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Cour fédérale

 

Federal Court

 

 


Date : 20121030

Dossier : IMM-855-12

Référence : 2012 CF 1268

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 30 octobre 2012

En présence de monsieur le juge O’Keefe

 

 

ENTRE :

ALLAN ALLARD
BIBI KHADIJA ALLARD
BIBI SHAMEEZA ALLARD

 

demandeurs

 

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

 

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande présentée en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, ch 27 (la Loi) en vue d’obtenir le contrôle judiciaire d’une décision datée du 2 décembre 2011 par laquelle un agent de Citoyenneté et Immigration Canada (l’agent) a rejeté la demande de résidence permanente des demandeurs. L’agent a en effet conclu que les considérations d’ordre humanitaire (CH) n’étaient pas suffisantes pour justifier l’octroi d’une dispense autorisant les demandeurs à présenter leur demande de résidence permanente à partir du Canada.

 

[2]               Les demandeurs souhaitent que la décision de l’agent soit infirmée et la demande renvoyée à Citoyenneté et Immigration Canada (CIC) pour qu’un agent différent procède à un nouvel examen.

 

Le contexte

[3]               Le demandeur principal, Allan Allard, est citoyen à la fois de la Guyana et de la Grenade, tandis que son épouse et sa fille sont citoyennes de la Grenade seulement. Ils sont arrivés au Canada le 18 décembre 2000, munis de visas de visiteur.

 

[4]               Les demandeurs ont présenté une première demande CH, laquelle a été rejetée le 31 août 2005.

 

[5]               Le demandeur principal a présenté une demande d’asile, disant craindre les représailles de criminels situés à la Grenade. Cette demande a été rejetée le 1er novembre 2006. Il a ensuite présenté une demande d’examen des risques avant renvoi (ERAR), qui a été rejetée le 13 juillet 2009. La Cour a refusé d’autoriser la présentation de demandes de contrôle judiciaire à l’égard de ces deux décisions.

 

[6]               Le demandeur principal a présenté une demande CH le 8 juin 2007. Il a allégué que sa famille éprouverait des difficultés si elle était renvoyée du Canada après plusieurs années d’établissement au pays et que l’intérêt supérieur de l’enfant – sa fille – exigeait qu’on autorise cette dernière à poursuivre ses études universitaires au Canada et qu’on la protège du préjudice qu’elle subirait si elle était renvoyée à la Grenade. Il a allégué que sa fille avait été victime d’une agression sexuelle lors du séjour que la famille avait fait à la Grenade et que l’État ne la protégerait pas contre d’autres actes de violence. Les demandeurs ont également présenté une preuve d’établissement au Canada, dont des lettres de la famille et d’amis, leurs antécédents en matière d’emploi ainsi que leur engagement au sein de la collectivité.

 

La décision de l’agent

[7]               Dans une lettre datée du 2 décembre 2011, l’agent a informé les demandeurs de la décision défavorable. Il a fait remarquer qu’une décision défavorable précédente avait été envoyée aux demandeurs le 6 juillet 2011, mais que cette demande avait été réexaminée après que l’on avait reçu de nouvelles observations de leur part le 22 juillet 2011.

 

[8]               Les demandeurs n’ont pas reçu la décision défavorable de juillet 2011 parce qu’elle a été envoyée à leur avocat précédent, qui nie l’avoir reçue.

 

[9]               Dans ses motifs, l’agent a tout d’abord résumé les lettres échangées par CIC et l’avocat des demandeurs avant le prononcé de la décision. Il a ensuite dressé la liste des membres de la famille des demandeurs qui vivaient au Canada et à l’étranger.

 

[10]           L’agent a décrit les ressources financières des demandeurs. La personne qui appuyait la demande – le fils du demandeur principal – disait avoir eu un revenu de 46 000 $ en 2010, mais aucune preuve n’était fournie à l’appui de cette prétention. Les demandeurs ont produit des relevés bancaires datant de mai 2011, mais, comme ces derniers ne faisaient pas état d’opérations quotidiennes, l’agent a examiné des relevés bancaires de 2010, qui contenaient ce niveau de détail. Il a souligné qu’aucune explication n’avait été donnée quant à la raison pour laquelle les demandeurs n’avaient pas produit de relevés bancaires récents dans le cadre des observations datées du 22 juillet 2011. En outre, plusieurs dépôts inexpliqués apparaissaient dans les relevés bancaires de 2011.

 

[11]           L’agent a résumé les antécédents en matière d’emploi du demandeur principal, notant que celui-ci travaillait maintenant comme emballeur auprès de Northdale Trading Ltd. et que son épouse était sans emploi.

 

[12]           L’agent a examiné d’autres liens avec le Canada, dont des lettres de recommandation de la part de membres de la famille, d’un membre de la collectivité et de l’enseignant de la fille du demandeur principal. Il a inclus des informations tirées d’un site Web public et portant sur le frère du demandeur principal et la fondation de bienfaisance du frère, qui semblait avoir octroyé une bourse d’études à la fille du demandeur principal (la nièce de son frère).

 

[13]           Pour ce qui est de la question des difficultés, l’agent a signalé l’argument des demandeurs selon lequel la Grenade se trouvait dans un état d’urgence et était minée par la violence, mais aussi l’absence de preuves à l’appui de cette prétention.

 

[14]           L’agent a pris en considération l’intérêt supérieur de l’enfant, la fille du demandeur principal. Ce dernier alléguait qu’elle avait été victime d’agression sexuelle avant d’arriver au Canada, qu’elle craignait d’être victime de représailles et que, en cas de renvoi, on pouvait s’attendre à ce qu’elle subisse un traitement sévère et injustifié. On compromettrait ses études en l’obligeant à ne plus fréquenter l’Université York, où elle avait obtenu une bourse d’études et était inscrite au tableau d’honneur.

 

[15]           En examinant le risque de préjudice que courait la fille du demandeur principal, l’agent a fait état des preuves et des conclusions tirées du formulaire de renseignements personnels des demandeurs, de l’audience tenue devant la Section de la protection des réfugiés, de l’ERAR et de la décision CH rendue le 6 juillet 2011. Dans les trois premiers de ces éléments, le préjudice allégué était lié à la crainte d’être victime de représailles d’un gang criminel, mais aucun préjudice n’était allégué dans la décision CH antérieure.

 

[16]           L’agent a commencé son analyse en faisant remarquer que, à la date de production des observations finales, les lettres d’emploi et l’avis de cotisation du demandeur principal n’étaient pas à jour. Il a calculé que le revenu familial des demandeurs était inférieur au seuil de faible revenu (SFR) qui s’applique à une famille de trois personnes. Le revenu du répondant aurait été suffisant pour subvenir aux besoins d’une famille de cinq personnes, mais aucun document financier n’a été fourni pour confirmer ce montant.

 

[17]           Les relevés bancaires des demandeurs dataient eux aussi d’un an, et rien n’était dit au sujet de la façon dont les membres de la famille avaient accumulé leurs économies, vu que leurs salaires avaient toujours été faibles. Leur situation professionnelle ne s’était pas beaucoup améliorée au cours des onze années passées au Canada. L’agent a donc conclu que leur établissement au Canada était minime, et il a accordé peu de poids à ce facteur CH.

 

[18]           L’agent a accordé du poids à l’engagement de la famille au sein de la collectivité, à l’absence d’activités criminelles et au fait qu’elle s’exprimait bien en anglais. Il a toutefois jugé qu’il s’agissait là de caractéristiques auxquelles on s’attendrait de la part de toute personne qui serait présente au Canada pendant une telle période et qu’elles n’étaient pas assimilables à des difficultés inhabituelles auxquelles feraient face les demandeurs s’ils quittaient le Canada.

 

[19]           L’agent a examiné les liens entretenus par les demandeurs avec leur famille et leurs amis. Il a fait remarquer que le neveu du demandeur principal avait produit une lettre indiquant que sa famille et lui étaient proches des demandeurs, mais il a conclu que ce facteur n’était pas suffisant pour justifier une dispense, car le neveu avait lui-même une famille immédiate. L’agent a ajouté que la majorité des membres de la famille des demandeurs vivaient à l’extérieur du Canada, dont certains à la Guyana et à la Grenade. Pour ce qui était des deux fils du demandeur principal qui avaient le statut de résident permanent du Canada, l’agent a fait remarquer qu’une demande CH n’avait pas pour but de réunir les familles, mais de déterminer s’il existait des facteurs CH suffisants pour justifier l’octroi d’une dispense. Il n’y avait pas eu de lettres de recommandation de la part des fils, ni d’indication quelconque de la raison pour laquelle le renvoi des demandeurs causerait des difficultés. La durée du séjour des demandeurs au Canada était attribuable au traitement ordinaire des demandes d’immigration, et n’était pas indépendante de leur volonté. Pour ces raisons, l’agent a conclu que le facteur de la présence de membres de la famille et d’amis ne signifiait pas que le renvoi des demandeurs causerait des difficultés inhabituelles, injustifiées ou excessives.

 

[20]           En analysant l’intérêt supérieur de l’enfant, l’agent a souligné les succès scolaires de la fille du demandeur principal, mais selon lui, le fait que le Canada soit un endroit plus propice où poursuivre ses études n’est pas un facteur déterminant dans le cas d’une demande CH. L’agent a conclu que la fille pouvait s’inscrire à une école de médecine à la Grenade ou, après son renvoi, présenter une demande d’études au Canada. Il a ajouté que la poursuite des études de la fille n’était pas un motif suffisant pour justifier l’octroi d’une dispense.

 

[21]           L’agent a reconnu que le retour des demandeurs à la Grenade causerait quelques difficultés, mais pas au point de justifier une dispense.

 

[22]           Pour ce qui était de la crainte d’être victime de préjudice à la Grenade, l’agent a fait remarquer qu’avant le 22 juillet 2010, il n’avait pas été mentionné que la fille du demandeur principal avait été victime d’une agression sexuelle. Comme la fille était âgée de huit ans à son arrivée au Canada, cela aurait été un élément fondamental de la demande d’asile de la famille.

 

[23]           L’agent a également passé en revue les preuves relatives à la protection de l’État contre la violence familiale à la Grenade et il a fait remarquer qu’il n’y avait aucune preuve que l’auteur de l’agression sexuelle vivait encore à la Grenade ou avait continué d’exercer des menaces. Il s’est donc dit non convaincu qu’en cas de renvoi, la fille du demandeur principal serait exposée à des difficultés inhabituelles ou injustifiées.

 

[24]           L’agent a passé en revue les éléments de preuve pertinents à l’égard des prétentions des demandeurs quant à la violence et à l’état d’urgence à la Grenade. Il a conclu que des sources indépendantes récentes confirmaient que la Grenade n’était pas en proie à une grave criminalité et que la population en général ne risquait pas de subir de graves préjudices de la part d’éléments criminels. La famille du demandeur principal aurait recours à la protection de l’État et ne serait donc pas exposée à des difficultés inhabituelles et injustifiées.

 

[25]           Pour tous ces motifs, l’agent n’a pas trouvé de raison impérieuse de modifier la décision datée du 6 juillet 2011 par laquelle la demande avait été rejetée.

 

Les questions en litige

[26]           Les demandeurs soulèvent les questions litigieuses suivantes :

1.         Les conclusions de l’agent étaient‑elles déraisonnables?

2.         L’agent a‑t‑il manqué à l’obligation d’équité?

 

[27]           Je reformulerais ces questions comme suit :

1.         Quelle est la norme de contrôle appropriée?

2.         L’agent a-t-il manqué à l’équité procédurale?

3.         L’agent a-t-il commis une erreur en rejetant la demande?

 

Les observations écrites des demandeurs

[28]           Les demandeurs soutiennent que la norme de contrôle de la décision raisonnable s’applique à la décision de l’agent et que la norme de la décision correcte s’applique à la question de l’équité procédurale.

 

[29]           Les demandeurs disent n’avoir jamais été avisés de la décision du 6 juillet 2011 et que l’agent a vraisemblablement réévalué la demande après s’en être rendu compte. Leur nouvel avocat a ajouté de nouvelles observations le 22 juillet 2011, de sa propre initiative, mais l’agent aurait dû attirer son attention sur la décision du 6 juillet 2011 et indiquer qu’un réexamen suivrait. Comme les demandeurs n’ont jamais reçu la décision du 6 juillet 2011, il aurait fallu leur donner la possibilité de mettre à jour leur demande avant que la décision du 2 décembre 2011 ne soit rendue. L’obligation d’équité exige que l’on donne l’occasion à un demandeur de mettre à jour sa demande.

 

[30]           Les demandeurs soutiennent de plus que l’agent n’a pas tenu dûment compte des preuves disponibles. Les dépôts non identifiés étaient liés à un remboursement du prix de billets d’avion ainsi qu’à une opération effectuée à un guichet bancaire. Rien ne lui permettait de conclure qu’il s’agissait d’un revenu d’emploi. L’agent a conclu qu’il n’y avait pas de relevés de comptes bancaires datant de moins d’un an, mais les demandeurs avaient produit des relevés qui dataient de mai 2011. L’agent n’a pas examiné tous les renseignements qui ont été présentés. Plus une preuve est importante, plus un tribunal peut être disposé à inférer d’un silence que l’organisme a tiré une conclusion de fait erronée.

 

[31]           L’agent a omis d’évaluer convenablement les facteurs relatifs à l’établissement. L’autonomie est un facteur subjectif, et ce qui peut être suffisant pour la famille du demandeur principal ne l’est pas forcément pour une autre famille de la même taille. L’agent n’a pas tenu compte du soutien financier des membres de la famille présents au Canada. Les demandeurs n’ont jamais reçu de prestations d’aide sociale, leurs antécédents en matière d’emploi sont stables et des membres de leur famille ont indiqué qu’ils les soutiendraient pécuniairement. Le fils du demandeur principal n’est pas un répondant, comme l’agent l’a cru, car il n’existe dans la Loi aucune disposition qui autorise un parrainage dans la catégorie du regroupement familial à partir du Canada. Il n’est donc pas nécessaire que le revenu du fils soit supérieur au SFR. Le fait que le demandeur principal et son épouse n’aient touché que le salaire minimum est sans importance pour évaluer la stabilité de leur emploi.

 

[32]           Selon les demandeurs, l’agent s’est appuyé sur des facteurs non pertinents. L’examen qu’il a fait au sujet de l’intégration des demandeurs au sein de la société canadienne a été superficiel, tandis que sa conclusion sur les membres de la famille faisait erronément état que quelques-uns d’entre eux résidaient à la Guyana et à la Grenade. Il n’y avait qu’un seul membre de la famille qui vivait à la Guyana, et non « quelques-uns ». La déclaration de l’agent selon laquelle la demande n’avait pas trait à la question de savoir si la famille devait être réunie est erronée, car la réunification des familles est un objectif de la Loi, souligné dans le Guide IP 5 et confirmé dans les décisions de la Cour.

 

[33]           L’agent a mal évalué le facteur de l’établissement, car il n’a pas tenu dûment compte de la stabilité financière, de la stabilité des antécédents en matière d’emploi, de la durée de l’établissement au sein d’une même collectivité, de la pertinence de la réunification de la famille ainsi que de l’existence d’un bon dossier sur le plan civil.

 

[34]           La conclusion que l’agent a tirée au sujet des études de la fille du demandeur principal est elle aussi déraisonnable. Sa conclusion selon laquelle cette dernière n’était pas différente d’une vaste majorité de demandeurs CH n’est pas fondée, car elle a passé onze des dix-neuf années de sa vie à étudier au Canada et a eu beaucoup de succès dans ses études postsecondaires. La supposition de l’agent selon laquelle elle pourrait s’inscrire à une école de médecine à la Grenade ou demander facilement un permis d’études au Canada n’a pas été établie par la preuve.

 

[35]           Le fait que l’agent se soit fondé sur des preuves relatives aux conditions régnant dans le pays était une erreur grave, car ces éléments n’ont pas été communiqués aux demandeurs. Les documents sont devenus disponibles après le dépôt des observations des demandeurs, et ces derniers n’avaient aucun moyen de savoir que l’agent allait se fonder sur ces éléments. Les demandeurs n’ont pas eu l’occasion de répondre à ces éléments de preuve. Une preuve non extrinsèque qui ne devient disponible qu’après le dépôt d’observations doit être communiquée, et toute preuve extrinsèque doit être divulguée. Les rapports sont considérés comme une preuve extrinsèque, car ils provenaient d’une source autre que les demandeurs, et ceux-ci n’étaient pas au courant qu’on les utilisait.

 

[36]           En conclusion, les demandeurs soutiennent que la décision de l’agent est dénuée de fondement, de transparence ou d’intelligibilité et qu’il y a donc lieu de l’infirmer.

 

Les observations écrites du défendeur

[37]           Le défendeur soutient qu’il incombe aux demandeurs de prouver le bien-fondé de leurs arguments et de soumettre à l’agent tous les renseignements pertinents. La Cour a rejeté l’argument selon lequel un agent CH est tenu de demander à un demandeur de fournir des documents. Les demandeurs n’ont pas dit quels documents auraient été soumis à l’agent si ce dernier les avait invités à présenter d’autres observations, ni en quoi l’issue aurait été différente. Le défendeur ajoute que l’utilisation d’une preuve publiquement disponible sur les conditions régnant dans le pays ne constitue pas un manquement à l’équité procédurale. Il était loisible à l’agent d’évaluer des documents récents sur le pays qui se rapportaient aux difficultés dont les défendeurs faisaient état. Les demandeurs n’ont fourni aucune preuve sur les conditions dans le pays.

 

[38]           L’agent s’est fondé sur des preuves non extrinsèques au moment d’examiner les possibilités de suivre des études à la Grenade, car ces renseignements étaient disponibles publiquement. Il n’était pas tenu de donner aux demandeurs la possibilité de répondre à ces renseignements.

 

[39]           L’agent a énoncé convenablement le critère CH, lequel n’est pas axé sur la seule question de la réunification des familles. Les demandeurs ont soutenu qu’il serait difficile pour la famille d’être séparée de deux fils, mais ils n’ont fourni aucune lettre de la part de ces derniers. Il était loisible à l’agent de conclure que la majorité des membres de la famille des demandeurs vivaient à l’extérieur du Canada, et l’agent n’a pas commis d’erreur en affirmant que « quelques-uns » des membres de la famille des demandeurs vivaient à la Guyana, car ils avaient là-bas une sœur et une belle-fille.

 

[40]           L’agent a évalué de manière raisonnable l’établissement des demandeurs au Canada. Il a fait remarquer qu’aucun document financier ne confirmait le revenu du fils du demandeur principal et que l’exigence relative au SFR était un facteur qu’il était pertinent de prendre en considération. L’agent avait le pouvoir discrétionnaire de soupeser les autres facteurs que les demandeurs ont soulevés. Il n’a tiré aucune conclusion défavorable des paiements non identifiés et tentait simplement de comprendre les relevés bancaires. Les relevés pour mai 2011 étaient inutiles, car ils ne montraient pas les opérations quotidiennes, et c’était pour cela que l’agent s’était penché sur les relevés bancaires de 2010.

 

[41]           En ce qui concerne les études de la fille du demandeur principal, l’agent n’a pas dit que cette dernière n’était pas différente de la majorité des demandeurs CH; il a plutôt déclaré que, pour toute personne faisant partie de ce groupe, le Canada serait un endroit propice où faire des études. Quoi qu’il en soit, l’agent a pris en considération la situation personnelle de la fille du demandeur principal.

 

Analyse et décision

[42]           La question no 1

Quelle est la norme de contrôle appropriée?

            Lorsque la jurisprudence établit quelle norme de contrôle s’applique à une question particulière dont la cour est saisie, la cour de révision peut adopter cette norme-là (voir l’arrêt Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 RCS 190, au paragraphe 57).

 

[43]           Il est bien établi en droit que c’est la norme de contrôle de la décision correcte qui s’applique aux questions d’équité procédurale (voir la décision Wang c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 798, [2008] ACF no 995, au paragraphe 13, et l’arrêt Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12, [2009] 1 RCS 339, au paragraphe 43). Il n’y a pas lieu de faire preuve de déférence envers les décideurs à l’égard de ces questions (voir l’arrêt Dunsmuir, précité, au paragraphe 50).

 

[44]           Il est bien établi que les évaluations qui sont faites par un agent dans sa décision au sujet d’une demande CH de résidence permanente à partir du Canada sont susceptibles de contrôle selon la norme de la décision raisonnable (voir l’arrêt Kisana c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CAF 189, [2009] ACF no 713, au paragraphe 18, la décision Adams c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 1193, [2009] ACF no 1489, au paragraphe 14, et la décision De Leiva c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 717, [2010] ACF no 868), au paragraphe 13.

 

[45]           Lorsqu’elle contrôle la décision de l’agent en fonction de la norme de la décision raisonnable, la Cour ne doit intervenir que si la Commission est arrivée à une conclusion qui n’est pas transparente, justifiable et intelligible et qui n’appartient pas aux issues acceptables au vu des éléments de preuve soumis (voir les arrêts Dunsmuir, précité, au paragraphe 47, et Khosa, précité, au paragraphe 59). Comme l’a conclu la Cour suprême dans l’arrêt Khosa, précité, il n’appartient pas à une cour de révision de substituer la solution qu’elle juge elle-même appropriée à celle qui a été retenue, pas plus qu’il ne lui appartient d’évaluer de nouveau la preuve (au paragraphe 59).

 

[46]           La question no 2

L’agent a-t-il manqué à l’équité procédurale?

            Les demandeurs font tout d’abord valoir que l’agent a manqué à l’équité procédurale en ne les mettant pas au courant de la décision défavorable du 6 juillet 2011 et de la décision ultérieure de réexaminer cette demande. Ils soutiennent qu’un tel avis est obligatoire, car cela leur permet de participer de manière appropriée au processus décisionnel.

 

[47]           Étant donné que les demandeurs ont présenté des observations additionnelles le 22 juillet 2011, je ne vois pas vraiment en quoi leurs observations auraient été différentes si les demandeurs avaient eu connaissance de la décision du 6 juillet. Ils soutiennent qu’on aurait dû leur donner la chance de présenter des observations additionnelles, mais ils ne disent pas pourquoi le fait que l’agent ait accepté les observations du 22 juillet ne constitue pas une telle possibilité. Même sans avoir été avisés de la décision du 6 juillet, les demandeurs se trouvaient encore dans la même situation que n’importe quel autre demandeur CH qui attend qu’une décision soit rendue. Ils ont fourni des observations mises à jour comme le font habituellement les demandeurs CH ayant présenté une demande dont le traitement dure longtemps. Comme ils ne sont pas en mesure d’indiquer quel préjudice, s’il en est, ils ont subi à cause de cette omission alléguée de donner un avis, je conclus qu’il n’y a pas eu de manquement à cet égard.

 

[48]           Les demandeurs se fondent sur un passage de la décision Chen c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CFPI 266, [2002] ACF no 341, au paragraphe 33, pour soutenir qu’il y a eu manquement à l’équité procédurale parce que les preuves relatives à la situation régnant dans le pays n’ont pas été communiquées après le dépôt de la demande CH :

[…] L’équité ne requiert toutefois pas la communication d’éléments de preuve non extrinsèques, comme les rapports sur la situation générale du pays, à moins que ces éléments n’aient été rendus accessibles après que la demanderesse eut déposé ses observations et à moins qu’ils respectent les autres critères formulés dans [l’arrêt Mancia].

[Non souligné dans l’original.]

 

[49]           Dans l’arrêt auquel il est fait référence dans le passage ci-dessus, Mancia c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1998] 3 CF 461, [1998] ACF no 565, la Cour d’appel fédérale n’a pas affirmé qu’il faut communiquer la totalité des éléments de preuve publiés après le dépôt d’une demande. Il faut plutôt que ces éléments montrent qu’il y a eu, dans la situation du pays, un changement dont le demandeur, en d’autres circonstances, n’aurait pas eu connaissance (au paragraphe 26) :

[…] À mon avis, l’obligation de communiquer un document au demandeur se limite aux cas où un agent d’immigration s’appuie sur un document important postérieur aux observations et où ce document fait état de changements survenus dans la situation générale du pays qui risquent d’avoir une incidence sur sa décision.

 

Il s’agit là d’un des « autres critères » mentionnés dans le passage ci‑dessus de la décision Chen, précitée.

 

[50]           La Cour a récemment suivi cette approche dans une décision portant sur une preuve semblable concernant la situation régnant dans le pays (voir la décision Millette c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 542, [2012] ACF no 564, au paragraphe 39) :

En l’espèce, la demanderesse a déposé ses dernières observations en octobre 2010. La version de 2011 du rapport annuel du Département d’État a été publiée le 8 avril 2011 et l’agent a rendu sa décision sur la demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire le 17 mai 2011. L’agent a cité le rapport dans sa décision et a souligné qu’il indiquait que [traduction] « le gouvernement de la Grenade est résolu à protéger les droits des victimes de violence ». Je conviens avec le défendeur que la demanderesse n’a présenté à la Cour aucune preuve permettant de croire que les renseignements contenus dans le rapport du Département d’État n’avaient pas été publiés dans d’autres sources qu’elle avait à sa disposition avant de transmettre ses observations en octobre 2010. La demanderesse n’a pas non plus produit de preuve ou avancé des arguments au sujet des raisons pour lesquelles on peut affirmer que les renseignements contenus dans le rapport du Département d’État montrent qu’un changement est survenu dans les conditions générales existant à la Grenade. Je conviens avec le défendeur que le rapport du Département d’État n’établit pas un tel changement. Bien que ce rapport fasse mention de certaines modifications apportées aux dispositions législatives de la Grenade en matière de violence conjugale, la demanderesse n’a pas démontré que ces modifications constituaient un changement important dans le contexte de sa situation personnelle. En conséquence, je suis d’avis que, selon le critère élaboré dans Mancia, l’obligation d’agir équitablement n’exigeait pas la communication du rapport du Département d’État à la demanderesse.

 

[51]           Étant donné que, en l’espèce, les demandeurs avaient déjà présenté une demande d’asile, une demande d’ERAR ainsi qu’une mise à jour de la demande CH en cause, il y a lieu de considérer qu’ils sont au courant du genre de preuves relatives aux conditions dans le pays sur lesquelles l’agent pourrait se fonder (voir l’arrêt Mancia, précité, au paragraphe 22).

 

[52]           Dans le cas présent, il incombe aux demandeurs d’établir l’existence d’un manquement à l’équité procédurale, mais ils ne peuvent pas indiquer quels sont les changements dans les conditions régnant dans le pays qui ressortent des documents connexes que l’agent avait en main. Étant donné que la preuve contestée dont l’agent s’est servi se composait principalement de rapports annuels d’organismes tels que le département d’État des États-Unis, le Foreign and Commonwealth Office du Royaume-Uni et Freedom House, les demandeurs ne devraient pas avoir de difficulté à comparer le contenu de ces documents aux rapports des années antérieures et relever les changements pertinents. Comme ils ne l’ont pas fait, je conclus que l’agent n’a pas manqué à l’équité procédurale.

 

[53]           La question no 3

      L’agent a-t-il commis une erreur en rejetant la demande?

            Les demandeurs soutiennent que l’agent a mal interprété de nombreux éléments de preuve et tiré des conclusions déraisonnables. Après avoir examiné les motifs de l’agent, je conclus que ce dernier a raisonnablement pris en considération les éléments de preuve que les demandeurs avaient présentés au sujet de chaque facteur CH et que la conclusion à laquelle il est arrivé n’est pas déraisonnable. Il n’appartient pas à la Cour de réévaluer les éléments de preuve.

 

[54]           L’agent n’a pas dit que la réunification des familles n’était pas un aspect pertinent dans le cas d’une demande CH; il a plutôt déclaré, avec raison, que le critère consiste à savoir si les facteurs CH (et la réunification des familles n’en est qu’un seul) justifient l’octroi de la dispense applicable.

 

[55]           Dans le même ordre d’idées, la conclusion de l’agent selon laquelle le revenu des demandeurs était inférieur au SFR n’a pas été un facteur particulièrement déterminant pour sa conclusion relative à la stabilité financière, car il a passé en revue la totalité des éléments de preuve concernant les antécédents des demandeurs en matière d’emploi. Il lui était loisible de prendre en compte les renseignements relatifs au SFR, et il lui appartient de soupeser ce facteur par rapport aux autres facteurs pertinents.

 

[56]           Les demandeurs contestent le fait que l’agent se soit fondé sur des relevés bancaires non récents, mais il ressort clairement des motifs que ce dernier l’a fait en raison de l’absence, dans les relevés plus récents, de renseignements sur les opérations quotidiennes.

 

[57]           Certes, les demandeurs peuvent être insatisfaits de la décision de l’agent au sujet des facteurs relatifs à l’établissement, mais il est inexact de dire que ce dernier n’a pas pris en considération la totalité des éléments de preuve qui lui avaient été présentés. Il a examiné à tour de rôle la situation de chacun des membres de la famille élargie et a évalué sa pertinence par rapport au facteur de l’établissement. La question de savoir si l’agent a eu raison de dire que « quelques-uns » des membres de la famille vivaient à la Guyana n’est guère déterminante, compte tenu de l’examen approfondi qu’il a fait de ce facteur.

 

[58]           Il n’était pas déraisonnable de la part de l’agent d’indiquer une école de médecine à la Grenade où la fille du demandeur principal pourrait étudier, puisque les demandeurs ont expressément invoqué la question des difficultés que représentaient les études postsecondaires, en plus des motifs d’équité procédurale décrits plus tôt. Bien sûr, il n’est pas certain que la fille du demandeur principal pourrait poursuivre ses études à l’Université York en tant qu’étudiante étrangère, mais il était loisible à l’agent d’envisager cette possibilité étant donné que les difficultés dont les demandeurs faisaient état étaient liées à l’effet qu’aurait le renvoi sur les études que la fille du demandeur principal faisait dans cet établissement. À mon avis, l’agent a examiné convenablement les éléments de preuve que les demandeurs ont présentés en rapport avec l’intérêt supérieur de leur fille. L’agent a pris en compte les réalisations scolaires de la fille, sa bourse d’études et le fait que le Canada pourrait être, pour elle, un endroit plus propice où poursuivre ses études.

 

[59]           L’examen que l’agent a fait des risques de violence en rapport avec la fille était raisonnable, car il lui était loisible de se fonder sur les documents relatifs aux conditions régnant dans le pays, ainsi qu’il a été décrit plus tôt, et il était également raisonnable de se demander pourquoi l’agression sexuelle n’avait pas été mentionnée dans les demandes antérieures des demandeurs.

 

[60]           Les demandeurs n’ont pas su démontrer qu’il y a un conflit marqué entre la décision de l’agent et les valeurs de transparence, de justification et d’intelligibilité dont il est question dans l’arrêt Dunsmuir, précité. Quant au fait de savoir si la décision appartient dans une large mesure aux issues acceptables, je ne puis conclure qu’elle se situe en dehors de cette catégorie. Je salue l’apport des demandeurs à la société canadienne pendant leur séjour dans ce pays, mais il était loisible à l’agent de conclure que les difficultés dont ils font état correspondent à celles qui sont intrinsèquement liées à une expulsion.

 

[61]           Au vu des conclusions qui précèdent, je dois rejeter la demande de contrôle judiciaire.

 

[62]           Ni l’une ni l’autre des parties n’ont souhaité me soumettre une question de portée générale à certifier.

 


JUGEMENT

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

 

 

 

« John A. O’Keefe »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Jean-François Leclerc-Sirois, LL.B, M.A.Trad.Jur.

 


ANNEXE

 

Dispositions légales applicables

 

Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, ch 27

 

72. (1) Le contrôle judiciaire par la Cour fédérale de toute mesure — décision, ordonnance, question ou affaire — prise dans le cadre de la présente loi est subordonné au dépôt d’une demande d’autorisation.

 

96. A qualité de réfugié au sens de la Convention — le réfugié — la personne qui, craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques :

 

a) soit se trouve hors de tout pays dont elle a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de chacun de ces pays;

 

b) soit, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle, ne peut ni, du fait de cette crainte, ne veut y retourner.

 

 

97. (1) A qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et serait personnellement, par son renvoi vers tout pays dont elle a la nationalité ou, si elle n’a pas de nationalité, dans lequel elle avait sa résidence habituelle, exposée :

 

a) soit au risque, s’il y a des motifs sérieux de le croire, d’être soumise à la torture au sens de l’article premier de la Convention contre la torture;

 

b) soit à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités dans le cas suivant :

 

(i) elle ne peut ou, de ce fait, ne veut se réclamer de la protection de ce pays,

 

 

(ii) elle y est exposée en tout lieu de ce pays alors que d’autres personnes originaires de ce pays ou qui s’y trouvent ne le sont généralement pas,

 

(iii) la menace ou le risque ne résulte pas de sanctions légitimes — sauf celles infligées au mépris des normes internationales — et inhérents à celles-ci ou occasionnés par elles,

 

(iv) la menace ou le risque ne résulte pas de l’incapacité du pays de fournir des soins médicaux ou de santé adéquats.

 

72. (1) Judicial review by the Federal Court with respect to any matter — a decision, determination or order made, a measure taken or a question raised — under this Act is commenced by making an application for leave to the Court.

 

96. A Convention refugee is a person who, by reason of a well-founded fear of persecution for reasons of race, religion, nationality, membership in a particular social group or political opinion,

 

 

 

(a) is outside each of their countries of nationality and is unable or, by reason of that fear, unwilling to avail themself of the protection of each of those countries; or

 

(b) not having a country of nationality, is outside the country of their former habitual residence and is unable or, by reason of that fear, unwilling to return to that country.

 

97. (1) A person in need of protection is a person in Canada whose removal to their country or countries of nationality or, if they do not have a country of nationality, their country of former habitual residence, would subject them personally

 

(a) to a danger, believed on substantial grounds to exist, of torture within the meaning of Article 1 of the Convention Against Torture; or

 

(b) to a risk to their life or to a risk of cruel and unusual treatment or punishment if

 

 

(i) the person is unable or, because of that risk, unwilling to avail themself of the protection of that country,

 

(ii) the risk would be faced by the person in every part of that country and is not faced generally by other individuals in or from that country,

 

(iii) the risk is not inherent or incidental to lawful sanctions, unless imposed in disregard of accepted international standards, and

 

 

(iv) the risk is not caused by the inability of that country to provide adequate health or medical care.

 

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-855-12

 

INTITULÉ :                                      ALLAN ALLARD
BIBI KHADIJA ALLARD
BIBI SHAMEEZA ALLARD

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :              Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :             Le 23 octobre 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                            LE JUGE O’KEEFE

 

DATE DES MOTIFS :                     Le 30 octobre 2012

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Alesha A. Green

 

POUR LES DEMANDEURS

 

Lucan Gregory

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Cabinet de Me Alesha A. Green

Toronto (Ontario)

 

POUR LES DEMANDEURS

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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