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Cour fédérale

 

Federal Court


 

Date : 20121030


Dossier : T-257-11

Référence : 2012 CF 1260

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Toronto (Ontario), le 30 octobre 2012

En présence de monsieur le juge Campbell

 

ENTRE :

 

MONSTER CABLE PRODUCTS, INC.

 

 

 

demanderesse

 

et

 

 

 

MONSTER DADDY, LLC

 

 

 

défenderesse

 

 

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

 

[1]               La Cour est saisie d’un appel interjeté, en application du paragraphe 56(1) de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T-13 (la Loi), de la décision du 2 décembre 2010 par laquelle un délégué du registraire des marques de commerce (le registraire) a rejeté, en partie, l’opposition produite par Monster Cable Products (Monster Cable) à l’encontre de la demande d’enregistrement n° 1349306 pour la marque de commerce MONSTER (la Marque). Le 29 mai 2007, Monster Daddy, LLC (Monster Daddy) avait produit une demande d’enregistrement de la Marque, fondée sur un emploi projeté de celle‑ci en liaison avec les marchandises suivantes :

Adhésifs à usage général industriel et commercial; produits chimiques pour la fabrication de solutions nettoyantes; nettoyants et lingettes tout usage; produits nettoyants, nommément savons à lessive et lingettes jetables à usage domestique, commercial et industriel; cires pour véhicules; lubrifiants et huiles automobiles; préparations de désinfection et d’assainissement tout usage (les Marchandises).

 

[2]               Dans sa déclaration d’opposition produite le 2 avril 2008, Monster Cable a invoqué les motifs d’opposition suivants :

1. La demande ne respecte pas les dispositions de l‘alinéa 30i) de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13 (la Loi), parce que la Requérante ne pouvait être convaincue qu’elle avait le droit d’employer la Marque au Canada en liaison avec les Marchandises, étant donné que l’Opposante avait adopté, employé et enregistré auparavant ses marques de commerce comme il est indiqué ci-après;

 

2. La Marque n’est pas enregistrable selon l’alinéa 12(1)d) de la Loi, parce qu’elle crée de la confusion avec les marques déposées de l’Opposante, à savoir MONSTER, numéro d’enregistrement LMC463392; MONSTER, numéro d’enregistrement LMC655938; MONSTER, numéro d’enregistrement LMC666620; MONSTER POWER, numéro d’enregistrement LMC611734; MONSTER POWER, numéro d’enregistrement LMC455217; MONSTER CABLE, numéro d’enregistrement LMC444635; MONSTER CABLE, numéro d’enregistrement 664281; et MONSTER COMPUTER, numéro d’enregistrement LMC530302;

 

3. La Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque selon l’alinéa 16(3)a) de la Loi, parce que, à toutes les dates pertinentes, la Marque créait de la confusion avec les marques employées antérieurement par l’Opposante, à savoir MONSTER, MONSTER POWER, MONSTER CABLE et MONSTER COMPUTER, en liaison avec les marchandises énumérées dans les enregistrements susmentionnés;

 

4. La Requérante n’est pas la personne ayant droit à l’enregistrement de la Marque selon l’alinéa 16(3)a) de la Loi, parce que, à toutes les dates pertinentes, la Marque créait de la confusion avec les marques employées antérieurement par l’Opposante, à savoir MONSTER et MONSTER COMPUTER, en liaison avec des produits nettoyants; des préparations de nettoyage, nommément des solutions servant au nettoyage d’équipements électroniques et de dispositifs d’affichage électronique; des lingettes de nettoyage; et des chiffons de nettoyage;

 

5. la Marque ne distingue pas, ni n’est apte à distinguer, les Marchandises de celles de l’Opposante, pour les raisons susmentionnées.

 

[Non souligné dans l’original.]

 

 

Tel que le fait ressortir le soulignement, le quatrième motif d’opposition ne vise que des produits nettoyants.

 

[3]               Le registraire a statué sur l’opposition après une audience où seule Monster Cable était représentée. Le registraire a rejeté dans leur totalité les premier, deuxième et troisième motifs d’opposition de Monster Cable. Celle‑ci a toutefois obtenu gain de cause quant à son quatrième motif d’opposition, de portée plus restreinte. Monster Cable soutient néanmoins que la nouvelle preuve produite lui donne droit à une protection élargie dans le cadre du présent appel. Monster Daddy n’a pas pris part à l’appel.

 

[4]               Pour les motifs qui suivent, je souscris à l’argument de Monster Cable relatif à l’élargissement de la protection seulement en ce qui concerne une des Marchandises, mais je conclus qu’il n’y a aucune raison de modifier les conclusions du registraire sur le caractère distinctif en lien avec le cinquième motif d’opposition.

 

I.         Élargissement de la portée du quatrième motif d’opposition – la confusion

[5]               En ce qui concerne le quatrième motif d’opposition – la confusion entre les marques des parties visée à l’alinéa 16(3)a) de la Loi –, le registraire a conclu à l’existence d’une probabilité de confusion entre la Marque de Monster Daddy lorsqu’elle est employée en liaison avec les « nettoyants et lingettes tout usage; produits nettoyants, nommément savons à lessive et lingettes jetables à usage domestique, commercial et industriel » et la marque MONSTER de Monster Cable lorsqu’elle est employée en liaison avec ses « préparations de nettoyage, nommément des solutions servant au nettoyage d’équipements électroniques et de dispositifs d’affichage électronique; des lingettes de nettoyage; et des chiffons de nettoyage ». Je fais remarquer que Monster Cable a imposé ses propres limites lorsqu’elle a formulé le quatrième motif d’opposition et, comme je l’ai indiqué ci-dessus, qu’elle a obtenu le résultat recherché.

 

[6]               Le registraire a principalement exclu les autres Marchandises en raison de l’absence de lien, ou de chevauchement, entre celles‑ci et les produits nettoyants de Monster Cable, comme l’indique le paragraphe 24 de la décision :

S’agissant de la nature des marchandises respectives des parties, il y a manifestement chevauchement entre les produits nettoyants de l’Opposante et les marchandises décrites comme « nettoyants et lingettes tout usage; produits nettoyants, nommément savons à lessive et lingettes jetables à usage domestique, commercial et industriel » (ci-après appelés « produits nettoyants de la Requérante »). Dans son plaidoyer écrit, la Requérante fait valoir que les produits nettoyants respectifs des parties n’ont pas le même objet. Je ne sais pas quel est l’objet des produits nettoyants de la Requérante, si ce n’est qu’ils sont à usage domestique, commercial et industriel. La description de ses Marchandises ne dit pas qu’elles ne pourraient pas servir à nettoyer des écrans de télévision et autres équipements électroniques que l’on peut trouver dans une maison ou dans un environnement commercial ou industriel. Quant aux autres marchandises visées par la demande, je ne vois aucun chevauchement avec les produits nettoyants de l’Opposante.

 

                        [Non souligné dans l’original.]

 

[7]               Monster Cable présente une preuve additionnelle dans le cadre du présent appel, comme le permet le paragraphe 56(5) de la Loi, en vue de démontrer la probabilité d’une confusion avec les Marchandises exclues par le registraire, nommément les « adhésifs à usage général industriel et commercial; produits chimiques pour la fabrication de solutions nettoyantes; cires pour véhicules; lubrifiants et huiles automobiles; préparations de désinfection et d’assainissement tout usage ».

 

[8]               Selon la jurisprudence concernant le paragraphe 56(5) de la Loi, un appelant a droit à une nouvelle audience, ou un procès de novo, lorsque la preuve additionnelle soumise à la Cour aurait influé de façon significative sur les conclusions de fait tirées par le registraire ou sur l’exercice par ce dernier de son pouvoir discrétionnaire (Brasseries Molson c John Labatt Ltée, [2000] ACF n° 159 (CAF); Papiers Scott Limitée c Georgia-Pacific Consumer Products LP, 2010 CF 478 (CF)). La norme de contrôle applicable serait donc celle de la décision correcte en de telles circonstances. Monster Cable soutient que sa nouvelle preuve lui donne droit à un procès de novo, et elle me demande ainsi d’en arriver à mes propres conclusions relativement aux autres Marchandises.

 

[9]               Dans la décision Garbo Group Inc. c Harriet Brown & Co., [1999] ACF n° 1763, 176 FTR 80 (CF), le juge Evans a confirmé que le nouvel élément de preuve produit devait avoir une force probante plus grande que celle des éléments fournis au registraire : « Si l’élément apporté a peu de poids et ne consiste qu’en une simple répétition des éléments déjà mis en preuve sans accroître la force probante de ceux‑ci, la présence de cet élément additionnel ne devrait avoir aucune incidence sur la norme de contrôle appliquée par la Cour en appel » (Garbo Group Inc., au paragraphe 37). Habituellement, la nouvelle preuve présentée tend à combler les insuffisances constatées dans la preuve par le registraire (Papiers Scott, au paragraphe 46). La question à laquelle je dois répondre est donc de savoir si la preuve additionnelle présentée aurait influé de façon significative sur les conclusions tirées par le registraire relativement aux Marchandises restantes.

 

[10]           Monster Cable a fourni quant aux « préparations de désinfection et d’assainissement tout usage » une preuve additionnelle visant à démontrer que de la publicité était faite pour l’emploi de ses produits nettoyants en vue d’éliminer les bactéries sur les ordinateurs portatifs, les téléphones, les caméras et divers types d’écrans. Par conséquent je conclus à l’existence d’une probabilité de confusion entre la Marque de Monster Daddy, lorsqu’elle est employée en liaison  avec les préparations de désinfection et d’assainissement tout usage, et la marque MONSTER de Monster Cable.

 

[11]           Pour ce qui est cependant des autres Marchandises exclues, selon moi, Monster Cable ne peut échapper à la restriction qu’elle a elle‑même donnée à la portée du quatrième motif d’opposition. Je le répète, on invoquait par ce motif d’opposition la confusion entre la Marque et les marques de Monster Cable « en liaison avec des produits nettoyants; des préparations de nettoyage, nommément des solutions servant au nettoyage d’équipements électroniques et de dispositifs d’affichage électronique; des lingettes de nettoyage; et des chiffons de nettoyage » [non souligné dans l’original]. Rien n’établit que les autres Marchandises, soit les « adhésifs à usage général industriel et commercial; produits chimiques pour la fabrication de solutions nettoyantes » et les « cires pour véhicules; lubrifiants et huiles automobiles » sont des produits nettoyants.

 

[12]           Monster Cable ayant elle‑même restreint la portée du quatrième motif d’opposition, je ne puis maintenant élargir le cadre de l’analyse et évaluer la confusion à l’égard de catégories de marchandises non soumises à l’examen du registraire et qui ne sont pas des produits nettoyants. Il ressort clairement de la jurisprudence de la Cour que celle‑ci n’a pas compétence, bien que le paragraphe 56(5) de la Loi autorise la présentation d’une nouvelle preuve en appel, pour statuer sur des questions qui n’avaient pas été soulevées dans la déclaration d’opposition présentée au registraire (McDonald’s Corp. c Coffee Hut Stores Ltd., 66 FTR 281 (CFPI), confirmé par la Cour d’appel, [1996] ACF n° 774 (CAF); Parmalat Canada Inc. c Sysco Corporation, 2008 CF 1104 (CF)). Je rejette par conséquent l’argument en faveur d’un élargissement applicable aux autres Marchandises.

 

II.        Cinquième motif d’opposition – le caractère distinctif

[13]           Monster Cable soutient également que le registraire a commis une erreur en concluant au caractère non distinctif de la Marque uniquement en regard des produits nettoyants. L’absence de caractère distinctif constitue un motif indépendant de refus d’enregistrement fondé sur l’alinéa 38(2)d) de la Loi, lequel dispose :

38.(2) Cette opposition peut être fondée sur l’un des motifs suivants :

[…]

d) la marque de commerce n’est pas distinctive.

38. (2) A statement of opposition may be based on any of the following grounds:

(d) that the trade-mark is not distinctive.

 

[14]           Le caractère distinctif est défini à l’article 2 de la Loi :

 « distinctive » Relativement à une marque de commerce, celle qui distingue véritablement les marchandises ou services en liaison avec lesquels elle est employée par son propriétaire, des marchandises ou services d’autres propriétaires, ou qui est adaptée à les distinguer ainsi.

“distinctive”, in relation to a trade-mark, means a trade-mark that actually distinguishes the wares or services in association with which it is used by its owner from the wares or services of others or is adapted so to distinguish them;

 

[15]            Le registraire a conclu que la Marque de Monster Daddy n’était ni distinctive ni apte à distinguer les produits nettoyants de l’une et de l’autre parties. Monster Cable soutient que le registraire a commis une erreur en restreignant l’analyse à son emploi de la marque MONSTER en liaison avec ses produits nettoyants. Selon l’avocat de Monster Cable, le registraire était tenu d’examiner le caractère distinctif de la Marque concernant l’emploi que Monster Cable fait de sa marque en liaison avec la totalité de ses produits.

 

[16]           Je ne souscris pas à l’argument de Monster Cable selon lequel le registraire a commis une erreur en imposant pour le cinquième motif d’opposition les restrictions apportées par Monster Cable elle‑même au quatrième motif d’opposition. Aux paragraphes 41 et 42 de la décision, le registraire s’est livré à une analyse du caractère distinctif à l’égard des produits nettoyants, en tenant pour acquis que Monster Cable aurait plus de chance d’obtenir gain de cause relativement à cette catégorie de Marchandises. L’opinion du registraire à cet égard donne à penser qu’il a jugé que la Marque avait un caractère distinctif quant à l’autre catégorie de produits.

[17]           L’alinéa 4e) des documents présentés par Monster Cable dans le cadre de la procédure d’opposition énonce en quoi consiste le cinquième motif d’opposition, et la tâche du registraire :

[traduction]

Monster Cable Products, Inc. (l’Opposante) a produit, le 2 avril 2008, une déclaration d’opposition où elle invoquait les motifs suivants :

 

[…]

 

e) la marque ne distingue pas les marchandises de la requérante, comme le prévoit l’alinéa 38(2)d) de la Loi sur les marques de commerce, des marchandises de l’opposante pour les motifs énoncés aux alinéas 4a), b) et c) ci‑dessus.

 

Les alinéas 4a), b) et c) sont les deuxième, troisième et quatrième motifs d’opposition. Ces motifs sont fondés sur la confusion créée avec les marques déposées de Monster Cable employées en liaison avec ses produits électriques (comme des câbles, fils électriques, connecteurs, batteries, cordons divers et disjoncteurs) et avec les marques employées antérieurement par Monster Cable en liaison avec ses produits nettoyants. Il est donc clair que le cinquième motif d’opposition est fondé sur la confusion créée entre la Marque de Monster Daddy et les marques employées par Monster Cable en liaison avec ses produits électriques et ses produits nettoyants.

 

[18]           S’agissant du caractère distinctif, la confusion s’entend de la confusion à propos de la source de produits associés à des marques de commerce (Cross-Canada Auto Body Supply (Windsor) Ltd. c Hyundai Auto Canada, 2007 CF 580 (CF), au paragraphe 18). Le critère applicable au caractère distinctif est de savoir si l’on a bien indiqué au public que les marchandises à l’égard desquelles la marque de commerce est associée et est utilisée sont les marchandises du propriétaire de la marque de commerce et non celles de quelqu’un d’autre (Cross-Canada Auto Body Supply, au paragraphe 17). Le caractère distinctif est ainsi une question de fait qui nécessite un examen attentif de la preuve.

 

[19]           Lorsque le registraire s’est penché sur le cinquième motif d’opposition, il avait déjà tiré des conclusions quant aux autres motifs, notamment sur la question de la confusion. Or, il ressort clairement de ses motifs que le registraire a jugé que les produits nettoyants étaient les seules marchandises visées par la demande de Monster Daddy qui posaient problème. Les commentaires suivants formulés par le juge Binnie dans Mattel, Inc. c 3894207 Canada Inc., 2006 CSC 22, [2006] 1 RCS 772 (CSC), au paragraphe 25, sont dignes d’intérêt à cet égard :

C’est à l’intimée [la partie qui produit la demande d’enregistrement de la marque de commerce] qu’incombait pendant tout le processus le fardeau de prouver l’absence de probabilité, mais la Commission n’était tenue d’examiner que les sources possibles de confusion qu’elle estimait vraisemblables.

 

[Non souligné dans l’original.]

 

 

À l’évidence, le registraire n’estimait pas vraisemblable, au vu de la preuve, que la Marque puisse être considérée non distinctive en liaison avec autre chose que les produits nettoyants. Il s’agissait là d’une conclusion que le registraire pouvait effectivement tirer.

 

[20]           L’avocat de Monster Cable soutient toutefois, en invoquant le paragraphe 6(2) de la Loi reproduit ci‑dessous, qu’après avoir conclu que la Marque n’était pas distinctive quant aux produits nettoyants, le registraire a commis une erreur en ne tirant pas la même conclusion quant à l’ensemble des marchandises :

6.(2) L’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

6.(2) The use of a trade-mark causes confusion with another trade-mark if the use of both trade-marks in the same area would be likely to lead to the inference that the wares or services associated with those trade-marks are manufactured, sold, leased, hired or performed by the same person, whether or not the wares or services are of the same general class.

 

 

 

 

[Non souligné dans l’original.]

 

[21]           Je souscris à l’argument de l’avocat selon lequel la confusion peut exister à l’égard de marchandises ou de services dissemblables. Or, une telle situation se produit généralement lorsqu’une marque est si célèbre ou connue que son emploi, même en liaison avec des gammes de produits différentes, tend à indiquer l’existence d’un lien avec le titulaire de la marque célèbre. Dans les autres cas, les marques sont habituellement considérées en regard des marchandises ou services en liaison avec lesquels elles sont employées (Polo Ralph Lauren Corp. c United States Polo Association (2000), 9 CPR (4th) 51 (CAF), au paragraphe 18; Toyota Jidosha Kabushiki Kaisha c Lexus Foods Inc., [2001] 2 CF 15; 9 CPR (4th) 297, au paragraphe 7 (CAF)).

 

[22]           Dans l’arrêt Mattel, Le juge Binnie a formulé les commentaires suivants au paragraphe 51 à l’égard des derniers mots du paragraphe 6(2) :

Cela ne signifie pas que le genre de marchandises ou de services n’est pas pertinent.  L’alinéa 6(5)c) indique expressément que « le genre de marchandises, services ou entreprises » est l’un des facteurs pertinents.  Les mots soulignés au par. 6(2) visent simplement à établir en termes clairs que la catégorie générale des marchandises et services, bien que pertinente, n’est pas déterminante.

 

Au paragraphe 63 de l’arrêt, le juge Binnie a aussi souligné que la notoriété d’une marque ne pouvait l’emporter à elle seule sur tous les autres facteurs pertinents, et que le critère de l’ensemble des circonstances était celui à appliquer pour évaluer si une marque transcendait les différences entre des marchandises ou services divers. L’emploi du temps présent est à privilégier pour une telle évaluation.

 

[23]           La preuve pertinente a été soumise au registraire au moyen de l’affidavit de David Tognotti, chef du contentieux et vice-président de Monster Cable, souscrit le 14 octobre 2008. Les pièces jointes à l’affidavit de M. Tognotti permettent de constater que les produits électriques et les produits nettoyants de Monster Vable sont offerts en vente et vendus partout au Canada. L’affidavit de M. Tognotti fait également état des ventes à l’unité réalisées au Canada pendant un certain nombre d’années, tant pour les produits électriques que pour les produits nettoyants, et il comporte des copies d’annonces publiées pour les produits nettoyants. Monsieur Tognotti déclare que Monster Cable consacre des sommes importantes à la publicité et au marketing, que ses marques sont mises bien en évidence lors de salons professionnels et que des prix lui ont été décernés soulignant le caractère novateur de ses produits. Bien que la preuve établisse clairement que Monster Cable emploie ses marques et vend ses produits au Canada, l’affidavit de M. Tognotti ne démontre pas selon moi l’existence d’une notoriété aussi importante qu’il n’est prétendu.

 

[24]           Pratiquement aucun élément de preuve ne porte sur la connaissance par le public ou la perception qu’a le public des marques de Monster Cable. Il n’est pas précisé non plus où les annonces de Monster Cable paraissent, ni si elles sont largement diffusées au Canada. Il ne suffit pas selon moi qu’un vice-président de Monster Cable affirme tout simplement que celle‑ci est bien connue ou bien considérée par ses clients. Un tel témoignage intéressé ne saurait nous renseigner sur les perceptions dans l’esprit du public ou sur la connaissance du public (Brasseries Molson, au paragraphe 58). À mon sens, les participants à des salons professionnels ne sont pas habituellement représentatifs des acquéreurs ordinaires de biens de consommation. Les prix de l’industrie ne démontrent pas non plus la notoriété d’une marque parmi de tels acquéreurs éventuels.

 

[25]           Je conclus qu’au vu de la preuve au dossier, il n’est pas justifié d’accorder à Monster Cable la protection qu’elle demande pour sa marque. À mon avis, Monster Cable n’a pas présenté une nouvelle preuve qui aurait influé de façon significative sur les conclusions du registraire relatives à l’alinéa 38(2)d) de la Loi. La preuve additionnelle a pris la forme d’un affidavit complémentaire souscrit par M. Tognotti le 16 septembre 2011. On ne traite pas dans l’affidavit et les pièces jointes du caractère distinctif de la marque de Monster Cable employée en liaison avec différentes catégories de marchandises. La preuve additionnelle porte en fait principalement sur les produits nettoyants, à l’égard desquels le registraire a déjà tiré une conclusion favorable à Monster Cable. Lorsque, comme en l’espèce, la preuve additionnelle produite n’est pas telle qu’elle aurait influé de façon significative sur les conclusions de fait ou de droit du registraire, ou sur l’exercice de son pouvoir discrétionnaire, il convient de faire preuve d’une grande retenue dans l’examen, selon la norme de la raisonnabilité, de la décision du registraire (Mattel; Garbo Group; Brasseries Molson).

 

[26]           Je conclus par conséquent que la décision du registraire relative au cinquième motif d’opposition est raisonnable.

 

ORDONNANCE

 

LA COUR ORDONNE que le présent appel soit accueilli, mais seulement selon les limites énoncées dans les motifs relativement aux « préparations de désinfection et d’assainissement tout usage ».

 

Aucuns dépens ne sont adjugés.

 

                                                                                                          « Douglas R. Campbell »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Linda Brisebois, LL.B.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        T-257-11

 

INTITULÉ :                                     MONSTER CABLE PRODUCTS, INC. c MONSTER

                                                           DADDY, LLC

 

                       

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :             LE 9 OCTOBRE 2012

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                      LE JUGE CAMPBELL

 

DATE DES MOTIFS :                     LE 30 OCTOBRE 2012

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Ken MacKay

 

POUR LA DEMANDERESSE

Pas de comparution

 

POUR LA DÉFENDERESSE

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

SIM LOWMAN

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

S. O.

POUR LA DÉFENDERESSE

 

 

 

 

 

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