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Date : 20130416

Dossier : IMM-9996-12

Référence : 2013 CF 382

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 16 avril 2013

En présence de monsieur le juge Phelan

 

 

ENTRE :

 

ANDREY GUDIMA

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

I.          INTRODUCTION

[1]               Le demandeur, une personne qui se dit apatride, a été exclu du statut de réfugié, parce qu’il avait commis un crime grave de droit commun. Il a été exclu en application de l’article 98 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c. 27 (la LIPR), et de la section F de l’article premier de la Convention des Nations Unies relative au statut des réfugiés, 1951, RT Can 1969, no 6.

 

II.        LE CONTEXTE

[2]               Le demandeur se considérait comme apatride, parce qu’il n’avait pas la citoyenneté des États-Unis (où il résidait avant de venir au Canada) et qu’il avait perdu sa citoyenneté russe lorsque ses parents avaient déménagé aux États-Unis.

 

[3]               En 2003, il a été accusé de voies de fait au second degré pour avoir agressé une personne en se servant d’un véhicule. Il a négocié un plaidoyer, aux termes duquel il a été condamné à 14 mois d’emprisonnement et à 18 mois de probation supervisée par un gardien. Au moment où il a traversé la frontière canadienne, il avait purgé sa peine aux États-Unis.

 

[4]               Le demandeur a un dossier judiciaire chargé, avant et après sa déclaration de culpabilité, constitué généralement d’infractions pour conduite en état d’ébriété.

 

[5]               Le commissaire de la Section de la protection des réfugiés (le commissaire) a conclu que les voies de fait au second degré commises aux États-Unis, un acte délictueux grave de catégorie B, était un crime grave apparenté à une « agression armée » (Code criminel, LRC 1985, c C‑46, alinéa 267a)), laquelle peut être un acte criminel passible d’une peine d’emprisonnement maximale de 10 ans ou punissable, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, d’un emprisonnement maximal de dix-huit mois. Le demandeur a admis qu’il s’agissait d’un « crime grave ».

 

[6]               Le commissaire a ensuite considéré les éléments constitutifs du crime, le mode de poursuite, la peine prévue, les faits et les circonstances atténuantes et aggravantes selon la jurisprudence établie dans l’arrêt Jayasekara c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CAF 404, [2009] 4 RCF 164.

 

[7]               Le commissaire a jugé que les facteurs aggravants, comme la conduite en état d’ébriété sans permis de conduire, les déclarations de culpabilité antérieures de même nature et le délit de fuite après avoir agressé et blessé une personne, l’emportaient sur les facteurs atténuants tels que l’admission de sa culpabilité, la négociation d’une peine favorable et une enfance difficile.

 

[8]               Le commissaire a aussi rejeté les observations du demandeur selon lesquelles les circonstances devraient être examinées dans le contexte d’une analyse relative à la réadaptation. Il a été noté qu’au moment du contrôle judiciaire, la question était en instance à la Cour d’appel.

 

[9]               Les questions en litige cruciales dans le présent contrôle judiciaire sont les suivantes :

a)         Est-ce que le commissaire a pris en considération les facteurs pertinents lorsqu’il a apprécié la gravité du crime?

b)         Cette prise en considération était-elle raisonnable?

 

III.       ANALYSE

[10]           Je souscris à l’analyse relative à la norme de contrôle applicable établie dans la décision Guerra Diaz c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 88, 2013 CarswellNat 114, dans laquelle le juge Manson s’est penché sur les justificatifs de la norme dans les arrêts Feimi c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CAF 325, 353 DLR (4th) 536, et Febles c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CAF 324, 223 ACWS (3d) 1012. La conclusion qu’il tire de l’interprétation de l’article 98 de la LIPR et de l’alinéa b) de la section F de l’article premier de la Convention est que la norme de contrôle est la décision correcte. La norme de contrôle eu égard à l’application de la loi aux faits est la décision raisonnable.

 

[11]           Le demandeur soutient que le commissaire a commis une erreur en incluant dans l’analyse relative à la « gravité du crime » et aux « facteurs aggravants » les autres déclarations de culpabilité et agissements du demandeur.

 

[12]           Dans l’arrêt Jayasekara, précité, la Cour d’appel fédérale a soutenu que les facteurs étrangers à la gravité de l’infraction, comme le risque de persécution dans le pays d’origine du demandeur, ne devraient pas être pris en compte.

 

[13]           Toutefois, en l’espèce, les circonstances des déclarations de culpabilité antérieures, la répétition des événements de conduite en état d’ébriété – une question directement liée au type de crime commis – sont des considérations pertinentes. Le fait que les infractions et les comportements se sont répétés accentue la gravité du crime comme il a été statué dans la décision Poggio Guerrero c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 937, 223 ACWS (3d) 181.

 

[14]           Par conséquent, le commissaire n’a pas commis d’erreur en considérant ces facteurs comme étant des facteurs aggravants.

 

[15]           Sur la question de l’application par le commissaire du critère juridique et des facteurs pertinents à prendre en compte aux faits de l’espèce, la prétention du demandeur selon laquelle le commissaire n’a pas dégagé ni apprécié les faits sous-jacents à la déclaration de culpabilité est insoutenable.

 

[16]           Il ressort d’une lecture juste des motifs du commissaire que celui-ci a examiné la preuve documentaire (y compris les déclarations de la police et des témoins), lui accordant sa préférence par rapport à la version des faits du demandeur. Le commissaire a tenu compte de la nature de l’infraction, tant au Canada qu’aux États-Unis, de l’équité du processus, du fait que le demandeur ait plaidé coupable ainsi que des facteurs atténuants et aggravants.

 

[17]           Le commissaire a considéré les faits entourant l’infraction d’une manière qui concorde avec l’arrêt Sing c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CAF 125, 253 DLR (4th) 606, en particulier en ce qui a trait au paragraphe 50 :

Le juge saisi de la demande a conclu que, pour ce qui est de l’avis d’intention du ministre, le critère essentiel était l’identification de l’alinéa de la section 1F sur lequel s’appuie l’intervention. Il a également conclu que les appelants adultes avaient été avisés qu’on les considérait exclus en raison de crimes graves de droit commun, soit la contrebande, la fraude, l’évasion fiscale et la corruption, et que leur exclusion était fondée sur l’information divulguée dans leurs Formulaires de renseignements personnels. Enfin, il a signalé que les exigences régissant une intervention dans une affaire d’exclusion n’équivalent pas aux exigences de communication dans le cadre d’une poursuite au criminel, parce que les buts de ces deux processus et des mesures législatives connexes sont très différents. En l’espèce, il a conclu que l’avis d’intention d’intervenir présenté par le ministre répondait aux exigences de la Loi.

 

IV.       CONCLUSION

[18]           Par conséquent, la présente demande de contrôle judiciaire sera rejetée. Il n’y a aucune question à certifier.

 


JUGEMENT

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

 

 

 

« Michael L. Phelan »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

 

C. Laroche, traducteur


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-9996-12

 

INTITULÉ :                                      ANDREY GUDIMA

 

                                                            et

 

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              Vancouver (Colombie-Britannique)

 

DATE DE L’AUDIENCE :             Le 9 avril 2013

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                            LE JUGE PHELAN

 

DATE DU JUGEMENT :               Le 16 avril 2013

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Shepherd I. Moss

 

POUR LE DEMANDEUR

 

R. Keith Reimer

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

SHEPHERD I. MOSS

Avocat

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

POUR LE DEMANDEUR

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Vancouver (Colombie-Britannique)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

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