Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

Cour fédérale

 

Federal Court

 

 


Date : 20130123

Dossier : T-476-12

Référence : 2013 CF 59

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 23 janvier 2013

En présence de monsieur le juge Rennie

 

 

ENTRE :

MARILYN THEP-OUTHAINTHANY

 

demanderesse

 

et

 

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

défendeur

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               La demanderesse cherche à faire annuler une décision datée du 7 février 2012 par laquelle le ministre des Transports, de l’Infrastructure et des Collectivités (le ministre) a rejeté sa demande d’habilitation de sécurité en matière de transport à l’Aéroport international de Vancouver. Pour les motifs qui suivent, la présente demande est rejetée.

 

Les faits

[2]               La sécurité des aéroports est régie par la Loi sur l’aéronautique, LRC 1985, c A‑2 (la Loi sur l’aéronautique), et le Règlement canadien de 2012 sur la sûreté aérienne (DORS/2011-318) (le Règlement). Aux termes du Règlement, les personnes travaillant dans les zones réglementées d’un aéroport doivent détenir une habilitation de sécurité, et l’article 4.8 de la Loi sur l’aéronautique confère au ministre le pouvoir discrétionnaire d’accorder ou non cette habilitation.

 

[3]               La Politique sur le Programme d’habilitation de sécurité en matière de transport (la Politique sur la sécurité) décrit quelle est la marche à suivre en vue d’obtenir une habilitation de sécurité. Les candidats doivent se soumettre à un contrôle détaillé de leurs antécédents, ce qui inclut une vérification de casier judiciaire ainsi qu’un examen des dossiers que tiennent les organismes d’exécution de la loi. Si l’on découvre des renseignements préjudiciables, un organisme consultatif, formé de hauts fonctionnaires, étudie l’affaire et formule une recommandation à l’intention du ministre.

 

[4]               Le 3 octobre 2010, la demanderesse a présenté une demande d’habilitation de sécurité comme condition au maintien de son emploi auprès de Westjet. Lors du contrôle de ses antécédents, la Division des renseignements criminels de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) a fait savoir que la demanderesse avait été impliquée dans une enquête en matière de stupéfiants .

 

[5]               J’analyserai plus loin la divergence relative à la date des faits cruciaux qui sous-tendent la décision de refuser à la demanderesse une habilitation de sécurité, mais, le 22 décembre 2006 ou le 1er mai 2007, la demanderesse et son époux se sont rendus en automobile jusqu’à une maison située à Surrey (Colombie-Britannique). La demanderesse est restée assise dans l’automobile, à la place du passager, pendant que son époux est entré dans la maison pour y faire une course. Au même moment, la police était en voie – ou avait entrepris – d’exécuter un mandat de perquisition concernant la maison en question. Quelle que soit la description que l’on en fasse, les faits qui ont suivi ont été spectaculaires : plusieurs suspects arrêtés, dont certains dans la maison, d’autres pourchassés et arrêtés à l’extérieur, des armes dégainées et un chien abattu. La demanderesse a été arrêtée, tout comme son époux.

 

[6]               La police a par la suite obtenu un mandat de perquisition concernant le véhicule. Ce dernier était immatriculé au nom de la mère de la demanderesse, mais c’était cette dernière qui était inscrite comme conductrice principale. La police y a trouvé un compartiment dissimulé contenant une importante quantité de cocaïne, ainsi que de l’héroïne, de la méthamphétamine, de l’ecstasy et un pistolet chargé.

 

[7]               La demanderesse et son époux ont été accusés de quatre chefs de possession de drogue en vue d’en faire le trafic ainsi que d’un chef de possession d’une arme à feu prohibée et chargée. Son époux a plaidé coupable, et le poursuivant a suspendu les accusations portées contre la demanderesse. Celle-ci a nié qu’elle était au courant des activités criminelles de son époux – et elle a continué de le nier pendant toute la durée du processus d’habilitation de sécurité.

 

[8]               Le 23 septembre 2011, la demanderesse a reçu une lettre l’informant que les renseignements obtenus suscitaient des doutes au sujet son aptitude à obtenir une habilitation de sécurité. Elle a été invitée à faire part de renseignements additionnels. Elle a fourni une déclaration et des éléments de preuve, dont des lettres de recommandation favorables, de pair avec des documents établissant sa séparation officielle d’avec son époux et le jugement conditionnel. Sa séparation a commencé le 31 janvier 2011.

 

La décision faisant l’objet du présent contrôle

[9]               Se fondant sur la recommandation de l’organisme consultatif, le ministre a refusé d’accorder l’habilitation de sécurité. L’organisme consultatif a indiqué que l’incident impliquait une grande quantité de cocaïne et d’autres drogues, ainsi qu’une arme à feu prohibée et chargée, et il a conclu que la demanderesse, aux termes la Politique sur la sécurité, était sujette ou susceptible d’être incitée à commettreou à aider ou à inciter toute autre personne à commettre – un acte d’intervention illicite visant l’aviation civile.

 

[10]           La demanderesse prétend toutefois que l’on a commis deux erreurs de droit. Premièrement, le ministre s’est trompé en prenant en considération la preuve relative aux accusations suspendues, et ce, en dépit de la radiation de son casier. Deuxièmement, soutient‑elle, il était légalement impossible de conclure, au vu des faits, qu’elle était sujette ou susceptible d’être incitée à commettreou à aider ou à inciter toute autre personne à commettre – un acte d’intervention illicite visant l’aviation civile.

La question en litige

[11]           Le présent contrôle judiciaire soulève la question de savoir si le ministre a commis une erreur en refusant à la demanderesse un certificat de sécurité. Compte tenu de la nature spécialisée et discrétionnaire de cette décision, la norme de contrôle applicable est la décision raisonnable : Clue c Canada (Procureur général), 2011 CF 323, au paragraphe 14. Les erreurs de droit sont susceptibles de contrôle selon la norme de la décision correcte.

 

[12]           La demanderesse soutient qu’à la lumière de ce qui peut être qualifié d’erreurs flagrantes dans la décision, il n’était pas loisible au ministre, en droit, de décider de rejeter la recommandation. À mon avis, la norme de contrôle demeure celle de la décision raisonnable, peu importe la façon dont on considère les erreurs de fait. Même la plus déraisonnable des décisions ne transforme pas la norme de contrôle de la décision raisonnable en celle de la décision correcte, en ce sens que cela entraîne une perte de compétence. Aucune question de droit n’a été relevée, pas plus qu’on a fait état d’une question ou d’un principe juridique qu’il est possible d’extraire de la matrice juridique et factuelle.

 

L’analyse

Les questions préliminaires

[13]           La demanderesse a inclus dans son affidavit diverses pièces qui n’ont pas été soumises au ministre [les pièces A, B, E, I, K et CC]. Elle soutient que ces éléments de preuve sont admissibles parce qu’ils situent le contexte dans lequel s’inscrivent les questions qui sont soumises à la Cour, et que, par ailleurs, ils confirment tout simplement les éléments de preuve qui se trouvent déjà dans le dossier. Elle les a toutefois fournis en vue de contester certaines informations qui se trouvaient dans le dossier qui avait été soumis au ministre. En particulier, elle souhaite établir que le ministre détenait des informations inexactes au sujet de la date de son arrestation et du fait de savoir si elle avait tenté de fuir la police. Comme ces éléments de preuve étaient déjà disponibles, ils ne sont pas, à strictement parler, admissibles. Ils débordent le cadre des éléments de preuve contextuels qui peuvent aider la Cour à comprendre les questions en litige : Sha c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 434. Compte tenu de la décision rendue en l’espèce sur le fond, ces éléments de preuve additionnels, même s’ils étaient retenus, ne changeraient pas le résultat.

 

[14]           De plus, les parties ne s’entendent pas sur ce que sont les motifs du ministre. La lettre que ce dernier a envoyée à la demanderesse indique ceci :

[traduction] Nous vous informons que le ministre des Transports, de l’Infrastructure et des Collectivités a rejeté votre demande d’habilitation à cause des informations figurant dans votre dossier ainsi que de la recommandation suivante de l’organisme consultatif:

 

« L’organisme consultatif recommande à l’unanimité de rejeter la demande d’habilitation de sécurité en matière de transport. Un examen approfondi du dossier, dont le rapport de police exposant en détail un récent incident lié à de la drogue, mettant en cause la candidate et son époux et impliquant une quantité extrêmement importante de cocaïne et d’autres drogues, de même qu’une arme à feu prohibée et chargée, a amené l’organisme consultatif à croire, selon la prépondérance des probabilités, que la candidate est sujette ou susceptible d’être incitée à commettre – ou à aider ou à inciter toute autre personne à commettre – un acte d’intervention illicite visant l’aviation civile. En outre, les explications écrites et les documents justificatifs que la candidate a fournis ne comportent pas assez d’informations pour convaincre l’organisme consultatif de recommander la délivrance d’une habilitation. »

 

 

[15]           La lettre est brève, mais elle énonce clairement le fondement sur lequel repose la conclusion du ministre. La demanderesse a fait valoir qu’il faudrait aussi considérer qu’un document de l’organisme consultatif intitulé [traduction] « Principaux sujets examinés » fait partie de la décision du ministre. Ce document est un sommaire de l’analyse que l’organisme consultatif a faite. À mon avis, il fait partie intégrante des motifs. En fait, sans lui, on pourrait dire que la lettre du ministre n’est pas étayée. Le document, à première vue, est important. Il est intitulé [traduction] « Principaux sujets examinés » et les facteurs qui y sont énumérés ont été [traduction] « pris en note » par l’organisme consultatif au moment où il a formulé sa recommandation. Ce document faisait également partie du dossier qui avait été soumis au ministre.

 

La décision raisonnable

[16]           L’article 4.8 de la Loi sur l’aéronautique confère au ministre un vaste pouvoir discrétionnaire :

4.8 Le ministre peut, pour l’application de la présente loi, accorder, refuser, suspendre ou annuler une habilitation de sécurité.

4.8 The Minister may, for the purposes of this Act, grant or refuse to grant a security clearance to any person or suspend or cancel a security clearance
.

 

 

[17]           Comme la Cour l’explique dans la décision Fontaine c Transports Canada Sécurité et sûreté, 2007 CF 1160, la sécurité aérienne est une question de grande importance et l’accès aux zones réglementées est un privilège, et non un droit.

 

[18]           Pour appliquer la norme de la décision raisonnable, la Cour s’attache à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit : Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 RCS 190.

 

[19]           Pour exercer le pouvoir discrétionnaire que lui confère cet article, le ministre peut prendre en considération tout facteur qu’il juge pertinent : Fontaine, au paragraphe 78. Cela inclut les accusations criminelles qui ne mènent pas à une déclaration de culpabilité ainsi que les éléments de preuve concernant la réputation d’une personne ou ses penchants : Clue, au paragraphe 20. Le fait que l’on ait suspendu les accusations visant la demanderesse n’est pas déterminant. Les poursuites ont lieu, ou non, pour diverses raisons, et, de ce fait, l’absence d’une déclaration de culpabilité n’est pas déterminante. À mon avis, il est possible de faire une analogie appropriée avec les procédures d’interdiction de territoire qui relèvent de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27. Le simple fait que l’on ait porté des accusations criminelles n’est pas probant, mais un tribunal est en droit d’examiner les circonstances sous-jacentes. Dans la décision Thuraisingam c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 607, au paragraphe 35, la juge Anne MacTavish écrit :

À mon avis, il faut établir une distinction entre le fait de se fonder sur le fait qu’une personne a été accusée d’une infraction criminelle et le fait de se fonder sur la preuve qui sous-tend les accusations en question. Le fait qu’une personne a été accusée d’une infraction ne prouve rien : il s’agit seulement d’une allégation. Par contre, la preuve sous-tendant l’accusation peut être suffisante pour justifier qu’un avis selon lequel une personne constitue un danger présent ou futur pour autrui au Canada soit émis de bonne foi. [Italiques supprimés.]

 

 

[20]           Deuxièmement, l’absence d’une déclaration de culpabilité au criminel ne peut pas être déterminante, compte tenu des normes de preuve différentes qui s’appliquent dans les deux contextes juridiques distincts. On confirme une déclaration de culpabilité au criminel en se fondant sur la preuve hors de tout doute raisonnable. Le refus d’accorder une habilitation de sécurité ne requiert qu’une conviction raisonnable, selon la prépondérance des probabilités, qu’une personne est sujette ou susceptible d’être incitée à commettre un acte qui peut être préjudiciable pour l’aviation civile.

 

[21]           Cela règle la prétention de la demanderesse selon laquelle le ministre ne pouvait pas tenir compte de son arrestation parce qu’elle avait fait radier l’incident du dossier du Centre d’information de la police canadienne (le CIPC), le dépôt fédéral des casiers judiciaires et des dossiers non criminels. L’absence d’un casier judiciaire n’efface pas son nom de toutes les sources qu’il est possible de consulter pour procéder à un contrôle des antécédents à des fins civiles. Ainsi qu’il a été mentionné plus tôt, le ministre peut prendre en considération tous les éléments de preuve qu’il juge pertinents. Ce dernier se fonde non seulement sur les résultats d’une vérification faite auprès du CIPC, mais aussi sur les dossiers du Service canadien du renseignement de sécurité (le SCRS) et sur ceux que tiennent divers organismes d’exécution de la loi. Les renseignements relatifs à la demanderesse ont peut-être bien été éliminés du CIPC, mais ils se trouvaient toujours dans les dossiers de la GRC.

 

[22]           En conclusion, il convient de signaler que la demande de carte d’identité de zone réglementée (partie E) requiert le consentement du candidat. Voici ce qu’on peut y lire :

Aux fins de l’habilitation de sécurité, en vertu de l’article 4.8 de la Loi sur l’aéronautique et du Programme d’habilitation de sécurité en matière de transports (PHST) destiné aux travailleurs aéroportuaires et conformément à la partie 5 du Règlement sur la sûreté du transport maritime (RSTM) à l’intention des employés des installations maritimes (ci-après « aux fins de l’habilitation de sécurité »), je consens à ce que tous les renseignements que j’aurai fournis à l’appui de cette demande soient divulgués par Transports Canada (TC) à la Gendarmerie royale du Canada (GRC), au Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS), à Citoyenneté et Immigration Canada (CIC) et aux organismes d’application de la loi. Sans que soit limitée la généralité de ce qui précède, cela comprend les renseignements sur ma date de naissance, ma scolarité, mes anciens lieux de résidence, mes antécédents professionnels et mon statut d’immigrant et de citoyen au Canada. Je consens également à ce que mes empreintes digitales ainsi que mon image faciale soient divulgués et utilisés aux fins d’identification.

 

Aux fins de l’habilitation de sécurité, j’autorise par la présente Transports Canada à obtenir, à vérifier, à évaluer, à recueillir et à conserver toute information relative à cette demande, y compris les casiers judiciaires et n’importe quels renseignements que comportent des dossiers d’exécution de la loi, notamment les renseignements recueillis dans le cadre de l’application de la loi, des renseignements relatifs à mon statut d’immigrant et de citoyen ainsi que toute information qui facilitera une évaluation de sécurité.

 

 

 

[23]           La demanderesse a consenti à ce que le ministre fasse les enquêtes qui ont mené à sa décision. Ce dernier était en droit, aux termes de la Politique sur la sécurité, de prendre en considération la conduite de la demanderesse n’ayant pas donné lieu à une déclaration de culpabilité. La question qui se pose consiste donc maintenant à savoir si cet incident pouvait raisonnablement amener le ministre à refuser à la demanderesse une habilitation de sécurité.

 

[24]           Comme il a été signalé, la norme de preuve requise pour étayer une conviction raisonnable qu’une personne peut être incitée à porter atteinte à la sécurité de l’aviation civile est moins exigeante que ce que l’on exige pour une déclaration de culpabilité au criminel. Le ministre doit avoir des motifs raisonnables de croire que la demanderesse est sujette ou susceptible d’être incitée à commettreou à aider ou à inciter toute autre personne à commettre – un acte d’intervention illicite visant l’aviation civile : Clue, au paragraphe 20.

 

[25]           Dans la décision Fontaine, le ministre a annulé l’habilitation de sécurité que détenait M. Fontaine à cause des liens qu’il avait entretenus dans le passé avec des personnes qui étaient membres d’une organisation criminelle. M. Fontaine insistait pour dire qu’il s’agissait d’amis d’enfance et qu’il n’était pas membre de cette organisation. La Cour a conclu que la décision du ministre était raisonnable dans les circonstances, car ces personnes pouvaient avoir sur M. Fontaine une influence néfaste.

 

[26]           En l’espèce, l’époux de la demanderesse était impliqué dans un réseau complexe de vente de drogue sur appel, et il se servait d’une automobile dont elle était la conductrice principale. Cette automobile était munie d’un compartiment secret contenant diverses substances réglementées ainsi qu’une arme à feu prohibée et chargée. Peut-être bien que la preuve n’était pas suffisante pour qu’on puisse déclarer la demanderesse coupable, mais les faits permettent raisonnablement de croire que cette dernière était soit liée de près à cette activité, soit victime d’aveuglement volontaire.

 

[27]           On importe de la cocaïne et de l’héroïne au Canada et l’accès de la demanderesse à une zone réglementée d’un aéroport est susceptible d’attirer l’attention de son époux ou des acolytes de ce dernier. La demanderesse a demandé le divorce, mais cette preuve n’avait pas été soumise au ministre à l’époque où il a rendu sa décision. À ce moment-là, le couple était séparé depuis plusieurs mois.

 

[28]           La demanderesse a fait valoir que l’organisme consultatif a mal compris certains éléments de preuve :

1)                  si elle avait fui les lieux ou si elle était restée dans son véhicule;

2)                  la date de son arrestation;

3)                  si elle avait changé de nom pour reprendre son nom d’origine en 2007.

 

[29]           L’organisme consultatif a fait remarquer que la demanderesse avait dit être restée assise dans l’automobile, mais la GRC, dans son rapport, a déclaré qu’elle avait essayé de prendre la fuite. L’organisme consultatif n’a pas tiré de conclusion de fait à propos de la question de savoir si elle avait pris la fuite ou non, mais il a relevé la contradiction.

 

[30]           Je souscris à l’argument de la demanderesse selon lequel sa conduite est un aspect important. Sa conduite  – le fait d’avoir pris la fuite ou celui d’être restée assise dans le siège du passager – constitue une certaine preuve dont il serait possible de tirer des inférences quant à l’étendue de la connaissance qu’elle avait des activités de son époux et du contenu du véhicule. Cependant, il importe de situer ce facteur dans le contexte de la situation dans son ensemble, ainsi que dans celui des autres éléments de preuve. Le compartiment secret dans l’automobile, l’arme chargée, l’absence d’explication pour les gestes qu’elle a eus à la date de l’arrestation et la gravité du crime commis étayent tous amplement le caractère raisonnable de la conclusion, indépendamment de la contradiction. Pour dire les choses autrement, la décision résiste à l’examen de la justification, de la transparence et de l’intelligibilité, peu importe que la demanderesse ait pris la fuite ou soit restée dans l’automobile.

 

[31]           La demanderesse a fourni une preuve que la police avait indiqué de manière inexacte la date de son arrestation. Selon le rapport de police présenté au ministre, elle avait été arrêtée le 22 décembre 2006, tandis que sa preuve indique comme date le 1er mai 2007. Cette erreur d’écriture est sans conséquence. Nul ne conteste ce qui s’est passé de façon générale.

 

[32]           Enfin, la demanderesse a changé de nom le 17 novembre 2009, mais l’organisme consultatif a indiqué par erreur qu’elle avait repris [traduction] « son nom d’origine ». [Non souligné dans l’original.] Rien n’indique que la décision du ministre soit fondée sur ce changement de nom. Cette légère erreur dans les notes de l’organisme consultatif ne rend pas déraisonnable la décision du ministre.

 

[33]           La demanderesse considère aussi comme déraisonnable le fait que l’organisme consultatif ait indiqué que, vu qu’elle vivait avec son époux, elle était forcément au courant de son activité criminelle. La drogue et l’arme ont été découvertes à l’intérieur du véhicule dont elle était considérée comme la conductrice principale. Elle était en compagnie de son époux quand le mandat de perquisition avait été exécuté. La quantité et la diversité de la drogue récupérée montrent que son époux était profondément impliqué dans de graves activités criminelles. Ce sont là des motifs qui permettent de croire raisonnablement que la demanderesse était soit au courant des activités illégales de son époux, soit victime d’aveuglement volontaire, ce qui faisait entrer en jeu les critères énoncés dans la Politique sur la sécurité.


JUGEMENT

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est rejetée, avec dépens.

 

 

« Donald J. Rennie »

Juge

 

Traduction certifiée conforme

Julie Boulanger, LL.M.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        T-476-12

 

INTITULÉ :                                      MARILYN THEP-OUTHAINTHANY c LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              OTTAWA (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :             LE 20 DÉCEMBRE 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT
ET JUGEMENT :
                            LE JUGE RENNIE

 

DATE DES MOTIFS

ET DU JUGEMENT :                     LE 23 JANVIER 2013

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Christopher Rootham

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

David Cowie

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Nelligan O’Brien Payne s.r.l.

Ottawa (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.