Epsilon et Comex qui pourrait être soulevée du fait que POPS a enregistré le 24 août 2010 un titre de propriété dans « Epsilon ou Comex » (Samsonite, précitée, et Oakley, précitée). En conséquence, comme les défendeurs l’ont demandé, j’ordonnerai que le certificat d’enregistrement des demanderesses concernant « Epsilon ou Comex », soit rayé du registre des droits d’auteur.

 

D.   Les demanderesses avaient-elles le droit de révoquer des droits d’utilisation du Logiciel qu’elles pouvaient avoir octroyés à IDP?

 

[123]       Le 20 octobre 2008, l’avocat des demanderesses a exigé, entre autres, qu’IDP [traduction] « cesse immédiatement toutes utilisation, modification, ou autre opération ou activité ayant trait au Logiciel [...] »

 

[124]       Les demanderesses soutiennent que POPS avait le droit de révoquer la licence qu’elle avait précédemment octroyée à IDP pour utiliser le Logiciel, puisque cette licence avait été octroyée sans contrepartie (« à titre gracieux »), en raison de la relation de bonne foi et de confiance qui existait entre Mme Posada, M. Chapuis et M. Bazoge.

 

[125]       Les demanderesses soutiennent en outre qu’une telle licence reposait sur la reconnaissance par IDP d’une propriété exclusive du Logiciel par POPS, ainsi que sur la collaboration continue de Mme Posada au sein d’IDP. Elles soutiennent que lorsque M. Bazoge a écrit à Mme Posada afin de déclarer que lui et M. Chapuis avaient pris note de son désir de quitter IDP et avaient proposé qu’elle mette fin à sa participation au sein d’IDP le 30 septembre 2008, cette relation de confiance avait été enfreinte et qu’un fondement important sur lequel reposait la licence d’IDP afin d’utiliser le Logiciel n’existait plus. Elles ont ajouté que cette confiance a également été enfreinte, et que l’autre fondement sur lequel reposait la licence a cessé d’exister lorsque M. Chapuis a allégué, dans un courriel daté du 23 octobre 2008 (le courriel contesté), que les droits de propriété intellectuelle dans Omega, Comex, Epsilon et leurs versions modifiées appartenaient à IDP.

 

[126]       Compte tenu de ce qui précède, les demanderesses soutiennent que POPS avait le droit de révoquer la licence d’IDP, car une licence octroyée à titre gracieux peut être révoquée à leur gré. Elles ajoutent que, dans la mesure où il peut être affirmé que les défendeurs ont fourni une contrepartie en échange de leur licence pour utiliser le Logiciel, les déclarations faites par M. Chapuis (à M. Decoste, le 9 octobre 2008, et à Mme Posada dans le courriel contesté) relativement à la propriété du Logiciel et à sa décision (prise avec M. Bazoge) d’acheter les parts détenues par Mme Posada dans IDP, ont constitué une violation fondamentale de l’entente entre les parties et que Mme Posada avait le droit de révoquer la licence et de refuser, de manière générale, d’exécuter l’entente.

 

[127]       Sur ces points, je ne souscris pas, de manière générale, à la position des demanderesses.

 

[128]       Comme il en a été question dans la section précédente ci-dessus, IDP a fourni une contrepartie importante en échange d’une licence explicite ou implicite pour utiliser le Logiciel et poursuivre son élaboration. Cette contrepartie a été fournie conformément à une entente explicite ou verbale, tout comme en témoigne la conduite adoptée par les parties pendant de nombreuses années. Par conséquent, POPS n’avait pas le droit de révoquer unilatéralement cette licence (Katz (Michael Katz Associates) c Cytrynbaum (1983), 76 CPR (2s) 276, au para 19 (CACB), où est cité H.G. Fox, The Canadian Law of Copyright and Industrial Designs, 2d ed (Toronto: Carswell, 1967), p. 339 et 340); voir également (J S McKeown, Fox, Canadian Law of Copyright and Industrial Designs, 4th ed, (Toronto: Carswell, 2009) à 19:4(e); et Winter Garden Theatre c Millenium Products, [1948] C.A. 173, aux pp 193 et 198).

 

[129]       Par ailleurs, il convient de souligner qu’une telle contrepartie a largement dépassé le montant de 2 000 $ que Mme Posada a facturé jusqu’à environ 1996 pour des licences d’utilisation du Logiciel (il semble que Mme Posada n’ait vendu aucune autre licence depuis cette époque environ – transcription, 10 janvier 2013, à la p 156), et plus particulièrement si l’on tient compte des centaines de réunions auxquelles ont assisté MM. Chapuis et Bazoge afin de participer à l’élaboration du Logiciel et les autres efforts importants qu’ils ont consacrés pendant de nombreuses années pour faire avancer le développement du Logiciel.

 

[130]       En ce qui concerne l’allégation selon laquelle la licence d’IDP pour utiliser le Logiciel reposait sur la participation continue de Mme Posada au sein d’IDP, cela n’a pas été étayé par quelque preuve qui soit, à part les simples affirmations de Mme Posada. À la lumière des autres éléments de preuve recueillis dans le cadre de la présente instance, je conclus qu’il n’existait nulle entente de ce genre entre les parties. À vrai dire, du point de vue d’IDP, cela n’aurait pas été logique, puisque son investissement important dans le Logiciel durant de nombreuses années se serait retrouvé exposé à des risques par la décision unilatérale prise par Mme Posada lorsqu’elle a avisé M. Bazoge qu’elle souhaitait « retourner comme avant » qu’elle ne se joigne à IDP (transcription, 9 janvier 2013, aux pp 135 à 137; voir aussi la page 2 du courriel contesté).

 

[131]       Je vais maintenant aborder la question de la violation flagrante du contrat par les défendeurs qu’ont alléguée les demanderesses. Selon les éléments de preuve examinés dans les deux sections qui précèdent, les modalités des ententes explicites et implicites conclues entre les parties étaient qu’IDP recevrait une licence pour utiliser le Logiciel et poursuivre son élaboration en contrepartie de ce qui suit :

i)       contribuer de manière importante et de différentes façons à l’élaboration du Logiciel;

ii)      fournir à Mme Posada un accès à son matériel pédagogique. Selon moi, les éléments de preuve indiquent qu’IDP a pour sa part respecté cette entente.

 

[132]       Cela dit, il semble toujours avoir existé une compréhension mutuelle des parties selon laquelle POPS ou Mme Posada conserverait les droits d’auteur sur Ceres et Omega. Cela est notamment indiqué dans l’entente qui a été conclue avec M. Ravelomanana en 1998 et dans le courriel du 23 novembre 2006 que M. Chapuis a fait parvenir à Mme Posada, dont il est question aux paragraphes 88 et 95 ci-dessus. Toutefois, il n’était fait nulle mention dans ce dernier courriel ou ailleurs de qui serait titulaire des droits d’auteur dans d’autres adaptations du Logiciel, notamment Epsilon et Comex. En conséquence, la situation en ce qui concerne la propriété des droits d’auteur dans ces adaptations est moins évidente, en particulier eu égard à la compréhension des parties selon laquelle POPS cesserait ses activités, dans le cadre de la collaboration quelque peu différente qu’ils poursuivraient finalement. Ce dernier fait soulève également la question de savoir si, dans la forme de collaboration que les parties ont finalement choisie, leur intention était que POPS ou Mme Posada conserve les droits d’auteur dans Omega.

 

[133]       Mme Posada et M. Decoste ont tous deux témoigné avoir interprété le courriel de M. Chapuis du 9 octobre 2008 (inclus à la page 164 du RCD) comme un message ayant communiqué la position selon laquelle lui-même ou IDP était titulaire des droits d’auteur sur le Logiciel (transcription, 8 janvier 2013, p. 167; 9 janvier 2013, à la p 17). Toutefois, j’estime que ces témoignages ne sont pas convaincants. Ils savaient tous deux que M. Decoste avait eu affaire à M. Chapuis parce que Mme Posada était en congé sabbatique (transcription, 9 janvier 2013, à la p 12). Dans ces circonstances, il m’est difficile d’accepter leur interprétation de la suggestion faite par M. Chapuis à M. Decoste de se rencontrer pour régler son problème avec le Logiciel avant qu’il ne parte en voyage pour six jours à la fin de cette semaine-là, puisque s’ils ne s’étaient pas rencontrés avant, M. Decoste n’aurait eu aucun autre recours, car personne d’autre n’aurait été disponible pour l’aider semble-t-il.

 

[134]       À mon avis, le courriel de M. Chapuis à M. Decoste ne peut être raisonnablement interprété comme ayant exprimé des revendications sur les droits d’auteur sur le Logiciel, et ne pourrait constituer un fondement légitime pour la prétendue révocation énoncée dans la lettre envoyée par l’avocat de Mme Posada aux défendeurs le 20 octobre 2008 (incluse à l’onglet 32 du RCD) et à nouveau dans une seconde lettre envoyée par son avocat aux défendeurs le 21 octobre 2008 (incluse à l’onglet 33 du RCD). Dans la mesure où M. Decoste aurait pu se fonder sur autre chose que le courriel susmentionné pour appuyer le fait qu’il croyait que M. Chapuis avait revendiqué être titulaire des droits d’auteur sur Ceres ou l’une ou l’autre de ses adaptations, je ne suis pas persuadé que M. Chapuis avait déjà présenté une telle revendication à M. Decoste.

 

[135]       Ce n’est que lors de l’envoi par M. Chapuis, le 23 octobre 2008, du courriel contesté que quiconque, au nom des défendeurs, a soulevé une question au sujet des droits de propriété sur le Logiciel. Ce courriel a été envoyé en réponse à un courriel reçu de Mme Posada plus tôt durant la journée et en réponse aux lettres susmentionnées envoyées par son avocat les 20 octobre 2008 et 21 octobre 2008. Dans son courriel, Mme Posada a essentiellement réitéré les positions prises dans les lettres de son avocat, selon lesquelles POPS détenait les droits sur le Logiciel et que sa collaboration avec MM. Chapuis et Bazoge avait toujours reposé sur le fait que ces derniers reconnaissaient les droits détenus par POPS sur le logiciel de simulation.

 

[136]       Dans sa réponse, M. Chapuis a confirmé de façon explicite qu’il n’avait jamais revendiqué de droits d’auteur sur Ceres. Cependant, et sans doute en raison de la prétendue révocation des droits d’IDP d’utiliser Ceres, il a demandé qu’elle fournisse une copie de l’acte de cession des droits d’auteur d’Andrew Szendrovits ou de l’Université McMaster. Il a fait remarquer qu’il serait difficile de négocier de bonne foi avec elle en l’absence d’une telle preuve et il s’est demandé pourquoi, si elle détenait cette preuve, elle ne la partagerait pas avec lui et M. Bazoge.

 

[137]       M. Chapuis a aussi fait observer dans ce courriel que l’élaboration d’Omega, de Comex et d’Epsilon avait été réalisée par des employés d’IDP pendant les dix-huit mois précédents et qu’il était conforme au droit d’affirmer que les droits de propriété intellectuelle de ce logiciel appartenaient à IDP. Cela dit, il a déclaré que si elle était en mesure d’établir le contraire, ils auraient un motif de tenir une discussion utile et enrichissante dans le cadre de la réunion que lui et M. Bazoge espéraient avoir avec elle.

 

[138]       À mon avis, le langage utilisé dans le courriel contesté indique bien que M. Chapuis ne faisait que soulever des questions dont lui et M. Bazoge voulaient tout naturellement discuter avec Mme Posada, en particulier en raison de la position qu’elle avait adoptée relativement à leur droit de continuer à utiliser le Logiciel. Selon les éléments de preuve recueillis au cours de la présente instance, il était parfaitement légitime pour M. Chapuis de soulever ces questions.

 

[139]       Contrairement aux allégations des demanderesses, la position adoptée par M. Chapuis dans son courriel du 23 octobre 2008, qui a constitué le fondement de l’évolution de la position adoptée par les défendeurs dans les discussions tenues au cours des mois qui ont suivi en vue d’en arriver à une entente, n’a pas constitué une violation fondamentale du contrat ou d’un autre type qui pourrait avoir donné le droit aux demanderesses de révoquer la licence d’utilisation du Logiciel qu’elles avaient octroyée au moins implicitement aux défendeurs. À mon avis, les modalités de la licence n’autorisaient pas les demanderesses à révoquer la licence pour les motifs qu’elles avaient invoqués. Entre autres choses, une telle action de la part des demanderesses ne cadrait pas du tout avec la raison pour laquelle les parties avaient collaboré ni avec leur conduite durant de nombreuses années. À vrai dire, il en va de même pour les demanderesses, qui ont refusé de fournir aux défendeurs des copies du Logiciel que Mme Posada était chargée d’élaborer pour le compte d’IDP.

 

E.        Les défendeurs ont-ils enfreint des droits d’auteur que POPS ou Mme Posada pouvaient détenir sur des versions du Logiciel?

 

[140]       Compte tenu de mes conclusions qui précèdent, je conclus que les défendeurs n’ont pas enfreint de droits d’auteur que POPS ou Mme Posada pouvaient détenir sur des versions du Logiciel (Ritchie c Sawmill Creek Golf & Country Club Ltd (2004), 35 CPR (4th) 163, au para 22).

 

F.    Réparations

 

[141]       Vu mes conclusions qui précèdent, les demanderesses n’ont pas droit au versement de dommages-intérêts par les défendeurs, à une restitution des profits ou à toute autre réparation qu’elles ont demandé dans le cadre de la présente instance, sauf une déclaration portant qu’elles sont titulaires des droits d’auteur sur Ceres.

 

 

[142]       Dans leur demande reconventionnelle modifiée à deux reprises en date du 11 janvier 2013, les défendeurs réclament :

i)        la radiation des certificats d’enregistrement des droits d’auteur au nom de POPS (en qualité de titulaire) et de Mme Posada (en qualité d’auteure), concernant Ceres et « Epsilon ou Comex », respectivement;

ii)      la confirmation qu’IDP, M. Bazoge et M. Chapuis détiennent une licence à perpétuité pour utiliser Ceres, Omega, Epsilon et Comex à toutes les fins se rattachant aux activités pédagogiques d’IDP;

iii)    10 000 $ en dommages-intérêts punitifs et exemplaires;

iv)    des dépens avocat-client d’un montant de 100 000 $.

 

[143]        Pour les motifs énoncés à la section V.A. des présents motifs de jugement, la demande des défendeurs afin que le certificat d’enregistrement des droits d’auteur de POPS sur Ceres soit rayé du registre des droits d’auteur sera rejetée.

 

[144]       Pour les motifs énoncés à la section V.C. des présents motifs de jugement, la demande des défendeurs afin que le certificat d’enregistrement des droits d’auteur sur « Epsilon ou Omega » soit rayé du registre des droits d’auteur sera accueillie.

 

[145]       Pour les motifs énoncés à la section V.D. des présents motifs de jugement, la demande des défendeurs visant à ce qu’il soit confirmé qu’IDP détient une licence pour utiliser Ceres, Omega, Epsilon et Comex à toutes les fins se rattachant aux activités pédagogiques d’IDP sera accueillie.

 

[146]       Je vais maintenant traiter de la demande reconventionnelle des défendeurs pour obtenir des dommages‑intérêts punitifs et exemplaires de 10 000 $.

 

[147]       Les défendeurs fondent leur demande de dommages-intérêts punitifs et exemplaires entre autres sur (i) la façon dont ils ont été traités par les demanderesses, depuis leur différend jusqu’à l’audience de la présente affaire, et ce, malgré les efforts qu’ils ont déployés de bonne foi pour régler le différend et sur (ii) le refus des demanderesses de fournir une preuve de leur propriété des droits d’auteur sur Ceres avant la tenue de l’audience de la présente affaire.

 

[148]       « Exceptionnellement, des dommages-intérêts punitifs sont accordés lorsqu’une conduite “malveillante, opprimante et abusive [...] choque le sens de la dignité de la cour”. Ce critère limite en conséquence de tels dommages-intérêts aux seules conduites répréhensibles représentant un écart marqué par rapport aux normes ordinaires en matière de comportement acceptable » (Whiten c Pilot Insurance Co, 2002 CSC 18, au para 36).

 

[149]       Je compatis avec les défendeurs en ce qui concerne leur demande de dommages-intérêts punitifs et exemplaires, et particulièrement du fait qu’ils n’ont pas réclamé d’autres dommages‑intérêts. Selon les données probantes, il est bien évident qu’ils ont beaucoup souffert de la conduite adoptée par Mme Posada. Cependant, je ne suis pas convaincu qu’ils ont démontré qu’une telle conduite satisfait au critère élevé requis pour l’octroi de tels dommages-intérêts.

 

[150]       La conduite la plus discutable à cet égard comportait :

i)        la prétendue révocation, fondée sur la mauvaise foi, de la licence implicite des défendeurs afin d’utiliser le Logiciel, qu’ils avaient plusieurs années durant, aidé à élaborer, à un coût élevé, tant sur le plan financier que non financier (lettres des demanderesses aux défendeurs, à partir du 20 octobre 2008);

ii)      les menaces répétées de poursuites judiciaires contre IDP, et contre MM. Bazoge et Chapuis personnellement, s’ils devaient continuer à utiliser le Logiciel dans leurs séminaires, notamment un séminaire prévu la première semaine de novembre 2008, sans tout d’abord reconnaître sans équivoque qu’[traduction] « IDP ne détient absolument aucun droit de propriété, incluant des droits d’auteur, sur le code source du Logiciel tel qu’il existait avant février 2007, ou sur l’une ou l’autre de ses versions » (lettre du 24 octobre 2008 de l’avocat des demanderesses aux défendeurs);

iii)    le refus de rencontrer les défendeurs afin de discuter des questions en litige relativement au Logiciel, à moins que les défendeurs ne reconnaissent tout d’abord, dans un délai de 72 heures, le droit exclusif de propriété du Logiciel par POPS (lettres du 20 octobre 2008 et du 21 octobre 2008 de l’avocat des demanderesses aux défendeurs);

iv)    le refus de fournir quelque preuve qui soit de leur propriété des droits d’auteur sur Ceres, sauf devant un tribunal (lettre du 31 octobre 2008 de l’avocat des demanderesses à l’avocat des défendeurs); 

v)      l’envoi d’avis à des personnes avec qui IDP collaborait, les informant, entre autres, (i) que [traduction] « [l]es droits d’auteur sur le Logiciel appartiennent entièrement et exclusivement à POPS ltée », (ii) que ni IDP ni MM. Bazoge ou Chapuis [traduction] « n’ont le droit ou l’autorité de vous donner des instructions relativement à toute utilisation ou activité ayant quelque rapport avec le Logiciel » et (iii) qu’elles devaient cesser immédiatement toute utilisation ou autre exploitation ou activité ayant trait au Logiciel, autre que celles strictement autorisées selon les instructions personnelles d’Elizabeth Posada » (lettres de l’avocat des demanderesses envoyées à Mme Marie-Agnes Chayane et à Variem Inc, le 2 novembre 2008).

 

[151]       Je conviens que la conduite susmentionnée s’est poursuivie, en grande partie, assez longtemps et a causé un trouble émotionnel et un préjudice financier importants aux défendeurs, puisqu’ils ont grandement réduit leurs activités liées aux séminaires de simulation en raison des menaces majeures des demanderesses. Toutefois, j’estime que cette conduite n’a pas été observée au degré exceptionnel requis pour établir des dommages-intérêts punitifs et exemplaires.

 

[152]       Cela dit, la conduite des demanderesses a incontestablement haussé de façon importante les frais encourus par les défendeurs pour assurer une défense dans cette instance. C’est un facteur dont je tiendrai compte au moment d’établir la répartition du montant forfaitaire fixe convenu par les parties en tant que montant correspondant aux frais juridiques de l’instance.

 

 VI.      Les dépens

 

[153]       À la fin de l’audition de la présente affaire, j’ai invité les parties à essayer de conclure une entente sur un montant forfaitaire de dépens à adjuger en l’espèce, d’ici le 18 janvier 2013. Le 17 janvier 2013, l’avocat des demanderesses a écrit à la Cour pour l’aviser, entre autres choses, que les parties avaient convenu que les dépens engendrés par cette instance pouvaient être fixés au total à 20 000 $.

 

[154]       Ainsi qu’il est indiqué au paragraphe 2 de cette lettre, l’entente a été conclue, sous réserve de la demande des défendeurs concernant des dépens avocat-client de 100 000 $.

 

[155]       Pour les motifs exposés ci-dessous, je ne suis pas convaincu qu’il est approprié d’accorder des dépens avocat-client en l’espèce.

 

[156]       Les dépens avocat-client sont « très rarement accordés », sauf, en règle générale, dans le cas d’une « conduite répréhensible, scandaleuse ou outrageante » d’une partie ou si des « raisons d’intérêt public » le justifient (Québec (Procureur général) c Lacombe, 2010 CSC 38, au para 67; Baker c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 RCS 817, au para 77; Young c Young, [1993] ACS no 112, au para 251).

 

[157]       En plus d’être exceptionnels, les dépens avocat-client ne sont généralement accordés que dans le cas d’une conduite répréhensible, scandaleuse ou outrageante liée à la procédure dans laquelle ces dépens sont demandés (Apotex Inc c Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien‑être social), [2000] ACF no 1919, aux para 7 et 8).

 

[158]       Dans Microsoft Corporation c 9038-3746 Québec inc., 2007 CF 659 au para 16, le juge Harrington a défini comme suit les termes « répréhensible », « scandaleux » et « outrageant » :

Constitue une conduite « répréhensible » celle qui mérite une réprimande, un blâme. Le mot « scandaleux » est dérivé de scandale, un terme pouvant désigner une personne, un objet, un événement ou une situation qui suscite la colère ou l’indignation publique. Le mot « outrageant » décrit notamment une conduite profondément choquante, inacceptable, immorale et injurieuse (voir le Oxford Canadian Dictionary [relativement aux termes « reprehensible », « scandalous » et « outrageous »]).

 

 

[159]       Les défendeurs ont demandé des dépens avocat-client en l’espèce sur le fondement de la conduite suivante des demanderesses qui, selon eux, était répréhensible :

i)        elles se sont approprié sciemment des droits d’auteur de Ceres alors qu’elles savaient que M. Andrew Szendrovits ou McMaster détenait les droits d’auteur du code source de base;

ii)      elles ont cavalièrement affiché une conduite répréhensible à compter du moment où est survenu le différend entre les parties jusqu’au procès, notamment :

a)      en envoyant une série de lettres menaçantes peu de temps après que le différend est survenu entre les parties, en octobre 2008, demandant, entre autres choses, que les défendeurs cessent d’utiliser le Logiciel,

b)      en refusant de produire divers documents, tels que les documents attestant qu’elles étaient titulaires des droits d’auteur sur Ceres,

c)      en laissant les défendeurs investir beaucoup de temps et d’argent dans l’élaboration du Logiciel, sans les avertir de l’intention des demanderesses de conserver la propriété exclusive des droits d’auteur du Logiciel,

d)     en refusant d’identifier la personne qui avait signé l’acte de cession de McMaster au nom de l’Université McMaster;

iii)    elles ont amorcé sciemment une poursuite en l’espèce sans motif valable;

iv)    elles se sont comportées d’une manière qui a eu pour effet d’augmenter considérablement les frais juridiques engagés par les défendeurs afin d’assurer leur défense dans cette poursuite.

[160]       En outre, les défendeurs prétendent qu’il était outrageant de la part des demanderesses de refuser à maintes reprises de fournir certains documents pour donner suite à des engagements et de supprimer certains paragraphes de leur déclaration (à savoir, les paragraphes 2 et 56 à 70) après que le protonotaire Morneau leur eut ordonné de le faire.

 

[161]       Il appert d’une évidence immédiate que certains des motifs invoqués par les défendeurs pour demander les dépens avocat-client sont les mêmes que ceux qu’ils ont invoqués pour demander des dommages-intérêts punitifs et exemplaires dont il est question à la fin de la section précédente.

 

[162]       À mon avis, les motifs invoqués par les défendeurs ne satisfont pas au critère d’une conduite « répréhensible » « scandaleuse » ou « outrageante », individuellement ou collectivement.

 

[163]       Plus précisément, en ce qui concerne l’appropriation alléguée des droits d’auteur sur Ceres, je ne suis pas convaincu que Mme Posada savait que M. Andrew Szendrovits était toujours titulaire des droits d’auteur sur le code source de base de Ceres au moment où elle a demandé un certificat d’enregistrement en 1991.

 

[164]       En ce qui concerne les sommes investies dans le Logiciel par les défendeurs, la prépondérance de la preuve indique qu’il a toujours été entendu entre les parties que Mme Posada ou POPS continuerait d’être titulaire des droits d’auteur sur Ceres, malgré le fait que les défendeurs aient contribué à l’élaboration de Ceres. (Voir, par exemple, l’entente conclue avec M. Ravelomanana, à l’onglet 14 du RCD, et le courriel daté du 23 novembre 2006 que M. Chapuis a envoyé à Mme Posada, à l’onglet 6 du RCD). La situation en ce qui concerne Omega, Epsilon et Comex est moins claire et, de toute façon, elle n’est certainement pas suffisamment claire pour étayer les revendications des défendeurs relatives aux dépens avocat-client.

 

[165]       En ce qui concerne le refus allégué de produire certains documents, que ce soit pour donner suite à des engagements ou autrement, et le refus d’identifier la personne qui a signé l’acte de cession de McMaster, je considère très favorablement les allégations des défendeurs. Il ne fait nul doute que le comportement des demanderesses a contribué au fait que les dépens des défendeurs ont été nettement supérieurs à ce qu’ils auraient été autrement, si les demanderesses s’étaient comportées d’une manière moins cavalière et plus appropriée. Il en est de même pour le comportement invoqué également par les défendeurs pour appuyer leur demande de dommages‑intérêts punitifs et exemplaires. Si les parties n’étaient pas parvenues à une entente relative à une somme globale au titre des dépens en l’espèce, j’aurais certainement envisagé sérieusement d’accorder aux défendeurs un montant supplémentaire pour tenir compte des dépens en sus qu’ils ont dû assumer. Cela dit, je ne suis pas convaincu que le comportement en question est « répréhensible » ou « outrageant ». En effet, en toute équité pour les demanderesses, il semble bien que ces dernières se sont efforcées d’obtenir certains des documents en question et d’identifier la personne qui a signé l’acte de cession de McMaster.

 

[166]       En ce qui concerne le défaut des demanderesses de supprimer certains paragraphes de leur déclaration modifiée, je ne suis pas convaincu qu’il s’agissait d’un refus intentionnel de se conformer à l’ordonnance du protonotaire Morneau.

 

[167]       Enfin, je ne suis pas convaincu que les demanderesses ont amorcé sciemment cette poursuite sans motif valable. Cela dit, je considère plutôt troublant que ces dernières aient continué la poursuite même après que M. Chapuis eut confirmé, le 20 octobre 2010, qu’IDP ne revendiquait pas de droits d’auteur sur Ceres (Chapuis, IAD, à la p 48). À cet égard, je fais observer que Mme Posada a déclaré que, en entendant ces propos, elle et son avocat se sont demandé : « Eh bien, pourquoi sommes-nous ici? ». C’est un autre facteur que j’ai pris en compte pour déterminer la façon de répartir le montant forfaitaire fixe sur lequel se sont entendues les parties comme étant les dépens à accorder pour cette instance.

 

[168]       Compte tenu de ce qui précède, la demande des défendeurs relative aux dépens avocat-client au montant de 100 000 $ sera rejetée.

 

[169]       Cependant, étant donné que les défendeurs ont en grande partie eu gain de cause dans cette poursuite et que les demanderesses n’ont réussi qu’à obtenir la confirmation qu’elles détiennent les droits d’auteur sur Ceres – les défendeurs ayant confirmé en octobre 2010 qu’ils n’avaient pas revendiqué ces droits pour eux-mêmes, j’accorderai aux défendeurs le montant total de la somme forfaitaire de 20 000 $ sur laquelle les parties se sont entendues. À mon avis, ce montant est particulièrement approprié compte tenu de certains comportements affichés par les demanderesses, dont il a été question ci-dessus. Je suis convaincu que de tels comportements ont eu pour effet d’augmenter considérablement l’ensemble des dépens assumés par les défendeurs pour assurer leur défense en l’espèce par rapport à ceux qu’ils auraient eu à engager si les demanderesses s’étaient comportées de manière plus appropriée.


JUGEMENT

 

LA COUR DÉCLARE ET ORDONNE QUE :

 

                      i)             La demanderesse PLANIFICATION-ORGANISATION-PUBLICATIONS SYSTÈMES (POPS) LTÉE est titulaire des droits d’auteur du Logiciel appelé Ceres, sous réserve des droits qui pourraient être soulevés et établis par M. Jérôme Doutriaux et M. Jean-Paul Sallenave.

 

                    ii)            La défenderesse 9054-8181 QUÉBEC INC. (IDP) détient une licence irrévocable pour utiliser Ceres, les adaptations de Ceres appelées Omega, Epsilon 1, Epsilon 2 et Comex, et toute adaptation future de ces logiciels qui pourront être élaborées par IDP ou pour le compte d’IDP, à toutes les fins se rattachant aux activités pédagogiques d’IDP, notamment, les séminaires. Pour plus de certitude, les activités pédagogiques, à cette fin, n’incluent pas la cession, l’octroi de licences, ou tout autre transfert de tels logiciels, ou accès à ceux-ci à quiconque autre que IDP et ceux de ses responsables, gestionnaires, employés ou entrepreneurs indépendants qui doivent avoir accès à ces logiciels afin d’atteindre les objectifs de cette ordonnance.

 

                    iii)          Les défendeurs n’ont pas violé les droits d’auteur détenus par POPS sur Ceres ou quelque droit d’auteur que POPS ou Mme Elizabeth Posada peut détenir sur l’une ou l’autre des adaptations de Ceres, ainsi qu’il est allégué dans la déclaration modifiée des demanderesses du 29 juin 2009 (DM).

 

                  iv)            Le certificat d’enregistrement des droits d’auteur, daté du 24 août 2010, correspondant au numéro d’enregistrement 1079833, concernant « Epsilon ou Comex », où sont identifiées POPS en qualité de titulaire et Elizabeth Posada en qualité d’auteure, sera rayé du registre des droits d’auteur.

 

                      v)          Les demanderesses n’ont pas droit à des dommages-intérêts, à une restitution des profits ou à toute autre réparation qu’elles ont demandée aux paragraphes 1(a)(iii) et 1(b) à (l) de leur DM.

 

                  vi)            Les demanderesses doivent payer immédiatement à IDP des dépens qui s’élèvent à 20 000 $.

 

                vii)            Les défendeurs n’ont pas droit à des dommages-intérêts punitifs et exemplaires ou à des dépens avocat-client, ainsi allégué dans leur défense et demande reconventionnelle modifiée à deux reprises (datée du 11 janvier 2013).

 

              viii)            Les demanderesses doivent fournir à IDP, dans les 30 jours suivant la date du présent jugement, des copies des plus récentes versions de Ceres, d’Omega, de Comex et d’Epsilon, y compris le programme source, qui ont été élaborées entre 1998 et la date où Mme Posada a effectivement cessé d’être une employée d’IDP, ainsi que toute version antérieure de ces logiciels que les défendeurs pourraient identifier et demander par écrit aux demanderesses dans un délai de 30 jours de la date de cette ordonnance, et qui seraient raisonnablement disponibles pour les demanderesses.

 

 

 

« Paul S. Crampton »

Juge en chef


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

DOSSIER :                                        T-583-09

 

INTITULÉ :                                      PLANIFICATION-ORGANISATION-PUBLICATIONS SYSTÈMES (POPS) LTÉE et ELIZABETH POSADA c 9054-8181 QUÉBEC INC, PHILIPPE CHAPUIS et BENOIT BAZOGE

 

                                                           

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              Montréal (Québec)

 

DATES DE L’AUDIENCE :          Du 8 au 11 janvier 2013

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                      LE JUGE EN CHEF CRAMPTON

 

DATE DES MOTIFS :                     Le 25 avril 2013

                                                            Modifiés le 17 juin 2013

 

COMPARUTIONS :

 

Daniel F. O’Connor

POUR LES DEMANDERESSES

 

 

Simon Grégoire

Yaël Lachkar

 

POUR LES DÉFENDEURS

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Daniel F. O’Connor

Avocat

 

POUR LES DEMANDERESSES

 

Simon Grégoire

Yaël Lachkar

Borden Ladner Gervais s.r.l. s.e.n.c.r.l

POUR LES DÉFENDEURS

 

 

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