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Date : 20130118

Dossier : T-522-12

Référence : 2013 CF 47

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 18 janvier 2013

En présence de monsieur le juge Rennie

 

 

ENTRE :

 

SIVANATHAN SIVADHARSHAN

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Le demandeur demande le contrôle judiciaire de la décision d’un délégué du ministre des Finances (le ministre) rejetant sa demande de modification de ses déclarations de revenus T-1 pour les années d’imposition 2004 et 2005.

 

[2]               Le paragraphe 152(3.1) de la Loi de l’impôt sur le revenu, LRC 1985, c 1 (la Loi de l’impôt sur le revenu) prévoit qu’une déclaration de revenus peut faire l’objet d’une nouvelle cotisation dans les trois ans suivant un avis de cotisation. Le paragraphe 152(4.2) de la Loi de l’impôt sur le revenu prévoit une exception au délai de trois ans. En effet, cette disposition confère au ministre le pouvoir discrétionnaire de réduire ou de rembourser l’impôt à payer après l’expiration du délai de trois ans. L’Agence du revenu du Canada a pour politique d’établir une nouvelle cotisation au-delà du délai de trois ans uniquement si le ministre est convaincu qu’il y aurait eu une nouvelle cotisation si la demande avait été présentée à temps.

 

[3]               Je conclus que le ministre a exercé de manière raisonnable son pouvoir discrétionnaire de rejeter la demande de nouvelle cotisation hors délai du demandeur. Par conséquent, la présente demande sera rejetée.

 

Les faits

 

[4]               Le 15 juin 2006, le demandeur a produit ses déclarations de revenus pour les années d’imposition 2004 et 2005, dans lesquelles il déclarait respectivement 41 725 $ et 77 217 $ de revenus nets d’entreprise pour ces années d’imposition. Les avis de cotisation ont été établis le 4 août 2006.

 

[5]               Le Service de recouvrement de l’ARC a communiqué avec le demandeur en octobre 2006, au sujet d’impôts impayés. Les notes que l’agent de l’ARC a prises relativement à cette conversation indiquent que le demandeur a affirmé qu’il ne s’inquiétait pas des poursuites en justice, parce que l’ARC ne connaissait pas l’origine de ses revenus.

 

[6]               Le 14 juillet 2010, quelque quatre ans plus tard, le demandeur a produit une demande de redressement pour modifier ses déclarations de revenus pour les années 2004 et 2005. Le demandeur expliquait qu’il avait déclaré par erreur un revenu de 81 500 $ au lieu de 8 150 $ pour l’année d’imposition 2005 et un revenu de 44 500 $ au lieu de 4 450 $ pour l’année d’imposition 2004.

 

[7]               Puisque sa demande avait été déposée en dehors du délai de trois ans, elle a été transmise à la division des allégements pour les contribuables. Aux fins du traitement de sa demande, l’ARC a demandé des renseignements complémentaires, notamment les livres comptables et les relevés bancaires du demandeur.

 

[8]               Le contribuable a répondu qu’il avait travaillé à son compte comme marchand de fleurs ambulant et que les transactions avaient été au comptant. Il a également expliqué qu’il n’avait pas de comptes bancaires, parce qu’il avait été victime d’un vol d’identité. Il a produit des rapports de police à l’appui.

 

[9]               Le demandeur a expliqué qu’il n’avait pas conservé certains de ses livres comptables. Il a également dit que certains reçus avaient été perdus lorsqu’il avait déménagé d’Ottawa à Toronto. Le demandeur a communiqué des détails additionnels concernant le vol d’identité. Il a expliqué que le fraudeur avait loué une boîte postale à son nom, de sorte qu’il n’avait pas reçu la correspondance de l’ARC.

 

[10]           Le demandeur n’a produit aucun document financier pour les années 2004 ou 2005. Il a dit que ses relevés bancaires et ses relevés de cartes de crédit étaient entre les mains du service de police d’Ottawa, et il a autorisé l’ARC à obtenir ces documents de sa banque.

 

[11]           Aux termes de la décision au premier palier datée du 23 février 2011, la demande d’établissement d’une nouvelle cotisation du demandeur a été rejetée, parce que le ministre était incapable de déterminer quels étaient les montants d’impôts à payer pour les années d’imposition en cause.

 

[12]           Le demandeur a demandé un examen administratif de la décision au premier palier. Aux termes de la décision révisée datée du 10 février 2012, sa demande d’établissement de nouvelles cotisations a été rejetée. Le demandeur n’a pas produit d’éléments de preuve pour établir ses revenus dans les années d’imposition 2004 et 2005. Aussi le ministre ne disposait-il pas de renseignements adéquats pour pouvoir déterminer quels étaient les montants d’impôts à payer.

 

 

 

La question en litige

 

[13]           La question en litige dans le cadre du présent contrôle judiciaire est de savoir si la décision du ministre est raisonnable : Lanno c Canada (Agence des Dounes et du Revenu), 2005 CAF 153.

 

Analyse

 

[14]           Selon le régime d’autocotisation canadien, il incombe au contribuable de s’assurer que ses déclarations de revenus sont produites correctement.

 

[15]           Le demandeur soutient que ses déclarations de revenus pour les années 2004 et 2005 indiquaient incorrectement ses revenus. Il explique qu’il n’aurait pas pu gagner un revenu si élevé puisqu’il était un étudiant à temps plein et qu’il travaillait comme marchand ambulant.

 

[16]           C’est peut-être vrai, mais il y a ceci de problématique que le demandeur a été incapable de produire le moindre document qui puisse établir le fait que son entreprise en était une de marchand de fleurs ainsi que le montant des revenus effectivement générés. Le ministre n’est pas tenu d’admettre l’affirmation d’un contribuable concernant son revenu en l’absence de tout élément de preuve à l’appui.

 

[17]           Le paragraphe 230(1) de la Loi de l’impôt sur le revenue exige que quiconque exploite une entreprise tienne des registres et des livres de comptes permettant d’établir le montant des impôts à payer. Le demandeur n’a pas tenu ces registres et livres de comptes ou il les a perdus.

 

[18]           Le demandeur a demandé à ce que le ministre obtienne des documents de son institution financière, mais cela n’aide pas sa cause à mon avis. Il incombe au contribuable d’obtenir ces éléments de preuve et de les communiquer au ministre. Si ces documents étaient disponibles, le demandeur aurait dû les obtenir.

 

[19]           Puisque le demandeur n’a présenté aucun élément de preuve au ministre pour établir sa situation financière en 2004 et en 2005, j’estime qu’il est raisonnable que le ministre ait rejeté sa demande.

 

[20]           Deuxièmement, il était raisonnable que le ministre soit sceptique quant à l’affirmation selon laquelle les revenus déclarés résultaient d’une erreur. En 2004, le demandeur avait décrit ses revenus découlant de son travail comme [TRADUCTION] « consultant technique » et, en 2005, comme [TRADUCTION] « marchand de fleurs ». Il n’y avait aucun élément de preuve ni aucune description à l’appui dans l’un ou l’autre cas, et aucune explication raisonnable n’a été donnée au changement rapide d’emploi.

 

[21]           Le ministre a pour politique (Circulaire d’information IC-07-1) d’exercer son pouvoir discrétionnaire de prolonger la période normale d’établissement de cotisations lorsque le ministre est convaincu que la nouvelle cotisation aurait été établie si la demande avait été faite à temps et que la nouvelle cotisation est conforme à la loi.

 

[22]           La décision du ministre est contrôlée selon la norme de la raisonnabilité, qui tient aux critères de la justification, de l’intelligibilité et de la transparence ainsi qu’à la question de savoir si la décision appartient aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit : Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, [2009] 1 RCS 339, au paragraphe 46.

 

[23]           Le pouvoir discrétionnaire conféré au ministre d’accorder une dispense d’application de certaines dispositions de la Loi de l’impôt sur le revenu s’exerce dans un contexte juridique et factuel. En l’espèce, ce contexte comprend l’absence d’éléments de preuve dont le ministre aurait pu tenir compte pour exercer raisonnablement son pouvoir discrétionnaire en faveur du demandeur.

 


JUGEMENT

LA COUR STATUE que :

1.             L’intitulé de la présente cause est modifié de manière à nommer seulement le ministre du Revenu national comme défendeur.

2.             La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

3.             Les dépens sont adjugés en faveur du défendeur.

 

 

« Donald J. Rennie »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

 

Christian Laroche, LL.B.

Juriste-traducteur et traducteur-conseil


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        T-522-12

 

INTITULÉ :                                      SIVANATHAN SIVADHARSHAN c MINISTRE DU REVENU NATIONAL

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :             Le 5 décembre 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                            LE JUGE RENNIE

 

DATE DES MOTIFS :                     Le 18 janvier 2013

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Sivanathan Sivadharshan

 

POUR LE DEMANDEUR

(POUR SON PROPRE COMPTE)

 

Amit Ummat

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

William F. Pentney,

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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