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Date : 20121128

Dossier : T-2061-11

Référence : 2012 CF 1387

[traduction française certifiée, non révisée]

Ottawa (Ontario), le 28 novembre 2012

En présence de monsieur le juge Boivin

 

ENTRE :

 

VLASTA STUBICAR

 

 

 

demanderesse

 

et

 

 

 

VICE-PREMIER MINISTRE ET

MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

           MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               Vlasta Stubicar (la demanderesse) interjette appel, en application des articles 51 et 369 des Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106 (les Règles) de l’ordonnance, en date du 22 octobre 2012, par laquelle la protonotaire Aronovitch a rejeté sa requête fondée sur l’article 97 des Règles qui visait à contraindre une personne à se présenter devant la Cour pour être réinterrogée.

 

[2]               Plus précisément, dans son ordonnance du 22 octobre 2012, la protonotaire Aronovitch a rejeté la requête, présentée en vertu de l’article 97 des Règles, par laquelle la demanderesse demandait que l’auteure d’un affidavit (Mme Rapley) comparaisse de nouveau pour subir un autre contre-interrogatoire. La protonotaire estimait que la requête était [traduction] « non fondée et ne ferait que retarder inutilement le déroulement d’une instance déjà empêtrée dans des questions procédurales ».

 

[3]               La question soulevée dans la présente affaire est de savoir si la protonotaire a commis une erreur en rejetant la requête en réinterrogatoire de la demanderesse.

 

[4]               Le critère applicable en ce qui concerne la norme de contrôle dans le cas des ordonnances discrétionnaires des protonotaires a été défini par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Canada c Aqua-Gem Investments Ltd., (CAF) [1993] 2 CF 425, 149 NR 273. Ce critère a par la suite été confirmé par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt ZI Pompey Industrie c ECU-Line NV, 2003 CSC 27, [2003] 1 RCS 450 puis reformulé par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Merck & Co c Apotex Inc, 2003 CAF 488, au paragraphe 19, [2004] 2 RCF 459 :

[19] […] Le juge saisi de l’appel contre l’ordonnance discrétionnaire d’un protonotaire ne doit pas intervenir sauf dans les deux cas suivants :

 

a) l’ordonnance porte sur des questions ayant une influence déterminante sur l’issue du principal,

 

b) l’ordonnance est entachée d’erreur flagrante, en ce sens que le protonotaire a exercé son pouvoir discrétionnaire en vertu d’un mauvais principe ou d’une mauvaise appréciation des faits.

 

[5]               En l’espèce, la décision de la protonotaire de rejeter la requête présentée par la demanderesse en vertu de l’article 97 des Règles en vue d’obliger l’auteure de l’affidavit à se présenter de nouveau devant la Cour pour subir un autre contre-interrogatoire constitue une décision discrétionnaire qui ne porte pas sur une question ayant une influence déterminante sur l’issue du principal. Il s’ensuit que la décision de la protonotaire ne devrait être modifiée que si la Cour devait conclure qu’elle est entachée d’une erreur flagrante, en ce sens que la protonotaire a exercé son pouvoir discrétionnaire en vertu d’un mauvais principe ou d’une mauvaise interprétation des faits.

 

[6]               La Cour rappelle que la demanderesse a, le 20 décembre 2011, introduit une demande de contrôle judiciaire conformément à l’article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales, LRC, 1985, c F‑7. Cette demande visait l’obtention d’une ordonnance de mandamus enjoignant au défendeur d’examiner une demande de correction de dossier soumise à la Division de l’accès à l’information et de la protection des renseignements personnels (Division de l’accès à l’information) de l’Agence des services frontaliers du Canada (l’ASFC) en vertu du paragraphe 12(2) de la Loi sur la protection des renseignements personnels, LRC, 1985, ch P‑21 et de rendre une décision à ce sujet.

 

[7]               Le 22 mai 2012, la demanderesse a signifié au défendeur une assignation à comparaître pour que Mme Rapley soit contre‑interrogée sur ses affidavits. Le document précisait que Mme Rapley devait amener et produire les documents suivants :

            [traduction] 

1)      Avis écrit/Confirmation de votre promotion de chef d’équipe à directrice par intérim à la Division de l’accès à l’information de l’ASFC;

 

2)      L’organigramme actuel de la Division de l’accès à l’information de l’ASFC (en date du 16 mai 2012);

 

3)      La totalité des dossiers détenus par la Division de l’accès à l’information de l’ASFC concernant les demandes de correction de dossier de la demanderesse que vous affirmez avoir [traduction] « personnellement examinées »;

 

4)            Les copies d’écran des activités dans les dossiers de l’ASFC suivants : P‑2009‑02921; P‑2011‑03955; PI‑2011‑03955;

 

5)            Tous les documents versés au dossier P‑2010‑02064/ID de l’ASFC se rapportant à la demande d’accès aux renseignements personnels présentée par la demanderesse le 20 septembre 2010 que vous affirmez avoir [traduction] « personnellement examinée »;

 

6)            La copie d’écran des activités dans le dossier de l’ASFC P‑2010‑02064/ID.

 

(Dossier de requête de la demanderesse, pièce A, affidavit de Vlasta Stubicar)

 

[8]               Il ressort du dossier que Mme Rapley s’est présentée le 24 mai 2012 pour subir son contre‑interrogatoire, mais qu’elle n’a pas apporté les documents énumérés aux paragraphes 1) – la confirmation de sa promotion – et 2) – l’organigramme de la Division de l’accès à l’information de l’ASFC. Le 24 août 2012, la demanderesse a déposé une requête en vue de contraindre Mme Rapley à comparaître de nouveau (article 97 des Règles) en vue de subir un autre contre‑interrogatoire au sujet de son défaut de produire les documents mentionnés aux paragraphes 1) et 2). La demanderesse soutient que ces documents auraient dû être produits, mais le défendeur n’est pas de cet avis.

 

[9]               Dans son ordonnance du 22 octobre 2012, la protonotaire Aronovitch a déclaré que les documents [traduction] « que Mme Rapley n’a pas produits lors de son contre-interrogatoire ne se rapportent pas aux questions soulevées dans l’instance principale et il n’est pas nécessaire de les produire », et elle a renvoyé à l’ordonnance qu’elle a rendue le 14 septembre 2012 dans le dossier no T‑1436‑11 (paragraphes 10, 11, 12). La protonotaire a estimé que rien ne justifiait de contraindre Mme Rapley à se présenter de nouveau pour subir un autre contre-interrogatoire et elle a également conclu que l’argument de la demanderesse était [traduction] « technique et non fondé ». À cet égard, la Cour rappelle qu’en principe [traduction] « [l]es parties ne peuvent compter sur la procédure sommaire imposée pour les demandes pour vérifier chaque détail de chaque affirmation faite dans des affidavits ou lors des contre‑interrogatoires portant sur des documents qui peuvent se trouver en la possession de la partie adverse » (Simpson Strong Tie Co c Peak Innovations Inc , 2009 CF 392, au paragraphe 24, 344 FTR 217).

 

[10]           Bien que la demanderesse cherche à contraindre Mme Rapley à se présenter de nouveau devant la Cour, la Cour signale que Mme Rapley n’a pas refusé de répondre aux questions se rapportant à son poste lors de son contre‑interrogatoire (dossier de requête du défendeur, contre‑interrogatoire de Tara Rapley tenu le 24 mai 2012, annexe G de l’affidavit de Jude Pattenden, onglet G). Dans son ordonnance du 22 octobre 2012, la protonotaire a expliqué que les réponses que Mme Rapley avait données lors de son contre‑interrogatoire en réponse aux questions qui lui avaient été posées au sujet des documents mentionnés aux paragraphes 1) et 2). [traduction] « permettaient de remettre en cause la crédibilité de Mme Rapley ». D’ailleurs, le dossier renferme des renseignements en ce sens (dossier de a requête du défendeur, onglet G). De plus, la Cour est d’avis que, vu les questions soulevées en l’espèce, la pertinence des documents mentionnés aux paragraphes 1) et 2) est douteuse, et que rien ne permet de penser que la demanderesse a subi un préjudice.

 

[11]           Enfin, la Cour signale que la demanderesse a déjà formulé des observations devant la protonotaire Aronovitch au sujet de la crédibilité de Mme Rapley (article 318 des Règles) dans le dossier no T‑1436‑11. 

 

[12]           Pour tous ces motifs, la Cour est convaincue que la protonotaire a bien cerné les principes de droit applicables en l’espèce et qu’elle n’a pas commis d’erreur en appliquant ces principes aux faits portés à sa connaissance. La Cour estime donc qu’il n’y a pas lieu de modifier l’ordonnance prononcée par la protonotaire le 22 octobre 2012 étant donné que sa décision n’est pas entachée d’une erreur flagrante, en ce sens que la protonotaire n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire en vertu d’un mauvais principe ou d’une mauvaise interprétation des faits. Par conséquent, l’intervention de la Cour n’est pas justifiée et l’appel sera rejeté.

 


ORDONNANCE

 

LA COUR :

1.             REJETTE l’appel interjeté de l’ordonnance rendue le 22 octobre 2012 par la protonotaire;

 

2.             ADJUGE les dépens au défendeur, sous la forme d’une somme forfaitaire de 500 $ qui devra être payée dans les quinze (15) jours de la date de la présente ordonnance.

 

 

 

« Richard Boivin »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Sandra de Azevedo, LL.B.

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