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Date : 20130131

Dossier: T-2090-10

Référence : 2013 CF 109

Ottawa (Ontario), le 31 janvier 2013

En présence de monsieur le juge Boivin

 

ENTRE :

 

DORIS TREMBLAY

 

 

 

Demandeur/

défendeur reconventionnel

 

et

 

 

 

ORIO CANADA INC.

 

 

 

Défenderesse/

demanderesse reconventionnelle

 

 

 

 

 

     MOTIFS DE JUGEMENT ET JUGEMENT

 

Introduction

[1]               La Cour est saisie d’une requête pour procès sommaire en vertu des articles 213 à 219 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106 [les Règles]. Le demandeur et défendeur reconventionnel allègue être titulaire des droits d’auteur dans un programme d’ordinateur qui s’intitule « SAM », et soutient que la défenderesse et demanderesse reconventionnelle a violé ses droits d’auteur en permettant qu’on en fasse une copie, qu’on le modifie, et en l’installant, le vendant, et le distribuant auprès de ses clients, le tout en violation de la Loi sur le droit d’auteur, LRC 1985, c C-42 [la Loi].

 

[2]               Le demandeur et défendeur reconventionnel recherche une déclaration suivant laquelle :    (i) il est titulaire des droits d’auteur dans les développements et améliorations du logiciel SAM effectués entre avril 2006 et juin 2009 (le logiciel « SAM modifié »); (ii) la défenderesse a violé ses droits d’auteur en permettant et en autorisant à un tiers de faire une copie du code source du logiciel SAM modifié, lequel a par la suite été modifié par ce tiers (le logiciel « SAM modifié retravaillé »); et (iii) la défenderesse a violé ses droits d’auteur en possédant, en offrant en vente et en installant le logiciel SAM modifié chez ses clients depuis août 2009. La requête du demandeur et défendeur reconventionnel vise également l’obtention d’une ordonnance de cette Cour enjoignant la défenderesse et demanderesse reconventionnelle à supprimer et à détruire ses copies du logiciel SAM modifié retravaillé et à cesser de l’offrir en vente et de l’installer.

 

[3]               La défenderesse et demanderesse reconventionnelle, quant à elle, estime qu’elle est titulaire des droits d’auteur dans le logiciel SAM modifié. Se portant demanderesse reconventionnelle, elle requiert un jugement sommaire en sa faveur et une ordonnance rejetant la demande du demandeur, déclarant qu’elle est titulaire des droits d’auteur dans le logiciel SAM modifié et ses modules, et ordonnant au demandeur et défendeur reconventionnel dans les cinq (5) jours de la signification du jugement de lui remettre le logiciel SAM modifié et ses modules complémentaires. Subsidiairement, la défenderesse et demanderesse reconventionnelle recherche une ordonnance déclarant qu’elle jouit d’une licence d’exploitation du logiciel SAM modifié et de ses modules, l’autorisant à les commercialiser et à les reproduire gratuitement pendant une période illimitée.

Contexte factuel

[4]               De façon générale, les faits dans le présent dossier sont admis par les parties. M. Doris Tremblay est le demandeur et défendeur reconventionnel dans la présente requête (le demandeur). Il est consultant en informatique et fait affaire sous le nom de Service Informatique Professionnel, une entreprise non incorporée de consultation en informatique. Orio Canada inc. (Orio) est la défenderesse et demanderesse reconventionnelle (la défenderesse) dans le présent dossier. La défenderesse est une société commerciale qui a pour activité principale la commercialisation d’un logiciel de gestion de rendez-vous dans le domaine de la mécanique automobile, soit le logiciel SAM (Service Appointment Monitor). M. François Gagné est le président de la société défenderesse (Affidavit de François Gagné, Réponse à l’avis de requête, onglet 2). En avril 2006, la défenderesse a conclu une entente verbale avec le demandeur pour que ce dernier effectue du travail sur le logiciel SAM (Dossier de requête pour procès sommaire, Pièce MAD-2 de l’affidavit de Marie-Anick Décarie, Interrogatoire de François Gagné, p 153).

 

[5]               Une première version préliminaire du logiciel SAM avait été développée en 2002-2003 par le frère de M. François Gagné, président de la société défenderesse. M. François Gagné estime toutefois être le concepteur et créateur du logiciel SAM, ayant conçu les caractéristiques essentielles initiales au développement du logiciel (Affidavit de François Gagné, paragraphe 3). Une deuxième version du logiciel SAM a été développée par la société tierce Openpole au cours des années 2005-2006, à la demande de la défenderesse (Dossier de requête pour procès sommaire, Pièce MAD-2 de l’affidavit de Marie-Anick Décarie, Interrogatoire de François Gagné, p 151).

 

[6]               En avril 2006, la défenderesse a voulu poursuivre le développement du logiciel SAM avec un autre programmeur, d’où la naissance de la relation d’affaires entre le demandeur et la défenderesse suivant une entente verbale pour lesdits services. À cette fin, la société tierce Openpole a remis les codes sources du logiciel SAM à l’employée du demandeur, Julie Gaudreault (Dossier de requête pour procès sommaire, Pièce MAD-2 de l’affidavit de Marie-Anick Décarie, Interrogatoire de François Gagné, p 154).

 

[7]               Le demandeur et ses employés, plus particulièrement Mme Julie Gaudreault, ont fourni des services informatiques à la défenderesse en travaillant sur le logiciel SAM d’avril 2006 à juin 2009 (Dossier de requête pour procès sommaire, Pièce MAD-2 de l’affidavit de Marie-Anick Décarie, Interrogatoire de François Gagné, pp 154-55). La nouvelle version du code source tel que programmée par le demandeur et ses employés, « SAM modifié », est presque deux fois plus volumineuse que la version initiale de SAM, passant de 412 fichiers, 224 dossiers et 1 273 pages à 669 fichiers, 286 dossiers et 2 453 pages (Dossier de requête pour procès sommaire, Affidavit de Doris Tremblay, p 21). Le demandeur y a également ajouté des modules complémentaires, à la demande de M. François Gagné (« Afficheur », « Email », « Essence », « Estimateur », « Feuille de route », « Matériel d’atelier » et « Outil d’estimation »; Réponse à l’avis de requête pour procès sommaire, Affidavit de Julie Gaudreault, onglet 12).

 

[8]               Le demandeur facturait la défenderesse pour le travail de programmation effectué sur le logiciel SAM et recevait une rémunération à un taux horaire. En tout, le demandeur a reçu plus de 73 000 $ pour son travail d’avril 2006 à juin 2009 (Défense amendée et demande reconventionnelle, paragraphe 22).

[9]               La relation d’affaires entre le demandeur et la défenderesse a pris fin en juin 2009. À ce moment, le code source complet du logiciel SAM modifié se trouvait sur le serveur de la défenderesse à Blainville (Dossier de requête pour procès sommaire, Pièce MAD-2 de l’affidavit de Marie-Anick Décarie, Interrogatoire de François Gagné, p 168). À partir de juillet 2009, la défenderesse a poursuivi le développement du logiciel SAM modifié avec une autre société, Groupe Énode (Énode). La défenderesse a remis une copie du code source du logiciel SAM modifié à Énode en lui donnant accès au serveur de Blainville (Dossier de requête pour procès sommaire, Pièce MAD-2 de l’affidavit de Marie-Anick Décarie, Interrogatoire de François Gagné, pp 169 et 171). Cette société aurait poursuivi le développement à partir du logiciel SAM modifié, créant ainsi le « logiciel SAM modifié retravaillé ». Le demandeur affirme ne pas avoir autorisé la défenderesse à faire une copie du code source du logiciel SAM modifié (Dossier de requête pour procès sommaire, Affidavit de Doris Tremblay, p 22).

 

[10]           Depuis le mois d’août 2009 et jusqu’à ce jour, la défenderesse vend et installe des copies du logiciel SAM modifié retravaillé chez ses clients. Ce logiciel contient une partie substantielle du code source développé par le demandeur et ses employés (Dossier de requête pour procès sommaire, Admission de la défenderesse, p 145 ; Pièce MAD-3 de l’affidavit de Marie-Anick Décarie, Interrogatoire de François Gagné du 26 mars 2012, pp 204-05). Le demandeur a été mis en demeure par la défenderesse le 21 juillet 2009, le sommant de remettre les codes source du logiciel SAM modifié (Défense amendée et demande reconventionnelle, paragraphe 35). La défenderesse a également été mise en demeure le 18 décembre 2009 et le 10 juin 2010, le demandeur la sommant de cesser ses activités en lien avec le logiciel SAM.

 

[11]           Une ordonnance, en date du 7 décembre 2011, du protonotaire Morneau a été émise dans le dossier, permettant au demandeur d’amender sa déclaration pour inclure le fait que la défenderesse ait permis à Énode de faire une copie du logiciel SAM modifié, fait qui fut découvert lors de l’interrogatoire préalable du président de la défenderesse. La Cour a également ordonné que les parties s’entendent sur un projet d’ordonnance de protection afin que certains documents soient produits sous le sceau de la confidentialité (soit les factures de la société défenderesse à ses clients de mai 2006 à novembre 2011) (Tremblay c Orio Canada Inc, 2011 CF 1437, [2011] ACF no 1793 (QL)).

 

Questions en litige

[12]           La présente affaire soulève trois (3) questions en litige :

a.       Qui est titulaire des droits d’auteur dans le logiciel SAM modifié ?

b.      Les droits d’auteur dans le logiciel SAM modifié ont-ils été cédés ?

c.       Y a-t-il eu violation des droits d’auteur dans le logiciel SAM modifié ?

 

Dispositions législatives pertinentes

[13]           Les dispositions de la Loi qui sont pertinentes à ce litige, ainsi que les Règles pertinentes portant sur les jugements et procès sommaires, sont reproduites en annexe au présent jugement.

 

Arguments des parties

Arguments du demandeur

[14]           Le demandeur allègue qu’il a développé une version intégrale du code source qui a été copiée, utilisée et installée par la défenderesse sans son autorisation. Le demandeur soutient que puisqu’il est le titulaire des droits d’auteurs, il y a clairement eu violation de ses droits au sens des articles 3 et 27 de la Loi. Le demandeur rappelle que la défenderesse ne nie pas l’existence des droits d’auteur – elle prétend plutôt en être la titulaire. Le demandeur précise que l’alinéa 34.1(1)b) de la Loi énonce ainsi une présomption de propriété en sa faveur.

 

[15]           Le demandeur précise également que ses employés ont fait le travail de développement sur le logiciel SAM original pour en arriver au logiciel SAM modifié, qu’ils sont donc les auteurs du programme et présumés être titulaires du droit d’auteur jusqu’à preuve du contraire. En vertu du paragraphe 13(3) de la Loi, le demandeur lui-même, à titre d’employeur, est le titulaire du droit d’auteur sur le travail réalisé par ses employés. Le demandeur prétend qu’il n’a jamais cédé ses droits d’auteur dans le logiciel SAM modifié puisque, suivant le paragraphe 13(4) de la Loi, seule une cession écrite et signée par le demandeur en faveur de la défenderesse aurait pu avoir cet effet. Le demandeur soutient que la condition voulant que la cession se fasse par écrit et soit signée est une condition de fond (citant JL De Ball Canada Inc c 421254 Ontario Ltd (1999), 179 FTR 231,   5 CPR (4e) 352).

 

[16]           Le demandeur souligne que le président de la défenderesse n’est pas programmeur et ne possède pas les connaissances nécessaires pour mettre sous forme de code les idées qu’il aurait pu avoir. Selon le demandeur, seuls ses employés, des programmeurs, peuvent être les auteurs du logiciel SAM modifié et les instructions du président de la défenderesse, M. François Gagné, n’étaient que des demandes par lesquelles il exprimait le résultat qu’il désirait obtenir (Dossier de requête pour procès sommaire, Pièce MAD-2 de l’affidavit de Marie-Anick Décarie, p 155; Cahier des autorités pour la requête, voir Normand Tamaro, Loi sur le droit d’auteur, 8e éd, Scarborough, Carswell, 2009 aux pp 359-74, onglet 10 [Tamaro]; Cahier des autorités pour la requête, John McKeown, Fox on Canadian Law of Copyright and Industrial Design, 4e éd, Toronto, Carswell, pp 17-2 à 17-7;, onglet 9 [Fox]).

 

[17]           Le demandeur prétend aussi que la jurisprudence confirme clairement que l’auteur d’un programme d’ordinateur est le programmeur, et non la personne qui a eu l’idée du logiciel (citant Hanis v Teevan (1998), 81 CPR (3e) 496, 162 DLR (43) 414 (CAO) au para 49 [Hanis] et Matrox Electronic Systems Ltd v Gaudreau, [1993] RJQ 2449 (QL) (CSQ) aux para 27-30 [Matrox]).

 

[18]           En ce qui concerne la question des actes de violation des droits d’auteurs, le demandeur allègue deux types de violation, soit : i) le fait d’avoir permis et autorisé une copie du code source par une tierce société, Énode; et ii) le fait de détenir, vendre et installer le logiciel SAM développé à partir de la copie effectuée par Énode.

 

Arguments de la défenderesse

[19]           Selon la défenderesse, il s’agit d’une affaire simple qui ne nécessite pas de longs arguments juridiques. En effet, son argumentaire écrit tient sur une (1) page.

 

[20]           La défenderesse prétend qu’elle est la seule détentrice de tous les droits liés au logiciel SAM, qu’il était déjà fonctionnel en avril 2006 et installé chez plusieurs concessionnaires, et que le demandeur était au courant qu’elle utilisait le logiciel SAM à seule fin de commercialisation. La défenderesse affirme que dès le début des relations entre elle et le demandeur, ce dernier lui a cédé à l’avance tous les droits relatifs aux futurs développements du logiciel SAM.

[21]           Selon la défenderesse, l’entente verbale d’avril 2006 entre elle et le demandeur a été formalisée par écrit dans diverses soumissions. La défenderesse allègue qu’en rédigeant ses soumissions, le demandeur savait que la défenderesse utilisait le logiciel SAM à des fins commerciales, et non personnelles (Réponse à l’avis de requête et demande reconventionnelle, Pièce BS-1 de l’affidavit de Brigitte Sauvageau, Interrogatoire de Doris Tremblay, onglet 4, p 11). La défenderesse prétend que la clause écrite dans les soumissions constitue une cession de tous droits auxquels aurait pu prétendre le demandeur.

 

[22]           La défenderesse rappelle que le demandeur connaissait plusieurs de ses clients, ayant lui-même effectué des opérations de correction directement sur les serveurs de ces derniers. Selon la défenderesse, les droits d’auteurs sur le logiciel SAM modifié et ses modules lui appartiennent en totalité.

 

[23]           Subsidiairement, la défenderesse avance que le demandeur lui a accordé une licence ou un droit de commercialisation du logiciel SAM et de ses modules. La défenderesse rappelle que d’avril 2006 à juin 2009, pendant leur relation d’affaires, le demandeur n’a jamais exigé de royauté (redevances), ni indiqué à la défenderesse qu’il en exigerait à l’avenir.

 

Analyse

A.         La requête pour procès sommaire

[24]           Les dispositions prévoyant la tenue de procès sommaires ont été ajoutées aux Règles en 2009. La Cour a énoncé certains principes généraux concernant les procès sommaires dans les arrêts Teva Canada Ltd c Wyeth LLC, 2011 CF 1169 aux para 28 à 36, 99 CPR (4e) 398, inf pour d’autres motifs par 2012 CAF 141, 431 NR 342 [Teva] et Wenzel Downhole Tools Ltd v National-Oilwell Canada Ltd, 2010 CF 966 aux paras 33 à 39, 373 FTR 306 [Wenzel Downhole]. Le fardeau de démontrer que le procès sommaire est un recours approprié incombe au demandeur (Teva, précité au para 35). Afin de décider si un dossier se prête à un procès sommaire, un juge peut considérer, entre autres, la complexité d’une affaire, sa nature urgente, les coûts d’aller de l’avant avec un procès régulier par rapport aux montants en jeu (Inspiration Management Ltd v McDermid St. Lawrence Ltd (BCCA) (1989), [1989] BCJ No 1003, 36 BCLR (2d) 202), ainsi que la question de savoir si le litige est prolongé, si le procès sommaire prendrait du temps, si la crédibilité est un enjeu, si le procès sommaire comporte un risque important de gaspillage d’efforts et d’énergie ou si le procès sommaire aurait pour effet de morceler le litige (Wenzel Downhole, précité au para 37, citant Dahl v Royal Bank, 2005 BCSC 1263 au para 12, 46 BCLR (4th) 342).

 

[25]           Les faits qui sous-tendent la présente affaire n’étant pas contestés, la crédibilité des parties n’est pas en cause et la preuve documentaire présentée par les parties, tels les affidavits et autres documents produits dans le cours normal des affaires, est suffisante pour permettre à la Cour d’en venir à une conclusion (Teva, précité au para 32).

 

[26]           En début d’audience devant cette Cour, les parties ont notamment confirmé leur souhait et leur volonté de procéder par voie de requête pour procès sommaire. Le demandeur avance, et la Cour est en accord, que les faits sont clairs et que le litige entre les parties est circonscrit et relève strictement des effets juridiques découlant de ces faits. Selon le demandeur, la Cour peut rendre jugement sur les faits présentés en preuve devant elle à cette étape. Le demandeur estime qu’un procès sommaire permettrait un jugement sur le fond rapide et à moindre coût, ce qui est important pour les parties qui ont des ressources modestes. De plus, la Cour note que la présente affaire est circonscrite dans le temps (2006 à 2009) et limité au logiciel en cause (SAM modifié). En l’espèce, la Cour est d’avis que les circonstances de la présente affaire se prêtent à une requête pour procès sommaire conformément aux Règles 213 à 219.

 

B.         La question de la propriété des droits d’auteur dans le logiciel SAM modifié

[27]           Tout d’abord, la Cour rappelle que le droit applicable au droit d’auteur est statutaire; conséquemment, les droits et recours se trouvent dans la Loi (CCH Canadienne Ltée c Barreau du Haut-Canada, 2004 CSC 13 au para 9, [2004] 1 RCS 339 [CCH]). Bien qu’on puisse enregistrer un droit d’auteur, cela n’est pas nécessaire au Canada : il suffit que l’auteur soit Canadien, ou citoyen de tout autre pays signataire de la Convention pour la protection des œuvres littéraires et artistiques, conclue à Berne le 9 septembre 1886, et que l’œuvre soit d’abord publiée dans un tel pays, si la publication est pertinente.

 

[28]           L’article 3 de la Loi énonce le contenu du droit d’auteur, et inclut, entre autres, le droit exclusif de produire ou reproduire l’œuvre en question. L’article 5 de la Loi indique quelles sont les œuvres pouvant faire l’objet d’un droit d’auteur, et précise qu’il doit s’agir d’une « œuvre littéraire, dramatique, musicale ou artistique originale ». Bien que la Loi ne définisse pas le terme « originale », la Cour suprême du Canada s’est penchée sur la question dans l’arrêt CCH, précité. Suite à une constatation de l’état contradictoire de la jurisprudence, la Cour suprême du Canada a conclu qu’une œuvre « originale » émane d’un auteur, n’est pas une copie d’une autre œuvre, et est « le produit de l’exercice du talent et du jugement d’un auteur. Cet exercice ne doit pas être négligeable au point qu’on puisse le qualifier d’entreprise purement mécanique. » (CCH, précité au para 25).

 

[29]           La jurisprudence précise également que le droit d’auteur « protège l’expression des idées dans ces œuvres, et non les idées comme telles » (CCH, précité au para 8). Une œuvre doit donc être fixée sous une forme matérielle pour être protégée, comme l’indique par exemple la définition de    « programme d’ordinateur ». La définition d’œuvre littéraire à l’article 2 de la Loi inclut expressément les programmes d’ordinateur, et un programme d’ordinateur est défini comme étant un « [e]nsemble d’instructions ou d’énoncés destiné, quelle que soit la façon dont ils sont exprimés, fixés, incorporés ou emmagasinés, à être utilisé directement ou indirectement dans un ordinateur en vue d’un résultat particulier ». Dans le cas présent, il est clair et non contesté par les parties qu’il existe des droits d’auteurs dans le logiciel SAM modifié. La question qui se pose est de définir qui en est le ou la titulaire.

 

[30]           L’alinéa 34.1(1)b) de la Loi énonce une présomption suivant laquelle, dans toute procédure où un défendeur conteste l’existence du droit d’auteur ou la qualité du demandeur, l’auteur de l’œuvre est présumé être titulaire de ce droit d’auteur jusqu’à preuve contraire. De plus, l’article 13 de la Loi énonce les éléments pertinents à la possession du droit d’auteur. En vertu du paragraphe 13(1), l’auteur de l’œuvre est le premier titulaire du droit d’auteur. Cependant, en vertu du paragraphe 13(3), si « l’auteur est employé par une autre personne en vertu d’un contrat de louage de service ou d’apprentissage, et que l’œuvre est exécutée dans l’exercice de cet emploi, l’employeur est, à moins de stipulation contraire, le premier titulaire du droit d’auteur ». Le paragraphe 13(4) stipule qu’un titulaire du droit d’auteur peut le céder ou en concéder un intérêt quelconque par une licence, mais il doit le faire au moyen d’un document écrit et signé.

 

[31]           La Loi ne définit pas le terme « auteur ». Tel qu’indiqué dans Fox, précité à la page 17-2, [TRADUCTION] « Le droit d’auteur ne s’attache pas à l’idée, mais bien à la forme sous laquelle l’idée est exprimée, qu’il s’agisse d’un écrit ou d’une image. L’auteur est celui qui donne forme à l’idée. » (La Cour souligne.)

 

[32]           La question à examiner est donc celle de cerner qui a exercé son talent et son jugement pour donner une forme d’expression à l’idée, pour la fixer sous une forme matérielle (CCH, précité aux para 8 et 25; Fox, précité à la p 17-7). Dans Tamaro, précité à la page 364, l’auteur indique qu’il « n’est pas suffisant d’agir à titre de secrétaire; il faut participer effectivement à la création de l’œuvre et non à sa seule expression sous la dictée de quelqu’un d’autre. ». L’auteur ajoute ce qui suit en lien avec les cas particuliers de programmeurs recevant des instructions, à la page 372 :

Il faut toutefois bien comprendre qu’au sens strict, un concept correspond à une idée. C’est ainsi qu’en rapport avec un logiciel de télécommunication, la Cour déclare que n’est pas auteur au sens du droit d’auteur celui qui fournit sous forme de notes des idées et un concept général à des programmeurs. Les auteurs sont plutôt les programmeurs qui expriment ces idées et ce concept en langage informatique. Conformément aux principes reconnus par le droit d’auteur, les auteurs sont ceux qui, grâce à leurs habiletés, donnent corps à une œuvre : Hanis c Teevan.

 

[Citations omises; la Cour souligne.]

 

[33]           En l’espèce, tel que mentionné précédemment, l’existence en soi d’un droit d’auteur dans le logiciel SAM n’est pas contestée. De plus, rien dans la preuve n’indique de façon significative que les modifications faites au logiciel SAM par le demandeur étaient négligeables, non originales, ou purement mécaniques, contrairement au cas de Harmony Consulting Ltd c GA Foss Transport Ltd, 2011 CF 340, 386 FTR 171, conf par 2012 CAF 226, 435 NR 200, où un expert avait témoigné comme quoi les modifications effectuées par le programmeur étaient excessivement simples et n’étaient donc pas protégées par le droit d’auteur.

 

[34]           En ce qui a trait au logiciel SAM modifié, compte tenu de la jurisprudence suivant laquelle l’auteur est celui qui a donné corps a une œuvre et non celui qui en a eu l’idée sans la concrétiser, force est de conclure que c’est le demandeur, par le biais de ses employés, qui soit l’auteur dans la présente affaire. En effet, M. Gagné, président de la société défenderesse, a admis sans détour qu’il n’est pas programmeur et n’aurait pu effectuer ce travail lui-même (Dossier de requête pour procès sommaire, Pièce MAD-2 de l’affidavit de Marie-Anick Décarie, Interrogatoire de François Gagné, pp 152, 153, 155, 159 et 160). Aucun affidavit n’a été déposé de la part de la défenderesse détaillant la nature exacte des instructions données au demandeur. De surcroît, la défenderesse n’a pas présenté d’arguments précis sur la question de la titularité des droits d’auteur. Son argumentaire tant à l’écrit qu’à l’oral a ciblé l’unique question de la cession des droits ou la concession d’une licence. Ainsi, au regard de la jurisprudence et de la preuve au dossier, la conclusion voulant que le demandeur (par l’entremise du travail de ses employés) soit l’auteur du logiciel SAM modifié s’impose.

 

C.        Y a-t-il eu cession des droits d’auteur ?

[35]           Compte tenu de la conclusion précédente selon laquelle le demandeur est titulaire des droits d’auteur dans le logiciel SAM modifié par son travail de programmation, la question qui se pose, et qui se retrouve au cœur du présent litige, est de savoir s’il y a eu cession des droits d’auteur en l’espèce. À cet égard, la Cour doit se pencher sur la clause que le demandeur a inclus dans ses soumissions à la défenderesse (dont un exemple daté du 12 avril 2007 a été déposé en preuve, pièce BS-2 de l’affidavit de Brigitte Sauvageau, Réponse à l’avis de requête pour procès sommaire, onglet 5, p 3): La clause se lit comme suit :

Tout le développement fait pour Orio Canada inc. deviendra la propriété exclusive de celui-ci et ne pourra donc pas être commercialisé ou réutilisé par Service Informatique Professionnel ou tout autre intervenant.

 

[36]           Plus précisément, la question soulevée est celle de savoir si cette clause, insérée par le demandeur dans ses soumissions, constitue une cession de ses droits d’auteur au profit de la défenderesse en vertu de l’alinéa 13(4) de la Loi.

 

[37]           Le paragraphe 13(4) de la Loi se lit comme suit :

Cession et licences

 

13. (4) Le titulaire du droit d’auteur sur une œuvre peut céder ce droit, en totalité ou en partie, d’une façon générale ou avec des restrictions relatives au territoire, au support matériel, au secteur du marché ou à la portée de la cession, pour la durée complète ou partielle de la protection; il peut également concéder, par une licence, un intérêt quelconque dans ce droit; mais la cession ou la concession n’est valable que si elle est rédigée par écrit et signée par le titulaire du droit qui en fait l’objet, ou par son agent dûment autorisé.

Assignments and licences

 

13. (4) The owner of the copyright in any work may assign the right, either wholly or partially, and either generally or subject to limitations relating to territory, medium or sector of the market or other limitations relating to the scope of the assignment, and either for the whole term of the copyright or for any other part thereof, and may grant any interest in the right by licence, but no assignment or grant is valid unless it is in writing signed by the owner of the right in respect of which the assignment or grant is made, or by the owner’s duly authorized agent.

 

[La Cour souligne.]

 

[38]           L’exigence de l’écrit et de la signature imposée à ce paragraphe est demeurée inchangée depuis son adoption en 1921 et sa mise en vigueur en 1924 (LC 1921, c 24; LC 1923, c 10, art 5). Le but visé par ce paragraphe fut discuté notamment dans l’arrêt Mensys Business Solution Centre Ltd c Drummond (Municipalité régionale de comté), [2002] RJQ 765, [2002] JQ no 169 (QL) [Mensys], où le juge Mercure a énoncé ce qui suit :

29  La jurisprudence et la doctrine retiennent les principes suivants en ce qui a trait à l’exigence de l’écrit comme condition essentielle à la cession du droit d’auteur :

 

- l’absence de tout écrit est fatale en ce qu’elle empêche la personne qui se prétend cessionnaire de faire la preuve de la cession. Une cession verbale n’est pas valide ;

 

- l’exigence d’un écrit est une condition de fond et non une simple règle de preuve ou de procédure ;

 

- l’écrit n’a pas à prévoir explicitement la cession. Il suffit qu’il soit signé par l’auteur et que l’on puisse raisonnablement inférer la cession du droit d’auteur du texte de l’écrit ;

 

- une preuve testimoniale peut être admise pour permettre au Tribunal d’interpréter l’écrit et de décider s’il emporte cession du droit d’auteur ;

 

- l’écrit peut être rédigé et signé postérieurement à la cession du droit d’auteur.

 

[…]

 

38  Le but visé par l’exigence d’un écrit signé prévue à l’article 13 (4) est de protéger le premier titulaire du droit d’auteur mais certes pas les tiers en leur permettant d’échapper plus facilement à des poursuites pour violation des droits d’auteur.

 

[Citations omises ; La Cour souligne.]

 

[39]           L’exigence de l’écrit et de la signature est une condition de fond, et non une simple question de preuve, tel qu’indiqué dans l’arrêt Motel 6, Inc c No 6 Motel Limited et John Van Edmond Beachcroft Hawthorne, [1982] 1 CF 638 au paragraphe 26 [Motel 6]:

26  J’admets avec l’avocat de la demanderesse que l’article [13(4)] est une condition de fond et non une règle de preuve. Par conséquent, l’acte de cession lui-même n’a pas nécessairement à être produit si la preuve établit son existence et sa conformité avec cet article. Toutefois, la preuve est loin d’établir par prépondérance l’existence d’une cession écrite, encore moins d’une cession signée par […], ou d’établir qui a bien pu être le cessionnaire. Elle a simplement établi la possibilité des trois conclusions tout aussi logiques les unes que les autres que j’ai mentionnées. La preuve qui donne lieu simplement à ce type de suppositions sans pencher pour l’existence réelle d’une cession conforme à la loi ne satisfait pas aux exigences de l’article [13(4)].

 

[40]           Le demandeur s’appuie également sur l’affaire Amusements Wiltron inc c Mainville (1991), [1991] JQ no 2574, 40 CPR (3e) 521 [Wiltron], où le juge Macerola de la Cour supérieure du Québec a indiqué ce qui suit aux paragraphes 37 à 39 :

37  Wiltron ne peut prétendre détenir des droits d’auteur sur ce jeu de poker puisqu’aucune cession de droit d’auteur n’a été faite par écrit.

 

38  La compagnie détenait donc un droit précaire dans ce jeu, assimilable à une licence ne conférant pas d’intérêt dans le droit d’auteur et elle doit vivre avec les conséquences que cela comporte.

 

39  Wiltron aurait dû, en dépit de la relation amicale entre M. Halwacks et M. Kraml, faire signer un engagement de confidentialité avec clause de non concurrence et une cession de droits d’auteur. […]

 

[41]           En somme, le paragraphe 13(4) de la Loi qui régit les cessions de droits d’auteur et les concessions de licences ne requiert nullement comme condition de validité que celles-ci soient rédigées en des termes particuliers; il énonce plutôt une condition conjonctive, à savoir un écrit et une signature.

 

[42]           Lors de son interrogatoire au sujet de la clause en cause, le demandeur a clairement reconnu avoir inclus cette clause dans différents mandats « pour l’exclusivité, pour protéger contre la compétition ». Il a confirmé que son intention était qu’elle s’applique à l’ensemble des mandats reçus de la société défenderesse (Orio) (Pièce BS-1 de l’affidavit de Brigitte Sauvageau, Interrogatoire de M. Doris Tremblay, onglet 4, p 14). Bien que le demandeur ait plaidé que ce libellé de la clause en question s’apparente à une clause de non-concurrence plutôt qu’à une clause de cession des droits d’auteur, l’argument du demandeur n’a pas convaincu cette Cour.

 

[43]           La Cour rappelle d’abord que la clause en cause se situe sous la rubrique « Propriété » et indique que le développement fait pour Orio (la défenderesse) « deviendra la propriété exclusive » d’Orio (la défenderesse) et ne pourra être « commercialisé ou réutilisé par Service Informatiques Professionnels ou tout autre intervenant ». Le demandeur en interrogatoire a d’ailleurs admis qu’il concédait un droit de commercialisation à la défenderesse (Pièce BS-1 de l’affidavit de Brigitte Sauvageau, Interrogatoire de M. Doris Tremblay, onglet 4, p 16).

 

[44]           La Cour est d’avis que le libellé de cette clause équivaut à une cession de droits d’auteur du demandeur au profit de la défenderesse. En effet, un droit d’auteur étant un droit de propriété (art 3 de la Loi), l’emploi des termes « propriété » et « propriété exclusive » ne peut que faire référence aux droits d’auteur. Qui plus est, cette propriété « exclusive » au profit d’Orio, la défenderesse, fait écho à la nature exclusive du droit d’auteur tel que défini à l’article 3 de la Loi. Dans le même sens, la clause en cause mentionne que la « propriété » visée ne peut être commercialisée par l’entreprise du demandeur, Service Informatique Professionnel. En somme, il y a en l’espèce un écrit qui démontre une intention de la part du demandeur de céder ses droits à la société défenderesse. Toutefois, cet écrit n’est pas signé tel que l’exige le paragraphe 13(4) de la Loi.  

 

[45]           Or, le droit d’auteur est un droit statutaire et tel qu’expliqué précédemment, le paragraphe 13(4) exige non seulement un écrit, mais également une signature pour que la cession des droits d’auteur puisse opérer. 

 

[46]           Lors de l’audience devant cette Cour, l’avocat du demandeur a souligné l’absence de signature du demandeur sur la soumission. La défenderesse, quant à elle, a insisté sur le fait que lors de son interrogatoire, le demandeur a admis avoir pris l’initiative d’inclure la clause en cause à l’ensemble de ses soumissions faites à la défenderesse, lui concédant ainsi le droit de commercialiser le logiciel :

Q         Vous y êtes, propriété :

« Tout développement fait [pour] Orio Canada inc. deviendra la propriété exclusive de celui-ci et ne pourra donc pas être commercialisé ou réutilisé par Services Informatiques Professionnels ou tout autre intervenant. »

C’est vous qui avez pris l’initiative de mettre cette clause-là ?

R         Oui.

Q         Pourquoi ?

R         Parce que c’est une annotation utilisée pour différents mandats déjà, pour l’exclusivité, pour protéger contre la compétition .

Q         Est-ce que ça s’appliquait à l’ensemble des mandats que vous avez eus de Orio Canada ?

R         Oui, les soumissions qui sont établies là, oui, sûrement .

[…]

Q         Est-ce que ça voulait dire que vous ne lui concédiez pas le droit de le commercialiser ?

R         Non .

Q         Non. Ça comprenait le droit de le commercialiser, on s’entend là-dessus ?

R         Oui .

 

(Pièce BS-1 de l’affidavit de Brigitte Sauvageau, onglet 4, pp 14 et 16)

 

[47]           Selon la défenderesse, cette admission a valeur de signature (Notes sténographiques de l’audience du 8 janvier 2013, aux pp 128-29). S’il est vrai que l’admission du demandeur traduit une intention, il est difficile pour cette Cour à la lecture du libellé du paragraphe 13(4) de la Loi de conclure que cette intention du demandeur, aussi claire semble-t-elle, puisse servir à contourner la condition conjonctive de l’écrit et de la signature imposée par la Loi. En effet, le législateur ne fait pas référence au concept d’intention au paragraphe 13(4) de la Loi mais exige expressément un écrit et une signature afin que la cession des droits d’auteur soit cristallisée. La jurisprudence a confirmé à maintes reprises que cette condition en est une de fond et demeure une condition de validité de la cession (Motel 6; Mensys, précités).

 

[48]           En l’espèce, la Cour ne peut que constater l’absence de signature. Bien que les parties aient confirmé devant cette Cour que le demandeur a fait parvenir d’autres soumissions à la défenderesse comportant la même clause, la preuve ne permet pas à cette Cour de conclure que les soumissions postérieures au mois d’avril 2007 comporteraient une signature. Qui plus est, la défenderesse n’a soumis aucune preuve supplémentaire devant cette Cour qui pourrait avoir valeur de signature (Milliken & Co c Interface Flooring Systems (Canada) Inc, [1998] 3 CF 103, 143 FTR 106).

 

[49]           N’eût été de l’absence de signature du demandeur, il y aurait eu cession des droits d’auteur au sens de la Loi, mais dans les circonstances, la Cour ne peut que conclure qu’en vertu du paragraphe 13(4) de la Loi, le demandeur n’a pas cédé ses droits d’auteur dans le logiciel SAM modifié. En arriver à la conclusion contraire uniquement sur la base du témoignage du demandeur, comme l’a plaidé la défenderesse, aurait pour conséquence de faire fi de l’exigence imposée par le législateur. La conclusion peut paraître rigide, mais elle est conforme aux exigences formalistes de la Loi. Il n’était pas suffisant pour le représentant de la société défenderesse (M. François Gagné) d’éviter de traiter explicitement de la question des droits d’auteur avec le demandeur au motif que, « dans [sa] tête à [lui], c’était très clair » (Dossier de requête pour procès sommaire, Pièce MAD-2 de l’affidavit de Marie-Anick Décarie, Interrogatoire de François Gagné, p 162 (p 50, ligne 4 de l’interrogatoire)).  

 

[50]           La défenderesse a également soumis à titre d’argument additionnel qu’elle a payé les honoraires au demandeur et que ce dernier n’a jamais réclamé de redevances. Pourtant, ce n’est pas parce que la défenderesse a payé le demandeur pour son travail que la défenderesse en détient les droits d’auteur et ce n’est pas parce que le demandeur n’a pas réclamé de redevances qu’il n’en détient pas.  

 

[51]           Cela étant, et bien que la preuve au dossier ne permette pas à cette Cour de conclure que le demandeur ait cédé ses droits d’auteur en vertu des conditions exigées par le paragraphe 13(4) de la Loi, la Cour est néanmoins d’avis, sur la base du dossier et de la preuve, que le demandeur a octroyé une licence d’utilisation implicite à la défenderesse dans le logiciel SAM modifié. Cette conclusion s’impose par déduction nécessaire pour les raisons qui suivent.

 

[52]           Tout d’abord, la Cour constate que la présente affaire comporte un facteur crucial et déterminant : le demandeur est l’auteur du libellé de la clause en cause et cette dernière a été inscrite dans les soumissions à l’initiative du demandeur et non de la défenderesse. Ensuite, la preuve démontre que le demandeur a inclus cette clause de façon répétée dans toutes ses soumissions avec la défenderesse et qu’il a l’habitude de fonctionner de la sorte. Le demandeur a confirmé ces faits dans son interrogatoire en précisant que l’objectif de cette clause était de permettre à la défenderesse de faire la commercialisation du logiciel SAM modifié. La preuve démontre également que le demandeur savait que le logiciel SAM modifié serait installé chez des concessionnaires automobiles. Le demandeur s’est d’ailleurs rendu en personne chez les concessionnaires à quelques reprises. La Cour rappelle aussi qu’il n’est pas contesté que le demandeur a reçu rémunération pour son travail (Céjibé Communication Inc c Construction Cleary (1992) Inc., [1998] AQ no 3520).

 

[53]           Ainsi, à la lumière de la preuve, la Cour en arrive à la conclusion que le demandeur a implicitement consenti à une licence au profit de la défenderesse afin que cette dernière puisse utiliser le logiciel SAM modifié. La jurisprudence a reconnu qu’une licence implicite peut s’inférer du comportement des parties et n’a pas à être consignée par écrit (Silverson v Neon Products Ltd (1978), 39 CPR (2d) 234 (BCSC); Cselko Associates Inc v Zellers Inc (1992), 44 CPR (3d) 56 (Ont Ct Gen Div)). La Cour est d’avis que c’est le cas en l’espèce.

 

[54]           La Cour abordera donc brièvement la question de la violation du droit d’auteur alléguée par la demanderesse. 

 

D.        Violation du droit d’auteur

[55]           Pour qu’il y ait violation en vertu de l’article 27, la Loi exige qu’un geste ou acte soit posé sans le consentement du titulaire des droits d’auteur en cause.

 

 

 

[56]           L’article 27 de la Loi se lit comme suit :

PARTIE III

 

VIOLATION DU DROIT D’AUTEUR ET DES DROITS MORAUX, ET CAS D’EXCEPTION

 

Violation du droit d’auteur

 

Règle générale

 

Règle générale

 

27. (1) Constitue une violation du droit d’auteur l’accomplissement, sans le consentement du titulaire de ce droit, d’un acte qu’en vertu de la présente loi seul ce titulaire a la faculté d’accomplir.

 

Violation à une étape ultérieure

 

(2) Constitue une violation du droit d’auteur l’accomplissement de tout acte ci-après en ce qui a trait à l’exemplaire d’une œuvre, d’une fixation d’une prestation, d’un enregistrement sonore ou d’une fixation d’un signal de communication alors que la personne qui accomplit l’acte sait ou devrait savoir que la production de l’exemplaire constitue une violation de ce droit, ou en constituerait une si l’exemplaire avait été produit au Canada par la personne qui l’a produit :

 

a) la vente ou la location;

 

b) la mise en circulation de façon à porter préjudice au titulaire du droit d’auteur;

 

c) la mise en circulation, la mise ou l’offre en vente ou en location, ou l’exposition en public, dans un but commercial;

 

d) la possession en vue de l’un ou l’autre des actes visés aux alinéas a) à c);

 

e) l’importation au Canada en vue de l’un ou l’autre des actes visés aux alinéas a) à c).

 

[…]

 

 

PART III

 

INFRINGEMENT OF COPYRIGHT AND MORAL RIGHTS AND EXCEPTIONS TO INFRINGEMENT

 

Infringement of Copyright

 

General

 

Infringement generally

 

27. (1) It is an infringement of copyright for any person to do, without the consent of the owner of the copyright, anything that by this Act only the owner of the copyright has the right to do.

 

Secondary infringement

 

(2) It is an infringement of copyright for any person to

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

(a) sell or rent out,

 

(b) distribute to such an extent as to affect prejudicially the owner of the copyright,

 

(c) by way of trade distribute, expose or offer for sale or rental, or exhibit in public,

 

 

(d) possess for the purpose of doing anything referred to in paragraphs (a) to (c), or

 

(e) import into Canada for the purpose of doing anything referred to in paragraphs (a) to (c),

 

a copy of a work, sound recording or fixation of a performer’s performance or of a communication signal that the person knows or should have known infringes copyright or would infringe copyright if it had been made in Canada by the person who made it.

 

 

 

[La Cour souligne.]

 

[57]           Tel qu’indiqué précédemment, la preuve au dossier démontre que le demandeur a implicitement consenti à ce que la défenderesse utilise le logiciel SAM modifié et lui a accordé une licence d’utilisation. Il s’ensuit que la prétention du demandeur comme quoi ses droits d’auteur ont été violés en vertu de l’article 27 de la Loi pour cause d’absence de consentement de sa part ne peut donc être retenue car il y a eu consentement de la part du demandeur.

 

 


 

JUGEMENT

 

LA COUR STATUE que :

1)                  Le demandeur est le titulaire des droits d’auteur dans le logiciel SAM modifié ;

 

2)                  Le demandeur n’a pas cédé ses droits d’auteur à la défenderesse dans le logiciel SAM modifié ;

 

3)                  Le demandeur a accordé une licence implicite d’utilisation à la défenderesse l’autorisant ainsi à utiliser le logiciel SAM modifié ;

 

4)                  Les droits d’auteur du demandeur n’ont pas été violés par la défenderesse ;

 

5)                  Vu le résultat de l’instance, chaque partie assumera ses propres dépens.

 

 

 

« Richard Boivin »

Juge


Annexe

 

Les dispositions pertinentes de la Loi sur le droit d’auteur en l’espèce sont les suivantes:

 

DÉFINITIONS ET DISPOSITIONS INTERPRÉTATIVES

 

Définitions

 

2. Les définitions qui suivent s’appliquent à la présente loi.

 

[…]

 

« œuvre littéraire »

“literary work”

 

« œuvre littéraire » Y sont assimilés les tableaux, les programmes d’ordinateur et les compilations d’œuvres littéraires.

 

[…]

 

« programme d’ordinateur »

“computer program”

 

« programme d’ordinateur » Ensemble d’instructions ou d’énoncés destiné, quelle que soit la façon dont ils sont exprimés, fixés, incorporés ou emmagasinés, à être utilisé directement ou indirectement dans un ordinateur en vue d’un résultat particulier.

 

[…]

 

PARTIE I

 

DROIT D’AUTEUR ET DROITS MORAUX SUR LES ŒUVRES

 

Droit d’auteur

 

Droit d’auteur sur l’œuvre

 

3. (1) Le droit d’auteur sur l’œuvre comporte le droit exclusif de produire ou reproduire la totalité ou une partie importante de l’œuvre, sous une forme matérielle quelconque, d’en exécuter ou d’en représenter la totalité ou une partie importante en public et, si l’œuvre n’est pas publiée, d’en publier la totalité ou une partie importante; ce droit comporte, en outre, le droit exclusif :

 

a) de produire, reproduire, représenter ou publier une traduction de l’œuvre;

 

b) s’il s’agit d’une œuvre dramatique, de la transformer en un roman ou en une autre œuvre non dramatique;

 

c) s’il s’agit d’un roman ou d’une autre œuvre non dramatique, ou d’une œuvre artistique, de transformer cette œuvre en une œuvre dramatique, par voie de représentation publique ou autrement;

 

d) s’il s’agit d’une œuvre littéraire, dramatique ou musicale, d’en faire un enregistrement sonore, film cinématographique ou autre support, à l’aide desquels l’œuvre peut être reproduite, représentée ou exécutée mécaniquement;

 

e) s’il s’agit d’une œuvre littéraire, dramatique, musicale ou artistique, de reproduire, d’adapter et de présenter publiquement l’œuvre en tant qu’œuvre cinématographique;

 

f) de communiquer au public, par télécommunication, une œuvre littéraire, dramatique, musicale ou artistique;

 

 

g) de présenter au public lors d’une exposition, à des fins autres que la vente ou la location, une œuvre artistique — autre qu’une carte géographique ou marine, un plan ou un graphique — créée après le 7 juin 1988;

 

h) de louer un programme d’ordinateur qui peut être reproduit dans le cadre normal de son utilisation, sauf la reproduction effectuée pendant son exécution avec un ordinateur ou autre machine ou appareil;

 

 

i) s’il s’agit d’une œuvre musicale, d’en louer tout enregistrement sonore;

 

 

j) s’il s’agit d’une œuvre sous forme d’un objet tangible, d’effectuer le transfert de propriété, notamment par vente, de l’objet, dans la mesure où la propriété de celui-ci n’a jamais été transférée au Canada ou à l’étranger avec l’autorisation du titulaire du droit d’auteur.

 

Est inclus dans la présente définition le droit exclusif d’autoriser ces actes.

 

[…]

 

Possession du droit d’auteur

 

Possession du droit d’auteur

 

13. (1) Sous réserve des autres dispositions de la présente loi, l’auteur d’une œuvre est le premier titulaire du droit d’auteur sur cette œuvre.

 

(2) [Abrogé, 2012, ch. 20, art. 7]

 

 

Oeuvre exécutée dans l’exercice d’un emploi

 

(3) Lorsque l’auteur est employé par une autre personne en vertu d’un contrat de louage de service ou d’apprentissage, et que l’œuvre est exécutée dans l’exercice de cet emploi, l’employeur est, à moins de stipulation contraire, le premier titulaire du droit d’auteur; mais lorsque l’œuvre est un article ou une autre contribution, à un journal, à une revue ou à un périodique du même genre, l’auteur, en l’absence de convention contraire, est réputé posséder le droit d’interdire la publication de cette œuvre ailleurs que dans un journal, une revue ou un périodique semblable.

 

 

 

 

Cession et licences

 

(4) Le titulaire du droit d’auteur sur une œuvre peut céder ce droit, en totalité ou en partie, d’une façon générale ou avec des restrictions relatives au territoire, au support matériel, au secteur du marché ou à la portée de la cession, pour la durée complète ou partielle de la protection; il peut également concéder, par une licence, un intérêt quelconque dans ce droit; mais la cession ou la concession n’est valable que si elle est rédigée par écrit et signée par le titulaire du droit qui en fait l’objet, ou par son agent dûment autorisé.

 

 

Possession dans le cas de cession partielle

 

(5) Lorsque, en vertu d’une cession partielle du droit d’auteur, le cessionnaire est investi d’un droit quelconque compris dans le droit d’auteur, sont traités comme titulaires du droit d’auteur, pour l’application de la présente loi, le cessionnaire, en ce qui concerne les droits cédés, et le cédant, en ce qui concerne les droits non cédés, les dispositions de la présente loi recevant leur application en conséquence.

 

 

 

 

 

Cession d’un droit de recours

 

(6) Il est entendu que la cession du droit d’action pour violation du droit d’auteur est réputée avoir toujours pu se faire en relation avec la cession du droit d’auteur ou la concession par licence de l’intérêt dans celui-ci.

 

Licence exclusive

 

(7) Il est entendu que la concession d’une licence exclusive sur un droit d’auteur est réputée toujours avoir valu concession par licence d’un intérêt dans ce droit d’auteur.

 

[…]

 

 

PARTIE III

 

VIOLATION DU DROIT D’AUTEUR ET DES DROITS MORAUX, ET CAS D’EXCEPTION

 

Violation du droit d’auteur

 

Règle générale

 

Règle générale

 

27. (1) Constitue une violation du droit d’auteur l’accomplissement, sans le consentement du titulaire de ce droit, d’un acte qu’en vertu de la présente loi seul ce titulaire a la faculté d’accomplir.

 

Violation à une étape ultérieure

 

(2) Constitue une violation du droit d’auteur l’accomplissement de tout acte ci-après en ce qui a trait à l’exemplaire d’une œuvre, d’une fixation d’une prestation, d’un enregistrement sonore ou d’une fixation d’un signal de communication alors que la personne qui accomplit l’acte sait ou devrait savoir que la production de l’exemplaire constitue une violation de ce droit, ou en constituerait une si l’exemplaire avait été produit au Canada par la personne qui l’a produit :

 

a) la vente ou la location;

 

b) la mise en circulation de façon à porter préjudice au titulaire du droit d’auteur;

 

c) la mise en circulation, la mise ou l’offre en vente ou en location, ou l’exposition en public, dans un but commercial;

 

d) la possession en vue de l’un ou l’autre des actes visés aux alinéas a) à c);

 

 

e) l’importation au Canada en vue de l’un ou l’autre des actes visés aux alinéas a) à c).

 

[…]

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PARTIE IV

 

RECOURS

 

Recours civils

 

Violation du droit d’auteur et des droits moraux

 

[…]

 

Présomption de propriété

 

 

34.1 (1) Dans toute procédure civile engagée en vertu de la présente loi où le défendeur conteste l’existence du droit d’auteur ou la qualité du demandeur :

 

a) l’œuvre, la prestation, l’enregistrement sonore ou le signal de communication, selon le cas, est, jusqu’à preuve contraire, présumé être protégé par le droit d’auteur;

 

 

b) l’auteur, l’artiste-interprète, le producteur ou le radiodiffuseur, selon le cas, est, jusqu’à preuve contraire, réputé être titulaire de ce droit d’auteur.

 

Aucun enregistrement

 

(2) Dans toute contestation de cette nature, lorsque aucun acte de cession du droit d’auteur ni aucune licence concédant un intérêt dans le droit d’auteur n’a été enregistré sous l’autorité de la présente loi :

 

a) si un nom paraissant être celui de l’auteur de l’œuvre, de l’artiste-interprète de la prestation, du producteur de l’enregistrement sonore ou du radiodiffuseur du signal de communication y est imprimé ou autrement indiqué, de la manière habituelle, la personne dont le nom est ainsi imprimé ou indiqué est, jusqu’à preuve contraire, présumée être l’auteur, l’artiste-interprète, le producteur ou le radiodiffuseur;

 

 

 

 

 

 

 

 

 

b) si aucun nom n’est imprimé ou indiqué de cette façon, ou si le nom ainsi imprimé ou indiqué n’est pas le véritable nom de l’auteur, de l’artiste-interprète, du producteur ou du radiodiffuseur, selon le cas, ou le nom sous lequel il est généralement connu, et si un nom paraissant être celui de l’éditeur ou du titulaire du droit d’auteur y est imprimé ou autrement indiqué de la manière habituelle, la personne dont le nom est ainsi imprimé ou indiqué est, jusqu’à preuve contraire, présumée être le titulaire du droit d’auteur en question;

 

 

 

 

 

 

 

 

c) si un nom paraissant être celui du producteur d’une œuvre cinématographique y est indiqué de la manière habituelle, cette personne est présumée, jusqu’à preuve contraire, être le producteur de l’œuvre.

 

INTERPRETATION

 

 

Definitions

 

2. In this Act,

 

 

 

“computer program”

« programme d’ordinateur »

 

“computer program” means a set of instructions or statements, expressed, fixed, embodied or stored in any manner, that is to be used directly or indirectly in a computer in order to bring about a specific result;

 

 

“literary work”

« œuvre littéraire »

 

“literary work” includes tables, computer programs, and compilations of literary works;

 

 

PART I

 

COPYRIGHT AND MORAL RIGHTS IN WORKS

 

Copyright

 

Copyright in works

 

3. (1) For the purposes of this Act, “copyright”, in relation to a work, means the sole right to produce or reproduce the work or any substantial part thereof in any material form whatever, to perform the work or any substantial part thereof in public or, if the work is unpublished, to publish the work or any substantial part thereof, and includes the sole right

 

 

(a) to produce, reproduce, perform or publish any translation of the work,

 

(b) in the case of a dramatic work, to convert it into a novel or other non-dramatic work,

 

(c) in the case of a novel or other non-dramatic work, or of an artistic work, to convert it into a dramatic work, by way of performance in public or otherwise,

 

 

(d) in the case of a literary, dramatic or musical work, to make any sound recording, cinematograph film or other contrivance by means of which the work may be mechanically reproduced or performed,

 

(e) in the case of any literary, dramatic, musical or artistic work, to reproduce, adapt and publicly present the work as a cinematographic work,

 

 

(f) in the case of any literary, dramatic, musical or artistic work, to communicate the work to the public by telecommunication,

 

(g) to present at a public exhibition, for a purpose other than sale or hire, an artistic work created after June 7, 1988, other than a map, chart or plan,

 

 

 

(h) in the case of a computer program that can be reproduced in the ordinary course of its use, other than by a reproduction during its execution in conjunction with a machine, device or computer, to rent out the computer program,

 

(i) in the case of a musical work, to rent out a sound recording in which the work is embodied, and

 

(j) in the case of a work that is in the form of a tangible object, to sell or otherwise transfer ownership of the tangible object, as long as that ownership has never previously been transferred in or outside Canada with the authorization of the copyright owner,

 

and to authorize any such acts.

 

 

 

Ownership of Copyright

 

Ownership of copyright

 

13. (1) Subject to this Act, the author of a work shall be the first owner of the copyright therein.

 

 

(2) [Repealed, 2012, c. 20, s. 7]

 

 

Work made in the course of employment

 

 

(3) Where the author of a work was in the employment of some other person under a contract of service or apprenticeship and the work was made in the course of his employment by that person, the person by whom the author was employed shall, in the absence of any agreement to the contrary, be the first owner of the copyright, but where the work is an article or other contribution to a newspaper, magazine or similar periodical, there shall, in the absence of any agreement to the contrary, be deemed to be reserved to the author a right to restrain the publication of the work, otherwise than as part of a newspaper, magazine or similar periodical.

 

Assignments and licences

 

(4) The owner of the copyright in any work may assign the right, either wholly or partially, and either generally or subject to limitations relating to territory, medium or sector of the market or other limitations relating to the scope of the assignment, and either for the whole term of the copyright or for any other part thereof, and may grant any interest in the right by licence, but no assignment or grant is valid unless it is in writing signed by the owner of the right in respect of which the assignment or grant is made, or by the owner’s duly authorized agent.

 

Ownership in case of partial assignment

 

(5) Where, under any partial assignment of copyright, the assignee becomes entitled to any right comprised in copyright, the assignee, with respect to the rights so assigned, and the assignor, with respect to the rights not assigned, shall be treated for the purposes of this Act as the owner of the copyright, and this Act has effect accordingly.

 

 

 

 

 

 

Assignment of right of action

 

(6) For greater certainty, it is deemed always to have been the law that a right of action for infringement of copyright may be assigned in association with the assignment of the copyright or the grant of an interest in the copyright by licence.

 

Exclusive licence

 

(7) For greater certainty, it is deemed always to have been the law that a grant of an exclusive licence in a copyright constitutes the grant of an interest in the copyright by licence.

 

 

PART III

 

INFRINGEMENT OF COPYRIGHT AND MORAL RIGHTS AND EXCEPTIONS TO INFRINGEMENT

 

Infringement of Copyright

 

General

 

Infringement generally

 

27. (1) It is an infringement of copyright for any person to do, without the consent of the owner of the copyright, anything that by this Act only the owner of the copyright has the right to do.

 

Secondary infringement

 

(2) It is an infringement of copyright for any person to

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

(a) sell or rent out,

 

(b) distribute to such an extent as to affect prejudicially the owner of the copyright,

 

(c) by way of trade distribute, expose or offer for sale or rental, or exhibit in public,

 

 

(d) possess for the purpose of doing anything referred to in paragraphs (a) to (c), or

 

(e) import into Canada for the purpose of doing anything referred to in paragraphs (a) to (c),

 

a copy of a work, sound recording or fixation of a performer’s performance or of a communication signal that the person knows or should have known infringes copyright or would infringe copyright if it had been made in Canada by the person who made it.

 

 

PART IV

 

REMEDIES

 

Civil Remedies

 

Infringement of Copyright and Moral Rights

 

 

Presumptions respecting copyright and ownership

 

34.1 (1) In any civil proceedings taken under this Act in which the defendant puts in issue either the existence of the copyright or the title of the plaintiff to it,

 

(a) copyright shall be presumed, unless the contrary is proved, to subsist in the work, performer’s performance, sound recording or communication signal, as the case may be; and

 

(b) the author, performer, maker or broadcaster, as the case may be, shall, unless the contrary is proved, be presumed to be the owner of the copyright.

 

Where no grant registered

 

(2) Where any matter referred to in subsection (1) is at issue and no assignment of the copyright, or licence granting an interest in the copyright, has been registered under this Act,

 

(a) if a name purporting to be that of

 

(i) the author of the work,

 

(ii) the performer of the performer’s performance,

 

(iii) the maker of the sound recording, or

 

(iv) the broadcaster of the communication signal

 

is printed or otherwise indicated thereon in the usual manner, the person whose name is so printed or indicated shall, unless the contrary is proved, be presumed to be the author, performer, maker or broadcaster;

 

 

 

(b) if

(i) no name is so printed or indicated, or if the name so printed or indicated is not the true name of the author, performer, maker or broadcaster or the name by which that person is commonly known, and

 

(ii) a name purporting to be that of the publisher or owner of the work, performer’s performance, sound recording or communication signal is printed or otherwise indicated thereon in the usual manner,

 

the person whose name is printed or indicated as described in subparagraph (ii) shall, unless the contrary is proved, be presumed to be the owner of the copyright in question; and

 

(c) if, on a cinematographic work, a name purporting to be that of the maker of the cinematographic work appears in the usual manner, the person so named shall, unless the contrary is proved, be presumed to be the maker of the cinematographic work.

 


Les dispositions suivantes des Règles des Cours fédérales concernant les jugements sommaires sont pertinentes pour le cas en l’espèce :

 

Jugement et procès sommaires

 

 

Requête et signification

 

Requête d’une partie

 

213. (1) Une partie peut présenter une requête en jugement sommaire ou en procès sommaire à l’égard de toutes ou d’une partie des questions que soulèvent les actes de procédure. Le cas échéant, elle la présente après le dépôt de la défense du défendeur et avant que les heures, date et lieu de l’instruction soient fixés.

 

Nouvelle requête

 

(2) Si une partie présente l’une de ces requêtes en jugement sommaire ou en procès sommaire, elle ne peut présenter de nouveau l’une ou l’autre de ces requêtes à moins d’obtenir l’autorisation de la Cour.

 

Obligations du requérant

 

(3) La requête en jugement sommaire ou en procès sommaire dans une action est présentée par signification et dépôt d’un avis de requête et d’un dossier de requête au moins vingt jours avant la date de l’audition de la requête indiquée dans l’avis.

 

Obligations de l’autre partie

 

(4) La partie qui reçoit signification de la requête signifie et dépose un dossier de réponse au moins dix jours avant la date de l’audition de la requête indiquée dans l’avis de requête.

 

 

Jugement sommaire

 

Faits et éléments de preuve nécessaires

 

214. La réponse à une requête en jugement sommaire ne peut être fondée sur un élément qui pourrait être produit ultérieurement en preuve dans l’instance. Elle doit énoncer les faits précis et produire les éléments de preuve démontrant l’existence d’une véritable question litigieuse.

 

Absence de véritable question litigieuse

 

215. (1) Si, par suite d’une requête en jugement sommaire, la Cour est convaincue qu’il n’existe pas de véritable question litigieuse quant à une déclaration ou à une défense, elle rend un jugement sommaire en conséquence.

 

Somme d’argent ou point de droit

 

 

(2) Si la Cour est convaincue que la seule véritable question litigieuse est :

 

a) la somme à laquelle le requérant a droit, elle peut ordonner l’instruction de cette question ou rendre un jugement sommaire assorti d’un renvoi pour détermination de la somme conformément à la règle 153;

 

b) un point de droit, elle peut statuer sur celui-ci et rendre un jugement sommaire en conséquence.

 

Pouvoirs de la Cour

 

(3) Si la Cour est convaincue qu’il existe une véritable question de fait ou de droit litigieuse à l’égard d’une déclaration ou d’une défense, elle peut :

 

a) néanmoins trancher cette question par voie de procès sommaire et rendre toute ordonnance nécessaire pour le déroulement de ce procès;

 

b) rejeter la requête en tout ou en partie et ordonner que l’action ou toute question litigieuse non tranchée par jugement sommaire soit instruite ou que l’action se poursuive à titre d’instance à gestion spéciale.

 

Procès sommaire

 

Dossier de requête en procès sommaire

 

216. (1) Le dossier de requête en procès sommaire contient la totalité des éléments de preuve sur lesquels une partie compte se fonder, notamment :

 

a) les affidavits;

 

b) les aveux visés à la règle 256;

 

c) les affidavits et les déclarations des témoins experts établis conformément au paragraphe 258(5);

 

d) les éléments de preuve admissibles en vertu des règles 288 et 289.

 

Affidavits ou déclarations supplémentaires

 

(2) Des affidavits ou déclarations supplémentaires ne peuvent être signifiés que si, selon le cas :

 

a) s’agissant du requérant, ces affidavits ou déclarations seraient admissibles en contre-preuve à l’instruction et leurs signification et dépôt sont faits au moins cinq jours avant la date de l’audition de la requête indiquée dans l’avis de requête;

 

 

b) la Cour l’autorise.

 

Déroulement du procès sommaire

 

(3) La Cour peut rendre toute ordonnance nécessaire au déroulement du procès sommaire, notamment pour obliger le déclarant d’un affidavit ou le témoin expert ayant fait une déclaration à se présenter à un contre-interrogatoire devant la Cour.

 

Conclusions défavorables

 

(4) La Cour peut tirer des conclusions défavorables du fait qu’une partie ne procède pas au contre-interrogatoire du déclarant d’un affidavit ou ne dépose pas de preuve contradictoire.

 

 

Rejet de la requête

 

(5) La Cour rejette la requête si, selon le cas :

 

a) les questions soulevées ne se prêtent pas à la tenue d’un procès sommaire;

 

b) un procès sommaire n’est pas susceptible de contribuer efficacement au règlement de l’action.

 

Jugement sur l’ensemble des questions ou sur une question en particulier

 

(6) Si la Cour est convaincue de la suffisance de la preuve pour trancher l’affaire, indépendamment des sommes en cause, de la complexité des questions en litige et de l’existence d’une preuve contradictoire, elle peut rendre un jugement sur l’ensemble des questions ou sur une question en particulier à moins qu’elle ne soit d’avis qu’il serait injuste de trancher les questions en litige dans le cadre de la requête.

 

Ordonnance pour statuer sur l’action

 

(7) Au moment de rendre son jugement, la Cour peut rendre toute ordonnance nécessaire afin de statuer sur l’action, notamment :

 

a) ordonner une instruction portant sur la détermination de la somme à laquelle a droit le requérant ou le renvoi de cette détermination conformément à la règle 153;

 

b) imposer les conditions concernant l’exécution forcée du jugement;

 

c) adjuger les dépens.

 

 

Instruction ou instance à gestion spéciale

 

(8) Si la requête en procès sommaire est rejetée en tout ou en partie, la Cour peut ordonner que l’action ou toute question litigieuse non tranchée par jugement sommaire soit instruite ou que l’action se poursuive à titre d’instance à gestion spéciale.

 

Dispositions générales

 

Droits du demandeur obtenant jugement

 

217. Le demandeur qui obtient un jugement au titre des règles 215 ou 216 peut poursuivre le même défendeur pour une autre réparation ou poursuivre un autre défendeur pour toute réparation.

 

Pouvoirs de la Cour

 

218. Si le jugement visé aux règles 215 ou 216 est refusé ou n’est accordé qu’en partie, la Cour peut, par ordonnance, préciser les faits substantiels qui ne sont pas en litige et déterminer les questions à instruire, ainsi que :

 

a) ordonner la consignation à la Cour d’une somme d’argent représentant la totalité ou une partie de la réclamation;

 

b) ordonner la fourniture d’un cautionnement pour dépens;

 

c) limiter la nature et l’étendue de l’interrogatoire préalable aux questions non visées par les affidavits déposés à l’appui de la requête en jugement sommaire ou en procès sommaire, ou par tout contre-interrogatoire s’y rapportant, et permettre leur utilisation à l’instruction de la même manière qu’un interrogatoire préalable.

 

 

Sursis d’exécution

 

219. Au moment de rendre un jugement en application des règles 215 ou 216, la Cour peut ordonner de surseoir à l’exécution forcée du jugement jusqu’à la détermination de toute autre question soulevée dans l’action ou dans une demande reconventionnelle ou une mise en cause.

Summary Judgment and Summary Trial

 

Motion and Service

 

Motion by a party

 

213. (1) A party may bring a motion for summary judgment or summary trial on all or some of the issues raised in the pleadings at any time after the defendant has filed a defence but before the time and place for trial have been fixed.

 

 

 

Further motion

 

(2) If a party brings a motion for summary judgment or summary trial, the party may not bring a further motion for either summary judgment or summary trial except with leave of the Court.

 

Obligations of moving party

 

(3) A motion for summary judgment or summary trial in an action may be brought by serving and filing a notice of motion and motion record at least 20 days before the day set out in the notice for the hearing of the motion.

 

 

Obligations of responding party

 

(4) A party served with a motion for summary judgment or summary trial shall serve and file a respondent’s motion record not later than 10 days before the day set out in the notice of motion for the hearing of the motion.

 

Summary Judgment

 

Facts and evidence required

 

214. A response to a motion for summary judgment shall not rely on what might be adduced as evidence at a later stage in the proceedings. It must set out specific facts and adduce the evidence showing that there is a genuine issue for trial.

 

 

 

If no genuine issue for trial

 

215. (1) If on a motion for summary judgment the Court is satisfied that there is no genuine issue for trial with respect to a claim or defence, the Court shall grant summary judgment accordingly.

 

 

Genuine issue of amount or question of law

 

(2) If the Court is satisfied that the only genuine issue is

 

(a) the amount to which the moving party is entitled, the Court may order a trial of that issue or grant summary judgment with a reference under rule 153 to determine the amount; or

 

(b) a question of law, the Court may determine the question and grant summary judgment accordingly.

 

Powers of Court

 

(3) If the Court is satisfied that there is a genuine issue of fact or law for trial with respect to a claim or a defence, the Court may

 

(a) nevertheless determine that issue by way of summary trial and make any order necessary for the conduct of the summary trial; or

 

(b) dismiss the motion in whole or in part and order that the action, or the issues in the action not disposed of by summary judgment, proceed to trial or that the action be conducted as a specially managed proceeding.

 

Summary Trial

 

Motion record for summary trial

 

216. (1) The motion record for a summary trial shall contain all of the evidence on which a party seeks to rely, including

 

(a) affidavits;

 

(b) admissions under rule 256;

 

(c) affidavits or statements of an expert witness prepared in accordance with subsection 258(5); and

 

(d) any part of the evidence that would be admissible under rules 288 and 289.

 

Further affidavits or statements

 

(2) No further affidavits or statements may be served, except

 

 

(a) in the case of the moving party, if their content is limited to evidence that would be admissible at trial as rebuttal evidence and they are served and filed at least 5 days before the day set out in the notice of motion for the hearing of the summary trial; or

 

(b) with leave of the Court.

 

Conduct of summary trial

 

(3) The Court may make any order required for the conduct of the summary trial, including an order requiring a deponent or an expert who has given a statement to attend for cross-examination before the Court.

 

Adverse inference

 

(4) The Court may draw an adverse inference if a party fails to cross-examine on an affidavit or to file responding or rebuttal evidence.

 

 

 

Dismissal of motion

 

(5) The Court shall dismiss the motion if

 

 

(a) the issues raised are not suitable for summary trial; or

 

(b) a summary trial would not assist in the efficient resolution of the action.

 

 

Judgment generally or on issue

 

 

(6) If the Court is satisfied that there is sufficient evidence for adjudication, regardless of the amounts involved, the complexities of the issues and the existence of conflicting evidence, the Court may grant judgment either generally or on an issue, unless the Court is of the opinion that it would be unjust to decide the issues on the motion.

 

 

 

Order disposing of action

 

(7) On granting judgment, the Court may make any order necessary for the disposition of the action, including an order

 

(a) directing a trial to determine the amount to which the moving party is entitled or a reference under rule 153 to determine that amount;

 

 

(b) imposing terms respecting the enforcement of the judgment; and

 

(c) awarding costs.

 

 

Trial or specially managed proceeding

 

(8) If the motion for summary trial is dismissed in whole or in part, the Court may order the action, or the issues in the action not disposed of by summary trial, to proceed to trial or order that the action be conducted as a specially managed proceeding.

 

General

 

Right of plaintiff who obtains judgment

 

217. A plaintiff who obtains judgment under rule 215 or 216 may proceed against the same defendant for any other relief and may proceed against any other defendant for the same or any other relief.

 

Powers of Court

 

218. If judgment under rule 215 or 216 is refused or is granted only in part, the Court may make an order specifying which material facts are not in dispute and defining the issues to be tried and may also make an order

 

(a) for payment into court of all or part of the claim;

 

 

(b) for security for costs; or

 

 

(c) limiting the nature and scope of the examination for discovery to matters not covered by the affidavits filed on the motion for summary judgment or summary trial or by any cross-examination on them and providing for their use at trial in the same manner as an examination for discovery.

 

 

Stay of execution

 

219. On granting judgment under rule 215 or 216, the Court may order that enforcement of the judgment be stayed pending the determination of any other issue in the action or in a counterclaim or third party claim.

 

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        T-2090-10

 

INTITULÉ :                                      Doris Tremblay c Orio Canada Inc.

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :             Le 8 janvier 2013

 

MOTIFS DU JUGEMENT :           LE JUGE BOIVIN

 

DATE DES MOTIFS :                     Le 31 janvier 2013

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Me Pascal Lauzon

 

POUR LA DEMANDERESSE

DÉFENDEUR RECONVENTIONNEL

 

Me André J. Bélanger

POUR LA DÉFENDERESSE

DEMANDERESSE RECONVENTIONNELLE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

BCF s.e.n.c.r.l.

Montréal (Québec)

 

POUR LA DEMANDERESSE

DÉFENDEUR RECONVENTIONNEL

André J. Bélanger

Montréal (Québec)

POUR LA DÉFENDERESSE

DEMANDERESSE RECONVENTIONNELLE

 

 

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