Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

Cour fédérale

 

Federal Court

 

 

 


Date : 20130131

Dossier : IMM-4408-12

Référence : 2013 CF 108

[traduction FRANÇAISE certifiée, non révisée]

Ottawa (Ontario), le 31 janvier 2013

En présence de monsieur le juge Phelan

 

 

ENTRE :

 

GALINA TEPORDEI

VITALIE TEPORDEI

DORINA TEPORDEI

 

 

 

demandeurs

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

I.          INTRODUCTION

[1]               La Cour est saisie de la demande de contrôle judiciaire de la décision de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission) refusant la réouverture de la demande d’asile des demandeurs. Le principal argument avancé est qu’il y avait soit une partialité réelle, soit une crainte raisonnable de partialité de la part du commissaire lors de l’audition de la demande d’asile.

 

[2]               Le juge Zinn a prononcé un sursis à l’exécution de la mesure d’expulsion, sursis basé en partie sur l’allégation de partialité qui constitue une question grave; la Commission ne l’a pas examinée dans sa décision relative à la réouverture. La Cour a maintenant l’avantage d’avoir un dossier complet et plus fourni que celui dont disposait le juge Zinn.

 

II.        LES FAITS

[3]               Les demandeurs qui ont présenté la demande d’asile sont des citoyens de la Moldavie. La demande a été entendue le 1er juin 2010 par le commissaire, mais la décision a été reportée jusqu’à ce que les demandeurs présentent leurs observations écrites. Il y a eu de vifs échanges entre l’avocat des demandeurs et le commissaire sur des questions telles que le défaut de l’avocat de déposer des documents avant l’audience et une prolongation possible du délai pour le dépôt d’observations écrites après l’audience.

 

[4]               Le jour où les observations écrites devaient être présentées, le 17 juin 2010, les demandeurs ont déposé une demande d’audience de novo (ou subsidiairement une vérification de l’interprétation), pour des raisons d’erreurs d’interprétation. Le 23 juin 2010, les demandeurs ont été informés que leur demande d’audience de novo était rejetée.

 

[5]               Le 25 juin 2010, l’avocat des demandeurs a demandé l’intervention du commissaire coordonnateur de la Commission. L’avocat a aussi fait part de son intention de présenter une plainte formelle contre le commissaire qui avait entendu la demande et demandé que le commissaire ne soit ni autorisé à trancher la cause ni assigné à toute autre cause à laquelle participe l’avocat des demandeurs. Le même jour, le commissaire a rejeté la demande d’asile sur la base d’une conclusion défavorable relative à la crédibilité des demandeurs adultes.

 

[6]               Deux semaines plus tard, le commissaire coordonnateur a informé l’avocat des demandeurs que le commissaire était « dessaisi », et que ce dernier avait à bon droit rejeté la demande d’audience de novo. L’avocat des demandeurs a été informé qu’il pouvait présenter une demande de contrôle judiciaire et une demande de réouverture de la décision conformément à l’article 55 des Règles de la Section de la protection des réfugiés (les Règles).

 

[7]               En août 2010, les demandeurs ont déposé une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire de la décision relative à la demande d’asile. La question de la partialité ou de la crainte raisonnable de partialité n’a pas été soulevée. La Cour a rejeté la demande d’autorisation le 21 décembre 2010.

 

[8]               Les demandeurs n’ont déposé une demande de réouverture de la décision relative à la demande d’asile que deux (2) ans plus tard, lorsqu’ils ont reçu signification de l’instruction de se présenter pour leur renvoi. La question de la partialité a alors été soulevée, ainsi que la question de l’erreur commise par l’interprète et du rejet de certains documents présentés lors de l’audience.

 

[9]               Les dispositions des Règles en application desquelles une question peut être rouverte exigent qu’une demande de réouverture soit déposée sans délai, et ces dispositions prévoient que cette demande peut être accueillie sur preuve du manquement à un principe de justice naturelle.

44. (1) Sauf indication contraire des présentes règles, toute demande est faite sans délai par écrit. La Section peut permettre que la demande soit faite oralement pendant une procédure si la partie n’avait pu, malgré des efforts raisonnables, le faire par écrit avant la procédure.

[…]

44. (1) Unless these Rules provide otherwise, an application must be made in writing and without delay. The Division may allow a party to make an application orally at a proceeding if the party with reasonable effort could not have made a written application before the proceeding.

[…]

 

55. (1) Le demandeur d’asile ou le ministre peut demander à la Section de rouvrir toute demande d’asile qui a fait l’objet d’une décision ou d’un désistement.

 

 (2) La demande est faite selon la règle 44.

 

 (3) Si la demande est faite par le demandeur d’asile, celui-ci y indique ses coordonnées et en transmet une copie au ministre.

 

 

 

 (4) La Section accueille la demande sur preuve du manquement à un principe de justice naturelle.

55. (1) A claimant or the Minister may make an application to the Division to reopen a claim for refugee protection that has been decided or abandoned.

 

 (2) The application must be made under rule 44.

 

 (3) A claimant who makes an application must include the claimant’s contact information in the application and provide a copy of the application to the Minister.

 

 (4) The Division must allow the application if it is established that there was a failure to observe a principle of natural justice.

 

Règles de la Section de la protection des réfugiés, DORS/2002-228.

 

[10]           Les motifs pour lesquels la Commission a rejeté la demande de réouverture sont succincts. La Commission a rejeté cette demande parce que toutes les questions avaient déjà été tranchées par la Commission, et parce que le comportement d’un consultant en immigration (une question soulevée par les demandeurs) relativement à une demande basée sur des circonstances d’ordre humanitaire (demande CH) n’était pas de la compétence de la Commission. La Commission a aussi souligné qu’une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire avait été rejetée. La Commission a conclu qu’il n’y avait pas de manquement à un principe de justice naturelle.

 

III.       ANALYSE

[11]           Aucune des parties n’a soulevé de question relative à la norme de contrôle. Dans leurs observations écrites, les demandeurs ont laissé entendre, de façon implicite, que la norme de contrôle était celle de la décision raisonnable, tandis que, dans leurs observations orales, ils ont admis que la norme de contrôle était la décision correcte.

 

La question cruciale porte sur la décision de la Commission selon laquelle elle n’avait pas commis de manquement à un principe de justice naturelle. La norme de contrôle habituelle pour une question relative à la justice naturelle est la décision correcte. La question n’en est pas une pour laquelle la Commission peut invoquer la déférence, en particulier en raison du fait qu’elle a elle‑même rendu le jugement.

 

[12]           Je conclus que la norme de contrôle applicable est celle de la décision correcte. Toutefois, le résultat serait le même si la norme de contrôle avait été celle de la décision raisonnable.

 

[13]           La Commission a eu raison de conclure, eu égard aux faits, que les questions en litige soulevées avaient déjà été tranchées. La Commission a eu raison de conclure, compte tenu du droit applicable, qu’il n’y avait pas eu de manquement à un principe de justice naturelle.

 

[14]           Après examen de la transcription, rien ne me permet de conclure qu’il y avait partialité ou crainte raisonnable de partialité. Les échanges étaient vifs, il est évident que le commissaire a des antécédents avec l’avocat des demandeurs, mais aucun de ces éléments n’est suffisant pour fonder la demande des demandeurs à cet égard.

 

[15]           La partialité ou la crainte raisonnable de partialité est une question qui doit être soulevée sans délai. Les demandeurs ont soulevé la question à la Commission le 25 juin 2010, le jour où la décision relative à la demande d’asile a été rendue. Les demandeurs ont pleinement eu l’occasion de soulever la question de la partialité dans leur première demande d’autorisation présentée à la Cour, ils ne l’ont pas fait. Ce fait constituerait à lui seul un motif suffisant pour rejeter la demande de réouverture fondée sur des motifs de partialité. Toute question d’équité procédurale doit être soulevée dans la demande d’autorisation, et le refus d’une telle autorisation entraîne forclusion du droit de soulever de nouveau cette question.

 

[16]           En outre, les Règles exigent qu’une demande telle que la demande de réouverture soit déposée sans délai. En l’espèce, les demandeurs ont attendu deux années, années durant lesquelles ils ont engagé un consultant en immigration pour une autre question d’immigration, puis ils ont de nouveau fait appel à leur avocat, lorsqu’ils étaient sur le point d’être expulsés et que la réouverture était leur « dernier recours ».

 

IV.       CONCLUSION

[17]           La Commission aurait pu rejeter la demande de réouverture sur la seule base du temps écoulé. Lorsque le délai est un facteur pris en compte dans la conclusion relative à l’absence de fondement véritable pour une prétention d’impartialité, il n’y a absolument rien qui justifierait la réouverture de la présente affaire. La décision de la Commission était correcte.

 

[18]           Le présent contrôle judiciaire sera rejeté. Il n’y a pas de question à certifier.

 


JUGEMENT

LA COUR STATUE : la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

 

 

 

« Michael L. Phelan »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Laurence Endale, LLM., M.A.Trad.jur.

 

 

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

Dossier :                                              IMM-4408-12

 

INTITULÉ :                                            GALINA TEPORDEI

                                                                  VITALIE TEPORDEI

                                                                  DORINA TEPORDEI

                                                                  c

                                                                  LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                    Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                   Le 17 janvier 2013

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                  Le juge Phelan

 

DATE DES MOTIFS

ET DU JUGEMENT :                           Le 31 janvier 2013

 

 

COMPARUTIONS :

 

Robin Morch

 

POUR LES DEMANDEURS

Bradley Gotkin

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

M. Robin Morch

Avocats et notaires

Ballantrae (Ontario)

 

POUR LES DEMANDEURS

M. William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.