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Date : 20130207

Dossier : T-357-12

Référence : 2013 CF 137

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 7 février 2013

En présence de madame la juge Gagné

 

 

ENTRE :

ANGELO NAGY

 

demandeur

 

et

 

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

défendeur

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Le demandeur, Angelo Nagy, est un détenu âgé de 51 ans qui purge une peine fédérale d’emprisonnement de quatre ans et six mois pour possession et trafic de substances illégales et défaut d’avoir respecté un engagement. Il sollicite le contrôle judiciaire d’une décision rendue au troisième palier de la procédure de règlement des griefs par laquelle Anne Kelly, sous‑commissaire principale [la commissaire] du Service correctionnel du Canada [le SCC], après avoir conclu à l’exactitude de l’échelle de réévaluation du niveau de sécurité [l’ERNS] le concernant, a rejeté le grief qu’il avait déposé en rapport avec le niveau de dangerosité du détenu [le NDD] qui lui était attribué. Le demandeur allègue que cette décision l’empêche de solliciter son transfèrement à un établissement d’un niveau de sécurité inférieur.

 

Le contexte

[2]               Le demandeur a été incarcéré le 11 juin 2010 à l’établissement à sécurité moyenne où il se trouve actuellement.

 

[3]               Le 24 février 2011, le SCC a rejeté la requête du demandeur en vue d’obtenir un transfèrement dit sollicité à un établissement à sécurité minimum. Cependant, comme l’agent de libération conditionnelle du demandeur avait omis dans le cadre de cette décision de procéder à un examen du niveau de dangerosité, un autre examen du NDD a été fait le 16 mai 2011 [l’évaluation contestée] et l’ERNS du demandeur a été mise à jour. Les cotes du demandeur concernant les rubriques suivantes : « adaptation à l’établissement », « risque d’évasion » et « risque pour la sécurité du public » ont été considérées, respectivement, comme moyenne, moyenne et faible, et l’ERNS le concernant a été fixée à 17,5 – ce qui, d’après la décision, le classait comme un délinquant à sécurité moyenne. Selon la version 4.0.3 des Spécifications fonctionnelles, un détenu ayant une ERNS de 16,0 ou moins est un détenu à sécurité minimum.

 

[4]               Il ressort du dossier que la cote d’« adaptation à l’établissement » moyenne du demandeur, qui nécessitait la cote de sécurité moyenne, a été influencée par des incidents décrits en ces termes dans l’évaluation contestée :

[traduction] [...] Depuis son arrivée, Nagy a un comportement relativement bon. Son dossier ne comporte qu’un seul incident consigné. Une personne venue lui rendre visite voyageait en compagnie de l’occupant d’un véhicule à qui l’on avait refusé l’entrée en vue d’une visite sociale parce que le chien détecteur de drogue avait signalé la présence de drogue dans le véhicule. Il faut également signaler deux incidents distincts, survenus à l’Unité d’évaluation de Millhaven, lors de la période d’examen. À ces deux occasions, le détenu a été trouvé en possession de « broue ».

 

Le détenu Nagy peut s’efforcer d’améliorer sa cote d’adaptation à l’établissement en continuant de se conformer aux règles et aux règlements de ce dernier. Comme il a des antécédents de position [sic : possession] de contrebande, il devra démontrer pendant un temps prolongé qu’il est résolu à se conformer à son plan correctionnel en évitant toute accusation et tout incident. [Traduction fidèle à la version anglaise reproduite.]

 

 

[5]               La nouvelle évaluation n’a pas modifié le risque d’évasion du demandeur, qui a été coté comme « moyen » :

[traduction] [...] Cette cote moyenne a été attribuée à l’arrivée du détenu. L’EGC est d’avis que cette cote est due aux antécédents du détenu sur le plan de la non-conformité à des ententes de confiance et à sa première libération problématique d’un établissement carcéral fédéral. Les informations qui suivent sont tirées du profil criminel et expliquent les détails entourant la première libération de Nagy : « Nagy n’a jamais été reconnu coupable de liberté illégale ou d’évasion d’une garde légale, mais il a été déclaré coupable antérieurement de non-respect d’un engagement, et il l’est encore actuellement. De plus, pendant qu’il était sous surveillance lors de sa dernière peine fédérale d’emprisonnement, son comportement a été problématique. Nagy a bénéficié d’une semi-liberté, mais l’EGC a recommandé la révocation de cette mesure à cause d’une détérioration de son comportement. La CNLC a annulé la suspension et Nagy a eu droit à la SL, avec résidence au CCC Hamilton. Sa libération a été transformée en LCT; cependant, celle-ci a été révoquée à cause d’une accusation additionnelle. Nagy a été remis sous garde et libéré à sa DLO car il avait obtenu sa mise en liberté sous caution sous réserve de strictes conditions liées à l’accusation en instance dont il faisait l’objet. Le 2003-06-13, une analyse d’urine a révélé la présence de cocaïne. Une seconde analyse a été effectuée le 2003-06-25, et le résultat a été négatif. L’EGC a signalé qu’aucune mesure n’était prise parce que la seconde analyse était négative et que sa DEM était le 2003-07-05. Nagy a purgé sa première peine fédérale jusqu’à la DEM sous le coup d’une assignation à résidence, assortie de strictes conditions liées à des accusations en instance qu’il avait encourues durant la période de LCT pour possession aux fins de trafic ». Compte tenu de ces antécédents et du temps assez court depuis lequel le détenu se trouve à Joyceville, l'EGC convient que cette cote moyenne soit maintenue. [Traduction fidèle à la version anglaise reproduite.]

 

 

[6]               Le demandeur a déposé un grief contre la décision de refuser son transfèrement à un établissement à sécurité inférieure par la voie de deux griefs distincts : V40R00002070 et V40R00002691, dont le dernier est l’objet de la présente demande de contrôle judiciaire. Il a déposé ce grief le 13 juillet 2011, disant que les renseignements relatifs à cette décision étaient erronés et qu’il était nettement exagéré d’avoir conclu qu’il avait des antécédents de non-respect des conditions imposées. Il a soutenu que le résultat de son ERNS avait été évalué à tort et n’aurait pas dû être supérieur à 13 ou à 13,5. En fait, même si le demandeur contestait le rejet de sa demande de transfèrement, sa plainte précise au sujet de son ERNS avait trait à ses cotes d’« adaptation à l’établissement » et de « risque d’évasion », ainsi qu’aux résultats d’évaluation qu’on lui avait attribués, dans le cadre du Plan correctionnel, au chapitre des progrès accomplis (question no 7) et de la motivation (question no 8), lesquels résultats étaient, respectivement, de 3,5/5,0 et de 4,0/6,0. Cette évaluation découlait de la décision selon laquelle, même si le demandeur suivait les programmes qu’exigeait son plan correctionnel, il continuait de minimiser ses crimes, n’était pas disposé à assumer la responsabilité de ses actes et blâmait d’autres personnes pour ces derniers.

 

[7]               Une recommandation de décision a été formulée le 28 juillet 2011 et le sous-commissaire adjoint par intérim [le commissaire adjoint] a rendu une décision au deuxième palier de la procédure de règlement des griefs le 3 août 2011. Cette décision énonce essentiellement les conclusions de la recommandation : elle maintient que le demandeur a été trouvé à deux reprises en possession d’alcool de fabrication artisanale depuis février 2010 et que l’une des personnes venant lui rendre visite (sa fille) s’est vu refuser l’entrée dans l’établissement après l’intervention d’un chien renifleur de drogue; il s’agit là de deux incidents dont le demandeur a plus tard nié l’existence. De plus, le commissaire adjoint a déclaré que le soutien de la collectivité dont le demandeur pouvait bénéficier n’était pas confirmé car sa famille n’avait pas répondu à la demande d’évaluation communautaire postsentencielle.

 

[8]               Au vu de ces informations, le commissaire adjoint a conclu que la justification de l’évaluation contestée était conforme à la loi et aux politiques en vigueur. Au sujet du rejet du transfèrement sollicité, il a conclu que les cotes moyennes d’« adaptation à l’établissement » et de « risque d’évasion » avaient été déterminées d’une manière conforme à la loi et aux politiques, et a-t-il déclaré :

[traduction] En raison de vos antécédents, il est conclu qu’un établissement à sécurité moyenne serait le meilleur endroit où gérer le risque que vous représentez. L’Équipe de gestion des cas (EGC) se soucie du fait que vous minimisez constamment vos crimes et que vous ne vous considérez pas comme un criminel. L’EGC croit qu’en dépit d’un plan de libération structuré, le fait que vous continuiez de blâmer d’autres personnes et n’assumiez pas la responsabilité de vos actes sera toujours un risque de reprise de votre cycle de délinquance.

 

 

[9]               En fin de compte, le commissaire adjoint a rejeté le grief au deuxième palier. Le demandeur a poursuivi l’affaire au troisième palier le 22 août 2011. Là encore, il a fait valoir que sa fille et le petit-ami de cette dernière (qui l’accompagnait à l’établissement) ne consomment pas de drogue et n’en transportaient pas le jour où le chien avait reniflé la présence de drogue. Il a fait remarquer que quand les agents du SCC avait refusé à sa fille d’entrer dans l’établissement, elle leur avait posé des questions et avait déclaré qu’elle accepterait de se soumettre à un contrôle additionnel ou à une fouille à nu pour prouver qu’ils avaient tort. Le demandeur a également réitéré qu’on ne l’avait jamais trouvé en possession d’alcool de fabrication artisanale. Il a soutenu que la première fois où on l’avait censément trouvé en possession d’alcool de fabrication artisanale, il en était à ses premières heures de présence dans une cellule double et qu’on l’avait personnellement fouillé, sans l’accuser. La seconde fois, il se trouvait dans une cellule individuelle qui n’avait pas été nettoyée avant son arrivée. Le demandeur a de plus déclaré qu’il n’avait aucun antécédent de comportement d’évasion et que les circonstances entourant le non‑respect des ententes de confiance n’étaient pas liées à son risque d’évasion.

 

[10]           Le demandeur a déclaré aussi qu’il n’avait jamais minimisé ou justifié ses actes criminels, ni refusé d’en assumer la responsabilité. Il a fait valoir que son plan correctionnel témoignait des progrès qu’il accomplissait et de sa motivation et qu’il satisfaisait à tous les facteurs réglementaires qu’il était nécessaire de prendre en considération pour évaluer son ERNS : [traduction] « [j]e ne fais l’objet d’aucune accusation en instance, mon rendement et ma conduite sont excellents, je n’ai aucune maladie physique ou mentale, je n’ai aucune propension à la violence, je ne suis impliqué dans aucune activité criminelle ».

 

La décision faisant l’objet du présent contrôle

[11]           Le 19 décembre 2011, la commissaire a rejeté le grief au dernier palier du demandeur. Elle a conclu que la décision de rejeter la demande de transfèrement du demandeur, demande qui avait été déposée avant la tenue de l’évaluation contestée (à un moment où son ERNS avait été cotée à 18,5, soit le 2 février 2011), n’était pas touchée par l’évaluation contestée et n’était donc pas visée par le grief qui lui avait été soumis.

 

[12]           La commissaire a fait remarquer que la question du rejet du transfèrement sollicité faisait l’objet d’un grief parallèle, qui, à ce moment-là, se situait au troisième palier. Elle a conseillé au demandeur de soulever dans le cadre de ce grief-là la question de ses cotes d’« adaptation à l’établissement » et de « risque d’évasion ».

 

[13]           En ce qui concerne la cote attribuée aux questions nos 7 et 8 de l’évaluation contestée, la commissaire a déclaré que la question des progrès accomplis par rapport au plan correctionnel vise à évaluer les progrès que réalise un délinquant par rapport à des programmes conçus pour traiter des risques contributifs et de l’évolution de la réduction des risques, tandis que l’aspect « motivation » permet d’évaluer la mesure dans laquelle le délinquant participe à des programmes et à d’autres mesures d’intervention. La commissaire a conclu que les résultats obtenus par le demandeur sur le plan des progrès accomplis et de la motivation avaient été déterminés d’une manière conforme aux Spécifications fonctionnelles appropriées, en tenant compte des facteurs suivants :

         la propension du demandeur à minimiser la gravité de ses infractions en en rejetant la faute sur d’autres et en n’assumant pas la responsabilité de sa propre conduite et de ses propres choix;

         le fait que le demandeur ne se rendait pas compte des conséquences de ses activités de trafic de drogue pour la collectivité;

         le peu de responsabilité, de remords et d’empathie du demandeur;

         le fait que le demandeur n’avait pas de programmes officiels d’inscrits, conformément à son plan correctionnel daté du 24 mars 2011.

 

[14]           La commissaire a donc conclu qu’aucune autre mesure n’était requise à l’égard de la décision de transfèrement défavorable, et le grief au troisième palier a été rejeté.

 

Les dispositions législatives et réglementaires applicables

[15]           Les articles 24, 28 et 30 de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, LC 1992, c 20 [la LSCMLC] sont les suivants :

 (1) Le Service est tenu de veiller, dans la mesure du possible, à ce que les renseignements qu’il utilise concernant les délinquants soient à jour, exacts et complets.

 

(2) Le délinquant qui croit que les renseignements auxquels il a eu accès en vertu du paragraphe 23(2) sont erronés ou incomplets peut demander que le Service en effectue la correction; lorsque la demande est refusée, le Service doit faire mention des corrections qui ont été demandées mais non effectuées.

 Le Service doit s’assurer, dans la mesure du possible, que le pénitencier dans lequel est incarcéré le détenu constitue un milieu où seules existent les restrictions nécessaires, compte tenu des éléments suivants :

 

 

 

a) le degré de garde et de surveillance nécessaire à la sécurité du public, à celle du pénitencier, des personnes qui s’y trouvent et du détenu;

 

 

 

 

 

 

 

 

b) la facilité d’accès à la collectivité à laquelle il appartient, à sa famille et à un milieu culturel et linguistique compatible;

 

 

 

 

 

 

c) l’existence de programmes et services qui lui conviennent et sa volonté d’y participer.

 (1) Le Service assigne une cote de sécurité selon les catégories dites maximale, moyenne et minimale à chaque détenu conformément aux règlements d’application de l’alinéa 96z.6).

 

(2) Le Service doit donner, par écrit, à chaque détenu les motifs à l’appui de l’assignation d’une cote de sécurité ou du changement de celle-ci.

 (1) The Service shall take all reasonable steps to ensure that any information about an offender that it uses is as accurate, up to date and complete as possible.

 

 

(2) Where an offender who has been given access to information by the Service pursuant to subsection 23(2) believes that there is an error or omission therein,

 

(a) the offender may request the Service to correct that information; and

 

(b) where the request is refused, the Service shall attach to the information a notation indicating that the offender has requested a correction and setting out the correction requested.

 

 

 If a person is or is to be confined in a penitentiary, the Service shall take all reasonable steps to ensure that the penitentiary in which they are confined is one that provides them with an environment that contains only the necessary restrictions, taking into account

 

(a) the degree and kind of custody and control necessary for

 

(i) the safety of the public,

 

(ii) the safety of that person and other persons in the penitentiary, and

 

(iii) the security of the penitentiary;

 

(b) accessibility to

 

(i) the person’s home community and family,

 

(ii) a compatible cultural environment, and

 

(iii) a compatible linguistic environment; and

 

(c) the availability of appropriate programs and services and the person’s willingness to participate in those programs.

 

 (1) The Service shall assign a security classification of maximum, medium or minimum to each inmate in accordance with the regulations made under paragraph 96(z.6).

 

(2) The Service shall give each inmate reasons, in writing, for assigning a particular security classification or for changing that classification.

 

 

 

[16]           Les articles 17 et 18 du Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, DORS/92-620 [le RSCMLC] clarifient davantage la façon de déterminer et de classer les cotes de sécurité des détenus :

 Le Service détermine la cote de sécurité à assigner à chaque détenu conformément à l'article 30 de la Loi en tenant compte des facteurs suivants :

 

 

a) la gravité de l'infraction commise par le détenu;

 

 

b) toute accusation en instance contre lui;

 

c) son rendement et sa conduite pendant qu'il purge sa peine;

 

d) ses antécédents sociaux et criminels, y compris ses antécédents comme jeune contrevenant s’ils sont disponibles et le fait qu’il a été déclaré délinquant dangereux en application du Code criminel;

 

e) toute maladie physique ou mentale ou tout trouble mental dont il souffre;

 

f) sa propension à la violence;

 

 

g) son implication continue dans des activités criminelles.

 Pour l'application de l'article 30 de la Loi, le détenu reçoit, selon le cas :

 

a) la cote de sécurité maximale, si l'évaluation du Service montre que le détenu :

 

(i) soit présente un risque élevé d'évasion et, en cas d'évasion, constituerait une grande menace pour la sécurité du public,

 

(ii) soit exige un degré élevé de surveillance et de contrôle à l'intérieur du pénitencier;

 

b) la cote de sécurité moyenne, si l'évaluation du Service montre que le détenu :

 

(i) soit présente un risque d'évasion de faible à moyen et, en cas d'évasion, constituerait une menace moyenne pour la sécurité du public,

 

(ii) soit exige un degré moyen de surveillance et de contrôle à l'intérieur du pénitencier;

 

 

c) la cote de sécurité minimale, si l'évaluation du Service montre que le détenu :

 

(i) soit présente un faible risque d'évasion et, en cas d'évasion, constituerait une faible menace pour la sécurité du public,

 

(ii) soit exige un faible degré de surveillance et de contrôle à l'intérieur du pénitencier.

 The Service shall take the following factors into consideration in determining the security classification to be assigned to an inmate pursuant to section 30 of the Act :

 

(a) the seriousness of the offence committed by the inmate;

 

(b) any outstanding charges against the inmate;

 

(c) the inmate's performance and behaviour while under sentence;

 

(d) the inmate’s social, criminal and, if available, young-offender history and any dangerous offender designation under the Criminal Code;

 

 

 

(e) any physical or mental illness or disorder suffered by the inmate;

 

(f) the inmate's potential for violent behaviour; and

 

(g) the inmate's continued involvement in criminal activities.

 

 For the purposes of section 30 of the Act, an inmate shall be classified as

 

(a) maximum security where the inmate is assessed by the Service as

 

(i) presenting a high probability of escape and a high risk to the safety of the public in the event of escape, or

 

(ii) requiring a high degree of supervision and control within the penitentiary;


(b) medium security where the inmate is assessed by the Service as

 

(i) presenting a low to moderate probability of escape and a moderate risk to the safety of the public in the event of escape, or

 

(ii) requiring a moderate degree of supervision and control within the penitentiary; and

 

(c) minimum security where the inmate is assessed by the Service as

 

(i) presenting a low probability of escape and a low risk to the safety of the public in the event of escape, and

 

 

(ii) requiring a low degree of supervision and control within the penitentiary.

 

 

La question en litige et la norme de contrôle applicable

[17]           La seule question que soulèvent les parties en l’espèce consiste à savoir si la décision d’attribuer au demandeur la cote de détenu à sécurité moyenne – et plus précisément celle de rejeter le grief que ce dernier a déposé contre l’évaluation contestée – est raisonnable.

 

[18]           J’ai conclu que les questions qui suivent ressortent des arguments du demandeur :

1)      La décision de la commissaire est-elle étayée par des renseignements « à jour, exacts et complets », comme l’exige l’article 24 de la LSCMLC?

2)      La décision de la commissaire est-elle étayée par des preuves et des motifs qui traitent de la réfutation du demandeur à l’égard des allégations portées contre lui?

 

[19]           Les deux parties font valoir – et j’y souscris – que la norme de contrôle à appliquer en l’espèce est la décision raisonnable.

 

[20]           Les contestations relatives aux décisions que rend le SCC à propos des cotes de sécurité pour les besoins d’un transfèrement mettent en cause des questions mixtes de fait et de droit. Pour ce qui est de la première question que soulève le demandeur, dans la décision Tehrankari c Canada (Service correctionnel), [2000] ACF no 495 [Tehrankari I] la Cour a conclu que la norme de la décision raisonnable porte « soit sur l’application des principes juridiques appropriés aux faits soit sur le bien-fondé de la décision de refus de corriger les renseignements dans le dossier du délinquant. »

 

[21]           Pour ce qui est de la seconde question, il est établi de manière satisfaisante dans la jurisprudence que la norme de contrôle concernant le bien-fondé d’une décision que rend le SCC à la suite du grief d’un délinquant est la décision raisonnable (Crawshaw c Canada (Procureur général), 2010 CF 1110, au paragraphe 39; Tehrankari c Canada (Procureur général), 2011 CF 628, au paragraphe 24; Tehrankari c Canada (Procureur général), 2012 CF 332, au paragraphe 22 [Tehrankari II]). Dans l’arrêt Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c Terre-Neuve-et-Labrador (Conseil du Trésor.), 2011 CSC 62, la Cour suprême du Canada a conclu que des motifs inadéquats touchent à l’essence même de la « raisonnabilité » d’une décision. Pour appliquer la norme de la décision raisonnable, la présente Cour est donc tenue de trouver un fondement pour la décision où elle le peut dans le dossier.

 

[22]           Un contrôle fait en fonction de la norme de la décision raisonnable « tient principalement à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » : Dunsmuir c New Brunswick, 2008 CSC 9, au paragraphe 47 [Dunsmuir].

 

Analyse

            Les observations du demandeur

[23]           Le demandeur conteste essentiellement la cote de détenu à sécurité moyenne qui lui a été attribuée, ce qui était, en partie, l’objet de son grief. Il allègue que l’on s’est fondé à cette fin sur  des renseignements erronés que la commissaire a omis d’examiner au moment de rejeter son grief. Même si ces deux arguments sont étroitement liés, le demandeur soutient également que la commissaire n’a pas répondu de façon substantielle à sa réfutation concernant les renseignements qui ont eu une incidence défavorable sur la cote qui lui a été attribuée à la suite de l’ERNS.

 

[24]           Le demandeur est d’avis que la réponse donnée au troisième palier ne constituait pas une réponse substantielle au grief qu’il avait déposé à l’encontre des cotes d’« adaptation à l’établissement » et de « risque d’évasion » et qu’elle faisait abstraction des explications détaillées qu’il avait données à cet égard. Il a demandé au SCC d’examiner de plus près les allégations de possession d’alcool de fabrication artisanale, notant qu’il n’a jamais été accusé à l’égard de la première allégation, ni reconnu coupable à l’égard de la seconde. Cependant, il est d’avis que le SCC n’a pas fait un autre examen pour déterminer si ces allégations étaient « à jour, exactes et complètes » ou si elles s’appuyaient sur des renseignements objectifs et fiables. Dans le même ordre d’idées, le demandeur affirme qu’il n’existe aucun renseignement objectif ou fiable qui indique qu’il a été impliqué dans l’incident dans le cadre duquel sa fille s’était vu refuser l’entrée dans l’établissement parce qu’un chien renifleur de drogue avait signalé la présence de drogue dans son véhicule. Selon le dossier, le propriétaire du véhicule accompagnait la fille du demandeur quand celle-ci s’était présentée à l’établissement.

 

[25]           De façon plus générale, le demandeur est d’avis que la commissaire se devait de répondre à ses arguments concernant l’exactitude des renseignements qui avaient eu une incidence défavorable sur le résultat de son ERNS, ce qui inclut les allégations d’abus de confiance. Le demandeur a indiqué dans sa réfutation que les renseignements dont disposait le défendeur au sujet de son manquement à des ententes de confiance étaient inexacts et que la commissaire aurait dû traiter de l’argument qu’il avait invoqué à ce sujet.

 

[26]           Le demandeur soutient par ailleurs qu’en concluant qu’il tendait à minimiser la gravité de ses infractions et à ne pas assumer la responsabilité de ses actes, la commissaire a refusé de traiter de la réfutation qu’il avait formulée dans ses observations écrites du 22 août 2011, où il disait le contraire. Dans le même ordre d’idées, il allègue que la commissaire n’a pas répondu de façon substantielle à son allégation concernant le déroulement de son plan correctionnel, et qu’elle a simplement réitéré l’opinion de l’agent de libération conditionnelle. Il réitère qu’il a suivi son plan correctionnel et que le défendeur n’a aucun programme officiel d’inscrit en rapport avec la gestion actuelle de sa peine.

 

La décision de la commissaire est-elle étayée par des renseignements « à jour, exacts et complets », comme l’exige l’article 24 de la LSCMLC?

 

 

[27]           Le demandeur soutient que le SCC n’a pas respecté les exigences de l’article 28 de la LSCMLC, qui dispose qu’il doit s’assurer, dans la mesure du possible, que le pénitencier dans lequel est incarcéré le détenu constitue un milieu où seules existent les restrictions nécessaires, compte tenu de certains facteurs.

 

[28]           Plus précisément, il se fonde sur la décision Tehrankari I, précitée, aux paragraphes 40 à 42, dans laquelle le juge Lemieux de la Cour fédérale conclut que l’article 24 de la LSCMLC s’inscrit dans le cadre d’un « faisceau de droits » dont dispose le délinquant et qui comporte « une obligation légale imposée au Service », visant à garantir que « les “banques de données” auxquelles renvoient divers rapports établis au sujet des délinquants doivent contenir les meilleurs renseignements possible : des renseignements exacts et complets et des données qui ne sont pas encombrées de stéréotypes passés ou d’histoires anciennes au sujet du délinquant ».

 

[29]           Aux paragraphes 50 à 52 de la décision Tehrankari I, la Cour définit comme suit la portée de l’obligation qu’impose au SCC l’article 24 de la LSCMLC :

L’article 24 de la Loi comporte deux éléments distincts. En premier lieu, l’obligation légale, prévue au paragraphe (1), de veiller à ce que les renseignements que le Service utilise concernant les délinquants soient à jour, exacts et complets, dans la mesure du possible. En second lieu, les dispositions du paragraphe (2), traitant le cas du délinquant qui croit que certains renseignements contiennent une erreur ou une omission et dont la demande de correction est refusée.

 

L’objet du paragraphe 24(1) paraît clair. Le Parlement a dit clairement que l’utilisation de renseignements erronés et déficients est contraire aux bons principes d’administration pénitentiaire, d’incarcération et de réhabilitation. L’avocat du défendeur a mis l’accent sur la limitation que comporte le paragraphe – il doit s’agir de renseignements que le Service utilise. Si les renseignements sont simplement dans le dossier sans être utilisés, ils sont sans conséquence selon son argumentation. Cette proposition trouve un appui dans une décision récente prononcée par ma collègue, le juge Reed, dans l’affaire Wright c. Canada (Procureur général), [1999] F.C.J. 1304. Je note, toutefois, qu’elle examinait non l’article 24, mais l’article 26, traitant de la communication aux victimes. Il ne s’agit pas en l’espèce d’une affaire d’accès et il n’y a aucun doute que le Service utilise les renseignements dont se plaint le demandeur; le commissaire l’a reconnu dans les motifs de sa décision sur le grief de troisième niveau, lorsqu’il a dit : « les renseignements contenus dans les rapports de sécurité préventive sont quand même pertinents en vue de la prise de décisions administratives... »

 

Le paragraphe 24(2) soulève des questions différentes, parce que ce ne sont pas n’importe quels renseignements concernant un délinquant qui peuvent faire l’objet de correction de la manière prévue dans ce paragraphe. Le paragraphe 24(2) ne vise que les renseignements auxquels le délinquant a eu accès en vertu du paragraphe 23(2), lequel renvoie à son tour aux renseignements obtenus par le Service en vertu du paragraphe 23(1). La structure des articles 23 et 24 de la Loi définit le type de renseignements visés par la correction. Il s’agit de renseignements sur le profil que le Service peut utiliser pour prédire le comportement probable d’un délinquant. Le commissaire a reconnu que ces renseignements de type ADN se trouvaient au fondement de la décision du Service lorsqu’il « a choisi d’augmenter votre niveau de sécurité sur la base d’un certain nombre de facteurs, notamment vos antécédents d’infractions avec violence, votre évasion antérieure et une évaluation de renseignements vous identifiant comme un risque d’évasion ».

[Non souligné dans l’original.]

 

 

[30]           Il est incontesté que la question soulevée en l’espèce tombe sous le coup du paragraphe 24(1) de la LSCMLC. Je ne suis pas disposée à souscrire à l’argument du défendeur selon lequel la décision rendue au troisième palier de la procédure de règlement des griefs, laquelle fait l’objet du présent contrôle judiciaire, ne tire qu’une seule conclusion à propos des questions nos 7 et 8 de l’évaluation contestée et que le calcul du résultat que le demandeur a obtenu au chapitre de l’ERNS est conforme à la politique applicable. Le défendeur estime que d’autres facteurs qui ont amené à classer le demandeur comme un délinquant à sécurité moyenne, soit les allégations relatives à l’alcool de fabrication artisanale et l’allégation concernant les antécédents du demandeur de manquement à ses ententes de confiance, sont donc sans rapport avec le grief examiné. Premièrement, comme je l’explique plus loin, la commissaire a commis une erreur en décidant qu’il ne fallait trancher ces questions que dans le cadre du grief parallèle concernant la décision de rejeter le transfèrement sollicité du demandeur. Deuxièmement, même si les arguments du demandeur qui se rapportent aux allégations susmentionnées n’ont été examinés qu’au deuxième palier de la procédure de règlement des griefs, la décision qu’a prise la commissaire de ne pas prendre ces arguments en considération est, à mon sens, une conclusion qui tombe sous le coup du présent contrôle judiciaire.

 

[31]           Pour ce qui est du signalement fait par le chien détecteur de drogue en rapport avec le véhicule dans lequel se trouvaient les personnes venues rendre visite au demandeur, le défendeur soutient que cet incident a eu un effet restreint sur le résultat de l’ERNS et la cote de sécurité moyenne qui ont été attribués au demandeur. Il allègue par ailleurs que le demandeur n’a fourni aucune preuve pour réfuter les faits liés à cet incident et qu’il n’a formulé aucune contestation ou aucun grief quand ce dernier est survenu.

 

[32]           Le défendeur invoque la décision Scarcella c Canada (Procureur général), 2009 CF 1272, aux paragraphes 22 et 23 [Scarcella], dans laquelle la juge Snider conclut que, même si le paragraphe 24(1) oblige le SCC à veiller à ce que les renseignements que ses agents utilisent pour prendre une décision au sujet d’un délinquant soient à jour, exacts et complets, [traduction] « ce n’est pas la perfection que l’on exige; le Service doit plutôt veiller, “dans la mesure du possible”, à s’acquitter de cette obligation » et, lorsque le SCC a dûment déposé des renseignements, le demandeur est tenu de produire d’autres éléments de preuve démontrant que ces renseignements sont erronés.

 

[33]           Je ne suis pas d’accord avec le défendeur à ce sujet. Premièrement, il ressort du dossier que les cotes d’« adaptation à l’établissement » et de « risque d’évasion » ont bel et bien eu une incidence sur la cote de détenu à sécurité moyenne attribuée au demandeur, une cote qui constituait un élément essentiel du grief de ce dernier, selon la lecture que j’ai faite de ses observations datées du 22 août 2011. Le sommaire relatif au deuxième palier de la procédure de règlement des griefs, établi le 28 juillet 2011, indique que [traduction] « la cote d’adaptation à l’établissement moyenne de M. Nagy requiert à elle seule une cote de sécurité moyenne, ainsi qu’il est indiqué dans la Directive du commissaire no 710‑6, Réévaluation de la cote de sécurité des détenus, annexe A ». Il est indiqué aussi dans la recommandation, en rapport avec les incidents liés au chien renifleur de drogue et à l’alcool de fabrication artisanale, que [traduction] « en conséquence directe des renseignements documentés qui précèdent, il a été décidé que M. Nagy a besoin d’une surveillance régulière et souvent directe, que seule une prison à sécurité moyenne peut offrir ».

 

[34]           Deuxièmement, la décision Scarcella n’étaye pas la thèse voulant qu’il incombe au demandeur de produire des preuves pour établir que des renseignements que le SCC a déposés sont erronés, s’il conclut que c’est le cas. Cela n’est valable que si les renseignements étaient exacts et complets au départ. Par exemple, dans la décision Scarcella, précitée, au paragraphe 23, la Cour conclut que le demandeur était tenu de produire [traduction] « des éléments de preuve additionnels pour démontrer que, même s’il a pu avoir été associé à une organisation criminelle, ce n’était plus le cas ». Cependant, dans la présente affaire, le demandeur s’est élevé contre l’allégation dès qu’elle a été formulée contre lui, notamment dans le NDD établi le 16 mai 2011. Toutefois, le dossier qui m’a été soumis n’indique pas clairement si les décideurs du SCC ont pris des mesures raisonnables pour s’assurer qu’ils ne se fondaient pas sur des renseignements erronés et fautifs, même si le demandeur réfutait les faits de manière constante.

 

[35]           Quant aux allégations relatives à l’alcool de fabrication artisanale, le demandeur a soutenu qu’il n’a jamais été accusé au sujet de la première allégation, ni déclaré coupable en rapport avec la seconde. Il a également expliqué les circonstances entourant ces incidents dans le cadre de son grief et a mis en doute l’exactitude des allégations.

 

[36]           Je conviens avec le défendeur que le SCC est en droit de recueillir et de tenir des renseignements sur les allégations qui sont formulées contre des détenus et de les consigner dans le cadre de leur dossier institutionnel même si l’information est « entièrement fallacieuse » (Brown c Canada (Procureur général), 2006 CF 463, aux paragraphes 29 à 31), du moins jusqu’au « moment où ces renseignements deviendront périmés et peu utiles ou pertinents pour la prise de décisions en matière de cote de sécurité » (Byard c Canada (Procureur général), 2009 CF 652, au paragraphe 10). Cependant, contrairement à ce que le défendeur allègue, le demandeur ne prétend pas que le SCC n’aurait pas dû consigner cet incident dans son dossier. Il conteste plutôt le fait que l’on se soit servi de ces renseignements pour le classer comme un détenu à sécurité moyenne, à la suite de quoi on a refusé – et il s’expose au risque qu’on refuse de nouveau – son transfèrement à un établissement à sécurité inférieure.

 

[37]           Même s’il était conclu que les renseignements qui ont été utilisés au détriment du demandeur sont « à jour, exacts et complets », ce qui n’est pas évident au vu du dossier, je conviens avec le demandeur que la commissaire a commis une erreur en omettant de traiter de la totalité des questions qu’il avait soulevées en vue de justifier convenablement la raison pour laquelle elle rejetait le grief qu’il avait déposé contre sa cote de sécurité moyenne.

 

La décision de la commissaire est-elle étayée par des preuves et des motifs qui traitent de la réfutation du demandeur à l’égard des allégations portées contre lui?

 

[38]           Le défendeur n’a pas traité de la question des motifs invoqués à l’appui de la décision de la commissaire. De l’avis du demandeur, le grief faisant l’objet du contrôle se limitait aux allégations non examinées dans le cadre du grief parallèle que le demandeur a déposé à l’encontre de la décision de rejeter sa demande de transfert sollicité.

 

[39]           Cependant, comme je l’ai dit plus tôt, la commissaire a commis une erreur en refusant de répondre aux allégations du demandeur à l’égard de ses cotes d’« adaptation à l’établissement » et de « risque d’évasion ». Même si l’évaluation contestée n’a pas modifié ces cotes de façon substantielle, la question faisait quand même partie du grief du demandeur, comme ce dernier l’indique clairement dans ses observations du 22 août 2011. De plus, même si ces questions ont également trait au grief relatif à la décision de rejeter la demande de transfèrement sollicité du demandeur, les cotes d’« adaptation à l’établissement » et de « risque d’évasion » ont bel et bien eu une incidence sur la cote de détenu à sécurité moyenne qui a été attribuée au demandeur, et il était nécessaire de les examiner.

 

[40]           Le demandeur se fonde essentiellement sur l’arrêt Dunsmuir, précité, ainsi que sur l’arrêt Barreau du Nouveau-Brunswick c Ryan, 2003 CSC 20, aux paragraphes 51 à 55 [Ryan], pour faire valoir que la Cour se doit d’examiner si des motifs quelconques étayent la décision faisant l’objet du contrôle. Si ces motifs sont insuffisants, cette lacune se répercute sur le processus logique par lequel des conclusions sont tirées, à l’instar d’une présomption qui n’a aucun fondement dans la preuve. Dans l’arrêt Ryan, précité, au paragraphe 55, la Cour déclare :

La décision n’est déraisonnable que si aucun mode d’analyse, dans les motifs avancés, ne pouvait raisonnablement amener le tribunal, au vu de la preuve, à conclure comme il l’a fait. Si l’un quelconque des motifs pouvant étayer la décision est capable de résister à un examen assez poussé, alors la décision n’est pas déraisonnable et la cour de révision ne doit pas intervenir (Southam, par. 56). Cela signifie qu’une décision peut satisfaire à la norme du raisonnable si elle est fondée sur une explication défendable, même si elle n’est pas convaincante aux yeux de la cour de révision (voir Southam, par. 79).

[Non souligné dans l’original.]

 

 

[41]           De plus, l’arrêt Dunsmuir, précité, au paragraphe 47, oblige la Cour à se demander « si la décision et sa justification possèdent les attributs de la raisonnabilité. »

 

[42]           Je conviens que les décisions de la commissaire au sujet de la motivation et des progrès du demandeur par rapport à son plan correctionnel, ainsi qu’au sujet de l’absence de programmes officiels actuels, peuvent être justifiées par le plan correctionnel du demandeur, mais je conclus que l’évaluation contestée manque de justification, de transparence et d’intelligibilité. La commissaire se devait de traiter des arguments invoqués par le demandeur contre les allégations de manquement à des ententes de confiance, de possession d’alcool de fabrication artisanale et de présumée implication avec les visiteurs qui s’étaient vu refuser l’entrée dans l’établissement où il était incarcéré à cause d’un signalement fait par un chien renifleur de drogue en rapport avec leur véhicule. En ce qui concerne le dernier incident, si le défendeur a raison de dire que le dossier reflète simplement les faits exacts, il faudrait aussi qu’il dénote qu’aucune preuve ne liait le demandeur à l’incident et que les visiteurs avaient offert que l’on fouille au complet leur véhicule. C’est dans ce cas-là que les renseignements auraient été complets. La commissaire n’a pas traité de la réfutation du demandeur à l’égard de ces allégations, même si le fait que les questions d’adaptation à l’établissement et de risque d’évasion faisaient partie du grief du demandeur à l’encontre de son NDD actuel et qu’elles avaient été examinées au deuxième palier de la procédure de règlement des griefs.

 

[43]           Cette lacune suffit pour infirmer la décision de la commissaire et renvoyer l’affaire au SCC en vue d’une nouvelle décision. Cela étant, je suis d’avis de faire droit à la présente demande de contrôle judiciaire, avec dépens en faveur du demandeur.

 


JUGEMENT

LA COUR ORDONNE :

1.                  la présente demande de contrôle judiciaire est accueillie;

2.                  la décision datée du 19 décembre 2011 de la sous-commissaire principale est annulée et l’affaire renvoyée au Service correctionnel du Canada pour nouvelle décision;

3.                  Le tout avec dépens en faveur du demandeur.

 

« Jocelyne Gagné »

Juge

 

Traduction certifiée conforme

Claude Leclerc, LL.B.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        T-357-12

 

INTITULÉ :                                      ANGELO NAGY c LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

LIEU DE L'AUDIENCE :              OTTAWA (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :             LE 17 DÉCEMBRE 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT :           LA JUGE GAGNÉ

 

DATE DES MOTIFS :                     LE 7 FÉVRIER 2013

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Brian A. Callender

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Max Binnie

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Avocat

Kingston (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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