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Date : 20121220

Dossier: T-1192-12

Référence : 2012 CF 1537

Ottawa (Ontario), le 20 décembre 2012

En présence de monsieur le juge Boivin 

 

ENTRE :

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

DJENABOU HOPE DIALLO

 

 

 

défenderesse

 

 

 

 

 

         MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               La présente est un appel, déposé en vertu de l’article 21 de la Loi sur les cours fédérales, LRC 1985, c F-7, et du paragraphe 14(5) de la Loi sur la citoyenneté, LRC 1985, c C-29 [la Loi], d’une décision d’une juge de la citoyenneté, rendue le 23 avril 2012, et approuvant la demande de citoyenneté de Madame Djenabou Hope Diallo.

 

 

 

Les faits

[2]               Madame Djenabou Hope Diallo (la défenderesse) est entrée au Canada en tant que visiteur en 2006. Elle a confié la garde de ses trois (3) filles mineures à un ami, et ces dernières ont débuté leur année scolaire au Collège Stanislas en septembre 2006 (Dossier du Tribunal, pp 17, 267-69; Dossier de la défenderesse, Affidavit de Djenabou Hope Diallo, p 1). Le mari de la défenderesse a fait l’achat d’un condo au Canada en septembre 2006 (Dossier du Tribunal, pp 446-54). La défenderesse est repartie pour ne revenir que le 30 juin 2007 avec le statut de résidente permanente (Dossier du Tribunal, p 155). La défenderesse a suivi une formation en anglais et travaille sur appel pour une garderie depuis juin 2011 en tant qu’éducatrice (Dossier du Tribunal, pp 321-29).

 

[3]               La défenderesse a déposé sa demande de citoyenneté le 31 août 2010, soit 1 157 jours après avoir acquis le statut de résidente permanente (Dossier du Tribunal, p 5). Ses trois (3) filles mineures font également partie de sa demande de citoyenneté. Le mari de la défenderesse aurait soumis sa propre demande de citoyenneté à titre individuel puisque sa présence physique au Canada serait différente de celle de la défenderesse et des filles mineures (Dossier de la défenderesse, Affidavit de Djenabou Hope Diallo, p 3). Elle a déclaré avoir été absente du Canada pendant cinquante-six (56) jours entre la date à laquelle elle a obtenu le statut de résidente permanente et la date de sa demande de citoyenneté (Dossier du Tribunal, p 5). Elle aurait donc été physiquement présente au Canada pendant 1 101 jours, soit six (6) jours de plus que le minimum de 1 095 prévu par l’alinéa 5(1)c) de la Loi. La défenderesse a soumis de nombreux documents à l’appui de sa demande, y compris les dossiers scolaires de ses filles, des relevés bancaires, des relevés téléphoniques, le contrat d’achat du condominium, des relevés d’assurance, des attestations de soins médicaux et dentaires, et des photocopies de passeport.

[4]               Une agente de citoyenneté a évalué le dossier de la défenderesse le 4 novembre 2011, a eu un entretien avec la défenderesse, et a par la suite fait suivre son dossier à un juge de la citoyenneté parce qu’elle trouvait les preuves présentées insuffisantes (Dossier du Tribunal, pp 21-21B). L’agente de citoyenneté a indiqué à la juge de la citoyenneté, dans un mémorandum daté du 9 mars 2012, que la défenderesse possédait un passeport diplomatique émis le 23 octobre 2001 (Dossier du Tribunal, pp 21-21B, 23-24). Ce passeport diplomatique, portant le numéro 001659 et venant à échéance le 14 avril 2008, couvre une période de plus de neuf (9) mois (du 30 juin 2007 au 14 avril 2008) de la période de référence.

 

[5]               La défenderesse a reçu un avis daté du 25 novembre 2011, exigeant qu’elle soumette une photocopie de toutes les pages du passeport ou document qu’elle a utilisé pour entrer au Canada, en plus de photocopies de « tout passeport/document de voyage valide ou expiré qui [lui] a été délivré depuis [son] entrée au Canada » (Dossier du demandeur, Vol 3, Affidavit de l’agente de citoyenneté Cathy Morneau, pièce « A », p 823). 

 

[6]               Par lettre datée du 5 avril 2012, la défenderesse a été convoquée à une entrevue de citoyenneté le 23 avril 2012 (Dossier du demandeur, Vol 1, Affidavit de l’agente de citoyenneté Cathy Morneau, pièce « A », p 20). L’avis de convocation demandait à la défenderesse de se présenter avec, entre autres, « tous les passeports et documents de voyage en [sa] possession (valides et expirés) ». Le passeport diplomatique de la défenderesse n’a pas été produit.

 

[7]               La demande de citoyenneté de la défenderesse a été accordée le 23 avril 2012.

 

La décision portée en appel

[8]               La juge de la citoyenneté a annexé des « Notes au dossier » au formulaire intitulé « Avis au Ministre de la décision du juge de la citoyenneté ». La juge de la citoyenneté a approuvé la demande de citoyenneté de la défenderesse. Elle a indiqué avoir pris connaissance de toute la documentation que la défenderesse avait soumise au soutien de sa demande. Elle a estimé que la défenderesse était crédible et démontrait une bonne volonté manifeste. La juge de la citoyenneté a noté les formations suivies par la défenderesse en anglais et en service de garde.

 

[9]               La juge de la citoyenneté a noté que le mari de la défenderesse n’a pas présenté sa demande de citoyenneté en même temps que cette dernière, et que la défenderesse a indiqué que c’était parce qu’il n’avait pas accumulé le même nombre de jours de présence au Canada. La juge de la citoyenneté a noté que la défenderesse a indiqué que son mari avait eu des mandats à titre de Représentant du Fonds des Nations-Unies, mais qu’une fois arrivé au Canada, il a dû travailler dans les domaines de la construction et de l’informatique. La juge de la citoyenneté a noté que la défenderesse était peu loquace lorsqu’il était question de son mari et a conclu qu’elle n’est pas au fait des activités de ce dernier. La juge de la citoyenneté a indiqué que la défenderesse a dit se concentrer principalement sur son rôle de mère et que son mari s’occupe de ses affaires.

 

[10]           La juge de la citoyenneté a conclu ses motifs en indiquant qu’elle n’avait aucun doute que la défenderesse s’était bien installée au Canada depuis le 30 juin 2007, et qu’elle a toujours répondu à ses questions sans hésitation.

 

 

La question en litige

[11]           La présente demande ne soulève qu’une question en litige, soit celle de savoir si la décision de la juge de la citoyenneté est raisonnable.

 

La législation pertinente

[12]           Les dispositions législatives pertinentes en l’espèce sont les suivantes :

PARTIE I

 

LE DROIT À LA CITOYENNETÉ

 

[…]

 

Attribution de la citoyenneté

 

5. (1) Le ministre attribue la citoyenneté à toute personne qui, à la fois :

 

a) en fait la demande;

 

 

b) est âgée d’au moins dix-huit ans;

 

c) est un résident permanent au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés et a, dans les quatre ans qui ont précédé la date de sa demande, résidé au Canada pendant au moins trois ans en tout, la durée de sa résidence étant calculée de la manière suivante :

 

 

(i) un demi-jour pour chaque jour de résidence au Canada avant son admission à titre de résident permanent,

 

(ii) un jour pour chaque jour de résidence au Canada après son admission à titre de résident permanent;

 

 

 

 

 

 

 

 

 

d) a une connaissance suffisante de l’une des langues officielles du Canada;

 

e) a une connaissance suffisante du Canada et des responsabilités et avantages conférés par la citoyenneté;

 

f) n’est pas sous le coup d’une mesure de renvoi et n’est pas visée par une déclaration du gouverneur en conseil faite en application de l’article 20.

 

[…]

 

PARTIE V

 

PROCÉDURE

 

[…]

 

Appel

 

14. (5) Le ministre et le demandeur peuvent interjeter appel de la décision du juge de la citoyenneté en déposant un avis d’appel au greffe de la Cour dans les soixante jours suivant la date, selon le cas :

 

 

a) de l’approbation de la demande;

 

 

b) de la communication, par courrier ou tout autre moyen, de la décision de rejet.

 

PART I

 

THE RIGHT TO CITIZENSHIP

 

 

Grant of citizenship

 

5. (1) The Minister shall grant citizenship to any person who

 

 

(a) makes application for citizenship;

 

(b) is eighteen years of age or over;

 

(c) is a permanent resident within the meaning of subsection 2(1) of the Immigration and Refugee Protection Act, and has, within the four years immediately preceding the date of his or her application, accumulated at least three years of residence in Canada calculated in the following manner:

 

(i) for every day during which the person was resident in Canada before his lawful admission to Canada for permanent residence the person shall be deemed to have accumulated one-half of a day of residence, and

 

(ii) for every day during which the person was resident in Canada after his lawful admission to Canada for permanent residence the person shall be deemed to have accumulated one day of residence;

 

(d) has an adequate knowledge of one of the official languages of Canada;

 

(e) has an adequate knowledge of Canada and of the responsibilities and privileges of citizenship; and

 

(f) is not under a removal order and is not the subject of a declaration by the Governor in Council made pursuant to section 20.

 

 

PART V

 

PROCEDURE

 

 

Appeal

 

14. (5) The Minister or the applicant may appeal to the Court from the decision of the citizenship judge under subsection (2) by filing a notice of appeal in the Registry of the Court within sixty days after the day on which

 

(a) the citizenship judge approved the application under subsection (2); or

 

(b) notice was mailed or otherwise given under subsection (3) with respect to the application.

 

La norme de contrôle applicable

[13]           Les parties s’entendent, et la Cour est en accord, que la norme de contrôle applicable aux décisions de juges de la citoyenneté quant aux questions mixtes de faits et de droit, comme la question de savoir si l’individu qui demande la citoyenneté s’est conformé aux exigences de la Loi, est celle de la décision raisonnable (Balta c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 1509 au para 5, 403 FTR 134 ; Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Baron, 2011 CF 480 au para 9, 388 FTR 261). La Cour doit donc limiter son examen « à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9 au para 47, [2008] 1 RCS 190).

 

L’analyse

[14]           Lors de l’audience devant cette Cour, la défenderesse a insisté sur le fait qu’elle a soumis de la preuve démontrant qu’elle a consulté une clinique médicale à quelques reprises pendant la période en cause (soit du 30 juin 2007 au 14 avril 2008), le 18 septembre 2007, le 25 novembre 2007 et le 9 décembre 2007 (Dossier du Tribunal, pp 30 et 41). De même, une de ses filles a nécessité des soins infirmiers les 24 et 28 décembre 2007 (Dossier du Tribunal, p 33). La Cour note également la présence de relevés d’utilisation de téléphones cellulaires, pour la défenderesse elle-même ainsi que pour le cellulaire qu’utilisent ses filles, durant les mois de juillet, août, septembre et quelques journées en novembre 2007 et en février 2008 (Dossier du Tribunal, pp 124-25, 136-47), mais note que les factures présentées sont partielles. Il existe également des transactions bancaires à partir d’un compte conjoint et l’utilisation d’une carte de crédit pendant la période en cause (Dossier du Tribunal, pp 615-33, 767-77 et 799-811). Toutefois, il y a absence de transactions à la carte de crédit de la défenderesse en décembre 2007 (Dossier du Tribunal, p 623) et l’absence d’un relevé bancaire pour le mois de décembre 2007.

 

[15]           Le passeport diplomatique, dont l’existence n’est pas niée par la défenderesse, se situe au cœur du présent litige. La seule preuve de l’existence de ce document au dossier est constituée des notes d’un agent d’immigration (Dossier du Tribunal, pp 23-24). La défenderesse affirme dans son affidavit n’avoir soumis que les passeports et documents de voyage qu’elle et ses filles ont utilisés depuis qu’elles sont résidentes permanents (Dossier de la défenderesse, Affidavit de Djenabou Hope Diallo, p 3). Elle affirme également que le passeport diplomatique date d’avant leur résidence permanente (Dossier de la défenderesse, Affidavit de Djenabou Hope Diallo, p 5), et fait brièvement allusion à la perte de ce document dans son mémoire devant cette Cour (Dossier de la défenderesse, Mémoire des faits et du droit de la défenderesse, p 10 au paragraphe 5).

 

[16]           La Cour ne peut que constater que ce point litigieux n’est pas mentionné, discuté ou analysé par la juge de la citoyenneté. En effet, la juge de la citoyenneté ne mentionne nullement l’absence du passeport diplomatique dans ses notes au dossier, annexées à sa décision à titre de motifs. La Cour doit examiner si la décision de la juge de la citoyenneté de conclure que la défenderesse rencontrait les exigences de la Loi malgré l’absence de ce document couvrant une période de neuf (9) mois était raisonnable.

 

[17]           La défenderesse réfère à la décision Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c El Bousserghini, 2012 CF 88 au para 19, [2012] ACF no 106 (QL) [El Bousserghini] afin d’appuyer sa prétention selon laquelle la remise du passeport diplomatique n’est pas un obstacle dans la présente affaire. Plus particulièrement, dans l’affaire El Bousserghini, les défendeurs avaient dû remettre leurs anciens passeports au gouvernement marocain, et ils avaient expliqué ce fait au juge de la citoyenneté. La Cour avait énoncé ceci au paragraphe 19 :

[19] En ce qui a trait au premier point, à mon avis, le ministre impose un fardeau excessivement sévère aux défendeurs. Dans les instances civiles, la norme de preuve applicable est celle de la prépondérance des probabilités. Bien que la citoyenneté soit un privilège, la loi n’exige pas une corroboration. Il en revient au décideur initial, en tenant compte du contexte, de déterminer l’étendue et la nature de la preuve requise (Mizani c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration); Abbott Estate v Toronto Transportation Commission; Lévesque c Comeau). Je suis en accord qu’il serait extrêmement inhabituel, et probablement téméraire, de se fier au témoignage d’un individu pour établir sa résidence, sans aucun document à l’appui. J’accepte également que les passeports constituent la meilleure preuve, pourvu qu’ils aient été estampés à chaque point d’entrée. Qu’il s’agisse d’un défaut de produire un document ou d’un défaut d’appeler un témoin qui pourrait corroborer les faits retrouvés dans une demande de citoyenneté, le décideur peut en tirer une conclusion défavorable. Aucun doute n’a été soulevé par rapport à l’explication des défendeurs selon laquelle ils devaient remettre leurs anciens passeports au gouvernement marocain pour en obtenir de nouveaux. Même s’il aurait été préférable de garder une copie de ces passeports, les défendeurs ne peuvent être punis pour ne pas l’avoir fait étant donné que le juge est convaincu de leur présence physique au Canada.

[citations omises; la Cour souligne]

 

[18]           Dans le cas d’El Bousserghini, comme dans le cas présent, il y avait d’autres éléments de preuve pour soutenir la présence physique des défendeurs au Canada, comme des relevés bancaires démontrant l’utilisation de cartes de guichet automatique.

 

[19]           La présente affaire se distingue toutefois d’El Bousserghini. En effet, dans le cas qui nous occupe et, contrairement au cas d’El Bousserghini, la défenderesse n’a fourni aucune explication ou preuve confirmant les raisons qui l’ont mené à ne pas présenter ce passeport diplomatique à la juge de la citoyenneté – ou à l’agente de citoyenneté qui a examiné son dossier au préalable. La défenderesse affirme ne pas avoir utilisé le passeport mais la preuve au dossier ne permet pas à cette Cour de conclure qu’un événement ou une décision d’une autre autorité – comme c’était le cas pour les défendeurs dans El Bousserghini – l’empêcherait de produire le passeport diplomatique. Si le passeport de la défenderesse est en sa possession et que ses prétentions sont fondées comme elle le plaide, il appert que le dépôt du passeport diplomatique n’aurait pour effet que de confirmer les allégations de la défenderesse et dissiper le doute – dont fait état le demandeur – qui peut exister quant aux entrées et aux sorties du Canada.  

 

[20]           Bien que la défenderesse ait insisté sur les éléments de preuve supplémentaire au dossier pour établir la présence de la défenderesse au Canada pendant cette période de neuf (9) mois, la Cour est d’avis qu’ils ne sont pas suffisants pour établir que la défenderesse était bien présente au Canada à tous les jours pendant cette période. Par contre, une photocopie du passeport diplomatique manquant pourrait établir ce fait. De plus, la Cour a remarqué une absence de documentation bancaire et l’inactivité de la carte de crédit de la demanderesse pour le mois de décembre 2007. La Cour note aussi la réticence de la défenderesse à fournir des détails concernant l’emploi de son mari qui s’ajoute à l’absence du passeport diplomatique.

 

[21]           La Cour reconnaît que la défenderesse n’a qu’à prouver sa présence physique sur la prépondérance des probabilités, et que la décision de la juge de la citoyenneté est contrôlable en fonction de la norme raisonnable. Toutefois, dans le cas qui nous occupe, étant donné l’importance du nombre de jours où la défenderesse a été physiquement présente au Canada pour la détermination de la citoyenneté, la Cour estime qu’il n’était pas raisonnable que la juge de la citoyenneté accorde la demande de la défenderesse sans s’enquérir auprès d’elle de ce document crucial, particulièrement après que l’existence du passeport diplomatique lui ait été expressément signalé par l’agente de citoyenneté qui lui a transmis le dossier et que l’avis de convocation exigeait qu’elle apporte, entre autres, avec elle tous les passeports en sa possession (valides ou expirés).

 

[22]           Dans la présente affaire, la question du passeport diplomatique revêt d’autant plus d’importance que la défenderesse n’a accumulé que six (6) jours de présence au-delà du minimum exigé par la Loi. Comme l’a souligné à bon droit la procureure du demandeur lors de l’audience devant cette Cour, une seule sortie du Canada par la défenderesse pourrait faire en sorte qu’elle n’atteigne pas le nombre de jours de présence minimum au Canada en vertu de la Loi. Ainsi, dans les circonstances, la Cour estime qu’en l’absence d’une telle preuve centrale et déterminante, la juge de la citoyenneté se devait d’en traiter dans sa décision. La Cour ne peut que constater que les notes de la juge de la citoyenneté démontrent que cet aspect n’a pas du tout été considéré.

 

[23]           Les quelques lacunes dans la preuve documentaire, aussi volumineuse et imposante soit-elle (863 pages), jumelées à l’absence du passeport diplomatique, ne permettent pas de raisonnablement conclure selon la balance des probabilités que la défenderesse était au Canada pendant la période requise précédant sa demande de citoyenneté.

 

[24]           La Cour rappelle que la citoyenneté est un privilège qui ne doit pas être conféré à la légère (Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) c Chiarelli, [1992] 1 RCS 711 au para 24, 90 DLR (4e) 289 ; Haddad c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CFPI 692, 124 ACWS (3e) 1044 ; Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Singh, 2002 CFPI 861 au para 29, 221 FTR 277) et que le fardeau incombe à la défenderesse. 

 

[25]           Pour toutes ces raisons, la Cour est d’avis que la décision de la juge de la citoyenneté est déraisonnable en ce qu’elle n’appartient pas aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit (Dunsmuir). 

 

 

 


JUGEMENT

 

LA COUR STATUE que

1.                  L’appel est accueilli.

2.                  L’affaire est renvoyée à un autre juge de la citoyenneté pour un nouvel examen.

3.                  Sans dépens.

 

 

« Richard Boivin »

Juge


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        T-1192-12

 

INTITULÉ :                                      MCI c Djenabou Hope Diallo

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :             Le 13 décembre 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT :           LE JUGE BOIVIN

 

DATE DES MOTIFS :                     Le 20 décembre 2012

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Me Émilie Tremblay

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Me Adam Eidelmann

POUR LA DÉFENDERESSE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

William F. Pentney

Sous procureur général du Canada

POUR LE DEMANDEUR

 

 

Cabinet Gamliel

Montréal (Québec)

POUR LA DÉFENDERESSE

 

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