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Date : 20130319

Dossier : T-1001-12

Référence : 2013 CF 285

Ottawa (Ontario), le 19 mars 2013

En présence de monsieur le juge O’Keefe

 

 

ENTRE :

 

INTERNATIONAL CLOTHIERS INC.

 

 

 

demanderesse

 

et

 

 

 

DORNA SPORTS, S.L.

 

 

 

défenderesse

 

 

 

 

 

           MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s'agit d'un appel d'une décision de la Commission des oppositions des marques de commerce (la Commission), datée du 6 mars 2012, qui rejetait l'opposition de International Clothiers Inc. (la demanderesse) à la marque de commerce « MOTOGP » et à son dessin (la marque).

 

[2]               La demanderesse demande une ordonnance accueillant l'appel, annulant la décision de la Commission et refusant la demande no 1,328,691 visant l'enregistrement d'une marque de commerce. La demanderesse demande les dépens.

 

Le contexte

 

[3]               La demanderesse détient et utilise les marques de commerce MOTO, MOTO JEANS, MOTO SPORT, MOTO GEAR et MOTO TECHGEAR, en lien avec des vêtements.

 

[4]               Le 18 décembre 2006, la défenderesse a présenté une demande pour faire enregistrer la marque pour un emploi projeté au Canada en lien avec des vêtements et d'autres marchandises.

 

La décision

 

[5]               Les motifs de la Commission, dont la référence est 2012 COMC 43, débutent par la description de la demande et le résumé des motifs d'opposition de la demanderesse, qui portaient sur un conflit entre la marque de la demanderesse et celle de la défenderesse. Chaque partie a présenté des observations écrites, appuyées par des affidavits, et a présenté des observations orales à l'audience.

 

[6]               La Commission a noté qu'il revenait à la défenderesse d'établir, selon la prépondérance des probabilités, que son enregistrement était conforme à la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13 (la Loi), mais que la demanderesse avait le fardeau initial de présenter une preuve à l'appui de ses motifs d'opposition.

 

[7]               En ce qui a trait à l'opposition présentée au sens de l'alinéa 12(1)d), confusion entre la marque proposée et les marques enregistrées de la demanderesse, la Commission a conclu que la demanderesse avait satisfait à son fardeau initial de preuve, mais elle a rejeté le motif de façon sommaire, parce qu'il portait sur des marchandises autres que les vêtements et que la demanderesse n'avait fait aucune observation à ce sujet.

 

[8]               En ce qui a trait aux vêtements, la Commission, en appliquant l'alinéa 6(5)a) de la Loi, a noté que les marques des parties portaient toutes deux le mot « MOTO » et que la preuve montrait que le terme était associé à des motocyclettes. La Commission a conclu que le suffixe « gp », en plus du dessin et des couleurs, distinguait la marque de celle de la demanderesse. En évaluant si la marque était devenue connue au Canada par la promotion ou par l'utilisation, la Commission a noté la preuve de l'auteure de l'affidavit de la défenderesse, qui a été en mesure d'acheter un T-shirt portant la marque sur un site Web canadien, mais a déclaré que cette preuve ne reflétait pas d'association entre la défenderesse et la marque. La Commission a conclu que la marque n'était pas devenue connue au Canada.

 

[9]               La demanderesse a témoigné qu'elle avait utilisé diverses marques portant le mot moto en lien avec des vêtements depuis 1997. La Commission a accepté que la demanderesse avait vendu de tels vêtements en lien avec sa marque, mais elle a été incapable d'examiner plus en profondeur la portée à laquelle la marque de la demanderesse était connue parce qu'il n'y avait pas dans la preuve suffisamment de chiffres d'affaires ou de factures aux consommateurs au Canada pour trancher la question. La Commission a appliqué la même analyse à son appréciation de la preuve effectuée en application de l'alinéa 6(5)b) de la Loi.

 

[10]           Dans son analyse en application des alinéas 6(5)c) et 6(5)d) de la Loi, la Commission a conclu qu'il était possible que les vêtements des parties suivent les mêmes voies commerciales.

 

[11]           Au sens de l'alinéa 6(5)e), la Commission a conclu que les éléments de dessin, la couleur et le suffixe « gp » étaient les éléments les plus frappants et les plus uniques de la marque. Bien que la Commission était d'accord avec la demanderesse que les marques des parties montraient des similarités au niveau du son, de l'apparence et de l'idée, elle a conclu qu'il existait des différences importantes en ce qui a trait aux éléments de dessin et de couleur ainsi qu'au suffixe.

 

[12]           Quant aux autres circonstances, la Commission a examiné des éléments de preuve du registre des marques de commerce. La Commission a conclu que 17 marques pertinentes comprenaient le mot moto en lien avec des vêtements, des couvre-chefs et des articles chaussants, ce qui lui permettait de tirer la conclusion selon laquelle au moins certaines de ces marques étaient utilisées dans le marché canadien. Bien que la preuve de la défenderesse au sujet d'achats en ligne n'était pas une preuve solide de l'utilisation du marché au Canada, elle était suffisante, lorsque combinée à la preuve du registre, pour établir que le mot moto est commun dans le domaine des vêtements, facteur qui appuie la position de la défenderesse. La Commission était d'avis que la défenderesse s'était acquittée de son fardeau d'établir, selon la prépondérance des probabilités, qu'il n'y avait pas de risque raisonnable de confusion entre les marques et, par conséquent, elle a rejeté le motif présenté au sens de l'alinéa 12(1)d).

 

[13]           La Commission a ensuite examiné le motif d'opposition présentée au sens de l'alinéa 16(3)a) de la Loi, absence de droit à l'enregistrement en raison d'un manque d'utilisation précédente au Canada. La Commission a conclu que la demanderesse avait satisfait à son fardeau initial de présenter des preuves permettant de conclure qu'une ou plus d'une de ces marques avait été utilisée au Canada à la date pertinente et n'avait pas été abandonnée à la date de la publicité. Cependant, la Commission a rejeté ce motif en raison de la conclusion qu'elle avait tirée au sujet du motif présenté au sens de l'alinéa 12(1)d), puisqu'aucune des marques déposées au sens de l'alinéa 16(3)a) ne présentait plus de similitudes que la marque de la demanderesse susmentionnée.

 

[14]           Enfin, la Commission a examiné le motif d'opposition présenté au sens de l'alinéa 38(2)d), absence de caractère distinctif. La Commission n'a pas été en mesure d'établir dans quelle portée la marque de la demanderesse était connue au Canada en raison d'un manque de chiffres d'affaires. Par conséquent, la Commission a conclu que la demanderesse n'avait pas satisfait au fardeau d'établir qu'une ou plus d'une de ses marques avait une réputation importante, significative ou suffisante au Canada pour annuler le caractère distinctif de la marque de la défenderesse.

 

[15]           La Commission a rejeté l’opposition en ce qui concerne la marque de commerce proposée.

 

Les questions en litige

 

[16]           Dans son exposé des arguments, la demanderesse soulève les questions suivantes :

            1.         Quelle norme de contrôle devrait être appliquée?

            2.         La Commission a-t-elle commis une erreur en rejetant le motif d'opposition de la demanderesse quant à l'absence de droit à l'enregistrement fondé sur l'article 16 de la Loi?

            3.         La Commission a-t-elle commis une erreur en rejetant le motif d'opposition de la demanderesse quant à la non-enregistrabilité fondé sur l'alinéa 12(1)d) de la Loi?

            4.         La Commission a-t-elle commis une erreur en rejetant le motif d'opposition de la demanderesse quant à l'absence de caractère distinctif?

 

[17]           Je reformulerais les questions comme suit :

            1.         Quelle est la norme de contrôle appropriée?

            2.         La Commission a-t-elle commis une erreur en rejetant le motif d'opposition de la demanderesse fondé sur l'absence de droit à l'enregistrement?

            3.         La Commission a-t-elle commis une erreur en rejetant le motif d'opposition de la demanderesse fondé sur la non-enregistrabilité?

            4.         La Commission a-t-elle commis une erreur en rejetant le motif d'opposition de la demanderesse fondé sur l'absence de caractère distinctif?

Les observations écrites du demandeur

 

[18]           La demanderesse soutient que la nouvelle preuve qu'elle a déposée en appel entraîne la norme de contrôle de la décision correcte pour les trois motifs d'opposition. La nouvelle preuve aurait affecté la décision de la Commission et, par conséquent, la Cour devrait tirer sa propre conclusion en fonction de la preuve dont elle est saisie.

 

[19]           Le critère applicable quant à la confusion est celui de la première impression qui passe dans l’esprit du consommateur ordinaire plutôt pressé qui ne s’arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur, pas plus que pour examiner de près les ressemblances et les différences entre les marques.

 

[20]           Les dates pertinentes sont le 18 décembre 2006 (la date du dépôt de la demande) en ce qui a trait à l'absence de droit à l'enregistrement au sens de l'article 16, et le 6 mars 2012 en ce qui a trait à la non-enregistrabilité au sens de l'article 12.

 

[21]           La Commission a commis une erreur en concluant qu'il n'y avait pas de risque raisonnable de confusion. Elle s'est fondée sur des références non datées d'extraits d'un dictionnaire en ligne qui donnent à penser que le mot moto est lié aux motocyclettes, mais aucune preuve ne montre que les Canadiens connaissaient, à un moment ou un autre, ces définitions de dictionnaire, encore moins aux dates pertinentes. La Commission n'a pas tenu compte du fait que les vêtements de la demanderesse n'ont aucun lien avec les motocyclettes, donc le mot moto est simplement arbitraire et n'a aucun lien avec le caractère ou la qualité des vêtements de la demanderesse. Il a été conclu que les acronymes sont intrinsèquement faibles, donc la conclusion de la Commission selon laquelle le suffixe augmentait le caractère distinct était fautive et, comme une partie des vêtements de la défenderesse est liée aux motocyclettes, le mot moto donne à penser qu'il s'agit de ce type de marchandises et, par conséquent, il revêt un caractère moins distinctif.

[22]           La Commission a conclu que la marque de la défenderesse n'était pas réellement connue au Canada, parce qu'il n'y avait aucune preuve d'utilisation, et cela n'a pas changé en appel. La Commission a conclu que la demanderesse avait affiché ses marques dans des publicités imprimées en 2005, sur des étiquettes vêtements et que la demanderesse vend ses marchandises aux consommateurs dans des magasins de détail au Canada.

 

[23]           La Commission n'a pas été convaincue au sujet de la portée de l'utilisation des marques en l'absence de chiffres d'affaires. La nouvelle preuve de la demanderesse établit qu'il a vendu plus de 30 millions de dollars de ces vêtements portant la marque moto de 2006 à 2012. L'alinéa 6(5)a) milite donc fortement en faveur de la demanderesse.

 

[24]           L'alinéa 6(5)b) milite fortement en faveur de la demanderesse puisque la Commission a conclu que la défenderesse n'avait pas établi l'utilisation de la marque, alors que les marques moto de la demanderesse sont utilisées depuis 1997 et qu'aucune nouvelle preuve n'avait été déposée en appel par la défenderesse.

 

[25]           En ce qui a trait aux alinéas 6(5)c) et 6(5)d), la demanderesse soutient que les gens font preuve de peu de minutie ou d'attention lorsqu'ils effectuent des achats. La Commission a conclu que les vêtements des parties pouvaient suivre les mêmes voies commerciales. Ces facteurs militent aussi fortement en faveur de la demanderesse.

 

[26]           En ce qui a trait à l'alinéa 6(5)e), la demanderesse soutient que la conclusion de la Commission n'était ni raisonnable, ni correcte. L'élément le plus distinctif des marques de la demanderesse est moto et la défenderesse a pris cet élément essentiel. Un suffixe n'est généralement pas suffisant pour éviter la confusion et les acronymes sont intrinsèquement faibles. Lorsqu'on examine les marques correctement en fonction de premier souvenir imparfait et dans leur ensemble, il est fort probable que des consommateurs prennent la marque moto GP & design pour un nouveau produit moto lancé par la demanderesse et portant l'identifiant GP.

 

[27]           La demanderesse soutient que la Commission a mal compris l'état de la preuve au registre lorsqu'elle a examiné les autres circonstances. La Commission a incorrectement conclu que 17 marques connexes étaient inscrites au registre. En date du dépôt de la demande le 18 décembre 2006, il n'y avait qu'une seule inscription de marque enregistrée en vigueur qui était liée aux vêtements, topmoto. Cela n'est pas suffisant pour établir que moto est un terme communément utilisé par des compagnies en lien avec les vêtements.

 

[28]           La preuve par affidavit de la défenderesse n'était pas pertinente parce qu'elle n'a pas établi que moto était un terme communément utilisé au Canada pour les vêtements. Il n'y a aucune preuve que de tels vêtements ont été vendus au Canada aux dates pertinentes. La nouvelle preuve de la demanderesse établit que la presque totalité des vendeurs identifiés dans l'affidavit de la défenderesse est située aux États-Unis. Les activités étrangères ne portent pas atteinte au caractère distinctif d'une marque au Canada.

 

[29]           Par conséquent, la défenderesse n'est pas la personne qui peut enregistrer MOTOGP & DESIGN et la marque ne peut pas être enregistrée. La demande la défenderesse devrait être rejetée.

 

[30]           La Commission a rejeté le troisième motif d'opposition de la demanderesse en raison de manque de chiffre d'affaires. La nouvelle preuve de la demanderesse établit qu'à la date pertinente quant à l'absence de caractère distinctif, le 27 janvier 2009, la demanderesse avait vendu 14,5 millions de dollars de vêtements portant la marque moto dans les trois années précédentes. Par conséquent, la demanderesse a satisfait à son fardeau initial, alors que la défenderesse n'a présenté aucune preuve d'utilisation réelle au Canada de la marque moto au Canada par une tierce partie avant la date pertinente. Les ventes importantes de la demanderesse neutralisent toute répercussion découlant de l'utilisation par la tierce partie. Par conséquent, la marque ne se distingue pas de celle de la défenderesse, n'est pas adaptée afin de se distinguer des marchandises de la défenderesse et la demande devrait être rejetée.

 

Les observations écrites du défendeur

 

[31]           La défenderesse n'a présenté aucune observation écrite.

 

Analyse et décision

 

[32]           La première question

      Quelle est la norme de contrôle appropriée?

            Si la jurisprudence a déterminé quelle est la norme de contrôle qui s’applique à une question particulière dont la cour de révision est saisie, cette dernière peut adopter cette norme (voir l’arrêt Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 RCS 190, au paragraphe 57).

 

[33]           Lorsque la nouvelle preuve déposée aurait affecté de manière appréciable les conclusions de fait de la Commission, la norme de contrôle est celle de la décision correcte (voir Hawke & Company Outfitters LLC c Retail Royalty Company and American Eagle Outfitters, Inc., 2012 CF 1539, [2012] FCJ No 1622, au paragraphe 30, citant Brasseries Molson c John Labatt Ltée, [2000] 3 CF 145, 5 CPR (4th) 180).

 

[34]           En l'espèce, les chiffres d'affaires fournis dans la nouvelle preuve auraient certainement affecté la décision de la Commission quant au motif portant sur l'absence de caractère distinctif, puisque les motifs de la Commission notent l'absence d'une telle preuve.

 

[35]           Quant aux motifs de l'absence de droit à l'enregistrement et de la non-enregistrabilité, la nouvelle preuve portant sur les origines nationales du site Web vendant des vêtements moto d'une tierce partie aurait affecté de façon importante la décision de la Commission, parce qu'elle contredisait la preuve de la défenderesse au sujet de telles ventes.

 

[36]           Par conséquent, pour les trois motifs, la norme de contrôle est la décision correcte.

 

[37]           La deuxième question

            La Commission a-t-elle commis une erreur en rejetant le motif d'opposition de la demanderesse fondé sur l'absence de droit à l'enregistrement?

            La Commission a conclu, en tenant compte de l'alinéa 6(5)a), qu'elle ne pouvait pas établir la portée de l'utilisation de la marque enregistrée moto de la demanderesse en raison d'un manque de chiffres d'affaires. La nouvelle preuve de la demanderesse établit des ventes de 30 millions de dollars de 2006 à 2012. Ce facteur, ajouté à la preuve déposée devant la Commission qui portait sur la publicité imprimée et sur l'utilisation d'étiquettes de vêtements, milite maintenant en faveur de la demanderesse.

 

[38]           Vu le peu de nouvelles preuves, il n’est pas nécessaire de modifier la conclusion de la Commission quant à l’alinéa 6(5)b) (durée) et les alinéas 6(5)c) et 6(5)d) (nature des marchandises et des ventes).

 

[39]           Quant à l’alinéa 6(5)e), ressemblance entre les marques, la demanderesse n’a présenté aucune nouvelle preuve, mais m’a demandé de conclure que la décision de la Commission était déraisonnable. Compte tenu du poids des autres facteurs, qui seront examinés plus bas, je n’ai pas à trancher cette question.

 

[40]           J’accepte la preuve de la demanderesse selon laquelle les ventes en ligne présentées comme élément de preuve par la défenderesse n’établissent pas l’utilisation au Canada et, par conséquent, je rejette la conclusion de la Commission selon laquelle le terme MOTO est commun dans la vente de vêtements au Canada.

 

[41]           En examinant tous ces éléments de preuve, il m’est difficile de conclure que la défenderesse s’est acquittée de son fardeau d’établir, selon la prépondérance des probabilités, qu’elle pouvait enregistrer la marque. Les marques de la demanderesse sont devenues bien connues par la vente des produits de la demanderesse. Cette dernière utilise les marques depuis au moins 1997. Les marques comportent bel et bien certaines similarités, même si la Commission avait raison lorsqu’elle a soutenu que le suffixe ajoute un élément distinctif.

 

[42]           Par conséquent, je conclus que la défenderesse n’a pas établi qu’il n’y aurait pas de confusion dans la première impression que laisse la marque dans l’esprit du consommateur ordinaire plutôt pressé et qui ne s’arrête pas pour réfléchir à la question en profondeur, pas plus que pour examiner de près les ressemblances et les différences entre les marques (Veuve Clicquot Ponsardin c Boutique Cliquot Ltée, 2006 CSC 23, [2006] 1 RCS 824). La défenderesse ne peut donc pas enregistrer la marque.

 

[43]           La troisième question

      La Commission a-t-elle commis une erreur en rejetant le motif d'opposition de la demanderesse fondé sur la non-enregistrabilité?

      Pour les mêmes raisons qui précèdent, la marque ne peut pas être enregistrée parce qu’elle peut être méprise pour les marques enregistrées de la demanderesse.

 

[44]           La quatrième question

            La Commission a-t-elle commis une erreur en rejetant le motif d'opposition de la demanderesse fondé sur l'absence de caractère distinctif?

            La Commission a conclu que la demanderesse ne s’était pas acquittée de son fardeau initial de prouver que ses marques étaient connues au Canada. La nouvelle preuve satisfait certainement à cette exigence. La demanderesse s’étant acquittée de son obligation, le fardeau revient maintenant à la défenderesse. Bien que cette dernière ne se soit pas présentée à l’audience, sa demande peut quand même être évaluée en fonction de la preuve dont la Commission était saisie. Compte tenu de la nouvelle preuve de la demanderesse montrant que les ventes en lignes provenaient des États‑Unis, il ne reste aucune preuve d’une utilisation par une tierce partie au Canada. Par conséquent, la défenderesse ne s’est pas acquittée de ce fardeau. La marque de la défenderesse ne revêt donc pas de caractère distinctif.

 

[45]           Par conséquent, l’appel est accueilli, la décision de la Commission est annulée et la demande no 1,328,691 visant l’enregistrement d’une marque de commerce est refusée.

 

[46]           Le demandeur sollicite les dépens sur la base avocat-client. La demande est fondée sur le défaut de la défenderesse de comparaître à l’audience, son défaut de consentir à l’appel et son défaut d’aviser la Cour de sa décision de ne pas se présenter à l’audition de l’appel. Je ne suis pas prêt à accorder les dépens sur la base avocat-client parce que la règle générale en la matière veut que des dépens entre avocat et client ne soient accordés qu’en de rares occasions, par exemple lorsqu’une partie a fait preuve d’une conduite répréhensible, scandaleuse ou outrageante (voir Mackin c New Brunswick (Ministre des Finances; Rice c New Brunswick, 2002 CSC 13, [2002] 1 RCS 405, au paragraphe 86).

 

[47]           J’accorderais les dépens à la demanderesse, calculés selon l’échelon supérieur de la colonne III du tarif B.

 


JUGEMENT

 

LA COUR STATUE que

            1.         L’appel est accueilli, la décision de la Commission est annulée et la demande n1,328,691 visant l’enregistrement d’une marque de commerce est refusée.

            2.         La demanderesse a droit aux dépens de la demande, calculés selon l’échelon supérieur de la colonne III du tarif B.

 

 

« John A. O’Keefe »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Evelyne Swenne, traductrice‑conseil

 

 

 

 


ANNEXE

 

Les dispositions légales applicables

 

Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13

 

6. (1) Pour l’application de la présente loi, une marque de commerce ou un nom commercial crée de la confusion avec une autre marque de commerce ou un autre nom commercial si l’emploi de la marque de commerce ou du nom commercial en premier lieu mentionnés cause de la confusion avec la marque de commerce ou le nom commercial en dernier lieu mentionnés, de la manière et dans les circonstances décrites au présent article.

 

 

(2) L’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

 

(3) L’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec un nom commercial, lorsque l’emploi des deux dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à cette marque et les marchandises liées à l’entreprise poursuivie sous ce nom sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à cette marque et les services liés à l’entreprise poursuivie sous ce nom sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou services soient ou non de la même catégorie générale.

(4) L’emploi d’un nom commercial crée de la confusion avec une marque de commerce, lorsque l’emploi des deux dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à l’entreprise poursuivie sous ce nom et les marchandises liées à cette marque sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à l’entreprise poursuivie sous ce nom et les services liés à cette marque sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou services soient ou non de la même catégorie générale.

 

(5) En décidant si des marques de commerce ou des noms commerciaux créent de la confusion, le tribunal ou le registraire, selon le cas, tient compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris :

 

a) le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus;

 

b) la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage;

 

c) le genre de marchandises, services ou entreprises;

 

d) la nature du commerce;

 

e) le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’ils suggèrent.

 

12. (1) Sous réserve de l’article 13, une marque de commerce est enregistrable sauf dans l’un ou l’autre des cas suivants :

 

 

a) elle est constituée d’un mot n’étant principalement que le nom ou le nom de famille d’un particulier vivant ou qui est décédé dans les trente années précédentes;

 

b) qu’elle soit sous forme graphique, écrite ou sonore, elle donne une description claire ou donne une description fausse et trompeuse, en langue française ou anglaise, de la nature ou de la qualité des marchandises ou services en liaison avec lesquels elle est employée, ou à l’égard desquels on projette de l’employer, ou des conditions de leur production, ou des personnes qui les produisent, ou du lieu d’origine de ces marchandises ou services;

 

c) elle est constituée du nom, dans une langue, de l’une des marchandises ou de l’un des services à l’égard desquels elle est employée, ou à l’égard desquels on projette de l’employer;

 

d) elle crée de la confusion avec une marque de commerce déposée;

 

e) elle est une marque dont l’article 9 ou 10 interdit l’adoption;

 

f) elle est une dénomination dont l’article 10.1 interdit l’adoption;

 

g) elle est constituée, en tout ou en partie, d’une indication géographique protégée et elle doit être enregistrée en liaison avec un vin dont le lieu d’origine ne se trouve pas sur le territoire visé par l’indication;

 

h) elle est constituée, en tout ou en partie, d’une indication géographique protégée et elle doit être enregistrée en liaison avec un spiritueux dont le lieu d’origine ne se trouve pas sur le territoire visé par l’indication;

 

i) elle est une marque dont l’adoption est interdite par le paragraphe 3(1) de la Loi sur les marques olympiques et paralympiques, sous réserve du paragraphe 3(3) et de l’alinéa 3(4)a) de cette loi.

 

16. (1) Tout requérant qui a produit une demande selon l’article 30 en vue de l’enregistrement d’une marque de commerce qui est enregistrable et que le requérant ou son prédécesseur en titre a employée ou fait connaître au Canada en liaison avec des marchandises ou services, a droit, sous réserve de l’article 38, d’en obtenir l’enregistrement à l’égard de ces marchandises ou services, à moins que, à la date où le requérant ou son prédécesseur en titre l’a en premier lieu ainsi employée ou révélée, elle n’ait créé de la confusion :

 

a) soit avec une marque de commerce antérieurement employée ou révélée au Canada par une autre personne;

 

b) soit avec une marque de commerce à l’égard de laquelle une demande d’enregistrement avait été antérieurement produite au Canada par une autre personne;

 

c) soit avec un nom commercial qui avait été antérieurement employé au Canada par une autre personne.

 

[. . .]

 

(3) Tout requérant qui a produit une demande selon l’article 30 en vue de l’enregistrement d’une marque de commerce projetée et enregistrable, a droit, sous réserve des articles 38 et 40, d’en obtenir l’enregistrement à l’égard des marchandises ou services spécifiés dans la demande, à moins que, à la date de production de la demande, elle n’ait créé de la confusion :

 

a) soit avec une marque de commerce antérieurement employée ou révélée au Canada par une autre personne; . . .

 

38. (2) Cette opposition peut être fondée sur l’un des motifs suivants :

 

[. . .]

 

d) la marque de commerce n’est pas distinctive.

 

 

6. (1) For the purposes of this Act, a trade-mark or trade-name is confusing with another trade-mark or trade-name if the use of the first mentioned trade-mark or trade-name would cause confusion with the last mentioned trade-mark or trade-name in the manner and circumstances described in this section.

 

 

 

 

 

(2) The use of a trade-mark causes confusion with another trade-mark if the use of both trade-marks in the same area would be likely to lead to the inference that the wares or services associated with those trade-marks are manufactured, sold, leased, hired or performed by the same person, whether or not the wares or services are of the same general class.

 

 

 

 

(3) The use of a trade-mark causes confusion with a trade-name if the use of both the trade-mark and trade-name in the same area would be likely to lead to the inference that the wares or services associated with the trade-mark and those associated with the business carried on under the trade-name are manufactured, sold, leased, hired or performed by the same person, whether or not the wares or services are of the same general class.

 

 

 

(4) The use of a trade-name causes confusion with a trade-mark if the use of both the trade-name and trade-mark in the same area would be likely to lead to the inference that the wares or services associated with the business carried on under the trade-name and those associated with the trade-mark are manufactured, sold, leased, hired or performed by the same person, whether or not the wares or services are of the same general class.

 

 

 

 

(5) In determining whether trade-marks or trade-names are confusing, the court or the Registrar, as the case may be, shall have regard to all the surrounding circumstances including

 

 

(a) the inherent distinctiveness of the trade-marks or trade-names and the extent to which they have become known;

 

 

(b) the length of time the trade-marks or trade-names have been in use;

 

 

(c) the nature of the wares, services or business;

 

(d) the nature of the trade; and

 

(e) the degree of resemblance between the trade-marks or trade-names in appearance or sound or in the ideas suggested by them.

 

 

12. (1) Subject to section 13, a trade-mark is registrable if it is not

 

 

 

(a) a word that is primarily merely the name or the surname of an individual who is living or has died within the preceding thirty years;

 

(b) whether depicted, written or sounded, either clearly descriptive or deceptively misdescriptive in the English or French language of the character or quality of the wares or services in association with which it is used or proposed to be used or of the conditions of or the persons employed in their production or of their place of origin;

 

 

 

 

(c) the name in any language of any of the wares or services in connection with which it is used or proposed to be used;

 

 

 

(d) confusing with a registered trade-mark;

 

 

(e) a mark of which the adoption is prohibited by section 9 or 10;

 

(f) a denomination the adoption of which is prohibited by section 10.1;

 

(g) in whole or in part a protected geographical indication, where the trade-mark is to be registered in association with a wine not originating in a territory indicated by the geographical indication;

 

(h) in whole or in part a protected geographical indication, where the trade-mark is to be registered in association with a spirit not originating in a territory indicated by the geographical indication; and

 

(i) subject to subsection 3(3) and paragraph 3(4)(a) of the Olympic and Paralympic Marks Act, a mark the adoption of which is prohibited by subsection 3(1) of that Act.

 

 

16. (1) Any applicant who has filed an application in accordance with section 30 for registration of a trade-mark that is registrable and that he or his predecessor in title has used in Canada or made known in Canada in association with wares or services is entitled, subject to section 38, to secure its registration in respect of those wares or services, unless at the date on which he or his predecessor in title first so used it or made it known it was confusing with

 

 

(a) a trade-mark that had been previously used in Canada or made known in Canada by any other person;

 

(b) a trade-mark in respect of which an application for registration had been previously filed in Canada by any other person; or

 

(c) a trade-name that had been previously used in Canada by any other person.

 

 

[. . .]

 

(3) Any applicant who has filed an application in accordance with section 30 for registration of a proposed trade-mark that is registrable is entitled, subject to sections 38 and 40, to secure its registration in respect of the wares or services specified in the application, unless at the date of filing of the application it was confusing with

 

 

 

(a) a trade-mark that had been previously used in Canada or made known in Canada by any other person; . . .

 

38. (2) A statement of opposition may be based on any of the following grounds:

 

[. . .]

 

(d) that the trade-mark is not distinctive.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        T-1001-12

 

INTITULÉ :                                      INTERNATIONAL CLOTHIERS INC.

 

                                                            - et -

 

                                                            DORNA SPORTS, S.L.

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              Toronto (Ontario)

 

DATE DE L'AUDIENCE :             Le 22 janvier 2013

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                            LE JUGE O'KEEFE

 

DATE DES MOTIFS :                     Le 19 mars 2013

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Mark K. Evans

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Aucune comparution

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Smart & Biggar

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

Marks & Clerk

Ottawa (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

 

 

 

 

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